samedi 28 novembre 2009

La question épistémologique du choix en astrologie

par Jacques HalBronn

A l'occasion du prochain colloque de Marseille (11 novembre) consacrée au choix de l'astrologie, il convient que nous soulignions toute l'importance du tri, de la sélection, de l'élection, qui semble constituer plus que jamais un obstacle épistémologique (Bachelard), ce qui tendrait à montrer que la pensée astrologique contemporaine a du mal à s'inscrire dans une problématique monothéiste, ce que d'ailleurs nombre d'astrologues reconnaissent actuellement.
On présente souvent l'astrologie comme ce qui donne sens à l'astronomie, comme si l'astrologie devait attribuer à toutes les composantes de l'astronomie une signification et qu'elle devrait continuer à le faire indéfiniment, ce qui semble être la consigne notamment chez les astrologues américains, en cheville, en quelque sorte, avec les toutes dernières avancées astronomiques du moins celles relatives au système solaire. Il est donc urgent de renoncer à un tel cahier de charges de l'astrologie, susceptible de faire perdre son âme à celle-ci. Un tel cahier de charges nous semble d'ailleurs lié à une certaine promiscuité entre astrologues et astronomes dont tant d'astrologues croient un peu vite devoir se glorifier. Qui sait si ces astronomes-astrologues n'ont pas conduit l'astrologie à se fourvoyer, au sein d'un tel binôme?
On ne peut évidemment penser l'astrologie sans quelque rapport minimal à l'astronomie mais encore faudrait-il en fixer les conditions et les limites...On connait le sophisme: puisque l'astrologie emprunte à l'astronomie, rien de ce qui est astronomique ne saurait lui être étranger. C'est là un travers commun chez les apprentis historiens que de croire qu'une fois la source d'un phénomène trouvée, la source a vocation à éclairer le dit phénoméne et à en déterminer la dynamique. Or, bien souvent, un tel emprunt est ponctuel, conditionnel et ne saurait être étendu indéfiniment. Tout emprunt a sa propre logique qu'il importe de découvrir.
Quelqu'un entre dans une pharmacie pour acheter un certain produit et non pour consommer tout ce qui se vend dans la dite pharmacie. Il n'est censé repartir qu'avec ce dont il avait besoin. Ni plus ni moins. Même si le pharmacien, s'il sait s'y prendre, peut lui vendre parfois ce qui ne lui est pas strictement nécessaire....Une personne influençable aura du mal à résister (pourquoi pas?) à certaines propositions, à telle opportunité, à se débarrasser de quelque cadeau empoisonné...
Mais n'est-il pas possible, justement, de diagnostiquer les cas de personnes ayant acquis des produits qui finalement risquent fort de l'encombrer, à la longue?
Cela vaut, à tous les niveaux: emprunt linguistique inutile (franglais), acquisition discutable d'un bien, annexion boulet d'un territoire.....Tout le monde, loin de là, n'est pas toujours assez censé pour renoncer à un "bien mal acquis" (qui ne profite jamais, dit l'adage), pour se retirer en temps utile, faire marche arrière...
Or, c'est précisément ce que nous demandons aux astrologues que de se dessaisir de certaines possessions, de ne plus se complaire dans une pléthore de données.
.Tout choix est un emprunt, est un recours mais quelle doit en être le bon usage éthiquement et épistémologiquement? Comment bien choisir? Certainement pas en prenant tout ce qui se présente à nous, ce qui nous fait basculer dans une fringale d'avoir aux dépends de la constitution et du maintien de l'être.
Il était une fois quelques législateurs, en charge d'une "tribu" donnée, qui jugèrent bon d'accorder quelque importance à une certaine cyclicité. Ils finirent par fixer leur choix sur un cycle parmi bien d'autres car un seul cycle suffisait. Deux cycles auraient déjà créé quelque confusion et trois cycles, bonjour les dégâts! Il est probable d'ailleurs qu'antérieurement une telle cyclicité n'ait nullement eu besoin des astres pour se mettre en place, la preuve en est que c'est ce qui se passe actuellement lors des élections organisées un peu partout et dans les moments les plus divers, sans tenir compte des astres, si ce n'est lorsque l'on décide que cela aura lieu tous les 4 ans ou tous les 5 ans, ce qui renvoie implicitement à un processus solaire (en fait terrestre)
A un certain stade, ces législateurs ou leurs descendants crurent bon de faire appel aux astronomes pour établir un cycle viable et stable. Et en ce sens, nous dirons que l'astrologie n'est pas née de l'astronomie mais lui a emprunté certaines données chronologiques commodes à observer par toute une population. A ce stade là, on l'aura compris, nous avons affaire à une astrologie culturelle, nullement subconsciente et n'existant que par la volonté de ceux s'y soumettant. Nous n'en sommes donc pas aux stades plus tardifs d'astrologues recherchant les lois sous tendant "occultement" et inconsciemment les comportements humains.. D'ailleurs, les astrologues, en règle générale, détestent que l'on parle de la culturalité de l'astrologie comme condition même de son existence (voir P. Guinard, Manifeste, site cura.free.fr). De fait, le stade de cette culturalité est dépassé depuis belle lurette et nous en sommes passés en grande partie du moins à un stade qui transcende ce niveau, cet état de conscience initiaux.(voir notre Etrange Histoire de l'Astrologie, Paris, Artefact, 1986)
