samedi 3 juillet 2021

Jacques Halbronnn Anthropocosmologie. Pour un tropicalisme sidéraliste. Contre Kepler

Anthropocosmologie. Un tropicalisme sidéraliste. Contre Kepler/ Par Jacques Halbronn La théorie des ères précessionnelles pose une problématique anthropocosmologique en ce qu’elle conjugue, à sa façon, le Ciel et la Terre. On oublie trop souvent que le Zodiaque comporte une dimension « terrestre » donc anthropologique en ce qu’il s’articule, directement ou indirectement sur le cycle des saisons. Autrement dit, du point de vue de la seule astronomie, aucun balisage de l’écliptique ne fait sens sinon au regard d’un recours à un méta-langage. L’étude de la position du « point vernal » est en ce sens tout à fait typique de l’approche que nous qualifions d’anthropocosmologique puisque cette donnée, comme son nom l’indique, renvoie à l’équinoxe de printemps ( d’où les « primevères ») dans l’hémisphère nord. Selon nous, les astrologues antiques observaient à quelle étoile fixe correspondait le dit « point vernal » et c’est d’ailleurs ce qui les aura mis sur la voie de la précession des équinoxes dans la mesure où il leur importait de savoir , de déterminer à quelle étoile correspondait pour une période donnée le dit équinoxe de printemps. Mais selon nous, une telle démarche devait sous tendre, en son temps, une astrologie planétaire et notamment saturnienne. En effet, Saturne coupe l’axe équinoxial et l’axe sosticial, alternativement, tous les 7 ans environ. (cf L’astrologie selon Saturne, Paris, Ed La Grande Conjonction, 1994 et 1995), ce qui correspond à la dialectique anthropocosmoloique. Dans l’Astrologie selon Saturne, nous avions axé notre recherche sur le seul passage de Saturne sur le point vernal (autour de 0° Bélier), tous les 30 ans environ. En 1979 nous avions dirigé « Aquarius ou la Nouvelle Ere du Verseau ». Paris, Albatros –Autre Monde. Un « collectif » de plus de 400 pages, à la suite d’un Colloque qui s’était tenu en septembre 1977 au Foyer International d’Accueil de Paris (FIAP) non loin de l’Hopital Sainte Anne et avec le recul, ce volume revêt une nouvelle dimension au prisme de l’anthropocosmologie de par sa dualité/dialectique intrinséque entre le monde des étoiles fixes et celui des saisons terrestres. Autrement dit, nous ne disposions pas à l’époque du « bon » paradigme pour valider le rapport Saisons-étoiles fixes. Au départ, nous accordâmes une importance structurante aux 4 étoiles fixes dites royales, ce qui évitait d’avoir à se soucier de quelque point vernal/axe équinoxial, que ce soit. Mais nos recherches consacrées à Jupiter et à Saturne nous auront permis de distinguer entre un cycle Saturnien axé sur le passage de Saturne sur les équinoxes et les solstices et un cycle jupitérien qui ne dépendait pas directement du cycle de la planéte au sens astronomique du terme mais de son cycle analogique, chronobiologique. Nous abordions le probléme au prisme d’un certain mimétisme, selon lequel le récepteur instrumentalisait le référentiel (cf La pensée astrologique, in L’Etrange Histoire de l’astrologie, Paris, Artefact, 1986) c’est à dite n’en dépendait que dans la mesure de ses besoins. Face au déterminisme cosmique saturnien nous posions la cyclologie jupitérienne de 12 ans, d’origine terrestre. Rappelons que le Zodiaque des constellations n’est que la projection du cycle saisonnier sur l’écliptique et la question des deux hémisphères est secondaire dès lors que l’on raisonne en termes d’axes équinoxiaux et solsticiaux, le printemps et l’automne étant équivalents tout comme l’été et l’Hiver. La problématique de l’instrumentalisation sous- tend l’approche « symboliste » en ce sens que l’influence n’est plus propre à l’émetteur mais au récepteur lequel se programme ou est programmé en conséquence tout comme tel matériau servira au sculpteur par- delà la vocation initiale du dit matériau/ Cela renvoie à notre théologie à trois degrés : le dieu universel, le dieu créateur de notre Ciel et de notre Terre et le dieu jupitérien organisateur de la Cité, de la « Polis ». Depuis notre formulation de 1986, nous avons renoncé à la thèse d’une instrumentalisation du Ciel par notre Humanité et nous situons désormais la dite instrumentalisation anthropocosmologique au niveau du dieu « créateur de notre Ciel et de notre Terre », ne laissant à notre Humanité que le degré inférieur. Dès lors, les tentatives astrologiques ne prenant pas en compte l’anthropocosmologie nous apparaissent comme caduques quand elles adoptent des positions aussi radicale et extrémes que celles d’un André Barbault lequel entend élaborer une astrologie « mondiale » sans la moindre référence au Zodiaque, au cycle saisonnier –sinon sur un plan purement logistique. Pour Barbault, le cycle astrologique serait déterminé par les aspects se formant entre planétes – suivant en cela l’astrologie de Kepler- et non par le passage d’une planéte sur tel ou tel point du Zodiaque. Autrement dit, les seules corrélations intéressant Barbault passent par la formation d’aspects et non par le passage de la planéte sur les axes équinoxiaux et/.ou solsticiaux. En cela, Barbault se démarquait de la théorie des Grandes Conjonctions (d’Albumasar entre autres) qui tenait le plus grand compte du changement de triplicité (Elément) dans les rencontres Jupiter- Saturne. On peut parler dans le cas de Barbault d’une astrologie « hors sol » qui nie la dimension terrestre de notre rapport au Cosmos. C ‘est ainsi que le cycle Saturne-Neptune, chez Barbault, est indifférent au fait que la conjonction se produise dans tel ou tel signe et notamment en signe équinoxial (bélier- balance) ou en signe solsticial (cancer-capricorne), ce qui ne peut que fragiliser ses analyses en ce que celles-ci ne disposent pas d’un dispositif duel nécessaire à toute forme de cyclicité. C’est ainsi que Barbault et ceux qui le suivent se révélent incapables de distinguer entre la conjonction Saturne Neptune de 1989 et celles qui ont suivi ou vont suivre. Or, que peut valoir une prévision qui ne propose pas des cas de figure opposés en alternance ? On a pu croire que Barbault avait touché juste en 1989 mais cela n’aura tenu qu’à une coincidence entre la formation de la conjonction Saturne-Neptune et le passage de Saturne sur les axes équinoxiaux et solsticiaux, comme on peut le vérifier dans les éphémérides. En définitive, on a tort d’opposer sidéralisme et tropicalisme., l’un ne se concevant pas sans l’autre et c’est pourquoi nous proposons de parler d’un tropicalisme sidéraliste, ce qui est bien résumé dans l’étude du point vernal dans la théorie des ères précessionnelles. Ce point vernal correspond à la dimension « terrestre » alors que les étoiles correspondent à la dimension « cosmique », les planétes étant l’interface entre ces deux plans sur la base d’une structure ternaire. Barbault dès les années 40 du siècle dernier (cf son Astrologie Météorologique, ed. Niclaus, 1945), avait décidé de jouer la carte de l’alliance unilatérale avec l’astronomie, en faisant allégeance au tout astronomique, excluant tout ce qui relevait de notre monde terrestre. Barbault restera sur cette base tout au long de sa carrière, y compris avec l’indice cyclique (Les astres et l’Histoire. Ed Pauvert, 1967) qui se contente d’étudier les aspects se formant au sein d’un bouquet de cinq planétes « lentes », ce qui d’ailleurs ne fait guère sens pour l’astronomie puisqu’il s’agit d’une cyclicité artificielle n’offrant de surcroit aucun caractère de récurrence comme c’est le cas pour le cycle d’une planéte seule dont la révolution est constante. Barbault sera parvenu à imposer la thèse selon laquelle la notion astrologique de « cycle planétaire » implique la combinatoire de deux corps célestes relevant de notre systéme solaire, évacuant ainsi ipso facto et les étoiles fixes et le cycle saisonnier. Comme le résume Yves Lenoble. « André Barbault étudie non seulement les conjonctions mais également les oppositions, ainsi que deux aspects positifs (les sextiles et les trigones) et trois aspects négatifs (les carrés, les semi-carrés et les sesqui-carrés), ce qui multiplie par six le nombre de périodes à analyser. »( La Découverte de l’Astrologie Mondiale par les cycles Correspondances des cycles avec les grandes étapes historiques mondiales). Ce faisant, c’est la victoire de Johannnes Kepler, à 4 siècle de distance lequel ne jurait que par les aspects. (cf Richard Pellard, « La notion d’aspect chez Kepler au XVIIe siècle » JHB 03 07 21

