Etudes de Critique biblique, astrologique nostradamiquej et linguistique.
lundi 31 juillet 2023
jacques halbronn Le Livre de L'Ecclésiaste comme fondement de la théologie de la maison de Juda. Fils d'Adam versus Fils d'Israel. l'Exode calque du Qohélet. Yahwé contre Elohim
jacques halbronn Le Livre de L'Ecclésiaste comme fondement de la théologie de la maison de Juda. Fils d'Adam versus Fils d'Israel. l'Exode calque du Qohélet Yahwé contre Elohim
/Selon nous, ll n'est pas de meilleur exposé de la théologie juive telle que nous l'entendons que ce livre qui fait partie intégrante de l'Ancien Testament. Il y a là une dimension cyclique parfaitement assumée avec l'idée de récurrence (rien de nouveau sous le Soleil), celle de rassembleur ( Kohélet). Mais la notion même de vanité (Hevel) vise tous ceux qui voudraient rivaliser avec la création divine.
Ecclésiaste Ch. I
א דִּבְרֵי קֹהֶלֶת בֶּן-דָּוִד, מֶלֶךְ בִּירוּשָׁלִָם. 1 Paroles de Kohélet, fils de David, roi à Jérusalem.
ב הֲבֵל הֲבָלִים אָמַר קֹהֶלֶת, הֲבֵל הֲבָלִים הַכֹּל הָבֶל. 2 Vanité des vanités, a dit Kohélet, vanité des vanités; tout est vanité!
ג מַה-יִּתְרוֹן, לָאָדָם: בְּכָל-עֲמָלוֹ--שֶׁיַּעֲמֹל, תַּחַת הַשָּׁמֶשׁ. 3 Quel profit tire l'homme de tout le mal qu'il se donne sous le soleil?
Il nous apparait que le Livre de l'Exode est un calque du Livre de l'Ecclésiaste tout comme le chapitre 45 de l'Ecclésiaste concernant Cyrus est un calque du Livre d' Esdras 1.1-11) On a un paralléle entre Elohim faisant alliance avec les fils d'Adam et Yahvé faisant alliance avec les fils d'Israel (alias Jacob) Dans son Enquéte, il est dommage que Thomas Römer n'ait pas su relier le Livre de l'Exode avec celui de l'Ecclésiaste (Moise en version originale. Enquéte sur le récit de la Sortie d'Egypte (Ed Bayard 2015).
Au niveau lexical, on ne trouve trace dans l'Ecclésiaste du nom "Yahvé", ce qui le rapproche du premier chapitre de la Genése avec lequel il est en parfaite harmonie: Il parle des Benéi Adam et non des Beney Israel et en ce sens, l'Ecclésiaste serait l'antidote du livre de l'Exode lequel traite de Yahvé et des Enfants d'Israel.
La seule fausse note est la référence à Israel - "Roi d'Israel""!! - tout en se référant à Jérusalem.
Chapitre I
ב אֲנִי קֹהֶלֶת, הָיִיתִי מֶלֶךְ עַל-יִשְׂרָאֵל--בִּירוּשָׁלִָם. 12 Moi, Kohélet, je suis devenu roi d'Israël, à Jérusalem.
On montrera que le Livre de l'Exode a remplacé le lien entre Elohim et les Fils d'Adam par un lien entre Yahvé et les Fils d'Israel.
Ecclésiaste III
ט כִּי מִקְרֶה בְנֵי-הָאָדָם וּמִקְרֶה הַבְּהֵמָה, וּמִקְרֶה אֶחָד לָהֶם--כְּמוֹת זֶה כֵּן מוֹת זֶה, וְרוּחַ אֶחָד לַכֹּל; וּמוֹתַר הָאָדָם מִן-הַבְּהֵמָה אָיִן, כִּי הַכֹּל הָבֶל. 19 Car telle la destinée des fils d'Adam, telle la destinée des animaux; leur condition est la même, la mort des uns est comme la mort des autres; un même souffle les anime: la supériorité de l'homme sur l'animal est nulle, car tout est vanité.
כ הַכֹּל הוֹלֵךְ, אֶל-מָקוֹם אֶחָד; הַכֹּל הָיָה מִן-הֶעָפָר, וְהַכֹּל שָׁב אֶל-הֶעָפָר. 20 Tout aboutit au même endroit: tout est venu de la poussière et tout retourne à la poussière.
