samedi 1 mai 2021

Jacques Halbronn La fabrication des fausses rééditions nostradamiques

La fabrication des fausses rééditions nostradamiques par Jacques Halbronn La thèse qui désormais nous semble la plus probable en ce qui concerne la genése des éditions « centuriques » est celle du recyclage- autour de trente ans plus tard – de la production de Nostradamus. Nous avons déjà abordé cette question dans un texte intitulé « du Nostradamus premier au Nostradamus bis » mais nous n’avions pas encore pris toute la mesure de l’entreprise et ne nous étions pas encore posé toutes les bonnes questions. La position que nous présentons ici est liée à une étude des quatrains « présages », c’est à dire de ceux parus dans les almanachs et qu’il faut distinguer, jusqu’à un certain point des quatrains « centuriques » L’édition Chevignard du Recueil des Présages Prosaïques comporte deux lacunes (cf les Présages de Nostradamus, Ed Seuil 1999). L’une tient à ce qu’elle ne distingue pas entre les almanachs et les pronostications, les textes appartenant à ces deux catégories s’enchainant sans que l’on marque une quelconque limite. Il est certes possible que le manuscrit ne comporte pas de tels marqueurs mais cela ne dispense pas de les souligner dans le cadre d’une édition crituque. Prenons l’exemple de l’année 1555 qui va nous occuper plus loin. Sous le titre « Des présages de l’an 1555 » (p. 218 et seq)on nous présente en fait la pronostication que l’on reconnaît au fait qu’elle se structure selon les 4 saisons et non mois par mois, depuis le printemps jusqu’à l’hiver. Puis l’on passe, sans prévenir à l’almanach avec dans la même page la fin de la pronostication et le début de l’almanach, ce que l’on reconnaît à une division mois par mois, de janvier à décembre. Or, Chevignard n’indique à aucun moment quand on est dans la pronostication et quand on est dans l’almanach, ce dernier étant marqué par des quatrains, ce qui n’est pas le cas de la pronostication. Pas plus n’indique-t-il les années où l’almanach est présenté sans quatrains. On aurait ainsi pu noter que pour l’an 1556, on ne disposait que de l’almanach mais sans quatrains (p.252) L’autre lacune de cette édition est qu’elle ne mentionne pas les Epitres introductives. Dans nos Documents Inexploités sur le phénoméne Nostradamus (2002), nous avons reproduit en fac simile une Epitre à la Christianissime Catherine reine de France (pp. 192) placée en tête de l’almanach de l’année 1557 et datée du 13 janvier 1556. Quant à la Grande Pronostication nouvelle et portenteuse de prédiction pour l’an 1557, elle est dédiée à Antoine de Bourbon, roi de Navarre alors que les Présages Merveilleux pour 1557 comportent une épitre au roi Henri II. Soit trois épitres pour l’an 1557 – que nous avons toutes reproduites – et l’on peut raisonnablement supposer que ces diverses publications annuelles étaient toutes introduites par quelque épitre ou préface. Qu’elles ne figurent pas dans le Recueil des présages prosaiques est une chose, que l’on puisse s’en passer en est une autre car lors des rééditions des années 1580, il est clair que nous avons affaire à des épitres recyclées. Or, pour 1555, nous avons le texte des Prophéties de Du Pavillon (1556) qui reprend des passages d’une épitre de Nostradamus à César tout comme pour les Présages Merveilleux pour 1557, nous avons une reproduction phototographique du début de l’ épitre à Henri II, dans le Testament de Nostradamus par D. Ruzo (Ed. Rocher 1982) que Chevignard ne signale même pas.Pour la pronostication pour 1555, Chevignard (p. 218) signale l’épitre dédicatoire à Joseph des Panisses, prévot de Cavaillon, en date du 17 janvier 1554 (dont Ruzo donne la page de titre mentionnant le dédicataire). Il note que « c’est première qui contienne des quatrains prophétiques » si ce n’est que c’est l’almanach annuel qui en contient et non la Pronostication tout comme c’est la Pronostication