Jacques Halbronn La fabrication du "Nostradamus bis" au prisme des "Présages de Nostradamus" dans l'édition de B. Chevignard. Paris, Seuil, 1999

La fabrication du Nostradamus bis au prisme des 'Présages de Nostradamus' dans l' édition de B. Chevignard, Paris, Seuil, 1999 Par Jacques Halbronn L'édition de Bernard Chevignard autour du Recueil des Présages Prosaïques nous inspire un certain nombre de réflexions quant à la fabrication du corpus centurique telle qu'elle a existé à partir de la fin des années 1580 à partir de pièces « non centuriques »- ce que nous appelons le Nostradamus premier- produites à partir des années 1550. Ce travail vient compléter notre récente étude autour de « Nostradamus et l'Antéchrist » (cf notre site NOFIM unblog.fr) et du rôle d'Antoine Crespin dans le processus d'élaboration du « Nostradamus bis ». I Les épitres à Henri II Chevignard commente ainsi un texte du Reccueil (p. 283) ainsi intitulé « D'un autre présage sur la mesme année (1557) qui ne se trouve point, dédié à Sa Magesté du Roy Tres Chrestien. Passages sigillez: et calomniez par un de des haineux de l'auteur pour ne les avoir point entendus et retirez d'un sien livre imprimé à Paris 1558. » Chevignard identifie correctement l'ouvrage de Nostradamus dont il s'agit, à savoir les Présages Merveilleux pour 1557, dont Ruzo avait fourni des reproductions dans son Testament de Nostradamus (Ed du Rocher, 1982) que nous avons reproduit intégralement en 2002 dans nos Documents Inexploités sur le phénoméne Nostradamus (Prophetica Judaica Aleph, Ed Ramkat) Chevignard explique que Chavigny s'est servi d'une attaque contre Nostradamus , le Monstre d'Abus (noter l'anagramme approximatif par rapport à Nostradamus) de Jean de La Daguenière (cf Benazra, RCN , pp. 33 et seq) qui reprend des termes de la dite Epitre à Henri II de 1556. On peut penser que la dite Epitre aura servi à fabriquer une nouvelle Epitre à Henri II cette fois datée de 1558. (cf notre étude sur la fabrication de la nouvelle Préface à César , dans le cadre de l'entreprise « Nostradamus bis », à partir des Prophéties d'Antoine Couillard, 1556) II Les quatrains présages Certaines éditions du « premier » volet des Centuries utilisent des quatrains des almanachs.(cf Benazra, RCN, pp. 118 et seq) : Les Prophéties de M. Michel Nostradamus Dont il y en a trois cens qui n'ont encores esté imprimées lesquelles sont en ceste présente édition..Reveues & additionnées pour l'Autheur pour l'an mil cinq cens soixante & un de 39 articles à la dernière centurie » « Prophéties de M. Nostradamus adioustées nouvellement . Centurie septiesme : 12 quatrains n° 72 à 83. Benazra note « Dans cette centurie, on a inséré 12 quatrains qui n'en ont jamais fait partie (qui) devaient être publiés comme présages pour l'almanach pour 1561. Nous ignorons pourquoi ils furent supprimés de l'almanach imprimé par Barbe Regnault et intégrés dans l'édition 1561 des Centuries » Cette formule « dernière centurie » montre bien que le projet devait s'arrêter à six centuries, complétée par une annexe greffée sur la dite « dernière centurie ». et qui deviendra une « septième centurie » Or,n'est ce pas dans le Recueil de Présages Prosaiques édité par Jean Aimé de Chavigny, que l'on aura puisé pour constituer ce supplément si ce n'est que cette solution sera par la suite repoussée et que l'on aura préféré fabriquer une série de faux nouveaux quatrains au lieu et place des dits « présages » authentiques. III Les Significations de l'Eclipse pour 1559 Chevignard reproduit en annexe de son édition du Recueil les Significations de l'Eclipse qui sera le 16. Septembre 1559 etc, Paris, Guillaume Le Noir.(cf dans le Recueil, Chevignard, pp. 376 et seq). Ces Significations constituent une pièce majeure en faveur d'une édition des Centuries ayant eu lieu dans la décennie 1550. Elle appartient à une série de rééditions ayant eu lieu dans les années 1905- 1906.Voilà le passage « centurique » contenu dans ces Significations s'ouvrant par une Epitre à Jacobo Marasalla, Evêque de Viviers et vice légat d'Avignon, en date du Ier mai 1557, de Salon. 'Comme plus amplement est déclaré à l' interprétation de la seconde centurie de mes Prophéties » (Ed Chevignard, p ; 455) Or, le test de la vignette de couverture nous enseigne que la vignette ornant les dites Significations était réservée aux seules Pronostications et d'ailleurs Chevignard reproduit la Pronostication pour 1558 avec cette même vignette.(p ; 419), . Cette errreur de vignette concerne notamment les fausses éditions de 1555 et 1557 lesquels se servent d'une vignette propre aux éditions « pirates » des almanachs de Nostradamus (cf RCN pp ; 58-59. On la trouve en page de titre du RCN) alors que seules les Pronostications de Nostradamus bénéficient d'une telle vignette agrémentée d'un bandeau zodiacal avec le nom « M. De Nostradame » en écusson.D'ailleurs, les deux ouvrages reproduits par Chevignard -Pronostication 1558 et Significations 1559) sont tous deux indiqués comme parus chez le même libraire parisien, Guillaume Le Noir et l'on peut penser que la fausse édition des Significations aura été réalisée à partir de la dite Pronostication de 1558, conservée à La Haye à moins que cela ne l'ait été à partir de la Grande Pronostication pour 1557 chez un autre libraire parisien J. Kerver également sis rue Saint Jacques. Or, nos reproductions ( in Documents Inexploités, 2002, pp 189 et seq) montrent que le dit Kerver réservait la dite vignette à la seule Pronostication, celle ci ne servant ni pour l'almanach ni pour les Présages Merveilleux pour l557 En fait, ces Significations visent l'année 1605, date qui figure juste avant la référence centurique. Or, cette année 1605 est celle des Prédictions admirables, recueilles des Mémoires de feu M. Michel Nostradamus (..) par Vincent Séve de Beaucaire en Languedoc dès le 19 mars 1605 au Chateau de Chantilly (cf RCN, pp. 160 et seq,) ce qui introduit un lot de 58 sixains, œuvre de Morgard (cf nos Documents Inexploités), laquelle œuvre aura été intégrée dans le corpus centurique à l'instar de celle d'un Antoine Crespin. JHB 03 07 21 Ci-dessous une étude de notre plume datant de 2003, donc juste après nos » Documents Inexploités « de 2002 sur Espace Nostradamus Accueil Biographie Ascendance Bibliographie Références Analyse Frontispices Gravures Actualité Recherche Club Ramkat ________________________________________ ANALYSE 38 La fortune des emprunts à Leovitius dans les deux épîtres nostradamiques datées de 1558 par Jacques Halbronn Deux épîtres sont supposées avoir été rédigées en 1558, celle dédiée à Henri II, en date du 26 juin et figurant en tête des Centuries VIII - X de la plupart des éditions des Centuries et celle adressée à Jacob Marrasala, évêque de Viviers, vice légat d’Avignon, en date du 14 Août, qui parut sous le titre de Significations de l’éclipse qui sera le 16 septembre 1559 etc, Paris, Guillaume le Noir.1 Torné Chavigny