כא מִי יוֹדֵעַ, רוּחַ בְּנֵי הָאָדָם--הָעֹלָה הִיא, לְמָעְלָה; וְרוּחַ, הַבְּהֵמָה--הַיֹּרֶדֶת הִיא, לְמַטָּה לָאָרֶץ. 21 Qui peut savoir si le souffle des fils d'Adam monte en haut, tandis que le souffle des animaux descend en bas, vers la terre?
Eoode III
יג וַיֹּאמֶר מֹשֶׁה אֶל-הָאֱלֹהִים, הִנֵּה אָנֹכִי בָא אֶל-בְּנֵי יִשְׂרָאֵל, וְאָמַרְתִּי לָהֶם, אֱלֹהֵי אֲבוֹתֵיכֶם שְׁלָחַנִי אֲלֵיכֶם; וְאָמְרוּ-לִי מַה-שְּׁמוֹ, מָה אֹמַר אֲלֵהֶם. 13 Moïse dit à Dieu (Elohim): "Or, je vais trouver les enfants d'Israël et je leur dirai: Le Dieu de vos pères m'envoie vers vous... S'ils me disent: Quel est son nom? que leur dirai-je?"
יד וַיֹּאמֶר אֱלֹהִים אֶל-מֹשֶׁה, אֶהְיֶה אֲשֶׁר אֶהְיֶה; וַיֹּאמֶר, כֹּה תֹאמַר לִבְנֵי יִשְׂרָאֵל, אֶהְיֶה, שְׁלָחַנִי אֲלֵיכֶם. 14 Dieu répondit à Moïse: "Je suis l'Être invariable!" Et il ajouta: "Ainsi parleras-tu aux enfants d'Israël: C'est l'Être invariable qui m'a délégué auprès de vous."
1 Il y a un temps pour tout, et chaque chose a son heure sous le ciel.
א לַכֹּל, זְמָן; וְעֵת לְכָל-חֵפֶץ, תַּחַת הַשָּׁמָיִם. {פ}
ב עֵת לָלֶדֶת, וְעֵת לָמוּת;
עֵת לָטַעַת, וְעֵת לַעֲקוֹר נָטוּעַ. 2 Il est un temps pour naître et un temps pour mourir, un temps pour planter et un temps pour déraciner ce qui était planté;
ג עֵת לַהֲרוֹג וְעֵת לִרְפּוֹא,
עֵת לִפְרוֹץ וְעֵת לִבְנוֹת. 3 un temps pour tuer et un temps pour guérir, un temps pour démolir et un temps pour bâtir;
ד עֵת לִבְכּוֹת וְעֵת לִשְׂחוֹק,
עֵת סְפוֹד וְעֵת רְקוֹד. 4 un temps pour pleurer et un temps pour rire, un temps pour se lamenter et un temps pour danser;
ה עֵת לְהַשְׁלִיךְ אֲבָנִים, וְעֵת כְּנוֹס אֲבָנִים;
עֵת לַחֲבוֹק, וְעֵת לִרְחֹק מֵחַבֵּק. 5 un temps pour jeter des pierres et un temps pour ramasser des pierres, un temps pour embrasser et un temps pour repousser les caresses;
ו עֵת לְבַקֵּשׁ וְעֵת לְאַבֵּד,
עֵת לִשְׁמוֹר וְעֵת לְהַשְׁלִיךְ. 6 un temps pour chercher [ce qui est perdu] et un temps pour perdre, un temps pour conserver et un temps pour dissiper;
ז עֵת לִקְרוֹעַ וְעֵת לִתְפּוֹר,
עֵת לַחֲשׁוֹת וְעֵת לְדַבֵּר. 7 un temps pour déchirer et un temps pour coudre, un temps pour se taire et un temps pour parler;
ח עֵת לֶאֱהֹב וְעֵת לִשְׂנֹא,
עֵת מִלְחָמָה וְעֵת שָׁלוֹם. {פ} 8 un temps pour aimer et un temps pour haïr, un temps pour la guerre et un temps pour la paix.
ט מַה-יִּתְרוֹן, הָעוֹשֶׂה, בַּאֲשֶׁר, הוּא עָמֵל. 9 Quel avantage tire le travailleur de la peine qu'il se donne?
י רָאִיתִי אֶת-הָעִנְיָן, אֲשֶׁר נָתַן אֱלֹהִים לִבְנֵי הָאָדָם--לַעֲנוֹת בּוֹ. 10 J'ai observé la besogne que Dieu (Elohim) a assignée aux fils d'Adam (Benei haAdam) pour se fatiguer en efforts.