qui comporte une vignette en frontispice et non l’almanach. Dès lors si Couillard s’en prend à l’adresse de Nostradamus à son fils César, cela ne pouvait être en tête de la Pronostication dédiée au prévot de Cavaillon mais bien plutot au début de l’almanach pour la même année 1555. Il reste que le dit Recueil des présages prosaiques – titre étonnant puisqu’il comporte des quatrains- n’en est pas moins d’un usage précieux si l’on sait en tirer parti,à condition de compléter, autant que faire se peut, par d’autres sources. Chevignard note avec raison, on l’a dit, que les quatrains des almanachs ne sont pas apparus avant la production pour l’année 1555. Ce point ressort d’ailleurs dans les éditions des Présages qu i accompagneront les Centuries au XVIIe siècle : Ci dessous la reproduction de leur présentation où l’année 1555 est mise en exergue : En effet, 1555 est précisément l’année de la première édition des Centuries de Nostradamus, Lyon, Macé Bonhomme. Il ne semble pas que ce point ait été signalé par Benazra ou par Brind’amour dans leurs introductions respectives à l’édition Macé Bonhomme (1984 et 1996). Or, selon nous, la Préface à César en tête de la dite édition aura d’abord été placée en tête de l’almanach de Nostradamus pour l’an 1555 et c’est de ce texte que traite à sa façon un Antoine Couillard Du Pavillon, dans ses »Prophéties » (1556) – cf Benazra, RCN, pp. 18-19. qui parle d’un pastiche. Nous avons montré dans un précédent texte que le dit pastiche n’était pas en phase avec le contenu des Centuries pas plus d’ailleurs que la Préface à César qui introduit le « premier volet ». Tout indique que c’est cet almanach pour 1555 qui aura servi de modèle pour le premier volet, tant pour la Préface à César que pour les quatrains qui y apparaissent pour la première fois. C’est un exemple de passage du Nostradamus premier au Nostradamus bis. Mais Nostradamus ne produit pas de quatrains pour l’an 1556 et les reprend pour l’année suivante 1557 et au delà. Or, on a dit que Nostradamus, dans ses Présages Merveilleux, s’adresse à Henri II, comme cela figure d’ailleurs sur la page de titre. L’édition suivante de celle de Macé Bonhomme se situe justement chez Antoine du Rosne en 1557. Selon nous, ces deux éditions auraient du totaliser 7 centuries complétes donc 700 quatrains et la moitié est 350, ce qui correspond à peu près au volume de la première édition. Le RCN nous montre d’ailleurs (p. 122) que des quatrains furent ajoutés d’une édition à l’autre si l’on considére la production des années 1588-89. Mais au bout du compte, le premier volet à 7 centuries ne dépassera pas la moitié d’une centurie pour la VIIe et dernière. La question que nous poserons à présent est la suivante : est-ce que l’épitre à Henri II remaniée à partir de celle ayant figure en tête des Présages Merveilleux n’aurait pas initialement introduit la deuxième partie du premier volet, débutant à la moitié de la Centurie IV vu que le projet au départ se limitait à sept centuries ? Une telle édition, certes, n’a pas été conservée. On aura préféré utiliser la nouvelle Epitre à Henri II pour ouvrit un second volet comportant 3 centuries et non pas 350 quatrains à moins de prendre en compte les 58 sixains qui seront ajoutés par la suite (sur ce sujet cf la production de Morgard, in Documents Inexploités 2002) Mais selon nous, au départ, la Préface à César devait correspondre à une production pour l’année 1555 et l’épitre à Henri II, remaniée par rapport à celle des Présages pour 1577 à une production pour l’année 1557..Lors de la production des éditions antidatées, il n’est pas apparu opportun de conserver la dite Epitre au Roi en tête de la seconde moitié du premier volet puisque l »idée de second volet avait été transférée pour un nouveau lot de 3 centuries ! Il suffisait en fait de changer le contexte , le texte retouché est devenu le suivant : ‘je viendrais consacrer ces trois