samedi 30 décembre 2023

jacques halbronn Cyrus ou quand le "rapatriement" sert de prétexte au bannissement

jacques halbronn Bible. Cyrus ou quand le « rapatriement » sert de prétexte au bannissement. L’Histoire juive aura été profondément marquée, à travers les âges, par une mystique du Retour. Or, c’est bien là une notion des plus ambigues. C’est souvent la proie pour l’ombre; On fait miroiter toute l’importance des racines, des origines plus moins mythiques pour justifier une dynamique de départ, une « invitation » à quitter les lieux éventuellement sous la conduite d’un leader charismatiques de type « Moïse ». Le cas de Cyrus nous semble tout à fait emblématique et l’on est en droit de s’interroger sur les vraies motivations sous tendant la décision de raccompagner les Hébreux à Jérusalem depuis Babylone où on les avait installés (déportés) quelques décennies plus tôt. On nous présente dans la Bible, à deux reprises (Isaïe XLV et Esdras I) comme une sorte de sauveur – et le qualificatif de Messie (Mashiah) est utilisé à son sujet dans le Deutéro Isaie. Wikipedia « Dès 538, Cyrus promulgua un édit permettant le retour des exilés dans leur pays d’origine et ordonnant la reconstruction du temple de Jérusalem aux frais du trésor royal. Bien plus, il restituait « les objets de la Maison de Dieu en or et en argent que Nabuchodonosor avait enlevés du temple de Jérusalem et emportés à Babylone » (Esd 1, 2-4 ; 6, 5). » Or si l’on observe ce qui s’est passé en Allemagne, sous le régime nazi, ne s’agissait-il pas d’abord et avant tout d’évacuer les Juifs du pays, vers la France ou vers la Palestine ou encore l’Argentine?. Quand cette stratégie n’a pas « marché », on en est passe à la « Solution Finale », en dernier ressort. En 1962, à la suite des Accords d’Evian, on a appelés « rapatriés » des gens dont ce n’était pas matériellement la patrie. Mais en usant d’une telle terminologie, l’on évitait aux personnes concernées le stigmate de bannis, d’expulsés. Cela permettait de mieux faire passer la pilule. En 1870, d’ailleurs, le décret Crémieux avait par avance, en quelque sorte, naturalisé comme citoyens français les indigénes juifs d’Algérie, ce qui permettrait de valider par la suite un tel « rapatriement ». Theodore Herzl, dans son Judenstaat, ne parle pas de la sorte et la Palestine n’y est présentée que comme une « solution » (c’est le sous titre de son essai) comme une autre (en concurrence notamment avec l’ Argentine, selon le projet du Baron Maurice de Hirsch mais en 1917, la Déclaration du ministre britannique Balfour allait pointer le retour en Palestine, désormais occupée par son pays, ce qui faisait écho à des attentes évangéliques liés à la fin des temps. La Société des nations adoptera, au lendemain de la Grande Guerre, la terminologie de » Foyer juif « ( Jewish Home) qui sera reprise en 1947, à l’ONU dans le plan de « partition » entre Juifs et arabo-musulmans. La Loi du Retour accordera aux Juifs du monde entier la nationalité israélienne sur le modéle du Décret Crémieux.(cf supra) On conçoitt tout l’intérêt d’un pays souhaitant évacuer des ressortissants étrangers de pouvoir compter sur un chef pronant leur retour, dans le style d’un Moïse vers la Terre Promise! S’il n’existait pas, il faudrait l’inventer! Si l’on s’interroge, à présent, sur la façon dont les Juifs « rapatriés » du Maghreb sont conduit à lire la Bible, cela ne peut pas ne pas faire écho à la Sortie d’Egypte, célébrée tous les ans à « Pessah » (Paques) si ce n’est que la France se substitue ici à la Palestine, constituant bel et bien une alternative voire une alternance. Dans l’imaginaire de cette population, le départ vers une autre destination se trouve mis en scéne dans le Pentateuque, dès l’émergence du personnage d’Abraham, quittant le pays d’Harran, au Nord. Que l’on songe à ce qui se passerait en France si l’on encourageait ainsi un « retour » des populations « immigrées » vers leur « patrie » historique, « pour leur salut », à la façon d’un Cyrus dont le texte ne se référe nullement au précédent de Moise, ce qui laisse à penser que Moise sera calqué sur Cyrus et non l’inverse. JHB 30 12 23