a signalé, en son temps, dans une lettre manuscrite, parue ultérieurement dans une précédente édition en fac-similé des Signfications - et qu’utilise d’ailleurs B. Chevignard qui reproduit la dite lettre par la même occasion - l’emprunt à l’Eclipsium de Leovitius. Nous reprendrons pour ce faire un passage de notre TPF2, en y ajoutant d’autres éléments signalés par Théo Van Berkel. I - L’Eclipsium et les Significations de l’éclipse Après avoir lu notre ouvrage, Documents inexploités sur le phénomène Nostradamus, Théo Van Berkel3 nous manifestait ainsi sa surprise voire son embarras (nous avons parfois amendé son français) à propos de notre renvoi à l’Eclipsium omnium ab anno Domini 1554 usque in annum Domini 1606 accurata descriptio & pictura ad meridianum Augustanum ita supputata.4 “J’ai lu dans votre livre ce qui concerne les Significations de l’Eclipse 1559. A la page 29, il y a un renvoi à Mars à 7.32 Sagittaire. Si je comprends bien, c’est un renvoi a l’Eclipsium de Leovitius. Parce que dans les Significations, je ne peux pas trouver un tel renvoi. J’ai fait le calcul du thème de l’Eclipse, c’est-à-dire le 16 septembre 1559, 17:01:08 GMT à Salon-de-Provence. Voici les longitudes zodiacales (système Regiomontanus) : * Soleil : 2:42:03 Libra * Lune : 2:42:03 Aries * Mercure : 24:40:39 Libra * Vénus : 18:30:38 Scorpio * Mars : 5:25:48 Capricornus * Jupiter : 10:31:00 Pisces rétrograde * Saturne : 6:36:16 Gemini rétrograde * Caput Draconis : 0:15:23 Aries * MC : 25:25:46 Sagittarius * XI : 12:18:45 Capricornus * XII : 6:22:09 Aquarius * Ascendant : 20:45:18 Pisces * II : 10:07:14 Taurus * III: 7:43:07 Gemini Selon la publication du texte repris dans les Présages de Nostradamus par Chevignard, on trouve : * Mars se trouve au milieu du ciel (p. 448) : cf. MC 25:25:46 Sagittarius, Mars 5:25:48 Capricornus * Le carré avec la queue du Dragon (p. 448) : cf. Mars 5:25:48 Capricornus, Queue du Dragon (Cauda Draconis) 0:15:43 Libra En conséquence, que Mars soit dominateur de l’Eclipse, dans la VIIIe maison, non loin d’Antarès (p. 451) n’est pas possible, c’est Vénus en Scorpio qui est dans la VIIIe maison, Antarès se trouve au 2:47:57 Sagittarius. Le Soleil se trouve en Libra, gouverné par Venus. * Une opposition de Saturne (p. 452) : Saturne opposé à Antarès, cf. Saturne 6:36:16 Gemini rétrograde, Antarès 2:47:57 Sagittarius *Un aspect de trigone de Jupiter à Vénus (p. 455) : cf. Jupiter 10:31:00 Pisces rétrograde, Vénus 18:30:38 Scorpio. Je ne comprends donc pas qu’il puisse être question d’une longitude zodiacale de Mars en Sagittarius, ni le renvoi au 7:32 Sagittarius (sauf : environ 1840 la longitude zodiacale d’Antarès était environ 7:30 Sagittarius). Ensuite, je ne vois pas un Ascendant en Aries / Bélier (cf. votre livre, p. 29). Selon mes calculs, l’Ascendant de l’Eclipse se trouve en Pisces. Mais peut-être le moment de l’Eclipse était-il plus tard, vers 17:20 GMT. Je suis bien curieux de connaître l’explication des mentions de Mars en Sagittaire et de l’Ascendant en Aries. Selon mes calculs, Mars se trouvait en Sagittarius entre le 12 février 1559 et le 9 septembre 1559 environ, sa longitude zodiacale à 7:32 Sagittarius autour du 4 mars 1559. En 1560, Mars ne se trouvait pas en Sagittarius.” Nous signalâmes à M. Van Berkel que l’Eclipsium était calculé selon le méridien d’Augsbourg, en Bavière (Allemagne) et non celui de Salon de Provence. Théo Van Berkel poursuivait alors, cette fois en anglais, dans une autre correspondance : “Since I did not have any knowledge about Leoviticus, I made a horoscope of this Eclipse for the Greenwich Mean Time of the Full Moon for Salon-de-Provence. Taking your remarks at heart, I made a new horoscope, this time for Augsburg, using the AstroScoop Plus software. In order to intercept a wrong date (Julian calendar vs. Gregorian calender). I calculated a second horoscope, with the Tuckerman Ephemeris 2-1649 AD and the Regiomontanus tables of houses, compiled by André Barbault. Here are the results : * Sun : 2:42:03 Libra * Moon : 2:42:03 Aries * Mercury : 24:40:39 Libra * Venus : 18:13:38 Scorpio * Mars : 5:25:48 Capricornus * Jupiter : 10:31:00 Pisces rétrograde * Saturn : 6:36:16 Gemini rétrograde * Caput Draconis : 0:15:23 Aries * MC : 0:45:01 Capricornus * 11 : 15:57:27 Capricornus * 12 : 10:12:50 Aquarius * Asc : 1:44:45 Aries * 2 : 22:04:39 Taurus * 3 : 15:40:44 Gemini Mars is in Capricorn in 10, conjunct the MC, and not in 8 in Sagittarius conjunct Antares. In fact, there is not one planet in the 8th house ! Both Mercury and Venus are located in the 7th house. But if in the Eclipsium this chart was calculated with equal houses, then Venus would be in the 8th house, no matter counting from the Asc or from the MC. The matter seems a little bit more complicated when one wants to draw conclusions. In the publication by Chevignard, it reads on p. 448 : Mars se trouve au milieu du ciel. According to me, this means that Mars is in the midst of heaven, which can be translated as in the 10th house. This is according to present-day software. Next, on the same page, a square aspect between Mars and the Dragon’s tail is mentioned. This is also according to present-day software, since according to this software Mars is located on the 6th degree of Capricornus and the Dragon’s tail on the 1st degree of Libra. When Mars would be located on the 8th degree of Sagittarius (7:32), a square would simply be impossible !” Grâce à M. Van Berkel, nous allons mieux comprendre la façon dont on a compilé - c’est le mot - les Significations de l’Eclipse attendue pour le 16 septembre 1559, selon le calendrier julien. Manifestement, l’Eclipsium de Leovitius comporte une erreur en ce qui concerne la position de Mars au début du Sagittaire et celui-ci ne sera donc pas conjoint avec l’étoile fixe Antarès. Dès lors, la prédiction de Leovitius ne se justifie plus, le maître de l’ascendant Bélier n’étant plus en VIII et plus à proximité d’Antarès. Ci-dessous les positions fautives de la Constitutio syderum pour l’Eclipse du 16 sep-tembre 1559, reprise de l’Eclipsium: MC : 1.16 Capricorne XI : 16.38 Capricorne XII :11.16 Verseau Asc : 2.59 Bélier II : 22.38 Taureau III : 16.8 Gémeaux IV : 1.16 Cancer etc Soleil : 1.36 Balance Lune : 2.37 Bélier Mercure : 21.4 Balance Venus : 17.47 Scorpion Mars : 7. 32 Sagittaire Jupiter : 10.54 Poissons Saturne : 9.15 Gémeaux Tête du dragon (Caput Draconis) : 0.14 bélier Le décalage avec les positions indiquées par Théo Van Berkel coïncident toutes, à peu de chose près, sauf en ce qui concerne Mars. Or, c’est justement sur la position de Mars que repose toute l’interprétation relative à la mort d’un roi. Les Grandes Ephémérides, (tome 1, Paris, Trédaniel, s. d.) de Gabriel donnent également Mars au début du Capricorne pour le 16 septembre 1559. Mais de cela, ceux qui composèrent les Significations de l’Eclipse de 1559 ne s’en rendirent pas compte ! Il n’allèrent pas étudier la page fournissant les positions plané-taires mais se contentèrent d’en recopier, à un autre endroit de l’Eclipsium, son interprétation qui ne précise pas la position de Mars dans le zodiaque et crurent que cette interprétation correspondait - ce que l’on pouvait, en effet, raisonnablement supposer, au thème de l’éclipse qu’ils dressèrent par ailleurs. Ils citèrent donc, sans état d’âme, le passage concerné, que nous avons reproduit en fac-similé dans nos Documents Inexploités (p. 29) : “Mars principal dominateur de l’éclipse occupant la 8. Maison non esloignée d’Antare etc”, mais par ailleurs, ils calculèrent bel et bien les positions correspondant à l’éclipse et cette fois sans passer par l’Eclipsium de Leovitius, sans se rendre compte que ces différentes