Etudes de Critique biblique, astrologique nostradamiquej et linguistique.
lundi 23 août 2021
jacques Reverchon Valeur des jugements et pronostics astrologiques
Valeur des Jugements et Pronostics Astrologiques
(Value of the Astrological Judgements and Forecasts)
par Jacques Reverchon
Value of the Astrological Judgements and Forecasts
(for the English version: see below)
Note P.G.: Cette brochure recherchée et devenue introuvable, a été publiée à Yerres (Essonne) en juillet 1971. La partie française est rééditée au format Texte, et la partie anglaise au format Image. Ce document, à l'appui et en illustration de l'article de l'historien Jacques Halbronn publié simultanément sur ce site, analyse les prévisions astrologiques faites dans les années 60 par l'astrologue André Barbault. On ne sera pas surpris de constater que le bilan de l'astrologie prédictive, prévisionnelle, "expérimentale", conjoncturelle, ou quel que soit le nom dont elle se dote, soit quasi nul, compte tenu des postulats de cette école, tentant de cerner l'événementiel à l'aide d'outils inadéquats. Comme je l'ai signalé dans mon Manifeste, c'est faire fausse route et desservir la cause de l'astrologie que de s'obstiner à rechercher ce qui n'est pas à sa portée, même si d'autres études de nature prospective, avec des techniques autres, ne parviennent pas, souvent, à de meilleurs résultats. La tendance prédictive, à l'opposé de la compréhension, individuelle ou collective, a été et reste, au vu de la production internationale de ces dernières décennies, la Circé des astrologues et des apprentis. On pourrait, semble-t-il hélas, pour qui aurait le temps et l'intérêt à leur consacrer, répéter ces analyses comparatives avec des matériaux plus récents, au besoin avec des auteurs différents, sans que les constats et conclusions de cette étude doivent être remaniés. Barbault en mai 1968
Note Scriba Revocatus (juillet 2004):
Foin des boniments et bobards! M. Barbault s'entête dans un article posté sur son récent site, dénie le fiasco de ses prédictions pour les années 60, comme d'ailleurs pour bien d'autres qui suivront, mais semble en revanche avoir compris qu'il importe peu qu'on se trompe presque à coup sûr, pourvu qu'on puisse rattraper la sauce a posteriori auprès d'un lectorat crédule, enclin à oublier très vite le passé, tout en maintenant une curiosité malsaine et jamais assouvie pour un avenir auquel il se croit destiné. Autrement dit, dire qu'on n'a pas dit ce qu'on a dit, et écrire qu'on a écrit ce qu'on n'a jamais écrit, font sans doute partie de l'arsenal de l'adepte du "grand art conjonctural", ou conjoncturel - on s'y perd.
M. Barbault voudrait faire croire aux jeunes générations qui ne peuvent plus se procurer son livre, et qu'on avait déjà du mal à se procurer dans les années 70 car il avait été rapidement soldé ou pilonné, que le pauvre Reverchon (lequel est un des rares astrologues d'une certaine envergure à n'avoir pas eu "l'honneur" d'une notice nécrologique dans le journal L'Astrologue), aurait été le seul à mal déchiffrer en 1971 les "nuancées" analyses du maître ès prédiction. Mais c'est oublier Alain Yaouanc (alias Hadès, in Cahiers Astrologiques 135, 1968) et Michel Gauquelin avant lui ("Qui est M. André Barbault?", in Cahiers Astrologiques 117, 1965) qui montrent à quel point "notre Trarieux d'Egmont d'après-guerre" (Cahiers, 117, p.217) s'est leurré sur les cas Kennedy et Khrouchtchev, Thorez, Togliatti, comme sur la plupart des autres. A quoi Barbault répond, d'abord par une bordée d'injures, puis que l'année 1965 n'est pas écoulée, évocant "la perspective d'une nouvelle crise mondiale s'étalant de 1965 à 1971" (ibid., p.227).
Loin de reconnaître ses bévues, Barbault reconduit sa prophétie apocalyptique pour le début des années 80: "1982 et 1983 se présentant comme les années les plus critiques du siècle! (...) 1981-1984 risque d'être la troisième tache noire du siècle où la mort triomphera de la vie, quels que soient les aspects sous lesquels elle sévira." (in "La loi fondamentale de l'astrologie mondiale", L'Astrologue 28, 1974), aussi traduite et propagée en anglais : "We await the risk of an important world crisis in 1982-83" ("The foundations of mundane astrology", in Kosmos 6.4, 1974, p.26).
Les années qui suivront verront la perspective d'un cataclysme mondial s'amenuiser dans l'esprit du futurologue, et ses déclarations se faire moins tonitruantes et de moindre conséquence, bien que tout aussi erronées. Qu'on en juge par ces cinq ans de "prédictions" glanées dans le journal L'Astrologue (97-117, Janvier 1992 à Janvier 1997).
L'Astrologue 98 (1992, pp.108-109): prévision d'un tandem Bérégovoy/Delors (ou Delors/Bérégovoy?) aux élections présidentielles de 1995 : "Jacques Delors porte un flambeau conjoncturel qui le dote d'un pouvoir d'accession à une assez prochaine nomination suprême de sa carrière politique... Mais ces deux mêmes astres [Uranus et Neptune] passeront sur le Jupiter de Bérégovoy à 26° du Capricorne sur les années 1995-1997. Qui sait si...?"