centuries du restant de mes prophéties, parachevant la miliade ». Mais on ne connait pas d’édition antérieure à 1568 à 10 centuries – qui est posthume – comportant ce texte. Contrairement à ce que nous avons pu écrire par le passé, il est clair que la première option aura été de produire des éditions prétendument parues du vivant de Nostradamus. D’ailleurs, celle de 1568 ne se présente nullement comme posthume et ne mentionne en son titre ni la mort de Nostradamus ni l’Epitre au Roi. On est là en présence d’une solution de continuité visant à intégrer des centuries supplémentaires en déplaçant l’Epitre au Roi qui se trouvait en tête de la seconde moitié du premier volet, dans la Centurie IV, pour qu’elle vienne ouvrir un second volet bis. Initialement, l’ajout à la Ive centurie était indiqué dans les éditions parues sous la Ligue après le 53e quatrain. (cf Nostradamus – L’édition Regnault 1561, modèle des éditions parisiennes facétieuses de 1588-1589 cura.online.fr) On s’interrogera à présent sur le rôle de Jean Aimé de Chavigny dans cette entreprise de réédition contrefaite. Dans son RCN (pp. 118 et seq) Benazra signale à propos des additions à la VIIe cenrurie que des quatrains des almanachs ont été intégrés dans les éditions centuriques parues sous la Ligue et appartiennent en fait à l’almanach pour 1561. Encore fallait-il en 1588-89 avoir acccès au dit almanach parue un quart de siècle plus tôt. L’on pense immédiatement au Recueil des présages prosaïques dont Chavigny avait certainement un exemplaire puisqu’il en était l’éditeur (cf nos Annexes iconographiques). Robert Benazra apporte un élément d’appréciation à propos des rapports entre quatrains-présages des almanachs et quatrains centuriques.(cf RCN, pp. 130 et seq et pp 156 et seq) Benazra note que l’on trouve deux quatrains qui manquent à dans le dit Recueil édité par Chavigny : le premier « D’un présage pour la dite année « figure en tête du Recueil ( d’Esprit divin etc) et il est suivi d’un autre quatrain « de l’Epistre liminaire sus la dicte année » « La mer Tyrrhenne etc) (cf reprint Nice 1981 Annexes p. XI) Benazra trouve des points communs entre ce quatrain et le 59e de la Iie Centurie, ce qui viendrait confirmer que les quatrains des almanachs ont pu servir de modèle pour ceux des Centuries. Mais Benazra se contente de soupçonner Chavigny d’avoir fabriqué le quatrain de l’almanach et non l’inverse ! Chevignard, p. 113 Epistre liminaire sur l’an 1555 La mer Tyrrhene, l’Océan par la garde Du grand Neptun & ses tridens soldars Provence seure par la main du grand Tende Plus Mars Narbon l’heroiq de Vilars Quatrain 59 de la deuxiéme centurie (donc dans la première partie du premier volet (déjà chez Macé Bonhomme 1555) Classe Gauloyse par apuy de grand garde Du grand Neptune & ses tridents souldars Rousgée Provence pour obtenir grand bande Plus Mars Narbon par iavelotz & dards On capte le procédé de transformation du quatrain présage en un quatrain centurique avec le maintien des rimes Le seul verset qui n’aura pas changé est le deuxiéme Du Grand Neptune & ses tridents souldars. Quant au quatrième verset, il commence pareillement : Plus Mars Narbon. Le premier verset dans les deux cas se termine par « garde ». Rappelons que selon nous les quatrains des almanachs se contentent de paraphraser les textes en prose correspondants ; On trouve ainsi « Le grand Neptune » (Chevignard, p 224, n° 292) de la Pronostication pour 1555, à l’automne. Mais la même formule se retrouve pour l’almanach au mois de Mars (Chevignard, n°445, p. 242) et encore au mois d’aout (Chevignard n° 471p. 244) Mais dans le Recueil, il y a deux almanachs pour 1555 l’un avec quatrains et l’autre sans et c’est dans ce dernier que l’on a des récurre,ces du du « Grand Neptune ». « D’un autre présage sur la mesme année » (Chevinard, p 241) JHB 01 05 21

Jacques Halbronn L'almanach de Nostradamus pour 1555 aura déterminé l'...