données n’étaient pas compatibles entre elles, ce qui nous conduit à penser que leurs connaissances astrologiques sinon astronomiques étaient assez médiocres et l’on peut se demander si Michel de Nostredame aurait pu commettre une pareille bévue, à savoir ne pas constater que le pronostic de Leovitius s’appuyait sur des données fausses. Le plus grave reste d’avoir écrit que Mars était maître de l’ascendant et de placer, ailleurs, celui-ci en Poissons alors que cela n’était possible que si l’ascendant était en Bélier. Or, pour Salon de Provence, al’scendant était en Poissons et pour Augsbourg, il était en Bélier, le signe suivant. Folios A2v et A4r des Significations de l'éclipse Dans un cas, Mars est Maison VIII et dans le second cas, il est au Milieu du Ciel, donc en Maison X ! Van Berkel conclut - à la suite de notre mise au point - au sujet du rapport avec l’annonce de la mort du roi : “As far as I have insight in this matter, I think that the horoscope was presented correctly on p. 448 of the reprint by Chevignard, and the remark about Mars and Antares is simply wrong. This does not change the impact it had in those days regarding astrological correspondences with the death of Henry II, but the fundaments don’t sustain such a prediction. On the contrary, they weaken it.” En vérité, l’important était que le lecteur pensât que Michel de Nostredame avait pu annoncer en 1558 la mort du roi. Il se trouvait que, par hasard, l’Eclipsium, paru avant le décès, comportait bel et bien un tel pronostic, encore que fondé sur une erreur de lecture des éphémérides. Il était tentant d’en attribuer le mérite à Michel de Nostredame mais la confrontation même des différentes parties des Significations aurait pu conduire le lecteur attentif à une certaine perplexité. On notera que B. Chevignard ne signale pas cette incongruité astronomico-astrologique dans ses notes relatives aux Significations. Nous ajouterons qu’il nous semble intéressant de souligner le rôle des étoiles fixes et notamment d’Antarès dans l’interprétation astrologique dans la seconde moitié du XVIe siècle.5 L'Eclipsium de Leovitius On notera dans l'horoscope la position de Mars à 7° 32 Sagittaire en Maison VIII II - L’Ephemeridum et l’Epître à Henri II Tant l’Eclipsium que l’Ephemeridum de Leovitius, tous deux parus dans les années 1550, s’arrêtent à 1606.6 Si l’on en croit sa correspondance latine, Michel de Nostredame se servit de l’Ephemeridum : “Je me réjouis que vous ayez pris connaissance des éphémérides de Cyprian Leowitz”.7 Pourtant, Tubbe, correspondant régulier de Nostradamus, dans sa lettre précédente du 20 septembre 1560 (Lettre XVI) qu’il avait adressée à ce dernier, n’avait point fait pas allusion à ces Ephémérides, à moins que ne manque une de ses lettres qui aurait été écrite en octobre ou novembre 1560.8 Or, c’est précisément cette année 1606 qui sera en ligne de mire de l’Epître à Henri II, dans la version “Cahors” parue au début des années 1590 et l’on conçoit que le début du siècle suivant ait été alors en ligne de mire. En revanche, il ne semble pas que l’année où s’arrête l’ouvrage ait revêtu a priori une importance particulière pour Leovitius, dans les années 1560. Tout se passe comme si ce qui initialement était aléatoire - des calculs d’astrologue à des fins essentiellement techniques - avait revêtu une signification beaucoup plus concrète, quelques décennies plus tard. Le ton de Leovitius peut induire en erreur car il réutilise grosso modo de vingt ans en vingt ans les mêmes formules. A propos d’une éclipse annoncée pour 1605 : “C’est chose toute certaine que plusieurs siècles auparavant n’en a esté une plus grande & n’en sera possible une telle pour l’advenir.“9 En fait, Leovitius reste extrêmement vague, après une échéance apparemment jugée grave, on passe à l’attente de la suivante comme si la vie allait se poursuivre normalement. La conclusion du recueil est révélatrice : “J’ay discouru cette présente prognostication jusqu’à l’an 1607 (…) Ce faisant attendront le second advenement du Fils de Dieu qui semble estre fort prochain”10 et d’entrer dans des considérations extra-astrologiques : fin du règne de Mahomet qui pourrait avoir lieu au bout de 1000 ans, donc dans le cours du XVIIe siècle, fin du monde au bout de 6000 ans mais qui peut être abrégée. Au fond à la façon d’un astronome conseillant d’observer telle éclipse puis telle autre, Leovitius signale des moments importants et si ce n’est pas l’un, ce sera le suivant de la série.11 La mention de l’an 1606 dans l’Epître à Henri II datée de 1558, doit être rapprochée des éphémérides de Stadius et de Leovitius qui toutes deux - sans parler de l’Eclipsium de ce dernier - aboutissent à l’an 1606. Il ne semble pas en effet qu’il s’agisse là de coïncidences : Leovitius, Eclipsium omnium ab anno domini 1554 usque in annum Domini 1606, et Ephemeridum novum.... ab anno Domini 1556 usque in 1606, Lauingen, 1557, BNF ; Stade, Ephemerides... .ab anno 1583 usque ad annum 1606, Lyon, S. Béraud et S. Michel, BNF, Res V 1138. Dans le “Brief discours sur la vie de M. Michel de Nostre Dame” (in recueil Janus Gallicus), il est fait mention de l’ouvrage de Stadius comme livre de chevet : “Me souvenant très bien, écrit le biographe, que sur la fin de Iuin ladite année (1566), il avoit escrit de sa main aux Ephémérides de Iean Stadius, ces mots latins, Hic prope mors est. C’est-à-dire, icy proche est ma mort.” On connaît par ailleurs, en français, des Prognostications et Advertissemens laissés par défunt Jean Stadius (...) déclarant les admirables significations de la grande Conjonction des planètes, laquelle s’est faite l’année 1583 continuant ses effets d’an en an jusques en l’an 1606, Lyon, Jacques Pons, Bib. Méjanes, Aix, Res D 56. Mais l’on s’aperçoit que les dates abordées correspondent à celles des Ephémérides : 1583 - 1606. L’on trouve dans l’Epître à Henri II une description complète de positions des diverses planètes dans le zodiaque, cette disposition s’avère justement être celle de 1606, absente de l’Epître de 1556. Il est question de Saturne en Capricorne qui s’y trouvera du 7 avril au 25 août, ce qui signifie qu’il passera du signe du Sagittaire dans celui du Capricorne puis “rétrogradera” dans le Sagittaire. Quant à Jupiter, il passera du Capricorne au Verseau, signe dans lequel il restera du 14 juin au 7 octobre. Voilà pour les planètes “hautes”. Il convient probablement d’étudier Leovitius et ses tables pour comprendre les allusions de ce texte. La position des planètes ne correspond en tout cas pas à l’an 1585 selon les éphémérides actuelles.12 “Seront trois régions (...) c’est à savoir la Romanie, la Germanie, l’Espagne qui seront diverses sectes par main militaire délaissant le 50 et 52 degrés de hauteur et seront tous hommages des religions (sic) lointaines aux régions de l’Europe et de Septentrion de 48 degrés de hauteur (...) Et sera au mois d’Octobre que quelque grande translation sera faite (...) Saturne qui tournera entrer à 7 du mois d’Avril jusques au 25 d’Août, Jupiter à 14 de Juin jusques au 7 Octobre, Mars depuis le 17 Avril jusques au 22 de Juin. Saturne en Capricorne, Jupiter en Aquarius (Verseau), Mars en Scorpio, Vénus en Pisces (Poissons), Mercure dans un mois en Capricorne, Aquarius et Pisces, la Lune en Aquarius, la tête du Dragon en Libra (Balance), la queue à son signe opposite. Suivant13 une conjonction de Jupiter à Mercure, avec un quadrin aspect (carré) de Mars à Mercure et la tête du Dragon sera avec une conjonction du Soleil à Jupiter l’année (sic) sera pacifique sans éclipse et non du tout et sera le commencement comprenant se de ce que durera et commençant icelle année sera faite plus grande persécution à l’Eglise