dimanche 11 juillet 2010

Apologie de la nouveauté en tant que ciment social

par Jacques HalBronn

On a souvent tendance à croire que la recherche de nouveauté est un facteur de division. C'est vrai à court terme, cela ne l'est pas à plus long terme.
C'est vrai, certes, au départ, puisque cela crée des tensions, des conflits, des divisions mais c'est un ciment, au bout du compte, du moins pour un certain temps, quand le groupe s'organise autour de tel ou tel courant qui aura fini par l'emporter sur ses concurrents.
Le cas de Moïse, dans la Bible, est emblématique: une nouvelle Loi va souder un peuple. Elle va aussi faciliter l'intégration des nouveaux venus qui ne seront pas en état d'infériorité par rapport aux anciens face à une nouveauté radicale.
Si l'on prend la société française, qu'en serait-il sans les nouveautés qui se sont présentées et imposées à elle, dans son ensemble et notamment au niveau technologique qui aura permis notamment aux enfants de l'immigration de ne pas trop souffrir d'un certain décalage culturel? D'ailleurs, les cybercafés sont très souvent tenus par des personnes d'origine maghrébine. Et quid de l'intégration des femmes s'il n'y avait pas eu les diverses révolutions industrielles, la taylorisation du travail "en miettes"?
Le problème, c'est que le progrès technologique a un coût au niveau de notre civilisation et il est opportun de se demander si le jeu en vaut la chandelle, ce qui est au demeurant un questionnement d'ordre écologique.
Mais il n'y a pas que dans le domaine du technologique que le progrès est souhaitable bien que plus difficile à introduire que ce qui est présenté sous le label technico-scientifique. Les réformes sociales sont plus difficiles à mettre en place que l'introduction de tel ou tel gadget.
Peut-on ainsi changer l'orthographe voire l'alphabet comme l'ont fait diverses langues au siècle dernier, comme le turc sous l'impulsion de Mustapha Kemal? Quid d'une nouvelle langue comme ce fut le cas avec l'instauration d'un Foyer Juif en Palestine - la nouveauté pouvant être un retour à un état beaucoup plus ancien, l'important est que ce soit nouveau pour la grande majorité des membres du groupe, de la communauté considérés, à un moment donné. Un pays marqué par une immigration qui se maintient sur des décennies a tout intérêt à maintenir une certaine pression ne fait de renouvellement et de changement, faute de quoi le nouveau devient vite du vieux et l'on retombe dans les mêmes problèmes d'intégration.
Cependant, il faut se méfier du nivellement produit par la nouveauté, l'effacement de certains repères à commencer par celui du sexe. La nouveauté doit-elle se faire aux dépends d'une certaine dynamique de dualité, ne risque-t-elle pas d'écraser une certaine altérité? Non, si le système social respecte une certaine alternance, ce qui implique des alternatives. Cela se peut dans le cadre d'une cyclicité passant par des phases récurrentes à intervalles relativement brefs. Nos travaux ont mis en évidence l'intérêt de phases de 3 ans 1/2, ce qui n'est pas loin des 4 ans qui séparent deux élections présidentielles américaines. (Voir nos textes à ce sujet sur le JBA)
Mais rappelons que pour parvenir à une certaine unité, il faut passer par la diversité et donc, à un certain stade, par des choix qui seront opérés plus ou moins judicieusement selon la qualité du "démos", ce qui n'est pas sans évoquer la sélection des spermatozoïdes. Beaucoup d'appelés et peu d'élus. Faute de savoir choisir, le démos peut en effet préférer s'en tenir à une "tradition", rendue vénérable avec le temps, mais le problème, c'est que par définition, le respect de celle-ci introduit un clivage entre les novices et les anciens, ce qui aboutit dans nombre de cas à une crise du recrutement, symptôme de sclérose.




JHB
11. 04.10

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