Autrement dit, l'astrologie ne serait pas née de l'astronomie pour la simple raison que l'astronomie est à cent lieues d'incarner la simplicité d'une cyclicité unique, dès lors que l'on n'en reste pas au niveau des luminaires, à la cyclicité jugée par trop limitée dans le temps. Selon nous, l'astrologie aura instrumenté l'astronomie et n'en aura, au départ, emprunté que le strict nécessaire, à savoir, selon nous, une planète lente (évidemment pas à l'époque une transsaturnienne!:) et quelques étoiles fixes pour baliser son parcours. On écoutera Michel Field (dans une émission reprise en partie sur teleprovidence) affirmer que l'astrologie a précédé l'astronomie comme l'alchimie la chimie. On ne saurait souscrire à une telle présentation des choses: les deux domaines ont existé parallèlement, si ce n'est que l'astrologie était d'abord une cyclologie, comme le sont nos constitutions et nos républiques. Comme l'astronomie était aussi une cyclologie, il était assez fatal qu'une astrologie qui n'en était pas encore une fît affaire avec l'astronomie pour satisfaire ses besoins cycliques.
Sous cet angle, il est exclu que l'accord ait consisté à ce que l’astrologie (cf. supra) se soit engagée à conférer une signification spécifique à tout ce qui existait astronomiquement. Tel ne fut pas, en tout cas, l'arrangement d'origine. Cela dit; quand on examine les travaux de Michel Gauquelin, force est bien de constater que cinq sur les sept astres du système solaire furent en effet mobilisés par l'astrologie.(à l'exception donc de Mercure et du soleil). Mais décalage, il y a, donc choix dicté par divers paramètres, à commencer par le fait que si une société se divise en cinq, elle n'a pas besoin de sept astres! Là encore, il importe de comprendre que les sociétés se sont organisées bien avant d'envisager de recourir à une astronomie d'autant qu'il fallut du temps, c'est à dire des millénaires, avant que les astronomes n'apprissent à distinguer planètes (errantes) et étoiles fixes! Quant aux astrologues qui veulent à tout prix - et c'est aujourd'hui, hélas, la très grande majorité- se servir, par dessus le marché, des transsaturniennes et autres astéroides, gageons qu'ils sont complètement à côté de la plaque!
Nous proposerons donc de définir le phénomène astrologique à investiguer comme la mise en évidence de la configuration céleste (planète + étoile) qui aura été finalement choisie- on dit bien choisie! - parmi toutes les possibilités existants alors, puisque l'on parle d'un événement s'inscrivant dans un passé des plus lointains. Planète choisie, planète "élue" par et pour une certaine Humanité, en un certain temps historique.
Que par la suite, l'astronomie ait pris le dessus et ait conduit l'astrologie à s'aligner sur elle semble un fait acquis. Mais comme nous le disions, il n'est jamais trop tard pour bien faire et pour corriger les erreurs commises en cours de route. Que la mythologie ait servi, à un certain stade; à nommer les planètes tout comme le zodiaque des mois à subdiviser l'écliptique, lieu de passage des planètes, est assez clair. Mais un tel usage n'avait pas nécessairement vocation à signifier. Désigner n'est pas signifier, en effet! Aucun astronome ne dira le contraire! Et c'est d'ailleurs une telle confusion sémantique qui est reprochée par les astronomes aux astrologues...
Certes, nous n'obligeons pas tous les astrologues à adopter la cyclicité saturno-stellaire que nous prônons mais nous leur demandons instamment d'admettre la nécessité de s'entendre sur une certaine cyclicité et donc de faire un choix qui tant que possible corresponde à celui de nos lointains prédécesseurs, c'est à dire finalement qui soit à terme confirmé par les neurosciences vouées, tôt ou tard, à montrer que certaines configurations déclenchent des états particuliers non pas nécessairement chez tout un chacun mais du moins sur une certaine proportion de l'Humanité, ce qui implique là encore un choix.
Au niveau épistémologique, le fait d'accorder la même importance aux axes qu'à leurs subdivisions risque fort, en effet, de fragiliser l'astrologie, puisque, comme on l'a vu, le passage d'une planéte d'une maison à une autre, d'un signe à un autre, est généralement interprété comme déterminant, alors que les subdivisions correspondent à une progression et ne sauraient se poser en entités distinctes comme si l'on passait d'un pays à l'autre, d'une langue à une autre, d'une monnaie à une autre. Les enseignants astrologues devront désormais impérativement éviter de cristalliser les subdivisions-(en aspects, en signe, en maison) au lieu d'encourager, comme ils le font encore trop souvent, à trancher entre deux signes, deux maisons ou de décider s'il y a ou non aspect. C'est d'ailleurs ainsi qu'il convient de procéder dans la consultation astrologique en aidant le client à distinguer ce qui dans sa vie est en quelque sorte amovible et donc modifiable et ce qui ne l'est guère. Que les astrologues commencent déjà à balayer devant leur porte! Rappelons que la liberté qui est un corollaire du changement est aussi un corollaire de nos précédentes libertés. Ce qui a été réalisé librement c'est à dire arbitrairement peut être défait tout aussi librement et arbitrairement. Ainsi, à vouloir nier le caractère amovible d'une partie de la tradition astrologique, on contribue, plus ou moins sciemment et délibérément, à la figer.


JHB
20. 10. 09

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