יא אֶת-הַכֹּל עָשָׂה, יָפֶה בְעִתּוֹ; גַּם אֶת-הָעֹלָם, נָתַן בְּלִבָּם--מִבְּלִי אֲשֶׁר לֹא-יִמְצָא הָאָדָם אֶת-הַמַּעֲשֶׂה אֲשֶׁר-עָשָׂה הָאֱלֹהִים, מֵרֹאשׁ וְעַד-סוֹף. Nous reproduisons ci dessous un article de 2022 à mettre en paralléle avec celui -ci." La double lecture de l’édit de Cyrus, celle des Judéens revue par les Israélites (Beney Israel)" Si l’on voulait une preuve flagrante de la manipulation du texte biblique par les ressortissants du Royaume sécessioniste d’Israel, il convient de lire le Deutéro Isaïe, postérieur au Retour de Bablylone des Judéens alors que le Royaume d’Israel avait été anéanti par les Assyriens au VIIIe siècle, donc bien avant la » Captivité de Babylone ». Cela atteste de la perpétuation de la cause des Beney Israel des siècles durant. Le « texte » biblique nous fournit en effet deux versions de l’Edit de Cyrus, l’une sur le mode judéen, l’autre sur le mode israélite. C’est dans une addition au Livre d’Isaie – désignée sous le terme de « Deutéro Isaie » que l’on trouve un document assez étonnant et que seule la confusion entre les deux « partis » a pu faire négliger lorsque l’on considére Juifs et Israel comme des synonymes. Mais la Bible ne nous fournit pas moins une autre version laquelle correspond, quant à elle, à la vérité historique concernant la portée de l’Edit de l’empereur de Perse, Cyrus. C’est à la toute fin de l’Ancien Testament, donc du troisiéme volet, dit des Hagiographes, que notre document figure:
Edit de Cyrus
( Livre d’Esdras 1.1-11)
Le texte du Livre d'Ezra est hybride, il se référe tantot à Elohim et tantôt à Yahwé!
כֹּה-אָמַר יְהוָה, לִמְשִׁיחוֹ לְכוֹרֶשׁ אֲשֶׁר-הֶחֱזַקְתִּי בִימִינוֹ לְרַד-לְפָנָיו גּוֹיִם, וּמָתְנֵי מְלָכִים, אֲפַתֵּחַ–לִפְתֹּחַ לְפָנָיו דְּלָתַיִם, וּשְׁעָרִים לֹא יִסָּגֵרוּ. 1 Ainsi parle Yahwé à son Oint (Mashiho), à Cyrus je l’ai pris par la main pour mettre les nations à ses pieds et délier les ceintures des rois, pour ouvrir devant lui les battants et empêcher que les portes lui soient fermées
Le verset 4 d’Isaie 45 renvoie explicitement à « Jacob-Israel »
לְמַעַן עַבְדִּי יַעֲקֹב, וְיִשְׂרָאֵל בְּחִירִי; וָאֶקְרָא לְךָ בִּשְׁמֶךָ, אֲכַנְּךָ וְלֹא יְדַעְתָּנִי. 4 C’est en faveur de mon serviteur Jacob, d’Israël mon élu, que je t’ai appelé par ton nom, que je t’ai décerné un titre, bien que tu ne me connusses pas.
ט לֹא בַסֵּתֶר דִּבַּרְתִּי, בִּמְקוֹם אֶרֶץ חֹשֶׁךְ–לֹא אָמַרְתִּי לְזֶרַע יַעֲקֹב, תֹּהוּ בַקְּשׁוּנִי; אֲנִי יְהוָה דֹּבֵר צֶדֶק, מַגִּיד מֵישָׁרִים. 19 Ce n’est pas en secret que j’ai parlé, dans un lieu obscur de la terre; je n’ai point dit aux enfants de Jacob (Israel): Recherchez-moi dans la solitude! Moi, Yahvé, je dis ce qui est juste, j’annonce ce qui est vrai.