Chré-tienne.” Avec quelle exactitude le pseudo-Nostradamus14 a-t-il recopié les données fournies dans les tables de Leovitius ? En fait, avec une minutie qui nous semble de peu d’intérêt a priori mais qui soulignerait l’attention extrême qu’il accordait à l’an 1606.15 Mais est-ce même certain ? Ne pourrait-il s’agir d’une précision factice, d’un remplissage astronomique ? Toujours est-il que ce faisant, le pseudo-Nostradamus nous donne la clef de sa mé-thode, assez vainement semble-t-il, puisqu’il n’a pas été entendu. Screech, dans son édition critique16 de la Pantagruéline Pronostication de Rabelais a raison de souligner ce que ces textes annuels doivent à des recueils d’éphémérides comme celui de Johannes Stoeffler17 qui sont purement et simplement recopiés par les faiseurs d’almanachs. Lorsque l’on considère l’Ephemeridum de Leovitius pour le mois de janvier 1606, le texte du pseudo-Nostradamus prend son sens. Celui-ci signale d’abord les signes dans lesquels se trouvent les planètes au 1er janvier 1606, puis les rétrogradations de ces planètes durant l’année 160618, puis les aspects qu’auront ces planètes dans les premières semaines de l’année 1606, ceux-ci étant indiqués sur des tableaux de Leowitz et n’exigeant aucun calcul. Les 3 - 4 janvier, la Lune rejoint la Queue du Dragon à 22 h 19, Mercure est conjoint à Jupiter à 21 h 40 et Mercure en carré avec Mars à 5 h 16. Les 7 - 8 janvier, Mars est carré à Jupiter à 16h 00. Les 17 - 18 janvier, la Lune rejoint la Tête du Dragon à 10 h 01 tandis que le Soleil est conjoint à Jupiter à 3 h 35.19 Par ailleurs, l’Eclipsium comporte un tableau de correspondances : De regionibus ac civitatibus duodecim Zodiaci subjectis20 et qui permettait au lecteur de déterminer dans quels pays une influence planétaire s’exercerait selon le signe zodiacalJ où l’astre se trouverait, à telle date. Enfin, le ton de l’Epître à Henri II prend une tournure de pronostication annuelle juste à la suite de cet “horoscope” pour 1606 : “L’année sera pacifique sans éclipse et non du tout, et sera le commencement comprenant se(sic) de ce que durera et commençant icelle année sera faicte plus grande persécution à l’Eglise Chrestienne, que na esté faicte en Affrique et durera ceste ici iusques à l’an mil sept cens nonante deux que l’on cuidera estre une renovation de siecle.” L’annonce de l’an 1792 est précisément liée à cette description astronomique de 1606 qui apparaît comme le commencement d’une période amenée à durer, selon le rédacteur de cette addition, 186 ans, retrouvant, du moins sur le plan chronologique, le schéma alliacien, transmis par Turrel et Roussat. En réalité, 1792 n’apparaît plus ici que comme la fin d’une période qui commence dès le début du dix-septième siècle. Il semble que les commentateurs n’aient guère remarqué ce point. Nous étudierons plus loin le climat de ce début du XVIIe siècle : dès 1607, Michel Losta rendait compte, dans un texte adressé au Roi, de la rumeur de la naissance de l’Antéchrist qui serait survenue en 1606, sur la base d’informations en provenance de Malte in L’Harmonie des accords du soldat françois & de ses contredisans.21 Notons par ailleurs, l’insistance sur l’Antéchrist dans l’Epître à Henri II. Quelques lignes en dessous de la mention de 1792, nous lisons : “Et dans iceluy temps (...) la puissance infernalle mettra à l’encontre de l’Eglise de Iesus la puissance des adversaires de sa loy, qui sera le second Antechrist lequel persecutera icelle Eglise et son vray Vicaire (...) Le susdict regne de l’Antechrist ne durera que iusques au definement de ce nay pres de l’aage etc.” L’Epître centurique à Henri II, telle qu’elle nous est parvenue, nous semble donc nettement marquée par un climat assez caractéristique du début du XVIIe siècle. La mention de 1792 pourrait ne pas avoir figuré dans l’épître au roi, signalée par Crespin. En fait, si Nostradamus avait mentionné à l’époque de la parution des Contredits de Couillard (1560) cette date de 1792 telle qu’elle figure dans l’Epître à Henri II, le sieur du Pavillon, qui lui avait déjà consacré un ouvrage parodique en 1556, n’aurait pas manqué, selon nous, de le signaler.22 On a vu en effet que Couillard avait mentionné les prophéties pour l’an 1789, qui circulaient à l’époque. Une substitution de date Nous ne connaissons, rappelons-le, que la première et la dernière version de l’Epître à Henri II. Nous ignorons ce que fut l’Epître à Henri II, signalée par Crespin et probablement placée en tête des centuries posthumes. Epître à Henri II : “depuis le temps que Saturne qui tournera entrer à sept du mois d’avril iusques au 25 d’aoust, Iupiter à 14 de juin iusques au 7 octobre, Mars depuis le 17 d’avril iusques au 22 de may, Mercure depuis le 3 de février iusques au 24 dudit etc.” On peut raisonnablement penser que dans l’épître de 1568 - si l’on veut ainsi dater la première version de l’épître remaniée - il devait exister une telle description de positions planétaires mais pour une autre année, peut être 1570. Or, une telle pratique est attestée dans la Pronostication de Seraphino Calbarsy pour 1542, étudiée par Screech : “Mil CCCCXLII en laquelle sera Saturne depuis le Ier de mars usques au XX de juillet parfera sa rétrogradation. Jupiter dès le VII mars iusques au VI juillet sera moleste de rétrogradation. Mars dès le XXII may iusques au XXVI juillet rétrogradera. Vénus, dès le commencement de l’année iusques au XIII de janvier sera rétrograde. Mercure du XXVI de mars iusques au XVII d’apvril & dès le XX juillet jusques au XII d’Aoust & oultre ce que depuis le XIIII novembre jusques au IIII décembre rétrocédera.” Laissons à nouveau la parole à Théo Van Berkel : “Selon mes calculs et ceux de Christian Wöllner (op. cit.), il s’agit de l’an 1606, les longitudes zodiacales du 1 janvier 1606. Je suis curieux parce que cette date est selon le calendrier Julien, comme les dates de commencement et finir des rétrogradations. Si je ne me trompe pas, le calendrier grégorien fut introduit en France le 10 décembre 1582, devenu le 20 décembre 1582. Donc, le 1 janvier 1606 (Julien) est le 11 janvier 1606 (grégorien). Dans l’Epître centurique, par exemple : le 7 avril (date de commencement de la rétrogradation de Saturne) est une date selon le calendrier julien. Selon le calendrier grégorien, il s’agit de 17 avril (en réalité : de 16 avril). Je crois que la source des longitudes zodiacales, rétrogradations et aspects dans l’Epître centurique doit être situé avant 1582, l’an d’introduction du calendrier grégorien. Selon M. Hofstede (un chercheur hollandais) la source est Leovitius, “parce que dans son oeuvre on peut trouver les dates des périodes de rétrogradation, les longitudes du soleil (sic !!!), de la lune et les planètes comme l’absence des Eclipses ; il renvoie au 28 janvier 1606, la date de la première Nouvelle Lune.” Malheureusement, Hofstede ne donne pas son texte de sa source ; il est probable qu’il a lu tous ça dans Nostradamus Astrophile de P. Brind’amour. Trois remarques : - 1. Dans l’Epître centurique, la longitude zodiacale du soleil n’est pas mentionnée. - 2. La date de la Nouvelle Lune est une date en calendrier julien ; selon le calendrier grégorien, il s’agit du 7 février 1606 (donc : la seconde (!) Nouvelle Lune selon le calendrier grégorien). - 3. Chaque année, il y a des éclipses : deux éclipses solaires et deux ou trois éclipses lunaires. En 1606, la Tête du Dragon (Caput Draconis) se trouvait en Aries et Pisces (la Queue du Dragon (Cauda Draconis) est située en Libra et Virgo), donc il n’y a pas des Eclipses en Leo (laquelle signe gouverne la France), donc une année de paix pour la France.” En effet, l’Ephemeridum qui paraît dans les années 1550 ne pouvait