par Jacques HalBronn
Nous recevons, à la suite de notre interview avec Lisyanne Lacombe, ce mail de Mireille Petit (site Orphée-astro), disciple de l'astrologue italienne Lisa Morpurgo, auteur d'un ouvrage dont la traduction française (chez Hachette) fut couronnée en 1974 par un prix décerné lors du Colloque ISAR du Méridien (voir sur teleprovidence):
"J'aimerais vous faire remarquer en toute modestie que le Sagittaire correspond au début de la germination contrairement à ce que j'entends dans votre dialogue. A cette époque de l'année, la semence commence à s'adapter au milieu qui l'environne; la motte de terre qui la recouvre n'est plus tombe (Scorpion), mais ventre maternel (exaltation de la planète X), refuge protecteur et confortable (Jupiter), monde stimulant qui accueille le miracle de la métamorphose (Neptune). La première manifestation de vie de la semence en germination, est le mouvement tourbillonnant des cellules par lequel se développera la future plante (Neptune); l'attention se concentre sur l'activité physique, tandis que l'activité intellectuelle passe en second plan (exil de Mercure). L'adaptation au milieu est également une prise de possession, une installation; elle joint à l'inquiétude neptunienne un désir de stabilité (Jupiter, chute de Pluton).Voilà pourquoi le Sagittaire est considéré un signe "d'abondance" !
Cette façon d'associer signes et planètes-dieux nous parait, désormais, devoir être considérée avec quelque réserve. Vouloir conformer le rythme de la nature, au cours du cycle saisonnier, avec la succession des symboliques planétaires est probablement aussi vain que l'est la Théorie des Ages de J. P. Nicola, laquelle tente d'appliquer à la psychogénèse l'ordonnancement planétaire, selon une succession assez comparable. Pourquoi, d'ailleurs, ne pas appliquer ici le principe de réversibilité : on irait de la lune à Saturne puis de Saturne à la Lune, ce qui couvrirait une soixantaine d'années? L'on sait qu'avec l'âge, du fait d'une certaine décroissance, nous retombons peu à peu en enfance.... Certes, on peut toujours se prêter à un tel exercice, en forçant le trait des différents stades d'une cyclicité. On ne peut, cependant, se faire suivre, au sein même d'une même saison, une valeur jupitérienne et une valeur saturnienne - puissamment différenciées et allant symboliquement en sens inverse, par la tradition astrologique - comme le propose Mireille Petit. La sagesse veut de s'en tenir à un point de vue purement cinétique. Il est assez clair que ces deux planètes correspondent à des phases différentes ou qu'il ne faut les considérer que du seul point de vue astronomique, sans implication de signification archétypale, comme une sorte de système alphanumérique. Autrement dit, les 12 signes pourraient démarrer à partir de n'importe quel point tout comme l'on pourrait indiquer une série en se servant de l'ordre astronomique des planètes, comme ce fut selon nous le cas pour les domiciles. Un alphabet est un alphabet. Le nom des lettres importe peu, même quand il est associé à des valeurs numériques. Qui s'intéresse au fait que la lettre D vient du grec delta (dont elle est l'initiale), issu du phénicien pour désigner une porte (Délet) ou que le B vient de Bétha, "maison" dans les langues sémitiques? Aller au delà d'une simple terminologie ferait basculer dans la guématrie kabbalistique. On parlera donc ici d'un alphabet planétaire ou d'un alphabet zodiacal, applicable à tout support.
Avec Mireille Petit, interprète de Lisa Morpurgo, le problème se corse du fait du recours aux planètes transsaturniennes mais aussi transplutoniennes (X, Y); selon le principe- cher à Jean Carteret - qu'à 12 signes il faut faire correspondre 12 astres et dont J. P. Nicola ne veut pas entendre parler, s'en tenant à 10 astres. André Barbault, ouvert aux idées de Carteret, parlait à leur sujet, dans son Traité d'Astrologie Pratique, d'une octave supérieure, au delà donc du 7.
