samedi 28 novembre 2009

Conception ou naissance en astrologie

par Jacques HalBronn

Le vrai débat autour du thème natal reste celui de savoir ce qui se joue au moment de la naissance.
Plus un astrologue tendra à complexifier la carte du ciel, plus cela signifiera qu'il accorde la plus grande importance au moment de la naissance mais en assume-t-il toujours les conséquences épistémologiques, on peut en douter...
Tout, en effet, n'est-il pas "joué" lors de la venue au monde, au bout d'un processus qui aura duré dans les neuf mois?
L'astrologie, en s'évertuant à défendre le thème natal pousse le "bouchon" très loin et il serait probablement plus facile de fonder l'astrologie scientifiquement en se délestant du "boulet" qu'un tel dispositif représente.
Récemment (voir Colloque de Rennes, sur teleprovidence), un des intervenants au débat s'est cru obligé de parler de réincarnation à propos du thème natal, soutenant que l'"âme" choisit par avance son temps exact de naissance. Est-ce que l'on ne franchit pas là quelque ligne rouge en fondant l'astrologie sur de tels arguments? Car même ceux qui croient en la réincarnation n'en arrivent pas forcément à affirmer que l'on soit en mesurer de plier les contraintes biologiques à de tels impératifs généthliaques, à consonance karmique.
En ce début de XXIe siècle, la position la plus raisonnable est bien celle de l'hérédité ou en tout cas celle de la génétique, à savoir que l'on tend à naitre à un moment où le ciel extérieur; c'est à dire astronomique, ferait pendant, serait en correspondance, en quelque sorte, avec le ciel intérieur, c'est à dire génétique. Pour Gauquelin, il faut être "martien" pour naitre "sous" Mars et ainsi de suite. Mars serait dans nos gènes et cette détermination n'aura pas attendu le moment de la naissance pour se mettre en place.
Quand, il y a de cela une quarantaine d'années, nous étions tout débutant en astrologie, dans les années 1967-1969, nous accordions la plus grande importance à l'ascendant et prétendions que l'on pouvait déterminer l'ascendant de quelqu'un en le voyant ou en tout cas trancher entre deux ascendants successifs. Ce disant, nous n'avions pas pensé que le corps ne pouvait changer d'une heure à l'autre, voire d'une minute à l'autre. Tel est le risque de ne pas appréhender l'astrologie dans la globalité des paramètres qui la concernent. Evidemment, fort de notre expérience, nous aurions pu continuer, indéfiniment, qu'il en était ainsi mais il y a un seuil où il faut sensiblement relativiser la valeur et la vraisemblance de nos "observations" et les placer sous le contrôle d'exigences théoriques à respecter. D'ailleurs, quel astrologue de bonne foi n'a pas été conduit à renoncer à certaines "observations"" prétendument définitives et sans appel?
Accorder par trop d'importance au thème natal, le considérer non pas comme une conséquence mais comme une cause peut se révéler fort inconfortable, à terme. Qu'en effet, l'importance du thème- comme l'a montré Gauquelin en recourant à des données très simples- tienne à ce que le nouveau né ne naisse pas à n'importe quel moment est une chose est une chose, que le thème "forme" la personne qui nait, en est une toute autre et c'est ce pas que l'on ne saurait franchir sans beaucoup de prudence.
Et d'ailleurs que gagne-t-on vraiment à opter pour une posture aussi intransigeante en faveur de l'impression cosmique que nous subirions à la naissance?
Mais si l'on admet que le nouveau né tienne compte d'un certain nombre de repères célestes, cela signifie qu'il n'est pas sensible à toutes les configurations existantes. Certains diront: c'est le thème qui nous dira à quelles configurations il réagit....Il faut admettre qu'il y a une vie avant la naissance et que tout ne part pas de là!
La naissance est beaucoup plus prévisible que la conception car elle dépend de la dite conception...
Au niveau cyclique, ce qui correspond à la naissance n'est pas la conjonction mais le mi-point, on est à mi-parcours entre la vie et la mort, en quelque sorte, entre le début et la fin d'un cycle. La naissance correspond à l'équinoxe de printemps, lui aussi, beaucoup trop investi par les astrologues qui veulent y voir un commencement alors que le printemps dépend de ce qui l'a précédé, il n'est pas tant une impulsion qu'une émergence.
Au départ d'un processus, on a affaire à un sujet - au sens grammatical du terme- et peu à peu l'on passe à un objet. Prenons le cas d'une parole qui s'exprime, elle dépend de celui qui la profère. Mais une fois que cette parole est écrite, elle devient objet que chacun peut s'approprier. Or, l'écrit est beaucoup plus tardif, dans l'Histoire de l'Humanité, que l'oral, il relève, selon nous, du passage à l'ère technico-technologique qui est toujours la nôtre aujourd'hui .( voir J. P. Changeux, Du vrai, du beau, du bien, une nouvelle approche neuronale, Paris, O. Jacob, 2009, pp. 253 et seq. ) C'est vrai pour la naissance: une fois qu'il est né, il peut être placé dans une autre famille que celle qui lui a donné naissance. Il y a toujours un moment de lâcher prise qui correspond au passage de la nuit au jour, de l'Hiver au Printemps. Quand un fruit est cueilli, on ne sait plus de quel arbre il est issu... On ne peut plus juger de l'arbre à ses fruits. Notre perception s'en trouve faussée. Plus on est proche de la source et moins l'on risque de se fourvoyer et plus on est éloigné de la source, plus l'on est à la merci des apparences.
Nous ne partageons pas le point de vue de René Cassin (repris par J. P. Changeux, in Du vrai, du bien, du beau, op. cit. p; 514).: "Cassin reconnaissait, rapporte Jean Pierre Changeux, que les inventions pratiques de l'industrie humaine (...) jusqu'aux biotechnologies contemporaines ont directement contribué à alléger la peine des hommes". Pour nous, le développement de la neurologie doit nous émanciper du joug technologique, lequel ne fait sens que pour combler certains handicaps. On peut penser que l'écrit a servi d'abord aux sourds. La technique "externe", celle qui passe par des objets, ne saurait être qu'un palliatif, pour venir en aide aux personnes présentant certaines carences, dont certaines dues à l'âge, à la maladie, aux accidents. Peut-on espérer des neurosciences qu'elles permettent à l'Humanité de cesser à ne penser le progrès qu'au prisme de la Technique?
Concluons sur ce texte de J. P. Changeux. (Du vrai, du beau, du bien. ibidem, pp. 467-468)
"Comme l'écrit Durckheim, "le seul moyen que nous ayons de nous libérer des forces physiques est de leur opposer des forces collectives". Le cerveau des hommes réunis en société a donc produit, comme "modèle explicatif" des "représentations collectives" efficaces sur le plan social (mythes, croyances, pouvoirs magiques, forces surnaturelles...) qui se sont transmises de génération en génération, de cerveau à cerveau. Ces représentations collectives permettent d'organiser le temps, non seulement le sien, mais celui objectivement pensé par tous les hommes d'une même civilisation"




JHB
03. 10. 09

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