avoir prévu la réforme grégorienne et par conséquent ceux qui s’en servirent, après 1582, se devaient d’effectuer les corrections. Une Epître datant du début du règne Parmi les variantes que l’on peut observer entre les diverses éditions des Vrayes Centuries et Prophéties et ce depuis 1649, date à laquelle ce titre apparaît, la plus remarquable ne semble pas avoir été signalée, à savoir la mention, au sein de l’Epistre à Henri II, de l’année 1547 au lieu de 1557 dans un nombre important d’éditions des Centuries au point qu’au XIXe siècle, plusieurs éditions des Prophéties comportent l’Epistre à Henri II avec la mention de l’an 1547.23 Il pourrait certes s’agir de quelque coquille mais la date du 14 Mars 1547 n’est pas indifférente, c’est à quelques jours près celle à la quelle Henri II succède à son père François Ier (mort le 31 mars 1546, soit avant Pâques, ancien style). C’est en ce dernier jour de mars 1547 où son père est à l’agonie, à Rambouillet, et qu’il lui transmet ses derniers conseils, que pour la première fois le Dauphin portera ce nom d’Henri Second. La formule employée, rappelons le, est la suivante : “accommençant depuis le temps présent qui est le 14 de Mars 1547”. Pourquoi au demeurant, si l’on conserve la date du 14 Mars 1557 ce décalage entre le “temps présent” et la date du 27 juin 1558 ? Nous pensons que cette référence est propre à la première édition remaniée de l’Epître à Henri II. Elle se réfère au début du règne pour indiquer peut être que Nostradamus avait rédigé celle-ci dès 1547, ce qui ne pouvait que rendre rétrospectivement ses prophéties encore plus remarquables. Toujours est-il que les éditions du milieu du XVIIe siècle que nous avons privilégiées, celles des Vrayes Centuries et Prophéties portent cette date de 1547, ce qui devient ainsi un trait distinctif. Il convient en outre de prendre en compte cette double date de 1547 / 1557 et de 1558 car nous retrouvons cette présentation chez Richard Roussat, en 1550, au Livre de l’Estat et mutation des temps, prouvant par authoritez de l’Escripture Saincte & par raisons astrologales la fin du Monde estre prochaine, Lyon, G. Rouillé, ouvrage dont Nostradamus paraît s’être servi, notamment à propos du cycle de 354, ans mais aussi en ce qui concerne “aulcuns quatrains” (pp. 120 et seq). Roussat : “Maintenant donc je dis que nous sommes en l’instant & approchons de la future renovation du Monde, ou de grandes alterations ou d’iceluy l’anichilation, environ deux cens quarante troys ans selon la commune supputation des hystoriographes, en prenant la date de la compilation de ce présent traicté, laquelle date est posée & escrite à la fin d’iceluy.” (p. 86) In fine : “terminé & fini le quinzième jour de Febvrier, l’an de grâce mil cinq cens quarante huict” (p.180) Il convient donc d’ajouter 1548 à 243, ce qui donne 1791. Comparons avec le texte de la deuxième Epître à Henri II : “toutefois, esperant de laisser par escrit les ans, villes, citez, regions où la plupart adviendra mesmes de l’année 1585 et de l’année 1606, accomençant depuis le temps présent qui est le 14 Mars 1547 / 57” Mais Nostradamus ou tout autre rédacteur ne précise pas le nombre d’années à ajouter au “temps présent”, en revanche, il fournit un peu plus loin le total, sans que l’on comprenne très bien la coupure entre deux passages qui auraient normalement été consécutifs : “et commençant icelle année sera faicte plus grande persécution à l’Eglise Chrestienne, que n’a esté faicte en Affrique, et durera ceste ici iusques à l’an mil sept cens nonante deux que l’on cuidera estre une renovation du siècle”. Le chiffre qui manque ici est 1792 - 1547 = 245 ans alors que celui qui manquait chez Roussat était 1548 + 243 = 1791. Chiffres extrêmement proches, on en conviendra. On peut évidemment prendre 1557 et le soustraire de 1792, ce qui donnera 235 ans. Le parallèle est d’autant plus net que la date de départ, dans les deux cas, est fournie dans tous ses détails, à la différence des autres données : 14 mars 1547 et 15 février 1548.24 A la façon du Période de Turrel qui fournit la date finale, 1789, l’Epistre annonce également, à peu de choses près, une telle date, 1792, mais néanmoins en introduisant des calculs qui évoquent ceux de Roussat, sans pour autant indiquer le nombre d’années à ajouter à la date de départ. Un commentaire sous la Fronde Vers 1651, François Davenne enrichit la galerie des nostradamistes les plus échevelés, il lui fait annoncer le départ de Louis XIV remplacé par lui- même. Il imagine Nostradamus commentant son Epître à Henri II, qu’il rend par Henri III à la lumière des événements du XVIIe siècle : “Lisez mon Epistre escrite à Henry troisiesme (sic), lui adressant mes centuries, vous verrez que j’ay prophétisé la rénovation, la descente du Saint Esprit & son combat contre le Royal, l’antéchrist & le mauvais chef de l’Eglise, laquelle avec le tremblement de terre & l’éclypse du Soleil va s’accomplir maintenant par la réforme de toutes classes” et le pseudo-Nostradamus d’affirmer avoir annoncé la fin du roi d’Angleterre (1649) sans nous fournir le passage concerné.25 Le rôle de la chronologie et l’influence de Pierre d’Ailly Quelle est la raison des deux développements consacrés à la chronologie du monde depuis sa Création, que l’on trouve dans l’Epître à Henri II26 ? Il nous semble qu’il s’agit d’une référence assez nette à Pierre d’Ailly, l’auteur de deux Concordances, l’une de l’Astronomie et de la Théologie, et l’autre de l’Astronomie et de l’Histoire qui comporte la date de 1789. On a l’impression que le pseudo-Nostradamus veut parvenir à un heureux dosage entre computations astronomiques et datations historiques à la façon du Cardinal de Cambrai.27 Ailly justifie historiquement les dates astronomiques qu’il met en avant à moins que parfois il ne soit tenté de faire le contraire. Il est d’autres auteurs qui ne s’occupent pas de rétrospectives historiques et spéculent uniquement sur la fréquence de certaines situations cosmiques dont ils supposent que cela doit entraîner des effets en conséquence. Il en est enfin qui ne recourent pas aux astres mais disposent d’une argumentation chronologique. C’est ainsi que l’an 1656 serait important parce que 1656 ans après la Création du Monde, il y eut le Déluge. L’on compare deux époques situées sur des paramètres différents.28 Il va de soi que tout repose ici sur une chronologie biblique. Dès lors que celle-ci sera mise en cause - on le verra avec le Zodiaque de Dendérah, au début du XIXe siècle29, ce type de démonstration perdra de sa crédibilité. Revenons sur la question de l’agencement du texte de l’Epître à Henri II. Un premier passage traite de l’année 1585 et de l’année 1606. puis l’on se réfère au 14 Mars 1547 ou 1557 sans que l’on comprenne pourquoi : “Et pour ce, ô très humanissime Roy, la plupart des quatrains prophétiques sont tellement scabreux que l’on n’y scauroit donner voye ny moins aucuns interpréter, toutesfois esperant de laisser par escrit les ans, villes, citez, régions où la plupart adviendra (...) depuis le temps présent qui est le 14 de mars 1557 et passant outre loing jusques à l’advenement qui sera après au commencement du 7. millénaire profondément supputé, tant que mon calcul astronomique et autre scavoir s’a peu estendre, où les adversaires de Jésus Christ et de son Eglise, commenceront plus fort de pulluler, le tout a esté composé et calculé en jours et heures d’ election et bien disposees et le plus justement qu’il m’a esté possible. Et le tout Minerva libera et non invita, supputant presque autant des adventures du temps advenir que des cages (sic, lire âges) passés etc.” Nous avons supprimé ce qui semble être une interpolation propre au troisième état posthume : “mesmes de l’année 1585 et de l’année 1606”. Passons à présent à un autre passage de la même Epître : “Or de Iesus Christ en ça, par la diversité des sectes, je le laisse et ayant supputé et calculé les présentes Prophéties, le tout selon l’ordre de la chaisne qui contient sa revolution, le tout par doctrine Astronomique et selon mon naturel instinct et (...) sera le commencement comprenant se (sic) de ce que durera et commençant icelle année sera faicte plus grande persecution à l’Eglise Chrestienne, que n’a esté faicte en Affrique et durera ceste ici (sic) iusques à l’an mil sept cens nonante deux que l’on cuidera estre une renovation du siecle: après commencera le peuple Romain de se redresser etc.