samedi 24 avril 2021

Jacques Halbronn Le premier Nostradamus et le Nostradamus bis.

Le premier Nostradamus et le Nostradamus bis par Jacques Halbronn Quand Daniel Ruzo dans l’édition française de son Testament de Nostradamus (Rocher, 1982 exemplaire dédicacé par l’auteur) reproduit en hors textes des reproductions, des Présages merveilleux de Nostradamus pour 1557 »Dédiés au Roy Ttres Chtestien Henri deuxiéme de ce nom » (Paris, Jacques Kerver 1557) et met en vis à vis la première pages de l’épitre au Roi dans les deux versions, celles de 1556 et celle de 1558, il nous mettait sur une piste que n’auront pas voulu suivre les nostradamologues depuis. On avait là ce que l’on pourrait un Nostradamus premier et un Nostradamus bis.Or, l’épitre de 1558 ne mentionne par celle de 1556 (cf reproduit dans nos Documents inexploités sur le phénoméne Nostradamus, Ed Ramkat 2002) De même, la connaissance des quatrains des almanachs de Nostradamus – qui d’ailleurs figurent sous le nom de « présages » dans certaines éditions sans parler de l’édition du Recueil des Présages Prosaîques par Bernard Chevignard (Présages de Nostradamus, Paris, Seuil, 1999) aurait du faire considérer que les quatrains des Centuries pouvaient bien être, après tout, des imitations de cette première série de quatrains et que sans ces premiers quatrains, on n’aurait point songer à en produire de nouveaux. Mais arrivons-en au troisième cas sur lequel nous mêmes avons pu trébucher, celui de la Préface à César. Apparemment, cette fois, nous n’avons pas sous la main deux versions de ce texte daté de 1555. Mais dans ce cas, pourquoi avoir choisi de produire une Préface à César dans des éditions datées de 1588 surtout si, comme nous le pensons, il n’y avait pas eu d’éditions des Centuries jusque là ? Certes, mais il existe les « Prophéties du Seigneur Du Pavillon les Lorris» d’Antoine Couillard de 1556 ( Paris, Jean Dallier) qui reproduisent que les bibliographes ont identifié comme étant des passages calqués sur une Préface à César . Il faudrait dans ce cas montrer que ces passages ne sont pas exactement identiques à ceux leur correspondant dans la dite Préface figurant en tête de toutes les éditions centuriques. Avouons que nous-même, nous avions jusque là opté pour une contrefaçon des années 1580-90 visant à étayer l’authenticité d’une édition 1555. Mais avec le recul, la thèse d’une précédente préface ayant servi pour un autre ouvrage que les Centuries a fait sont chemin, d’autant que c’est ce qui s’est passé -sans le moidre doute cette fois pour l’Epitre à Henri II. Avant d’aller plus loin, reconnaissons que Ruzo avait montré le chemin et que son avertissement aura été tout simplement occulté et ignoré. Benazea, en 1990, commente ainsi de façon assez obscure (‘pp.21-22): »Il existe un autre almanach (sic) ne contenant point de vers prophétiques et dont la dédicace, comme la précédente datée également du 13 janvier 1556 est aussi adressée à Henri II » Dans les notes de Benazra sur les éditions de 1568, les premières, officiellement, à comporter une Epitre au Roi, nous n’avons pas trouvé de renvoi la mouture d 1556 ? Benazra doute que l’on ait pu publier une Epitre au Roi après sa mort en 1559 (RCN p .36. Il fallait donc qu’elle datât au plus tard de 1558. Inversement, notons que l’édition de 1568 qui comporte cette Epitre au Roy ne la mentionne pas en son titre, à la différences des Présages Merveilleux 1557. Mais il semble avoir fait peu de cas de la première version de l’Epitre au Roi, ce qui fait que le lecteur du RCN n’aura pas été suffisamment sensibilié au problème lié à un tel doublon. Mais venons en à la Préface à César et à ce qu’il en reste dans les Prophéties de Du Pavillon dont Benazra indique (RCN, p. 18) qu’il s’agit d’une « parodie des Centuries » alors même qu’on n’y trouve aucun quatrain. A contrario, on est en droit de s’interroger sur ce qui figure dans les Prophéties de 1556 et qui ne figure pas dans l’édition Macé Bonhomme de 1555. Couillard fait référence (fol 27 v) dans ses Prophéties à un délai de « deux cens trente cinq ans », ce qui ajouté à 1554, donne 1789, année avancée par Pierre d’Ailly en 1414. Or, l’édition lyonnaise des Centuries est de 1555 et non de 1554. Autrement dit, l’ouvrage dont il s’agit serait de 1554. Bien des éléments semblent d’ailleurs, correspondre à un almanach plutôt qu’à des éditions centuriques, deux genres bien différents, on en conviendra. Et c’est bien là que le bât blesse : « Et si ce n’est en Borgongne, Flandres ou Picardie ce sera en Piedmont, Italie, Naples ou autres regions contentieuses »Or, on ne trouve rien de tel dans les Centuries alors que c’est chose courante dans les almanachs et autres pronostications. Quant à la mention de l’an 3797 que l’on trouve dans les deux documents, elle reléve du genre des Prophéties Perpetuelles et non de celui des Centuries. On ne s’est pas assez soucié du décalage existant entre la Préface à César et les quatrains centuriques ! Le Recueil de Présages prosaiques fourni par Chevignard nous donne amplement témoignage de la localisation géographique : » Présages de l’an 1555 (Chevignard p. 223, n° 182),on retrouve « le pais de Bourgongne » figurant dans les Prophéties de Du Pavillon. Notons que les présages pour l’an 1555 ont fort bien pu être introduits par une « préface » datée de 1554. Mais les Présages pour 1554 comportent le mot « Picardie » que l’on trouve aussi dans les dites Prophéties (Chevignard, p. 197, n° 403) Il semble que le dit Recueil de Présages ne comporte pas les Epitres introductives qui devaient relever d’un autre type de travail. D’ailleurs, à partir des Présages pour 1556, le style des Présages annuels n’est plus le même et Nostradamus n’a plus la même préoccupation géographique dans ses textes comme le montre nettement la suite du Recueil de Présages Prosaiques. En quelque sorte, le dit Recueil, édité par Chavigny en 1589, nous aura aisé à mettre en évidence la supercherie. Nous pouvons donc, avec suffisamment de probabilité, conclure que le texte dont Couillard fait le pastiche est bien de Nostradamus mais qu’il ne s’agissait pas – et pour cause- des Centuries mais du genre « annuel » marqué par une certaine précision géographique régionale faisant pendant à la précision uranographique et qu’il s’agit très probablement d’une publication pour l’an 1554. Le puzzle est complet : nous disposons là des « sources » du Nostradamus bis, celui du revival. On pense au Dariotus redivivus; or, A briefe introduction conducing to the judgement of the stars Imprint: London, A. Kemb, 1653, concernant l’édition d’un traité de 1558. (cf notre travail sur la fortune anglaise du traité de Dariot, Ed Pardés, 1990) Sources non pas externes mais internes, tout comme nous avons montré dans notre post doctorat (2007) que certains quatrains centuriques dérivaient de textes en prose du « premier Nostradamus ». JHB 24 04 21