JAcques Halbronn A propos de son étude inédite de 1988 sur Nostradamus

Jacques Halbronn. A propos de étude inédite de 1988 sur Nostradamus Cette étude figure dans notre Introduction bibliographique à l'étude de l'Astrologie française, de la fin du Xve siècle à la fin du Xxe siècle « L'oeuvre astrologique de Nostradamus. « Nostradamus n'est pas l'homme d'une seule œuvre, les Centuries. Outre les textes non astrologiques, il publie une série d'almanachs ; de prognostications- largement étudiée par un Buget, un Chomarat, un Benazra etc qui firent sa réputation de son vivant plus encore que ses prophéties successives. Sa réputation, de son vivant, doit probablement plus à ses productions annuelles, à ses préface à César et à Henri Second (celle datée de janvier 1556) qu'aux fameuses et obscures Centuries qui ne trouveront de commentaire cohérent qu'en 1594 avec la Première Partie du Janus Gallicus de Chavigny qui d'ailleurs commençant en 1534 présente parfois Nostradamus comme décrivant des événements ayant de vingt ans précédé les premières Centuries. Les adversaires de Nostradamus ne s'y trompent pas : ce sont les petits 'paquets » annuels attendus impatiemment par le public que dénonce un La Daguenière, un Fulke ou, au contraire, que célébre un Ronsard (texte reproduit par Chavigny dans le Janus François) (…) D'ailleurs, les quatrains n'en sont pas absents et Chavigny (…) combinera, fixant ainsi une certaine méthode éxégétique relevant plus d'une tradition orale que d'indications écrites de Nostradamus les quatrains de toutes origines pour asseoir sa démonstration . Si Chavigny est , comme l'indique Jean Céard, le premier exégéte des quatrains nostradamiques, Antoine Couillard est certainement le premier commentateur, ironique certes, de la Préface à César. Oliviet Millet (cf Feux Croisés sur Nostradamus au XvIe siècle, in Divination et controverse religieuse en France, au xVIe siècle, Journées Verdun Saulnier, n°35, 1987) a justement rappelé que ces Prophéties n'en étaient pas » « Le cas des Centuries – peu importe ici si elles constituent ou non un ensemble homogéne constitue un cas extreme et devrait permettre de mener une recherche statistique étant donné que la production nostradamique ne se répartit pas régulièrement sur quatre siècles. On note d'abord entre 1568 et 1588 une période de vingt années durant laquelle les Prophéties ne sont pas rééditées (sic). Robert Benazra se demande à cet égard si Benoit Rigaud ne bénéficiait pas d'une sorte de monopole s'achevant en 1588. Mais pourquoi, dans ce cas, n'a-t-il pas réédité durant 20 ans à moins qu'il n'ait reproduit le nombre dde 1568 ce dont ne se sont pas privés les libraires du début du XVIIe siècle ? En revanche, l'on publie l'oeuvre du faux Nostradamus, Michel ou Mi.de Nostradamus (le Jeune) et Antoine Crespin dit Nostradamus qui imitent davantage les pronostications et Epîtres que les Centuries. Puis, à partir de 1588 se produit comme un retour en arrière puisque l'on renonce peut être pour tourner un tel monopole, à publier la « milade » de quatrains de l'édition de 1568, ce qui permet aux historiens de tenter de reconstituer des éditions disparues parues du vivant de Nostradamus puisque l'on ne dispose , à proprement parler que de l'édition de Mai 1555 de Macé Bonhomme.(!) Ces éditions de 1588-1589 offrent un certain caractère d'authenticité en ce qu'elles révélent clairement les raccords successifs intervenus depuis la première édition alors que l'édition Benoist Rigaud de 1568 -première édition posthume voulait présenter un ensemble bien poli de dix centuries. Toutefois, dès la mort du libraire lyonnais , c'est bien l'édition de 1568 qui s'imposera et définitivement. La vogue de Nostradamus ne se démentira guère entre 1568 et 1988 (date de notre rédaction). Toutefois, il semble que certaines périodes soient davantage marquées que d'autres . Nous voyons apparaître deux critères : la publication d 'une biographie de l'auteur et un processus de mise en concordance des quatrains avec les événements plutôt qu'une simple réédition. Les charnières entre deux siècles nous semblent avoir constitué des temps favorables. A la fin du XVIe siècle, Chavigny publie une première Vie de Nostradamus ainsi que la Première Partie du Janus Gallicus mis en chantier dès 