28 mars 1993 : défaite des socialistes aux législatives
29 mars 1993 : démission du gouvernement de Pierre Bérégovoy
29 mars 1993 : Edouard Balladur nommé 1er ministre
1er mai 1993 : Bérégovoy se suicide à Nevers
7 mai 1995 : victoire de Jacques Chirac aux présidentielles
L'Astrologue 99 (1992, p.164): Menaces sur Fidel Castro? : "Le dictateur de Cuba ne risque-t-il pas tout simplement d'être renversé l'année prochaine?"
Sans commentaire.
L'Astrologue 99 (1992, p.171): Ombre sur la famille royale britannique: "Ne faut-il pas s'interroger sur la possibilité - le point commun MC-Soleil entre mère et fils étant concerné - d'une transmission du pouvoir royal?"
Sans commentaire.
L'Astrologue 105 (1994, p.2): Un retour de la monarchie en Bulgarie? [pour 1995]
Sans commentaire.
L'Astrologue 106 (1994, p.72): La paix Israélo-Palestinienne : "Le chemin vers une paix réelle devrait ainsi se poursuivre jusqu'à une normalisation prévisible pour le trigone Saturne-Pluton de 1997."
Sans commentaire.
L'Astrologue 106 (1994, p.97) : Paix dans l'ex-Yougoslavie [pour oct-nov. 1994]
Sans commentaire.
L'Astrologue 112 (1995, p.30) : Elections anticipées et nouvelle cohabitation "inverse à celle du duo antérieur Mitterrand-Chirac" pour le début de l'année 1997
Décès de François Mitterrand le 8 janvier 1996.
L'Astrologue 117 (1997, p.36) : Une forte reprise économique: "Le retour ascendant du cycle Jupiter-Saturne avec la remontée de l'indice laisse augurer une reprise de l'expansion économique, voir le climat d'un grand boom."
Crise asiatique de 1997.
Se leurrer ainsi avec une inquiétante régularité est déjà dommageable pour la cause de l'astrologie, et ravira les railleurs. Mais plus grave est de présenter cette sous-littérature de la prévision politique et événementielle comme une pratique légitime de l'astrologie. Dans le numéro 128 de L'Astrologue, à la page 27, André Barbault glisse quelque recette de son cru, et rapporte à l'astrologue l'art de faire de la bonne cuisine. Ça commencerait, paraît-il, avec l'habilité à réussir la sauce. Espérons pour au moins quelques lecteurs qu'elle n'aura pas pris, avec ou sans grumeaux, et qu'ils auront pu échapper à l'indigestion!
Valeur des Jugements et Pronostics Astrologiques
Cet essai est dédié à tous ceux qui estiment encore que l'astrologie est une chose sérieuse, qui du moins peut, à l'occasion d'un phémomène étrange et difficile à interpréter [i.e. la relation statistique entre une définition particulière de l'état céleste lors d'une naissance humaine, et la structure, le comportement original de l'individu ainsi venu au monde], ouvrir des perspectives neuves sur les relations fondamentales entre l'homme et certaines structures fines de son milieu naturel. Ce pourquoi elle ne devrait pas être ravalée au rang de jeu de société et de passe-temps pour dilettantes, comme s'y emploient quelques rivaux de Mme Soleil.
Du temps où on pouvait espérer un proche et authentique renouveau des recherches sur ce terrain, H. Selva écrivait :"Lorsqu'on discute des preuves que l'on peut apporter à l'appui de la croyance que les astres exercent une influence sur les êtres vivants, l'adversaire profane croit généralement trancher la question ... en disant: "annoncez-moi un fait aussi simple que vous voudrez, mais qui devra se réaliser à la date précise que vous m'indiquerez; et je croirai à l'astrologie".
Selva concluait :"Cette manière d'envisager le problème peut paraître décisive; au fond, elle est singulièrement déraisonnable ". (Quelques considérations sur la véritable portée des prédictions astrologiques, Paris, Vigot, 1918, p.5). Constatation à la portée du reste de tout esprit réfléchi, même quand on se veut plus radical, moins prudent que Selva, pour qui il était "manifestement" absurde d'imaginer que le déterminisme astral soit seul à régir le cours des événements", - le facteur astral se composant selon lui avec différents facteurs terrestres (ibid., p.33-34; cf les piètres rêveries pseudo-psychanalytiques évoquant "la grande figure du ciel ... reflet extérieur de nos propres évolutions" - ou "quelque accord de l'horloge sidérale" favorisant électivement les initiatives sublunaires ?).
Et pourtant, il s'est trouvé naguère un astrologue, l'un des plus considérables quant au poids du papier imprimé à son nom, pour inviter quelques-uns de ses confrères à un ridicule tournoi prévisionniste, prétexte pour lui à un surcroît de publicité.
Comme il ne s'agit plus ici d'un quelconque " adversaire profane", mais de quelqu'un qui se présente comme un spécialiste averti, il devient indispensable de ré-étudier les conditions sous lesquelles une preuve par la datation et la description d'un fait serait réellement recevable.
Trois types de tests peuvent être envisagés:
I - définition de la structure d'un individu et des particularités de sa carrière, d'après son horoscope ;
II - détermination par le même moyen de l'époque (et de la nature) des événements marquants de l'existence ;
III - prédiction des fluctuations générales (atmosphériques, telluriques, politiques, économiques), en fonction des configurations et révolutions sidérales.
En ces trois domaines, les modernes conjectures astrologiques, sans être aussi sybillines que celles de Nostradamus, s'entourent presque toujours d'un halo d'imprécision et gardent une ambiguïté, une plurivalence surtout, qui leur laissent toutes chances d'échapper à des fiasco trop flagrants, pour peu que le censeur soit indulgent, sans perspicacité, voire seulement inattentif.