On trouve dans ce chapitre 45 des références au premier chapitre de la Genése lequel est selon nous, à l’instar des 4 premiers chapitres, d’inspiration Israelite
verset 12:
ב אָנֹכִי עָשִׂיתִי אֶרֶץ, וְאָדָם עָלֶיהָ בָרָאתִי; אֲנִי, יָדַי נָטוּ שָׁמַיִם, וְכָל-צְבָאָם, צִוֵּיתִי. 12 C’est pourtant moi qui ai fait (Assiti) la terre(Eretz) et créé (bariti) Adam sur elle, c’est moi dont les mains ont déployé les cieux (Shamayim), et qui ai mis en rang toute leur armée »
verset 18 Car ainsi parle Yahwé, le Créateur des cieux ce Dieu qui a formé, façonné la terre, qui l’a affermie, qui l’a créée non pour demeurer déserte mais pour être habitée : « Je suis Yahwé, et il n’en est pas d’autre.
Dans Genése I, l’on trouve le même verbe hébreu pour créer: (bara) ainsi que Assa, faire,utilisés à propos d’Adam dans Isaie 45 et la Terre (Eretz) et le Ciel. (Shamaym) On y parle dans les deux cas de la « lumière » et des ténébres avec la même terminologie
יוֹצֵר אוֹר וּבוֹרֵא חֹשֶׁךְ, עֹשֶׂה שָׁלוֹם וּבוֹרֵא רָע; אֲנִי יְהוָה, עֹשֶׂה כָל-אֵלֶּה. {פ} 7 Je forme la lumière (Or) et crée les ténèbres (Hoshekh), j’établis la paix et suis l’auteur du mal: moi Yahwé, je fais tout cela. »
Genése I, 1
La Genèse – Chapitre 1 - בְּרֵאשִׁית
א בְּרֵאשִׁית, בָּרָא אֱלֹהִים, אֵת הַשָּׁמַיִם, וְאֵת הָאָרֶץ. 1 Au commencement, Dieu-Elohim créa(Bara) le ciel et la terre.
ב וְהָאָרֶץ, הָיְתָה תֹהוּ וָבֹהוּ, וְחֹשֶׁךְ, עַל-פְּנֵי תְהוֹם; וְרוּחַ אֱלֹהִים, מְרַחֶפֶת עַל-פְּנֵי הַמָּיִם. 2 Or la terre n’était que solitude et chaos; des ténèbres (hoshekh) couvraient la face de l’abîme, et le souffle de Dieu-Elohim planait à la surface des eaux.
ג וַיֹּאמֶר אֱלֹהִים, יְהִי אוֹר; וַיְהִי-אוֹר. 3 Dieu Elohim dit: « Que la lumière (Or) soit! » Et la lumière fut.
ד וַיַּרְא אֱלֹהִים אֶת-הָאוֹר, כִּי-טוֹב; וַיַּבְדֵּל אֱלֹהִים, בֵּין הָאוֹר וּבֵין הַחֹשֶׁךְ. 4 Dieu Elohim considéra que la lumière était bonne, et il établit une distinction entre la lumière et les ténèbres.
ה וַיִּקְרָא אֱלֹהִים לָאוֹר יוֹם, וְלַחֹשֶׁךְ קָרָא לָיְלָה; וַיְהִי-עֶרֶב וַיְהִי-בֹקֶר, יוֹם אֶחָד. {פ} 5 Dieu-Elohim appela la lumière jour, et les ténèbres, il les appela Nuit. Il fut soir, il fut matin, un jour.
ו וַיֹּאמֶר אֱלֹהִים, יְהִי רָקִיעַ בְּתוֹךְ הַמָּיִם, וִיהִי מַבְדִּיל, בֵּין מַיִם לָמָיִם. 6 Dieu Elohim dit: « Qu’un espace s’étende au milieu des eaux, et forme une barrière entre les unes et les autres. »
ז וַיַּעַשׂ אֱלֹהִים, אֶת-הָרָקִיעַ, וַיַּבְדֵּל בֵּין הַמַּיִם אֲשֶׁר מִתַּחַת לָרָקִיעַ, וּבֵין הַמַּיִם אֲשֶׁר מֵעַל לָרָקִיעַ; וַיְהִי-כֵן. 7 Dieu Elohim fit l’espace, opéra une séparation entre les eaux qui sont au-dessous et les eaux qui sont au-dessus, et cela demeura ainsi.
ח וַיִּקְרָא אֱלֹהִים לָרָקִיעַ, שָׁמָיִם; וַיְהִי-עֶרֶב וַיְהִי-בֹקֶר, יוֹם שֵׁנִי. {פ} 8 Dieu Elohim nomma cet espace le Ciel. Le soir se fit, le matin se fit, – second jour.