1589 » « Sur les dates de rédaction et de publication de la Préface à César. « Cette préface a souvent induit en erreur à propos de la date de naissance de César Nostradamus, qui serait né en 1558 du fait que la Préface est datée de 1555. Il apparaît que César est né à la fin de l'année 1553, style de Pâques (probablement en décembre), le 18 selon son propre témoignage . César aurait donc été âgé de quinze mois lors de la rédaction de la Préface « ad Caesarem Nostradamum filium ». Nostradamus aurait préféré lui transmettre oralement son savoir mais « le tard advénement l'a fait référer par escript...au commun profit des humains du fait du risque de « corporelle extinction de ton progéniteur ». Nostradamus a franchi le cap des cinquante ans lorsque nait son fils qui ne sera pas le légataire de sa science et il craint, il s'en excuse de ne pas vivre assez vieux pour le former. Cette Préface serait donc une sorte de testament. Nostradamus croyait-il alors sa mort prochaine?Du Pavillon , dans ses Prophéties, rédige en 1556 une parodie de préface, en s'adressant à son propre fils Martial dont il donne l'âge avec une précision qui se veut comique (encore qu'il puisse y avoir un jeu sur le mot « martial » ; « tes moys martiaulx » écrit Nostradamus à son fils. (..) Mais pourquoi Nostradamus aurait-il attendu quinze mois donc plus d'un an pour s'adresser à son fils , le bien nommé ? (…) La lettre n'aurait-elle pas été écrite plus tôt ? On n'a pas, à notre connaissance, relevé l'anachronisme de l'intitulé de la date du Ier Mars 1555. A cette époque, régne en France le style de Pâques. (…) Ne serait-il pas possible que la Préface à César ait paru dans une prophétie annuelle pour 1554 ? Selon la Chronique de la Ville de Salon de Louis Gimon (1682) il existe une procuration chez Maistre Antoine de Royer, dit Lizerot, imprimeur à Lyon,de retirer des mains de Bertot les textes que Nostradamus lui avait confiés, vu que le travail effectué par le premier imprimeur ne l'a pas satisfait(cf Benazra qui précise qu'un texte pour 1554 aurait disparu) Il convient de préciser que le terme « Prophéties » n'est pas nouveau dans le domaine de la production astrologique française. En 1533, l'Allemand Joseph Grünpeck avait publié une prophétie (cf Fonds Rostchild BN) pour la période allant jusqu'à 1540. Le même texte était publié chez un autre libraire, sous le nom de Pronostication. Ce sont donc des termes plus ou moins synonymes. D'où l'expression de Couillard « prophéties après un an ». C'est probablement dans l'une d'elles qu'a pu figurer la lettre à César, datée du Ier mars » « Le Janus François et les Centuries Certains « éditeurs » ne craignent pas de nos jours de présenter les Centuries comme étant d'un seul tenant. Le lecteur moyen ignore qu'elles ne constituent pas un ensemble monolithique. La première édition de mai 1555 ne comportait que 353 quatrains soit un peu plus de trois centuries et demie sur les dix de l'édition censée être complète de 1568 par Benoist Rigaud. Quand en mai 1555 Michel de Nostradamus signe ce premier recueil a-t-il déjà le projet d'autres « livres de prophéties », titre qu'il utilise dans sa Préface à César et non celui de Centuries ? Nous ne le pensons pas . D'ailleurs, le concept de « Centurie » est trompeur puisque la quatrième Centurie est alors incomplète. Ce premier recueil est précédé d'une préface (plutôt que d'une épitre) à César. Le choix du nom de son fils n'est certes pas le témoignage d'un ami de la Couronne de France. César, c'est le nom de l'empereur, de Charles Quint en l'occurrence. A vrai dire, Trithème dans son De septem causis-ouvrage dont Nostradamus a pu s'inspirer s'adresse aussi à César comme le note Daniel Ruzo/ Il conviendrait ici de faire la part du particularisme provençal séduit un moment par les entreprises impériales. En revanche, à partir du début de 1559, Nostradamus prend le parti du Roy de France et de la Reyne Catherine de Médicis, comme il apparaît dans la dédicace des textes parus chez Jacques Kerver , datés de janvier 1556(1557) Ce paralléle entre les deux souverains, même s'il est quelque peu biaisé par l'anedote filiale correspond à un enjeu prophétique et politique important. A vrai dire, Nostradamus n'est guère heureux dans ses choix puisque Charles Quint « César » abdiquera peu après en 1555 et 1556 et qu'Henri II , qui connaitra des échecs militaires, notamment avec la perte de Saint Quentin en 1557 se tuera en tournois en 1559. En1560, les deux dédicataires sont morts. « L'édition de Macé Bonhomme n'est pas la première.Elle a dû être réalisée par Macé Bonhomme en tant qu'imprimeur.Mais pas en tant que libraire. Il suffit pour cela d'étudier la production de Macé Bonhomme. Probablement, Nostradamus en fut lui même le premier éditeur si l'on prend en considération la vignette de frontispice. On note que l »édition comporte en sa page de titre « avec Privilège' alors qu'il n'y en a pas. Elle porte aussi « la permission est à l'intérieur. Il y a, en effet, un document à l'intérieur qui date de 4 jours avant la parution de mai 1555 et qui autorise Macé Bonhomme à publier un livre qu'il a « recouvert  « Les prophéties de Michel Nostradamus «  sans préciser de nom de l'auteur. On aurait dû lire « Les Prophéties dues à Michel Nostradamus ou toute autre formule comparable » (…) Nous voyons d'ailleurs un lien possible entre l'année 1553 et le fait que la première série de quatrains soit au nombre de 353 » (..) On trouvera étrange que Du Pavillon ne fasse aucune allusion aux quatrains de Nostradamus dans ses « Prophéties » Certes, la formele « moyennant la flamme exigue » (..) se retrouve-t-elle dans le premier quatrain (..)Mais l'on trouve déjà la substance des versets 1 et 3 (..)dans la Préface à César » Sur Guillaume de la Peyrière « Cet auteur publie des Centuries chez Macé Bonhomme à la même époque où paraissent les Prophéties de Nostradamus. Ce sont des ouvrages plus richement présentés que les dites Proph éties » «  C'est dans la Portenteuse pronostication pour 1557, parue chez Kerver, (cf musée Arbaud Aix en Pr.) que Nostradamus s'en prend à un certain « Pater Liber » qui n'est autre qu 'un des noms du dieu Dyonisos. (..)Or, un des libraires qui publient le Monstre d'abus se nomme Estienne Denise (..) On n'avait jusqu'à présent rencensé que l'édition de Barbe Regnault. Mais en 1987, a été présenté par Bruce Mc Kittrick de Philadelphie (cf Catalog X) à la Foire Internationale du Livre Ancien (Paris, La Conciergerie) l'édition de 1558 d'un autre libraire , Estienne Denise pour lequel Barbe Regnault imprimait des ouvrages (..) Dionysos serait donc ce Denise qui, aux yeux de Nostradamus, serait l'âme du complot contre lui. -(..) Barbe Regnault publiera plusieurs prophéties et pronostications de Nostradamus, dans des conditions -souligne Benazra- assez douteuses » « Robert Benazra note à propos de l'édition de 1588 des Prophéties de Nostradamus qui font référence à 1561 « Nous pourrions nous interroger sur ces publications reproduisant l'édition hypothétique de 1561. Sans doute, la situation politique en France est elle responsable de ces diverses éditions. En effet le 5 décembre 1588 c'est l'assassinat du duc de Guise puis dans la nuit du Ier au 2 aout c'est au tour du roi Henri III, ce qui aurait pu provoquer une situation politique identique à celle de 1561 » (cf Bibliographie de Nostradamus de R.Benazraà paraître) A propos de Chavigny, concernant les positions de Jean Dupèbe  qui mentionne «  Les larmes et soupirs de Jean Aimé de Chavigny Beaunois sur le trespas de M. Antoine Fiance Bizontin (Paris, 1582, Bib. Mazarine) 21684) l'auteur déclare qu'il avait le même âge que Fiancé qui venait de mourir en 1581, à vingt neuf ans. Dans ce cas, Chavigny n'aurait pu être le disciple de Nostradamus, ayant eu une quinzaine d'années à sa mort.Il ne serait pas le même Chavigny Beaunois dont il est notamment question dans la correspondance de Nostradamus, né en 1533. Mais ne peut-on renverser l'argument et considérer que ce Chevigny, né vers 1550, qui s'adresse à Fiancé n'est pas le même que celui qui rédige la Première Face du Janus Gallicus ? Nous trouvons, au demeurant étrange que cet « imposteur » signale dans le même ouvrage que Nostradamus est mort en 1566 (Vie de Nostradamus) et qu'il l'a connu « privément » autrefois (Epitre à Alphonse d'Ornano De l'avénement à la couronne de France). En effet, sachant que Chevigny aurait eu quinze ans à la mort de Nostradamus, qui n'aurait pas souri à l'entendre se targuer d'une telle familiarité ? En fait, Chavigny pourrait fort bien être né en 1533 , date à laquelle commence le Janus Gallicus) soit une différence d'une trentaine d'années avec Nostradamus. Il aurait eu 33 ans à la mort du » prophéte ». Qu'il y ait eu deuxChavigny pourquoi pas ?Mais selon nous, c'est le même Chavigny qui vécut auprès de Nostradamus et qui publia l'Androgyn (1570),la Première Face du Janus Gallicus et les Pleiades » Quelques commentaires à propos de nos textes remontant avant 1990 et la publication du Répertoire Chronologique Nostradamique (Ed Trédaniel-La Grande Conjonction, 1990 Préface de Jean Céard)). En 1988 nous avions eu entre les mains le manuscrit du Répertoire de Benazra, que nous ferions paraître en 1990. A cette époque, nous n'évoquions pas encore la thèse d'éditions antidatées et considérions comme fiable le témoignage d'Antoine Couillard pastichant la Préface à César dans ses « Prophéties » de 1556, ce qui ne nous empêchait pas de nous interroger sur la chronologie des éditions centurique. Toutefois, en 1990, lors de la présentation du Répertoire de Benazra, nous insisterions pour l'usage de l'adjectif « nostradamique » pour signifier qu'il existait toute une littérature « paranostradamique » Nous rappelions que dans les almanachs on trouvait déjà des quatrains que le Janus Gallicus avait d'ailleurs intégré dans son Commentaire et cela pouvait indique que les quatrains des Centuries imitaient ceux des almanachs.. Nous notions l'existence d'une première Epitre à Henri II, datée non pas de 1558 mais de 1556 (en tête des Présages Merveilleux pou 1557 (que nous reproduirons en 2002 dans nos Documents Inexploités sur le phénoméne Nostradamus), dont Daniel Ruzo avait reproduit des passages dans son Testament de Nostradamus (Ed du Rocher, 1982) L'existence d'une première Epitre au Roi pouvait entretenir un certain doute sur l'authenticité de celle, daté de 1558,, figurant en tête de l'édition de 1568 et ne se référant pas à une première Epitre. Par ailleurs, l'édition Rigaud de 1568 ne mentionnait pas en son titre l' Epitre au Roi, alors que la première épitre était indiqué au titre des dits Présages. Lors de l'édition du RCN de Benazra, nous avions omis de lui signaler l'ouvrage de Pierre Petit dont nous avions pourtant traité peu auparavant. Nous n'avons pu vérifier si Chomarat l'indique mais comme sa Bibliographie Nostradamus était déjà parue, il est probable que Benazra en aurait tenu compte. Une traduction française de ces pages latines serait la bien venue..Enfin, force était de constater qu'il avait fallu attendre 1594 pour voir paraître un Commentaire des quatrains lesquels étaient déjà parus en 1568 pour ce qui était des quatrains des Centuries sans parler des quatrains parus successivement dans les almanachs. Un tel retard pouvait indiquer que les quatrains centuriques ne paraitraient que peu avant le Janus Gallicus. Répétons-le, notre rédaction de 1988 envisageait clairement que les deux textes introductifs en prose parurent d'abord en tête d'autres productions que celles où on les trouvera par la suite. C'était évident pour l'Epitre à Henri II, sur la base des documents reproduits par Ruzo dans son Testament de Nostradamus (cf aussi notre reproduction dans Documents inexploités sur le phénoméne Nostradamus, 2002 grâce à un envoi du dit Ruzo). En 1988, nous envisagions déjà l'éventualité selon laquelle la Préface à César des éditions centuriques aurait été reprise d'une Préface à une pronostication pour 1554. Par ailleurs, la question des calendriers est abordée au sujet du style de Pâques qui ne sera abandonné qu'à partir de 1564. Nous pensions à l'époque qu'une rédaction tardive n'aurait pas tenu compte de ce probléme, d'autant que la date du ier Mars 1555 en base de la Préface à César aurait probablement du être indiquée 1554, puisque le changement de millésisme ne se produisait dans les années 1550 qu'à Pâques. On notera que la bataille de Pavie fatale pour François Ier, se déroula en 1524 selon le calendrier de l'époque alors qu'elle nous est présentée de nos jours, anachroniquement, comme datant de 1525. On notera aussi nos observations sur la signification du mot « Prophéties », lequel pouvait tout à fait concerner une production à caractère astrologique. Il est possible que par la suite, le terme ait vu son sens évoluer puisque dans les années 1580, le