- Par exemple, les appréciations couramment émises sur le caractère, par des astrologues sans compétences véritables en psychologie, restent assez vagues et disparates pour ne se laisser réduire à aucun des portraits typologiques classiques, et par suite ne donner prise à aucun constat formel d'échec expérimental.
- De même, il est rarissime que l'annonce d'un événement comporte une singularité, un détail spécifique qui, en identifiant assez péremptoirement le fait, puissent rendre ensuite la prévision très convaincante. Or, celle-ci concerne le plus souvent des accidents vraisemblables a priori, fort communs et dont la fréquence (et la probabilité) sont logiquement grandes; sa réalisation pouvant donc vérifier une simple extrapolation à partir d'informations très terrestres.
- Enfin, la prédiction des météores, cataclysmes et autres pertubations à l'échelle mondiale, jouit évidemment d'une très large marge d'ajustement et d'approximation quand elle ne s'assigne pas de strictes limites dans le temps et dans l'espace : de tels phénomènes se produisant chaque année en un point ou l'autre du globe.
De cette analyse préalable, il ressort que les risques de prendre pour preuve ce qui ne serait qu'analogie contestable ou concordance fortuite entre le fait observé et la supputation astrologique, sont constamment très importants.
- Mais comment évaluer objectivement l'efficacité des méthodes astrologiques, par exemple en astrologie dite mondiale ?
En examinant l'accord plus ou moins satisfaisant entre le processus historiquement enregistré dans une période donnée, et la description qu'en avait pu fournir d'avance l'astrologue. En tant que corrélation globale, et non comme convergences sur tels points particuliers qui pourraient être choisis pour les besoins de la cause, ou retenus de bonne foi comme frappants, sans souci suffisant au contexte.
Bien entendu, il ne saurait s'agir de confronter une simple nomenclature des faits (trop touffue et ne respectant pas l'échelle des valeurs), aux intuitions ou déductions de l'astrologue qui en principe s'appliquent aux tendances prépondérantes, aux incidents marquants.
Du moins pourrait-on exiger qu'à tout "temps fort" relevé dans les annales (d'après les comptes-rendus synoptiques, annuels et mensuels, publiés dans certaines revues comme Le Spectacle du Monde, ou les chronologies dressées par les historiens), corresponde une conjecture catégorique, - et vice-versa -.
D'autre part, pour reconstituer avec le maximum d'impartialité le message du devin, on se fondera principalement sur les sous-titres et les accentuations qu'il a placés dans son texte.
Dès lors, l'efficacité de l'astrologue et de ses procédés pourra se juger :
- d'après le nombre des concomitances relevées entre les deux ensembles descriptifs, proportionnellement au nombre total des assertions notables de l'astrologue pour la période en cause ;
- d'après la qualité de ces concomitances, c.à.d. la véracité relative du commentaire astrologique dans chaque cas.
Autrement dit, il faut établir :
1°) les chronologies parallèles des péripéties principales,
A - d'après Le Spectacle du Monde ou une oeuvre historique citée ;
B - selon les alinéas significatifs de l'oeuvre prédictive, avec référence aux sources.
2°) la comparaison entre la nature des faits enregistrés et celle des tendances annoncées, quand une convenable coïncidence d'époque est observée.
Hors d'une telle critique systématique des présomptions astrologiques, on ne peut espérer aboutir à aucune conclusion défendable (surtout si l'astrologue se fonde sur des circonstances célestes qui se répètent fréquemment, tout en visant - sans aucun contrôle statistique - l'ajustement à des péripéties terrestres aux contours mal définis, ayant de multiples occasions de se
produire ici ou là, dans un monde mouvant et instable : "pulsions pacifiantes" ou menaces de "crise", entre autres).
A titre d'exemple, une investigaton de ce genre a été appliquée ici à deux séries prévisionnelles qui chacune forment un tout, l'une pour le thème, l'autre pour l'intervalle de temps concerné. Il s'agit des pronostics sur le déroulement - et surtout sur le dénouement - de la guerre d'Algérie (Cahiers Astrologiques, du n° 75, VII-VIII 1958, au n° 91, III-IV 61), et de La Crise Mondiale de 1965 (Paris, Albin Michel, 1963), - deux ouvrages du populaire André Barbault.(1)
(1) Barbault s'est principalement illustré en tant que créateur d'Ordinastral, puis de l'entreprise internationale baptisée Astroflash. Cette dernière promet, à partir de 5 facteurs seulement de l'horoscope, une analyse strictement personnelle du caractère en profondeur, et la prédiction de l'avenir pour six mois.
Si de telles performances pouvaient réellement s'accomplir avec une information aussi mince - voire sans la connaissance de l'heure natale -, nul doute que l'astrologie eut été prouvée depuis longtemps ? Mais on connaît du reste les conclusions, à la fois instructives et cocasses, de l'enquête menée par Michel Gauquelin à propos de cette affaire d'astrologie électronique : "L'Astrologie parée d'I.B.M.", Science et Vie, n° 611 (VIII 1968), p.80-89.
La guerre d'Algérie
En voici les étapes essentielles, notamment d'après le memento de Jean Delorme (professeur à la Faculté de Toulouse), P.U.F., 1967 :
- (Fin de la bataille de Dien-Bien-Phu le 7 V 1954) ;
- début de la guerre le 1er XI 1954 ;
- (chute de Mendès-France le 5 II 1955) ;
- (fin du protectorat français au Maroc le 6 XI 1955) ;
- (fin du protectorat français en Tunisie le 20 III 1956) ;
- Sécession d'Alger le 13 V 1958 ;
- ministère de Gaulle le 31 V 1958 ;
- constitution de la Vème République le 28 IX 1958 ;
- élection de de Gaulle à la présidence de la République le 21 XII 1958 ;
- offre de l'autodétermination à l'Algérie par de Gaulle le 16 IX 1959 ;
- semaine des Barricades à Alger du 24 au 31 I 1960 ;
- début de la conférence d'Evian le 20 V 1961 ;
- accords d'Evian le 18 III 1962 ;
- referendum les ratifiant en France le 8 IV 1962 ;
- indépendance de l'Algérie le 1er VII 1962 .