“ Nous avons à nouveau supprimé un passage qui concerne une fois de plus l’année 1606 puisque les données qui s’y trouvent lui correspondent, si l’on ouvre les éphémérides, bien que l’année n’y figure pas nommément. On a ainsi l’impression que le discours alliacien, relayé par Turrel et Roussat, se trouve ici interpolé par des préoccupations liées à l’an 1606 et ce à deux reprises au sein d’un bref texte. La récupération protestante Bien plus, nous pensons que les deux passages susmentionnés devraient logiquement être joints et se faire suite. Certes, on a du mal à admettre que l’auteur de l’Epître à Henri II imagine que la persécution de l’Eglise durera plus d’un siècle et demi, de 1606 à 1789 : “l’année (1606) sera pacifique sans eclipse (...) et commençant icelle année sera faite plus grande persécution à l’Eglise Chrestienne (…) et durera ceste ici (sic, lire ceste-ci) jusques à l’an mil sept cens nonante deux” Tout se passe comme si l’on avait interpolé quelques passages de l’Eclipsium ou de l’Ephemeridum de Leovitius, avec les commentaires, au sein d’un texte à vocation antéchristique - un passage est consacré à l’Antéchrist - et de portée beaucoup plus générale. Qu’écrit le chanoine Roussat à ce propos ? Il n’est nullement question d’une date intermédiaire : “Maintenant donc je dy que nous sommes en l’instant & approchons de la future rénovation du Monde ou de grandes altèrations ou d’icelui l’anichilation environ deux cens quarante troys ans” (p.86) Volonté de brouiller le discours alliacien en interpolant, par une sorte de collage, des éléments astronomiques ou hémérologiques qui ne peuvent qu’égarer le lecteur, telle cette liste de jours et de mois sans précision d’année qui coupe le second passage tout comme les éléments toponymiques intégrés en masse, puisés chez Estienne, viennent-ils “noyer” des développements proprement historiques. En fait, nous assistons à un syncrétisme entre le discours alliacien axé sur 1789 et un autre discours qui nous semble devoir caractériser l’approche réformée. Il importe de situer, avec davantage de rigueur, le propos eschatologique de l’Epître à Henri II, telle qu’elle est apparue dans les années 1590, et notamment les événements attendus pour 1792. Si pour Pierre d’Ailly, la fin du XVIIIe correspondait à l’avènement de l’Antéchrist, pour l’Epître centurique à Henri II, il convient de rappeler d’une part qu’elle ne nous est connue que dans le cadre d’une édition “réformée”, parue sous la Ligue et d’autre part qu’un tel pronostic ne saurait être attribuée à Michel de Nostredame, plus marqué par le début du XVIIIe siècle que par sa fin et par l’An 1999 - dates qui recoupent peu ou prou celles qu’adoptera au début du XVIIe siècle, dans son Accomplissement des Prophéties, un Pierre Du Moulin. Or, de quelle “Eglise chrestienne” s’agit-il dans le passage suivant ? “Et commençant icelle année sera faicte plus grande persécution à l’Eglise Chrestienne, que n’a esté faicte en Affrique, et durera ceste ici iusques à l’an mil sept cens nonante deux que l’on cuidera estre une renovation du siècle.” A notre connaissance, les catholiques n’ont pas spéculé - on ne parle pas ici de la situation avant la Réforme ni de la question de la fin de l’Islam - sur la durée de la persécution de la papauté, cela est surtout réservé aux protestants, aux XVIe - XVIIe siècles, qui se demandent précisément combien de temps ils seront persécutés par le pape antéchrist ou par le roi. Tout au plus, les catholiques envisagent-ils une brève période de 3 ans et demi durant laquelle l’Antéchrist sévira - on l’a vu pour la prophétie pseudo-malachienne qui s’achève sur une “persecutio extrema Sacrae Romanae Ecclesiae” - mais cela est sans commune mesure - la transposition joachimite 1260 jours / 1260 ans n’est plus ici de mise - avec une période de plusieurs siècle comme il ressort de ce texte, à savoir depuis “icelle année”, celle à laquelle l’Epître est censée avoir été rédigée (c1558) jusqu’en 1792, soit encore 200 ans après la parution de l’Epître autour précisément de 1592. Quoi de plus normal, au vrai, qu’une épître placée en tête de centuries annonçant une victoire réformée, du moins aux yeux de ceux qui prirent l’initiative de leur publication, use de représentations qui sont celles de leur Eglise ? On pourrait certes objecter que les délais ainsi introduits perpétuent une situation d’attente bien au delà des enjeux des affrontements qui ont lieu sous la Ligue. Mais il ne s’agit plus ici seulement de la situation du parti d’Henri de Navarre mais de la lutte à plus long terme contre la papauté. Que sous la Révolution, alors que l’Eglise catholique est en difficulté, l’épître ait paru s’appliquer à elle, ne nous intéresse guère en la circonstance. C’est en comparant avec le discours d’un Pierre Du Moulin, vers 1612, soit une vingtaine d’années après la parution de l’Epître à Henri II, que nous voyons notre lecture confirmée : un adversaire de Du Moulin ne résume-t-il pas sa position en indiquant que 1689 mettrait fin à la “persécution” de son Eglise30 ? Mais pourquoi 1689 dans un cas et 1792 dans l’autre ? Il semble qu’il y ait là quelque syncrétisme : tout se passe comme si la date alliacienne de 1789 avait été ramenée à 1689, constituant ainsi une échéance plus accessible. Le lien entre l’Epître à Henri II et certains quatrains des trois dernières centuries est assez patent. ainsi pour IX, 44 : “Migrez, migrez de Genève trestous Saturne d’or en fer se changera” qui fait écho, selon nous, au passage suivant de la fin du texte : “Et après que tel temps aura duré longuement sera presque renouvelé un autre regne de Saturne et siècle d’or (...) et (Satan) demeurera lié environ l’espace de mille ans et tournera en sa plus grande force, la puissance Ecclesiastique et puis tourne deslié.” Ce quatrain n’annonce pas des malheurs immédiats pour les réformés dont il prédit la prochaine victoire mais ne peut éviter, pour autant, de prophétiser un dernier avènement de l’Antéchrist qui verra à nouveau la persécution de l’Eglise Chrétienne. Antagonisme, en quelque sorte, entre une logique politique qui n’est pas censée laisser entendre que l’adversaire pourrait triompher et une logique eschatologique qui doit faire la part du diable. Dès lors, les mentions de dates intermédiaires - qui ne correspondent en effet pas au texte alliacien - s’expliqueraient par une récupération réformée, ce qui finalement va de soi puisque la version connue de l’épître centurique à Henri II apparaît en milieu protestant, en tête de centuries anti Guise. Le fait de délimiter un espace de temps allant de 1606 à 1792 s’apparente au discours d’un Pierre du Moulin, qui lui, rapprochera l’échéance alliacienne d’un siècle. On notera d’ailleurs au début du XVIIe siècle une certaine effervescence dont Du Moulin est précisément une des expressions les plus frappantes. L’Eglise en question est bien ici celle des évangélistes et non celle de Rome. Inutile de préciser que de tels