ט וַיֹּאמֶר אֱלֹהִים, יִקָּווּ הַמַּיִם מִתַּחַת הַשָּׁמַיִם אֶל-מָקוֹם אֶחָד, וְתֵרָאֶה, הַיַּבָּשָׁה; וַיְהִי-כֵן. 9 Dieu -Elohim dit: « Que les eaux répandues sous le ciel se réunissent sur un même point, et que le sol apparaisse. » Cela s’accomplit.
י וַיִּקְרָא אֱלֹהִים לַיַּבָּשָׁה אֶרֶץ, וּלְמִקְוֵה הַמַּיִם קָרָא יַמִּים; וַיַּרְא אֱלֹהִים, כִּי-טוֹב. 10 Dieu -Elohim nomma le sol la Terre, et l’agglomération des eaux, il la nomma les Mers. Et Dieu (Elohim considéra que c’était bien.
יא וַיֹּאמֶר אֱלֹהִים, תַּדְשֵׁא הָאָרֶץ דֶּשֶׁא עֵשֶׂב מַזְרִיעַ זֶרַע, עֵץ פְּרִי עֹשֶׂה פְּרִי לְמִינוֹ, אֲשֶׁר זַרְעוֹ-בוֹ עַל-הָאָרֶץ; וַיְהִי-כֵן. 11 Dieu -Elohim dit: « Que la terre produise des végétaux, savoir: des herbes renfermant une semence; des arbres fruitiers portant, selon leur espèce, un fruit qui perpétue sa semence sur la terre. » Et cela s’accomplit.
יב וַתּוֹצֵא הָאָרֶץ דֶּשֶׁא עֵשֶׂב מַזְרִיעַ זֶרַע, לְמִינֵהוּ, וְעֵץ עֹשֶׂה-פְּרִי אֲשֶׁר זַרְעוֹ-בוֹ, לְמִינֵהוּ; וַיַּרְא אֱלֹהִים, כִּי-טוֹב. 12 La terre donna naissance aux végétaux: aux herbes qui développent leur semence selon leur espèce, et aux arbres portant, selon leur espèce, un fruit qui renferme sa semence. Et Dieu considéra que c’était bien.
יג וַיְהִי-עֶרֶב וַיְהִי-בֹקֶר, יוֹם שְׁלִישִׁי. {פ} 13 Le soir se fit, le matin se fit, – troisième jour.
יד וַיֹּאמֶר אֱלֹהִים, יְהִי מְאֹרֹת בִּרְקִיעַ הַשָּׁמַיִם, לְהַבְדִּיל, בֵּין הַיּוֹם וּבֵין הַלָּיְלָה; וְהָיוּ לְאֹתֹת וּלְמוֹעֲדִים, וּלְיָמִים וְשָׁנִים. 14 Dieu -Elohim) dit: « Que des corps lumineux apparaissent dans l’espace des cieux, pour distinguer entre le jour et la nuit; ils serviront de signes pour les saisons, pour les jours, pour les années;
טו וְהָיוּ לִמְאוֹרֹת בִּרְקִיעַ הַשָּׁמַיִם, לְהָאִיר עַל-הָאָרֶץ; וַיְהִי-כֵן. 15 et ils serviront de luminaires, dans l’espace céleste, pour éclairer la terre. » Et cela s’accomplit.
טז וַיַּעַשׂ אֱלֹהִים, אֶת-שְׁנֵי הַמְּאֹרֹת הַגְּדֹלִים: אֶת-הַמָּאוֹר הַגָּדֹל, לְמֶמְשֶׁלֶת הַיּוֹם, וְאֶת-הַמָּאוֹר הַקָּטֹן לְמֶמְשֶׁלֶת הַלַּיְלָה, וְאֵת הַכּוֹכָבִים. 16 Dieu (Elohim fit(Yaassé) les deux grands luminaires: le plus grand luminaire pour la royauté du jour, le plus petit luminaire pour la royauté de la nuit, et aussi les étoiles.
יז וַיִּתֵּן אֹתָם אֱלֹהִים, בִּרְקִיעַ הַשָּׁמָיִם, לְהָאִיר, עַל-הָאָרֶץ. 17 Et Dieu (Elohim) les plaça dans l’espace céleste pour rayonner sur la terre;
יח וְלִמְשֹׁל, בַּיּוֹם וּבַלַּיְלָה, וּלְהַבְדִּיל, בֵּין הָאוֹר וּבֵין הַחֹשֶׁךְ; וַיַּרְא אֱלֹהִים, כִּי-טוֹב. 18 pour régner le jour et la nuit, et pour séparer la lumière des ténèbres. Dieu (Elohim) considéra que c’était bien.