Et voici comment l'astrologue a pressenti l'épilogue du processus engagé, par retouches successives : (n° 75 à n° 91 des Cahiers Astrologiques)
- Fin de la guerre d'Algérie pour la Toussaint 1958 (28 X à 7 XI) ;
- courant discerné pouvant se concrétiser par un paix négociée entre février et mai 1959 ;
- configurations pacifiantes vers 18 XI et 5 XII 1959 ;
- relance des négociations autour du 15 II 1960 ;
- idem vers le 6 V 1960 ;
- armistice suggéré entre 20 VI et 16 VII 1960 ;
- vagues pacifiantes vers 20 III 1961, 10 IV 1961, 28 V 1961, 20/25 IX 1961 ;
- et, puisque tout a une fin (y compris les meilleures plaisanteries) :
vague plus imposante au début de 1962, dans la 1ère décade de février.
Soit, pour environ 40 mois, 11 périodes "possibles", couvrant au total un peu plus de 7 mois ; le présage s'égrène sur près de 3 ans, suivant pas à pas le déroulement de l'affaire algérienne. A 15 jours près, 3 coïncidences de dates entre les 2 listes, de mi-septembre 58 à fin mars 62 : selon la loi binomiale, résultat très normal, de probabilité 0,26 pour p = 11/42,5 et n = 11 ; avec 2 définitions sur 3 tombant à faux quant à la qualité des effets : février 1960 et avril 1961.
- C'est ce jeu puéril que l'auteur appelle "un banc d'essai significatif", en assurant avoir signalé "pour ainsi dire toutes les dates déterminantes" du dialogue, entre 1958 et 1962.
Le procédé a été repris à propos de la guerre du Viet-Nam (10 périodes "pacifiantes", souvent d'une quinzaine de jours, proposées sur un intervalle inférieur à 4 ans et demi : entre mi-juillet 1966 et le 23 novembre 1970. (Cahiers Astrologiques, XI-XII 1965).
Cette "méthode" serait d'une candeur désarmante si elle ne visait d'évidence à frapper l'imagination d'un public crédule. Lequel, peu soucieux de rigueur en la matière, réalise mal d'ordinaire que des "mises (conjoncturales) répétées", au sujet d'une éventualité qui doit se produire relativement à court terme, selon les vraisemblances, - équivalent à augmenter la chance de
vérification par le fait d'une quelconque des échéances stipulées dans la chaîne prévisionnelle.
Dans une "expérience" comme celle de Barbault - qui s'achève forcément quand la circonstance attendue se produit -, la probabilité que l'un des jalons fixés (ce ne peut être, stricto sensu, que le dernier), corresponde à l'événement, dépend de l'ensemble des présomptions avancées ; elle est ici supérieure à 1/6 pour l'intervalle 28 X 58 -10 II 62.
Les détails de l'analyse présentée ne sont pas moins édifiants.
Ainsi (Cahiers Astrologiques, V-VI 59), Barbault annonce avec beaucoup de sagacité que si une paix négociée n'intervient pas avant l'été 1959, il y aura relance de l'action militaire - vers le 1er XI -. A la même époque, il déclare redouter une internationalisation du conflit ... si celui-ci ne demeure pas localisé entre la France - en position avantageuse vis à vis du FLN -, et l'Algérie. Il estime aussi qu'à défaut de mettre un terme à cette affaire, la Vème République et de Gaulle seraient menacés d'être balayés avant le printemps 1970 ; mais il perd l'occasion de prédire la guerre civile qui a failli éclater entre le début 1960 et le printemps 1961. La date à laquelle de Gaulle devient "l'artisan (pas du tout) involontaire de la libération de l'Algérie" (cf Cahiers Astrologiques, n° 72), à la fin de l'été 1959, - et qui constitue le tournant capital -, est complètement ignorée du prévisionniste. Il est vraiment superflu d'insister davantage.
1964 - La Crise Mondiale de 1965 (Paris, Albin Michel, 1963)
Les pronostics relatifs à 1964 forment en quelque sorte l'introduction à "La Crise Mondiale de 1965", qui était appelée à se développer jusqu'en 1971 ? (p.176).
Ces pronostics comportent déjà, en quelques pages, un lot de bourdes de haute graisse dignes de marquer dans la carrière d'un praticien :
- Kennedy "a de fortes chances d'être reconduit à la présidence aux élections de novembre 1964" (p.88), tandis que Khroutchev "restera au pouvoir pendant toute cette période historique", soit d'octobre 64 à décembre 66 (p.103), ce qui permettait d'augurer "la poursuite du dialogue des deux K".
Or Kennedy a été assassiné en novembre 63 et Khroutchev a été brusquement évincé du pouvoir en octobre 64.
- De Gaulle : "le gaullisme en perte de vitesse, allant sur sa fin dès le printemps 65" (p.140-144) ; "départ du président de la République par maladie ou accident au cours de l'année 1965".
Or, de Gaulle a été réelu en décembre 65 malgré le ralliement du P.C. à la candidature de son concurrent Mitterrand, et on n'a pas oublié le raz-de-marée gaulliste de 1968 ("la chambre introuvable", seconde édition).