terme semble ne plus référer à des prévisions datées.. D'ailleurs, les Prophéties perpétuelles de Moult comportent avant tout des mentions de dates, selon un mode de calcul bien précis. La remarque concernant les 53 quatrains de la Ive Centurie à propos d'une publication pour l'an 1553 est assez judicieuse, avouons-le.. On précisera que ce n'est qu'à partir de l'almanach pour 1555 que l'on voit apparaître des quatrains, ce qui n'était pas le cas pour l'an 1554 (cf Chevignard Présages de Nostradamus, Paris, Seuil, 1999, pp. 113 et seq) L'on conçoit donc que Du Pavillon n'ait point faite référence à des quatrains dans son pastiche si la Préface à César figurait en tête de l'almanach pour 1554. On appréciera le rapprochement entre le « Pater Liber » et le libraire Estienne Denise (cf P. Guinard CORPUS NOSTRADAMUS 25 -- Les premières éditions des Prophéties 1555-1563 (État actuel des recherches, repères bibliographiques, et conjectures) qui mentionne ce libraire (qu'il relie à Sixte Denyse) mais ne fait pas la relation avec la formule en question désignant les adversaires de Nostradamus. On sait que de faux almanachs de Nostradamus ont été produits de son vivant et qu'il ne faudrait pas confondre avec les éditions authentiques de ses productions annuelles. Que le terme Prophéties ait pu éventuellement avoir été utilisé à l'époque ne prouve nullement qu'il s'agissait des Centuries mais bien plutôt que les faussaires sous la Ligue auront ou reprendre une telle formule croyant que telle édition était bien de Nostradamus, erreur par ailleurs commise en ce qui concerne le choix de la vignette des faux almanachs de Barbe Regnault pour le frontispice des Centuries. A propos du débat autour de la personne de Chavigny, notons en 1589 l'édition du Recueil des Présages Prosaiques de Nostradamus qu'il devait avoir en sa posssession et qui rassemble les texes des almanachs et des pronostications annuels, avec les quatrains à partir de 1555 qui est précisément la date de la « première » éditon des Centuries (Macé Bonhomme). Selon nous ; la date de 1555 aurait été choisie du fait que le premier almanach de Nostradamus comportant des quatrains concerne cette année. cf B . Chevignard, Présages de Nostradamus, Paris, Ed Seuil 1998, p. 193) Notons que l'almanach pour 1556 ne comporte pas de quatrain dans le dit Recueil de présages prosaiques mais il y en aura chaque année par la suite. Si l'on compare le Recueil à la publicaion des Présages dans les éditions du XVIIe siècle, on note « Présages tirez de ceux faitz par Mr Nostradamus es années mil cinq cens cinquante cinq & suivantes ». L'année 1555 est donc bien mise en évidence. On y trouve deux quatrains qui manquent à cet endroit dans le dit Recueil édité par Chavigny : le premier « D'un présage pour la dite année «  figure en tête du Recueil ( d'Esprit divin etc) et il est suivi d'un autre quatrain « de l'Epistre liminaire sus la dicte année » « La mer Tyrrhenne etc) (cf reprint Nice 1981 Annexes p. XI) Benazra trouve des points communs entre ce quatrain et le 59e de la Iie Centurie, ce qui viendrait confirmer que les quatrains des almanachs ont pu servir de modèle pour ceux des Centuries. Mais Benazra se contente de soupçonner Chavigny d'avoir fabriqué le quatrain de l'almanach et non l'inverse ! On note aussi que l'année 1556 n'a pas de quatrain, ce qui expliquerait que les éditions antidatées sont de 1555 et 1557.(cf Benazra, RCN p. 6 lequel n'avait pas alors accès au manuscrit du Recueil des Présages Prosaiques pour l'étude des quatrains. Force est de constater que Chavigny ne commente aucun quatrain de l'année 1556 et pour cause On trouvera l'intégralité de notre texte sur Nostradamus de 1988 lors d'une prochaine numérisation de la dite «I ntroduction Bibliographique. » Entre 1988 et 1999, date de notre soutenance du Texte prophétique en France (Presses Universitaires du Septentrion) , signalons deux parutions  en 1991 et 1997 sur Nostradamus, outre en 1990 le publication du Répertoire Chronologique Nostradamique de Robert Benazra. 1991Une attaque réformée oubliée contre Nostradamus (1561)", dans Bulletin de l’Association d’études sur l’humanisme, la réforme et la renaissance, année 1991, volume 33, numéro 33, pp. 43-72. 1997 Les prophéties et la Ligue . Journées Verdun Saulnier .