יט וַיְהִי-עֶרֶב וַיְהִי-בֹקֶר, יוֹם רְבִיעִי. {פ} 19 Le soir se fit, le matin se fit, – quatrième jour.
כ וַיֹּאמֶר אֱלֹהִים–יִשְׁרְצוּ הַמַּיִם, שֶׁרֶץ נֶפֶשׁ חַיָּה; וְעוֹף יְעוֹפֵף עַל-הָאָרֶץ, עַל-פְּנֵי רְקִיעַ הַשָּׁמָיִם. 20 Dieu(Elohim) dit: « Que les eaux fourmillent d’une multitude animée, vivante; et que des oiseaux volent au dessus de ta terre, à travers l’espace des cieux. »
כא וַיִּבְרָא אֱלֹהִים, אֶת-הַתַּנִּינִם הַגְּדֹלִים; וְאֵת כָּל-נֶפֶשׁ הַחַיָּה הָרֹמֶשֶׂת אֲשֶׁר שָׁרְצוּ הַמַּיִם לְמִינֵהֶם, וְאֵת כָּל-עוֹף כָּנָף לְמִינֵהוּ, וַיַּרְא אֱלֹהִים, כִּי-טוֹב. 21 Dieu(Elohim) créa(Vayivra) les cétacés énormes, et tous les êtres animés qui se meuvent dans les eaux, où ils pullulèrent selon leurs espèces, puis tout ce qui vole au moyen d’ailes, selon son espèce; et Dieu considéra que c’était bien.
כב וַיְבָרֶךְ אֹתָם אֱלֹהִים, לֵאמֹר: פְּרוּ וּרְבוּ, וּמִלְאוּ אֶת-הַמַּיִם בַּיַּמִּים, וְהָעוֹף, יִרֶב בָּאָרֶץ. 22 Dieu -Elohim) les bénit en disant: Croissez et multipliez remplissez les eaux, habitants des mers oiseaux, multipliez sur la terre! »
כג וַיְהִי-עֶרֶב וַיְהִי-בֹקֶר, יוֹם חֲמִישִׁי. {פ} 23 Le soir se fit, le matin se fit, – cinquième jour.
כד וַיֹּאמֶר אֱלֹהִים, תּוֹצֵא הָאָרֶץ נֶפֶשׁ חַיָּה לְמִינָהּ, בְּהֵמָה וָרֶמֶשׂ וְחַיְתוֹ-אֶרֶץ, לְמִינָהּ; וַיְהִי-כֵן. 24 Dieu-Elohim dit: « Que la terre produise des êtres animés selon leurs espèces: bétail, reptiles, bêtes sauvages de chaque sorte. » Et cela s’accomplit.
כה וַיַּעַשׂ אֱלֹהִים אֶת-חַיַּת הָאָרֶץ לְמִינָהּ, וְאֶת-הַבְּהֵמָה לְמִינָהּ, וְאֵת כָּל-רֶמֶשׂ הָאֲדָמָה, לְמִינֵהוּ; וַיַּרְא אֱלֹהִים, כִּי-טוֹב. 25 Dieu (Elohim) forma (Vayass) les bêtes sauvages selon leurs espèces, de même les animaux qui paissent, de même ceux qui rampent sur le sol. Et Dieu considéra que c’était bien.
כו וַיֹּאמֶר אֱלֹהִים, נַעֲשֶׂה אָדָם בְּצַלְמֵנוּ כִּדְמוּתֵנוּ; וְיִרְדּוּ בִדְגַת הַיָּם וּבְעוֹף הַשָּׁמַיִם, וּבַבְּהֵמָה וּבְכָל-הָאָרֶץ, וּבְכָל-הָרֶמֶשׂ, הָרֹמֵשׂ עַל-הָאָרֶץ. 26 Elohim dit: « Faisons (naassé) l’homme (Adam) à notre image, à notre ressemblance, et qu’il domine sur les poissons de la mer, sur les oiseaux du ciel, sur le bétail; enfin sur toute la terre, et sur tous les êtres qui s’y meuvent. »
כז וַיִּבְרָא אֱלֹהִים אֶת-הָאָדָם בְּצַלְמוֹ, בְּצֶלֶם אֱלֹהִים בָּרָא אֹתוֹ: זָכָר וּנְקֵבָה, בָּרָא אֹתָם. 27 Dieu (Elohim) créa (Vayivra) l’homme (haAdam) à son image; c’est à l’image de Dieu qu’il le créa (bara). Mâle et femelle furent créés à la fois.