- Pompidou : "son avenir politique au delà de 1965, très improbable ; ses chances sont minimes" (p.158). Depuis...
- Thorez : "temps d'opportunités nouvelles et renflouement de puissance au printemps 1964". En fait, mort en juillet 1964 après plusieurs mois de déclin physique inexorable.
- Duclos, au contraire, "est (alors) menacé d'une proche retraite". Tout se passe comme si les horoscopes des deux leaders communistes s'étaient trouvés par mégarde intervertis? (Duclos a été candidat aux présidentielles contre Pompidou et sa verdeur s'est encore récemment manifestée dans un face-à-face télévisé).
- Mollet : son redressement politique, qui devait se donner "plein cours en 1965", - sans doute parallèlement à l'effacement de de Gaulle ? -, est passé totalement inaperçu (et pour cause).
- Harold Wilson : devait être touché en 1963-64 par configuration dépressive, compromettant son avenir politique. En réalité, les travaillistes ont remporté les élections en Grande-Bretagne (Octobre 64).
- Ehrard : influences favorables en 1964, mais "menaces de chute à partir du printemps 1965". Ce nonobstant, Ehrard a été réélu chancelier en octobre 1965.
- Nasser : "quelques progrès en 1964, ... mais tout risque d'être remis en question en 1965 ?". Or, c'est en mars 1965 que Nasser a été élu président de la République. Trois jours après mourait l'ex-roi Farouk; la prédiction concernait peut-être ce dernier, par quelque "transfert" ?
- Nehru : "bilan d'échec entre printemps 1964 et printemps 1965". Ce bilan n'a pas eu besoin d'être établi, Nehru ayant encouru un échec personnel définitif dès mai 1964 (date de sa mort).
- Hassan II, Franco, auraient affronté des "échéances très critiques", pour leur personne ou leur pouvoir, le premier dans la seconde quinzaine de février 1964, le deuxième au printemps et à l'été 1965. La presse s'est montrée d'une discrétion absolue à cet égard ?
Les appréciations générales sur l'évolution de la situation dans le monde sont d'une justesse de ton non moins stupéfiante.
- Ainsi, André Barbault insiste lourdement (titres de chapitres) sur le contraste entre la grandeur (actuelle) des USA, - pour la richesse, la puissance et le prestige -, et leur proche décadence, leur éclipse au profit de l'URSS, appelée par son "grand essor économique" à devenir entre 1965 et 1969 "la première force planétaire".
C'était là le défi de Mr. K. ("battre l'économie américaine avant la fin de 1970"), c'est aussi le pari de Barbault. Malheureusement pour eux, en 1971, le produit national de l'URSS dépassera de peu la moitié seulement du produit national des USA - une légère erreur d'appréciation, d'environ 500 milliards de dollars -. (Valeurs Actuelles, n° 1791, p.25).
- La Chine nouvelle (i.e. populaire) a manifestement manqué de prendre le "tournant ultime" (?) qui lui était solennellement assigné entre avril 65 et février 66 (après une "heure cruciale" d'une durée de 10 semaines, entre mi-mars et fin mai 65); elle ne s'est donc pas retrouvée avec Washington et Delhi au "carrefour" situé au "niveau de la prochaine conjoncture internationale" (p.112) : expansion dynamique de la révolution chinoise (hors frontières ?), les choses se gâtant en Inde, notamment autour du 1er IV 65 ?
En fait, Pékin s'est borné à faire exploser sa 2ème bombe atomique, le 14 V 65. (La révolution culturelle n'a commencé qu'en VIII 66).
- A. Barbault envisageait clairement (p.130) l'entrée de l'Angleterre dans la communauté européenne, avec départ corrélatif de de Gaulle en 1965 (p.132). Selon lui, le train Europe, "remis en marche en avril-mai 1964" ?, après s'être orienté vers "une destination critique vers juillet 65" ?, devait "filer à toute allure, à la satisfaction de tous les voyageurs, à partir de juillet 66" ? - début d'une intégration supra-nationale des pays à l'Europe" (p.136).
Cette esquisse lyrique s'avère sans rapports aucuns avec la réalité observée.
- "L'effervescence dans le Tiers-Monde" devait affecter l'Afrique du Nord, spécialement le Maroc d'Hassan et la Tunisie de Bourguiba. Pourtant, c'est l'Algérie de Ben Bella (renversé en juin 65) qui en a éprouvé quelques effets mineurs, tandis qu'Hassan faisait plus figure de chasseur que de gibier (enlèvement de son adversaire Ben Barka en octobre 65).
- La république Sud-Africaine célèbrerait "son 4ème et (soi-disant) dernier anniversaire sous la (sinistre) éclipse du 30 V 65". En foi de quoi, elle continue, 6 ans après, à se bien porter.
- A Cuba, Castro a très bien surmonté le déclin qui devait le frapper entre novembre 64 et mars 65. Pour sa part, le président du Brésil n'a eu aucune peine à éviter "son élimination entre octobre et fin 65", car c'est justement fin octobre que le maréchal Branco, installé depuis la chute de Goulart en avril 64, a pris les pleins pouvoirs. Mais le présage s'appliquait peut-être à Goulart, avec une erreur d'un an et demi ?
- Par contre, la révolution congolaise (déchéance de Tchombé, puis de Kasavubu) en octobre-novembre 65, les putschs en Indonésie (X 65), l'attentat contre le Chah (IV 65), ont été superbement dédaignés par l'astrologue.
- Rien non plus au sujet de l'indépendance de la Rhodésie (novembre), qui souleva des passions dans plusieurs pays africains, provoquant la rupture des relations avec Londres (décembre 65).