Nous avons récemment montré à quel point il importait d'évacuer du système des doubles domiciles les transsaturniennes vu que ces doubles domiciles indiquent l'idée majeure d'une réversibilité, d'un aller-retour, d'un retour d'ascenseur, d'une volonté de substituer à la cyclicité de la linéarité, de la spiralité, bref de permettre une fuite en avant, d''exil et non d'exode, de départ sans espoir de retour.
Mais il faut aussi souligner à quel point les planètes ne sont ici que des données en quelque sorte mathématiques, constituant une sorte de progression (voir la loi de Titius Bode, chère à J. P. Nicola, in Nombres et formes du cosmos). Que Jupiter indique un stade entre Mars et Saturne, d'accord, qu'il faille pour autant épiloguer sur la signification intrinsèque de Jupiter, c'est ouvrir la boîte à Pandore!
Il faut raison garder. La cyclicité astrologique doit rester simple. De quoi s'agit-il si ce n'est de la mis en adéquation d'un cycle végétal et d'un cycle minéral que les sociétés humaines prendraient pour modèle?
Ce cycle végétal est particulièrement perceptible quand on considère un arbre. Au printemps, l'arbre verdit et à l'automne, jaunir puis perdre ses feuilles. Le tronc de l'arbre - son squelette en quelque sorte- est ainsi recouvert, habillé, entouré de branches, d'un feuillage et à la fin du cycle, il en sera dépouillé, retrouvera sa nudité. Tout un programme!
L'Automne correspond au retour vers ce que nous appelons, dans le système NOA, le niveau 1, soit le solstice d'Hiver, lieu du plus grand dépouillement et étrangement célébré par l'arbre de Noël (du 25 décembre). puis avec l'Hiver, il y a déjà une recomplexification qui s'opère, encore que l'on se réchauffe grâce aux cheminées alimentées par des bûches, par des branches mortes. On parvient avec la fin du printemps à l'extrême du processus de diversification de la nature, le solstice d'été étant l'amorce de l'involution et ainsi de suite.
Maintenant, si l'on transpose tout cela au niveau du cosmos, il va falloir trouver un cycle. Or, il y a là l'embarras du choix! Toute la question sera donc de faire un choix parmi tous les candidats possibles. Or, nous savons que la plupart des astrologues - et Jean-Pierre Nicola ne fait pas exception- ont refusé de choisir, se contentant de poser certaines limites - on n'accepte pas les astres fictifs en astrologie conditionaliste (COMAC). Mais ce sont là des limites bien insuffisantes et bien timides qui n'assurent nullement la viabilité du système ainsi produit!
Selon nous, Saturne fut choisi comme matrice du cycle astronomique de référence, selon des critères forcément arbitraires, il ne restait plus alors que de ponctuer le dit cycle en conformité avec le cycle saisonnier, celui parcouru par "notre" arbre et là encore tout aussi arbitrairement. Un tel système avait l'avantage de "marcher" au sens organisationnel du terme -comme marche la constitution de la Ve République - et à partir de là il fut adopté et progressivement intégré, au cours des âges, dans les automatismes organiques des populations qui s'étaient branchées sur lui.
On relèvera évidemment le mot "arbitraire", plusieurs fois, sciemment, utilisé! Ce terme a le don de mettre mal à l'aise un grand nombre d'astrologues et même de penseurs de l'astrologie. Et c'est là que l'on peut parler, avec Bachelard, d'un obstacle épistémologique!
Nous dirons pour commencer qu'il y a des choix à faire.(voir le colloque de Marseille "Le(s) choix de l'Astrologie, 11. 11. 09, sur teleprovidence) que l'on ne peut refuser. Un astrologue qui refuserait l'idée de choix serait un bien piètre coach pour ses clients! En fait, soit l'on fait soi même un choix, soit le choix, la décision seront ou ont été dictés de l'extérieur, par d'autres. On reporte la question du choix à l'échelon supérieur ou à l'échelon inférieur. Pour notre part, il est essentiel de reporter certains choix en aval à partir du moment où le cadre a été fixé. Il est vrai aussi que nous ne sommes plus dans la situation de ceux qui ont fait ces choix en amont - car il importe que nous en prenions connaissance - mais évitons de nous projeter sur eux!