כח וַיְבָרֶךְ אֹתָם, אֱלֹהִים, וַיֹּאמֶר לָהֶם אֱלֹהִים פְּרוּ וּרְבוּ וּמִלְאוּ אֶת-הָאָרֶץ, וְכִבְשֻׁהָ; וּרְדוּ בִּדְגַת הַיָּם, וּבְעוֹף הַשָּׁמַיִם, וּבְכָל-חַיָּה, הָרֹמֶשֶׂת עַל-הָאָרֶץ. 28 Dieu (Elohim) les bénit en leur disant « Croissez et multipliez! Remplissez la terre et soumettez-la! Commandez aux poissons de la mer, aux oiseaux du ciel, à tous les animaux qui se meuvent sur la terre! »
כט וַיֹּאמֶר אֱלֹהִים, הִנֵּה נָתַתִּי לָכֶם אֶת-כָּל-עֵשֶׂב זֹרֵעַ זֶרַע אֲשֶׁר עַל-פְּנֵי כָל-הָאָרֶץ, וְאֶת-כָּל-הָעֵץ אֲשֶׁר-בּוֹ פְרִי-עֵץ, זֹרֵעַ זָרַע: לָכֶם יִהְיֶה, לְאָכְלָה. 29 Dieu (Elohim) ajouta: « Or, je vous accorde tout herbage portant graine, sur toute la face de la terre, et tout arbre portant des fruits qui deviendront arbres par le développement du germe. Ils serviront à votre nourriture.
ל וּלְכָל-חַיַּת הָאָרֶץ וּלְכָל-עוֹף הַשָּׁמַיִם וּלְכֹל רוֹמֵשׂ עַל-הָאָרֶץ, אֲשֶׁר-בּוֹ נֶפֶשׁ חַיָּה, אֶת-כָּל-יֶרֶק עֵשֶׂב, לְאָכְלָה; וַיְהִי-כֵן. 30 Et aux animaux sauvages, à tous les oiseaux du ciel, à tout ce qui se meut sur la terre et possède un principe de vie, j’assigne toute verdure végétale pour nourriture. » Et il en fut ainsi.
לא וַיַּרְא אֱלֹהִים אֶת-כָּל-אֲשֶׁר עָשָׂה, וְהִנֵּה-טוֹב מְאֹד; וַיְהִי-עֶרֶב וַיְהִי-בֹקֶר, יוֹם הַשִּׁשִּׁי. {פ} 31 Dieu (Elohim) examina tout ce qu’il avait fait (assa) c’était éminemment bien. Le soir se fit, puis le matin; ce fut le sixième jour.
Livre d'Ezra Chapitre I On note un mélange de références tantot à Yahwé, tantot à Elohim.
א וּבִשְׁנַת אַחַת, לְכוֹרֶשׁ מֶלֶךְ פָּרַס, לִכְלוֹת דְּבַר-יְהוָה, מִפִּי יִרְמְיָה: הֵעִיר יְהוָה, אֶת-רוּחַ כֹּרֶשׁ מֶלֶךְ-פָּרַס, וַיַּעֲבֶר-קוֹל בְּכָל-מַלְכוּתוֹ, וְגַם-בְּמִכְתָּב לֵאמֹר. 1 Dans la première année de Cyrus, roi de Perse, à l'époque où devait s'accomplir la parole de l'Eternel(Yahwé) annoncée par Jérémie, l'Eternel(Yahwé) éveilla le bon vouloir de Cyrus, roi de Perse; et celui-ci fit proclamer dans tout son empire, par la voix [des hérauts] et aussi par des missives écrites, ce qui suit:
ב כֹּה אָמַר, כֹּרֶשׁ מֶלֶךְ פָּרַס--כֹּל מַמְלְכוֹת הָאָרֶץ, נָתַן לִי יְהוָה אֱלֹהֵי הַשָּׁמָיִם; וְהוּא-פָקַד עָלַי לִבְנוֹת-לוֹ בַיִת, בִּירוּשָׁלִַם אֲשֶׁר בִּיהוּדָה. 2 "Ainsi parle Cyrus, roi de Perse: Yahwé, Dieu du ciel, m'a mis entre les mains tous les royaumes de la terre, et c'est lui qui m'a donné mission de lui bâtir un temple à Jérusalem, qui est en Judée.