- Quant à Israël qui, "après de rudes difficultés en 1964, aurait la possibilité d'en finir (?) en 1965", trois faits seulement sont à retenir:
- la decision de Bonn de ne plus livrer d'armes à Israël (février);
- l'établissement de relations diplomatiques entre Bonn et Israël (mars);
- le succès d'Echkhol aux législatives israéliennes (octobre).
De manière plus systématique, on recense en 1965, sur 146 journées mémorables citées dans Le Spectacle du Monde (p.14-19, N° de I 66), 105 événements assez symptômatiques à divers titres, qui seront énumérés ci-après dans l'ordre chronologique.
Aucun d'eux d'ailleurs n'atteint la dimension d'un fait de grande portée : en tous domaines, on observe la continuité ou le conservatisme, - rien qui évoque une nouvelle "crise mondiale" (p.24), une grande flambée (p.56) ou un bouleversement universel se déroulant à partir du printemps 65 (p.85).
On remarquera pourtant que, dans cette année banale, on peut dénombrer sept événements pouvant être regardés comme l'expression d'une "pulsion pacifiante", et quatorze assimilables à des crises à retentissement international. Une proportion qui paraît assez logique en général, et qui donne à penser sur les chances de tomber à peu près juste, offertes en toutes circonstanes (sur ce plan) à tout prévisionniste même sans talent spécial, pourvu qu'il soit tant soit peu astucieux.
2 I L'Indonésie quitte l'ONU.
24 I Mort de Churchill.
27 I Khanh reprend le pouvoir à Saïgon.
28 I Mort de Weygand.
6-7 II Arrivée de Kossyguine à Hanoï, via Pékin. Début des bombardements du Nord-Vietnam
par l'aviation américaine.
11 II Bonn cesse de livrer des armes à Israël. Mgr Duval et le clergé d'Alger choisissent la
nationalité algérienne.
12 II Création en Mauritanie d'un groupement d'Etats francophones.
15 II Bonn cesse son aide à Nasser.
17 II Indépendance de la Gambie (ex-Guinée Britannique).
21 II Fièvre à Harlem, assassinat de Malcom X.
27 II Démission du gouvernement hollandais.
28 II Décès du président de la République Autrichienne.
7 III Marche des Noirs en Alabama, et répression.
9 III Mobilisation de la RAU contre les biens de l'Allemagne Fédérale.
14 III Nasser élu président de la République. Succès péroniste massif aux élections argentines.
17 III Mort de Farouk.
18 III Lancement de Voskhod II, marche d'un des pilotes dans l'espace.
19 III Nationalisation des compagnies pétrolières en Indonésie. Mort du chef de l'état roumain.
22 III Accord France-URSS au sujet du SECAM.
23 III Lancement de Gemini III.
30 III Rencontre Chou-en-Lai / Ben Bella.
8 IV Fusion des 3 exécutifs dans l'Europe des Six.
12 IV La France refuse d'admettre le contrôle du Parlement européen sur le budget de la
Communauté Agricole.
17 IV Première usine d'uranium en RAU.
21 IV Prolongation de l'aide à l'Algérie pour 3 ans.
23 IV Licenciement chez Bull-France.
25 IV Putsch manqué à St Domingue. Agitation communiste au Vénézuela, en Colombie.
3 V Rupture Cambodge-USA.
6 V Fermeture de la mission culturelle française au Sud-Vietnam.
9 V Succès electoral de I. Smith en Rhodésie.
13 V Neuf pays arabes rompent les relations avec Bonn.
14 V Deuxième explosion nucléaire en Chine populaire.
18 V Réforme de l'enseignement en France.
21 V Etat de siège en Bolivie et en Colombie. Complot au Brésil.
1 VI Plan Ouest-Allemand pour l'Europe Fédérale.
3 VI Lancement de Gemini IV.
4 VI Les autorités ferment le lycée français d'Hanoï.
10 VI De Gaulle qualifie de Jean-Foutre les partisans de l'Europe supra-nationale.
19 VI Putsch algérien contre Ben Bella.
24 VI Rupture des relations diplomatiques du Sud-Vietnam avec la France.
28 VI Kadar abandonne la présidence du gouvernement en Hongrie.
30 VI Echec à Bruxelles des négociations sur le financement de l'Europe Agricole.
2 VII Nationalisation du commerce extérieur au Maroc.
3 VII Nationalisation du pétrole annulée au Brésil.
8 VII Démission de l'ambassadeur US à Saïgon.
13 VII Accords pétroliers franco-algériens.
15-18 VII Expériences spatiales (américaines et russes).
19 VII Arrangements commerciaux entre la Roumanie et l'Allemagne Fédérale.
20 VII Mort de S. Rhee à Honolulu.
21 VII Malraux à Pékin.
4 VIII Nouveau cabinet en Belgique.
7 VIII Le Vietcong demande officiellement le soutien de Hanoï.
8 VIII Eclatement de la Fédération de Malaisie. Victoire électorale de Tsirana à Madagascar.
11 VIII Violente émeute raciale à Los Angelès.
12 VIII L'URSS achète du blé au Canada et à l'Argentine.
22 VIII Lancement de Gemini V ; record de durée de vol.
25 VIII Cessez-le-feu au Yémen.
26 VIII Début des travaux du canal Mer Blanche-Baltique.
27 VIII Mort de Le Corbusier.
1 IX Remplacement de l'ambassadeur de France aux USA.
2 IX Fermeture par la France du consulat de Chine nationaliste en Polynésie.
3 IX Le gouvernement de St Domingue (constitué grâce à l'appui militaire des E.U.)
est reconnu par Washington et par l'Amérique latine.