Le non-choix de la part de tant de penseurs de l'astrologie -et c'est là un trait constant de l'école française d'astrologie du XXe siècle - aura abouti à fausser totalement le parallèle entre cycle céleste et cycle végétal. En effet, l'ensemble du règne végétal est soumis à un seul et même super-cycle, déterminé par un nombre limité de paramètres, si ce n'est que c'est inversé dans l'hémisphère sud, tout en respectant le même schéma. Or, au niveau cosmique, il n'existe pas, à l'état naturel, de super-cycle de ce genre. Il aura donc bien fallu l'inventer!
Certes, il existe le cycle solaire mais on vient de voir que celui-ci sous-tendait le cycle saisonnier d'autant que sa périodicité annuelle - liée en réalité au géocentrisme - était précisément ce qui faisait problème, le but de l'opération étant de constituer un cycle d'une plus grande ampleur que l'année. (Voir nos études sur ce sujet, sur le journal de bord)
Le choix, selon nous , fut dicté par un fait très simple: Saturne était l'astre le plus lent que l'on connaissait alors parmi les planètes, il était le plus proche spatialement des étoiles fixes et qui plus est il offrait la même structure numérique que la Lune.(7/28), Saturne étant aux étoiles fixes ce que la Lune était au soleil, au niveau des conjonctions.
Pouvait-on adopter un cycle de 30 ans? C'était bien trop long! Elit-on un président pour 30 ans? La solution consista, selon nous, à couper le dit cycle en 4 et à considérer quatre périodes de 7 ans, environ, dont chacune serait vécue sur le modèle d'un cycle saisonnier complet. Autrement dit, en l'espace de 7 ans, l'on serait passé d'un solstice d'hiver au suivant : c'est l'ouroboros, le serpent qui se mord la queue. Telle serait l'unité de temps de l'Humanité.
On aura compris à quel point un tel cycle cosmique était artificiel par comparaison avec le cycle saisonnier voire avec le cycle soli-lunaire. Dont acte.
Dilemme pour la pensée astrologique! Soit accepter que l'astrologie se serait ainsi constituée "artificiellement", à l'instar d'une langue ou d'un code (dans tous les sens du terme), soit que l'astrologie aurait décrit une cyclicité cosmique ingérable de par son intrication même. On a l'impression de parler de contraception, entre les partisans du "choix' et leurs adversaires qui n'acceptent pas que l'on puisse décider de la naissance d'un enfant.
Toute l'Histoire de l'Astrologie Moderne se résout dans la façon dont une telle problématique aura été traitée, au cours des siècles, par les uns et par les autres. C'est ainsi que d'aucuns insisteront sur le fait que chaque planète, de par son nom, de par sa position par rapport aux autres (RET de Nicola), offre une tonalité différente, qui ne se confond pas avec celle des autres, d'où une entreprise de différenciation dont on peut décrire touts les dérives et qui selon nous correspond à un habillement d'un supercycle absent, au feuillage d'un arbre fantôme, d'une chair sans squelette, sans colonne vertébrale. Une astrologie invertébrée! Quel fouillis! Quelle anarchie!
Anarchie, en effet, qu'une telle représentation des choses et qui aura fait se retourner dans leurs tombes les pères fondateurs de l'astrologie en quête au contraire d'un Ordre, d'une Unité qui certes se déclinerait, se conjuguerait, mais qui réaffirmerait périodiquement son pouvoir, sa puissance (dans tous les sens de ces termes)
De tels astrologues seraient-ils ainsi victimes de ce que les Hindous appelèrent la Maya? Cette diversité du monde qu'ils s'efforcent de faire se refléter dans le cosmos n'est-elle pas autre chose que des états subalternes et passagers de l'unité, tout comme le polythéisme ne serait que la somme des avatars du monothéisme, les objets que le total des secrétions du sujet?
Nous n'avons aucune objection à ce que la pensée astrologique s'ingénie à baliser la diversité du monde à condition qu'elle reste au service d'un projet unique et unifiant centré sur une configuration-reine.
JHB
24. 11. 09
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