calculs diffèrent sensiblement de ceux établis par Michel de Nostredame. Conclusion Dans le cas des deux passages issus l’un d’un Eclipsium, l’autre d’un Ephemeridum, l’on peut raisonnablement supposer qu’il ait pu effectivement existé des Significations sur l’éclipse du 16 septembre 1559, parus à cette époque mais nous pensons que les exemplaires qui nous sont parvenus ont subi des modifications, notamment par l’interpolation maladroite d’un passage de l’Eclipsium de Leovitius relatif à une supposée conjonction Mars-Antarès en Sagittaire et en Maison VIII annonçant la mort violente d’un prince. On aura voulu créditer Michel de Nostredame d’un tel succès prévisionnel. En ce qui concerne le passage concernant 1606 au sein de l’Epître à Henri II, il s’agit, bien évidemment, aussi d’une interpolation, également assez maladroite. En effet, il est étonnant qu’une telle série de positions planétaires ne soit pas signalée en rapport avec l’année correspondante, à savoir 1606. Tout se passe comme si l’on avait récupéré une telle série en un lieu où l’année 1606 était nettement indiquée et que par inadvertance on ait oublié de le signaler. Il semble en effet exclu qu’une telle bévue ait pu se produire si l’Epître avait été d’un seul tenant. La présence de l’année 1606, rajoutée à l’année 1585, ne suffit guère à éclairer le lecteur sur la raison d’être des dites positions planétaires et on peut d’ailleurs supposer que cette addition date de l’époque où précisément 1606 a été juxtaposé à 1585, soit vraisemblablement au début des années 1590, après que l’excitation liée aux années 158031 soit retombée. Mais rappelons que le véritable enjeu concernant la thèse de la contrefaçon des Significations de l’Eclipse de septembre 1559 est d’un autre ordre : il s’agissait de disqualifier la seule et unique pièce, n’appartenant pas au corpus centurique proprement dit, pouvant témoigner de l’existence de centuries du vivant de Michel de Nostredame et qui plus est d’un texte qui aurait été rédigé par ce dernier ! Rappelons que MDN ne mentionne les Centuries ni dans sa correspondance, ni dans ses publications annuelles. Il est fort probable qu’outre l’interpolation-Antarès, il faille aussi prendre en compte l’interpolation-seconde centurie. Jacques Halbronn Paris, le 2 juillet 2003 Notes 1 Reproduite en fac-similé dans les Présages de Nostradamus, de B. Chevignard, Paris, Seuil, 1999. Voir nos observations in Documents inexploités sur le phénomène Nostradamus, Feyzin, Ed. Ram-kat, 2002, pp. 29 et seq. Retour 2 Diffusé par les Presses Universitaires du Septentrion, 2002, dont le IIIe volet, qui comprend l’essentiel de nos études consacrées au corpus nostradamique, dans notre thèse d’Etat, sera bientôt en ligne, sur le Site Nostredame.chez.tiscali.free.fr. Retour 3 Voir ses études sur le Site Nostredame.chez.tiscali.free.fr. Retour 4 Cf. BNF Reserve V 1820 Resaq. Retour 5 Cf. nos travaux sur Antarès, étoile fixe constituant avec Aldébaran un axe majeur, à la rubrique Astrologica in Encyclopaedia Hermetica et notamment “Epistémologie des aspects astrolo-giques”. Retour 6 Voir Lettre XVIII de Lorenz Tubbe à Nostradamus, J. Dupèbe, Intr. Et trad. Lettres Inédites de Nostradamus, Genève, Droz, 1983. Retour 7 Lettre de Bourges datée du 1er décembre 1560" (Trad. Bernadette Lecureux, p. 91 in R. Amadou, dir. L’astrologie de Nostradamus, dossier, Poissy, ARRC, 1992. Retour 8 Voir sur 1606 dans les Ephémérides de Leovitius, Christian Wöllner Das Mysterium des Nostra-damus, 1926, p. 29. Retour 9 Cf. Prédictions des choses mémorables, op. cit. Retour 10 Cf. Prédictions mémorables, op. cit. p. 70. Retour 11 Or, Nostradamus aurait avancé à plusieurs reprises la date de 1607 mais sur quelles bases ? Voir Chomarat, “De quelques dates dans les prophéties de Nostradamus”, in Prophètes et prophéties au XVIIe siècle, Paris, Cahiers V-L. Saulnier, 15, Presses de l’Ecole Normale Supérieure, 1998. Retour 12 En fait l’année 1547 conviendrait mieux à cette description, mais Nostradamus ne parle-t-il pas du futur ? Retour 13 Voir Prunier, “Nostradamus et l’année 1606”, Cahiers astrologiques, n° 202, Paris, 1980, p. 15, concernant la ponctuation de cette phrase et le statut de “suivant” qui devient pour lui “suivent” ; P. Brind’amour, Nostradamus astrophile, Ottawa, Presses de l’Université d’Ottawa, 1992, aboutit aux mêmes conclusions. Retour 14 P. Brind’amour (op. cit.) attribue le mode de lecture des éphémérides à Michel de Nostredame en personne. Retour 15 Il semble en fait, comme l’a montré P. Brind’amour (op.cit.), que l’auteur n’a pas accompli toutes les interpolations nécessaires et se serait contenté de recopier telles quelles les données figurant dans les tables astronomiques, pour une heure arbitrairement choisie. Retour 16 Cf. M. Screech, Ed. de Rabelais, La Pantagruéline Pronostication, Genéve, Droz, 1980. Retour 17 “Ephemeridum a capite anni (...) DXXXII in alios XX proxime subsequentes” (sur vingt ans, à partir de 1532, Screech cite notamment une édition parisienne, chez Galiot Du Pré de 1533, Bodleian Library (Oxford), l’Ephemeridum de Leovitius fait en quelque sorte suite à celui de Stoef-fler. Retour 18 Le fait de ne pas citer les luminaires qui, eux, n’ont pas de rétrogradation aurait pu mettre sur la voie. Retour 19 Voir Prunier, op. cit. pp. 14 - 15, qui signale quelques anomalies. Retour 20 Repris par E. Tabourot, en 1588. Voir sa notice dans notre CATAF, sur le Site Cura.free.fr. Retour 21 A Paris, F. Bourriquant, pp. 46 et seq, BNF, 8° Lb35 846. Retour 22 NDE : Les Contredits de Couillard, bien que publiées en 1560 avaient déjà été composés en 1555 (fol. 100r). Voir notre article dans cette même rubrique, “Les premiers garants de la pu-blication des Centuries de Nostradamus ou la Lettre à César reconstituée”. Retour 23 Cette différence de date - 1547 au lieu de 1557 - est considérée par Ruzo, Testament de Nostra-damus, Monaco, Le Rocher, 1982, pp. 84 - 85, comme une marque des éditions d’Avignon. Il est possible que celles-ci aient en effet servi pour la confection d’éditions des années Quatre-Vingt et que l’Epître à Henri II ait été conservée telle quelle, tandis que les quatrains, quant à eux, étaient largement remplacés. Voir aussi J. Halbronn, “Récentes bibliographies autour de Nostrada-mus”, Politica Hermetica, 5, 1991. Retour 24 Il y a là un problème de calendrier pour des dates situées dans les mois de janvier, février et une partie de mars, en raison de la fixation du Ier de l’an en janvier dans la seconde partie du siècle, ce qui pourrait aboutir à l’ajout d’un an. Retour 25 Cf. La Hierusalem céleste, s. l. n. d., BNF. Retour 26 Cf. Théo Van Berkel “The second biblical chronology in the Epistle to Henry II”, Site Nostre-dame.chez.tiscali.free.fr. Retour 27 Voir Halbronn, “Pierre d’Ailly: des conjonctions planétaires à l’Antéchrist”, Bulletin de la Société Historique de Compiégne, 1993, et “Exégèse prophétique de la Révolution Française”, Politica Hermetica, 1994. Retour 28 Voir E. Labrousse, L’entrée de Saturne au Lion. L’Eclipse du 16 août 1654, La Haye, Nijhoff, 1974. Retour 29 Cf. “Newton et l’école précessionnelle française”, Site Cura.free.fr. Retour 30 Voir Halbronn, “Pierre du Moulin et le thème du pape Antéchrist”, Formes du millénarisme, à l’aube des temps modernes, Paris, Champion, 2001. P. Jurieu usera également de la formule dans le titre de l’Accomplissement des prophéties (…) ouvrage dans lequel il est prouvé (…) que la persé-cution présente peut finir dans trois ans & demi, Rotterdam, 1686, BNF, D2 3822 (1,1). Retour 31 Cf. “Exégèse prophétique de la Révolution Française”, Colloque Prophétisme et politique, Politica Hermetica, 1994. Retour ________________________________________