9 IX De Gaulle demande la révision de l'OTAN et du traité de Rome avant 1969.
10 IX Plusieurs pays prêtent à la Grande-Bretagne pour le soutien de la livre; la France n'y consent pas.
13 IX Pertes socialistes aux élections norvégiennes.
22 IX Morts accidentelles des guides L. Terray et Martinetti.
24 IX Formation du nouveau gouvernement grec après 2 mois de crise.
30 IX Putsch manqué contre Soekarno.
1 X Série de putschs en Indonésie.
4 X Paul VI à l'ONU.
10 X Triomphe du Parti de la Justice aux élections turques.
11 X Tchombé renvoyé par Kasavubu.
14 X Prix Nobel décerné à trois biologistes Français.
15 X Le Concile adopte la déclaration sur les Juifs.
16 X Arrivée du président de la RAU à Paris.
18 X Le parti communiste indonésien est interdit.
20 X Ehrard réélu chancelier.
27 X Le maréchal Branco prend les pleins pouvoirs au Brésil pour 2 ans.
28 X Enlèvement à Paris de Ben Barka.
2 XI Succès d'Echktol aux législatives en Israël.
4 XI De Gaulle annonce sa canditature à la présidence de la République.
8 XI Succès des libéraux aux élections canadiennes.
11 XI Indépendance de la Rhodésie.
17 XI Rupture de la Guinée avec la France. Pas de majorité pour l'admission de la Chine à l'ONU.
24 XI Mobotu dépose Kasavubu. Le président du Dahomey est exclu par le Parti Unique.
26 XI Une fusée Diamant lance au Sahara le premier satellite français.
5 XII Premier tour des élections présidentielles en France.
6 XII Fin du Concile du Vatican ; levée des excommunications reciproques Rome-Constantinople.
Accroissement des crédits militaires en URSS.
9 XII Remplacement de Mikoyan (70 ans) à la tête de l'Etat soviétique.
Mitterrand élu président de la Fédération démocrate et socialiste.
15 XII Rendez-vous de Gemini VI et VII réussi.
17 XII Plusieurs pays africains rompent avec Londres à cause de l'attitude
de la Grande-Bretagne envers la Rhodésie.
19 XII Réélection de de Gaulle à la présidence de la République.
- Voici maintenant comment l'astrologue paraît avoir envisagé la succession des périodes marquantes en 1965, autant qu'on puisse tirer de son texte quelques indications suffisamment nettes :
I. - vers 8 janvier (entre 1er et 15) : actes constructifs, regain d'influence de l'ONU.
II. - vers 8 mars (entre fin février et mi-mars) : entrée au "coeur de la crise", laquelle "s'étale sans discontinuer de fin février à mi-mai 1965". Ailleurs, le coeur de la crise (la même ou une autre ?) est situé entre avril et juin 65 (soit en moyenne vers 15 mai).
III. - vers 25 mars (entre 20 et 30 mars) : zone critique...
IV. - vers 1er avril (entre mi-mars et fin mai) : "heure cruciale" pour Pékin.
V. - vers 12 mai (entre 5 et 20 mai) : nouvelle zone critique...
VI. - vers 30 mai (autour de l'éclipse totale) : "carte blanche est donnée à la grande flambée, à la suite de la situation (probablement) amorcée dans la 1ère décade de décembre 64, et (probablement) relancée début 65 et surtout à partir de mi-mars" (p.56). Barbault ne fait pas allusion ici à une guerre mondiale, mais sans doute (p.85, 88, 90) à un affaiblissement spectaculaire, sinon au début d'un effondrement (économique, politique ?) des USA au bénéfice de l'URSS (p.97). Ailleurs, il parle d'une "fracture (sic) américano-européenne", d'un recul américain sur notre continent, vers mi-1965.
VII. - vers 5 août ("en été") : "phase aigüe de l'échéance saturnienne" s'étendant - pour de Gaulle -, du printemps 65 au début 66 (p.154) ; "destination critique du train Europe".
VIII. - vers 10 août : expansion soviétique (?) vers début août, puis détente en mi-août.
IX. - vers 8 septembre (entre 1er et 15 septembre): étape de métamorphose politique importante (tant dans le monde communiste que dans le monde capitaliste). Retour au climat offensif "se prolongeant jusque fin janvier-mi-février 66", rebondissement (de la crise?).
X. - vers 15 septembre : poussée soviétique (p.100).
XI. - vers 15 novembre : tournant des destinées de l'URSS, en position de force exeptionnelle ; poussée soviétique entre 6 et 19 novembre.
XII. - vers 6 décembre (entre 20 novembre et 22 décembre) : affrontements, contradictions, désordres. Moment critique...
- Barbault propose en somme pour 1965 douze étapes assez typiques malgré leur énoncé confus ; en contre-partie, on peut raisonnablement prélever, dans le compte-rendu publié d'après Le Spectacle du Monde, les 12 événements suivants qui se distinguent par leur importance relative :
A -2 janvier : l'Indonésie quitte l'ONU.
B -6 mars : arrivée de Kossyguine à Hanoï , début des bombardements du Nord-Vietnam.
C -7 mars : manifestation des noirs aux E.U.
D -14 mars : élection de Nasser comme président de la République.
E -25 avril : putsch manqué à St Domingue; agitation communiste au Vénézuela, en Colombie.
F -19 juin : putsch algérien contre Ben Bella.
G -16 juillet : plusieurs expériences spatiales aux USA et en URSS.
H -11 août : grave émeute raciale en Californie.
I -25 août : cessez-le-feu au Yémen.
J -1er octobre : série de putschs en Indonésie.
K -11 novembre : indépendance de la Rhodésie.
L -19 décembre : réélection de de Gaulle.
- Entre les deux calendriers, aucune concordance satisfaisante : Dans l'un et l'autre schéma, on compte moyennement une date marquante par mois. Soit, pour 12 épreuves et à 10 jours près - selon l'approximation suggérée par l'astrologue dans ses pronostics -, une probabilité de 8 coïncidences temporelles entre les deux listes.
On ne dénombre que 5 coïncidences de cette sorte : I-A, II-C, VII-G, VIII-H, XI-K. L'impuissance à désigner les époques saillantes de l'année est ainsi patente. En outre, parmi ces 5 coïncidences, seule II-C est à la rigueur acceptable quant à la nature des effets, malgré l'évident rétrécissement de champ du phénomène "pressenti" (?) ; I-A et VIII-H sont assez nettement des contre-sens; les deux autres sont simplement des non-sens. Le caractère de contre-sens; les deux autres sont simplement des non-sens ; les deux autres sont simplement des non-sens. Le caractère de ces 5 phases n'a donc même pas été discerné correctement, dans l'ensemble.
Par surcroît de précautions, une contre-épreuve a été effectuée. On a cherché dans la totalité des 105 événements tirés du Spectacle du Monde, les faits susceptibles d'une certaine adéquation - positive ou négative -, à ceux entrevus par l'astrologue (toujours à 10 jours près quant à la date).
I - 30 XII 64 à 18 I 65 : 2 I : l'Indonésie quitte l'ONU (-), 12 I : création d'un groupe d'Etats francophones (+)
II - 27 II à 18 III 65 : 7 III, marche des Noirs en Alabama (+)
III - 15 III à 3 IV : rien de conforme (0)
IV - 22 III à 10 IV : 30 III, rencontre Chou-en-Lai / Ben Bella (+?)
V - 2 à 21 V : 3 V, rupture Cambodge-USA (+)
VI - 20 V à 8 VI : 21 V, état de siège en Bolivie et en Colombie, complot au Brésil (+), 1er VI, plan ouest-allemand pour l'Europe Fédérale (-)
VII - 26 VII à 14 VIII : rien de conforme (0)
VIII - 31 VII à 19 VIII : 12 VIII, l'URSS achète du blé au Canada et à l'Argentine (-)
IX - 29 VIII à 17 IX : 9 IX, de Gaulle demande la révision de l'OTAN (+?), 3 IX, reconnaissance du gouvernement conservateur de St Domingue (-)
X - 5 à 24 IX : rien de conforme (0)
XI -3 à 22 XI : rien de conforme (0)
XII - 26 XI à 15 XII : rien de conforme (0)
Si aucune divination ne s'est réellement exercée, on doit trouver sensiblement autant d'affinités directes, inverses et de "coups nuls". C'est bien ce qu'on constate : 6 (+), 4 (-), 5 (0).
En toute objectivité, ce qui appert le plus sûrement de cette discussion, c'est la parfaite inanité de l'entreprise astrologique en l'occurrence. Le pronostiqueur, avec ses déclarations dramatiques, semble constamment en dehors du problème, quand il n'est pas d'aventure aux antipodes de la réalité. Son travail (221 pages) est littéralement "bon à mettre au cabinet".
- En définitive, pour les deux séries prévisionnelles, un bilan désastreux : ce qui était annoncé ne s'est pas produit, ce qui est arrivé n'était pas prévu.
Mais ce qui est plus pénible, c'est la prodigieuse outrecuidance ou l'aveuglement inquiétant du responsable qui ose présenter ses ours comme un témoignage de son éclatante supériorité technique, aux dépens de plusieurs confrères dont il dénonce les travers ("fatras d'élucubrations" chez Privat, "surabondance de prévisions" chez J. Viaud, assujettissement aux préjugés personnels chez Trarieux). Des tics dont ses propres oeuvres fournissent de multiples illustrations, dans un intarissable verbiage (et pourtant "le bon astrologue n'est pas bavard", à son gré).
- On souhaiterait du moins que ceux qui s'abusent à ce point (ou feignent de s'abuser?) sur les mérites de leurs tentatives - même après le cinglant démenti des faits : cf. Cahiers Astrologiques, n° 126, I-II 67 -, s'obligent à garder leur auto-satisfaction pour l'usage interne, et s'abstiennent de propager leurs illusions ou de faire prendre allègrement à d'autres des vessies pour des lanternes.
Car il n'est pas douteux que de telles billevesées, amplement diffusées de nos jours pour satisfaire une curiosité de mauvais aloi, contribuent puissamment à discréditer davantage encore l'astrologie auprès des esprits sensés, et par conséquent à rendre la tâche plus ardue à ceux qui s'efforcent d'établir la vérité en ce domaine.
Rappel des oeuvres citées:
H. Selva, Quelques considérations sur la véritable portée des prédictions astrologiques, Vigot, 1918, Paris.
J. Delorme, Les grandes dates de l'époque contemporaine, PUF, 1967, Paris.
A. Barbault, in Cahiers Astrologiques, Nice (XI-XII 1965) et n° 126 (I-II 1967).
A. Barbault, in Cahiers Astrologiques, Nice, du n° 75 (VII-VIII 1958) au n° 91 (III-IV 1961).
A. Barbault, La Crise Mondiale de 1965, Albin Michel, 1963, Paris.
Le Spectacle du Monde, revue mensuelle, n° de janvier 1966.
Valeurs Actuelles, hebdomadaire, n° 1791.
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