ג מִי-בָכֶם מִכָּל-עַמּוֹ, יְהִי אֱלֹהָיו עִמּוֹ, וְיַעַל, לִירוּשָׁלִַם אֲשֶׁר בִּיהוּדָה; וְיִבֶן, אֶת-בֵּית יְהוָה אֱלֹהֵי יִשְׂרָאֵל--הוּא הָאֱלֹהִים, אֲשֶׁר בִּירוּשָׁלִָם. 3 S'il est parmi vous quelqu'un qui appartienne à son peuple, que son Dieu soit avec lui, pour qu'il monte à Jérusalem, qui est en Judée, et bâtisse le temple de Yahwé Dieu d'Israël, de ce Dieu qui réside à Jérusalem!
ד וְכָל-הַנִּשְׁאָר, מִכָּל-הַמְּקֹמוֹת אֲשֶׁר הוּא גָר-שָׁם--יְנַשְּׂאוּהוּ אַנְשֵׁי מְקֹמוֹ, בְּכֶסֶף וּבְזָהָב וּבִרְכוּשׁ וּבִבְהֵמָה; עִם-הַנְּדָבָה--לְבֵית הָאֱלֹהִים, אֲשֶׁר בִּירוּשָׁלִָם. 4 Tous ceux qui restent [de ce peuple], quelle que soit leur résidence, leurs compatriotes devront les gratifier d'argent, d'or, d'objets de valeur et de bêtes de somme, en même temps que d'offrandes volontaires destinées au temple d' Elohim à Jérusalem."
ה וַיָּקוּמוּ רָאשֵׁי הָאָבוֹת, לִיהוּדָה וּבִנְיָמִן, וְהַכֹּהֲנִים, וְהַלְוִיִּם; לְכֹל הֵעִיר הָאֱלֹהִים, אֶת-רוּחוֹ, לַעֲלוֹת לִבְנוֹת, אֶת-בֵּית יְהוָה אֲשֶׁר בִּירוּשָׁלִָם. 5 Alors s'apprêtèrent les chefs de famille de Juda et de Benjamin, les prêtres et les Lévites, tous ceux en qui Yahwé avait éveillé le désir d'aller bâtir le temple de Yahwé à Jérusalem.
ו וְכָל-סְבִיבֹתֵיהֶם חִזְּקוּ בִידֵיהֶם, בִּכְלֵי-כֶסֶף בַּזָּהָב בָּרְכוּשׁ וּבַבְּהֵמָה וּבַמִּגְדָּנוֹת--לְבַד, עַל-כָּל-הִתְנַדֵּב. {ס} 6 Et tous leurs voisins les munirent de vases en argent, d'or, d'objets de valeur, de bêtes de somme et de joyaux précieux, sans compter tous les [autres] dons volontaires.
ז וְהַמֶּלֶךְ כּוֹרֶשׁ, הוֹצִיא אֶת-כְּלֵי בֵית-יְהוָה, אֲשֶׁר הוֹצִיא נְבוּכַדְנֶצַּר מִירוּשָׁלִַם, וַיִּתְּנֵם בְּבֵית אֱלֹהָיו. 7 Le roi Cyrus fit produire les ustensiles du temple de Yahwé, que Nabuchodonosor avait emportés de Jérusalem et déposés dans le temple de son dieu.
ח וַיּוֹצִיאֵם, כּוֹרֶשׁ מֶלֶךְ פָּרַס, עַל-יַד, מִתְרְדָת הַגִּזְבָּר; וַיִּסְפְּרֵם, לְשֵׁשְׁבַּצַּר, הַנָּשִׂיא, לִיהוּדָה. 8 Cyrus, roi de Perse, les fit produire par l'entremise de Mithridate, le trésorier, qui les remit, après les avoir comptés, à Chêchbaçar, le prince de Juda.
ט וְאֵלֶּה, מִסְפָּרָם: אֲגַרְטְלֵי זָהָב שְׁלֹשִׁים, אֲגַרְטְלֵי-כֶסֶף אָלֶף, מַחֲלָפִים, תִּשְׁעָה וְעֶשְׂרִים. {ס} 9 En voici l'énumération: trente bassins d'or, mille bassins d'argent, vingt-neuf coutelas;
י כְּפוֹרֵי זָהָב, שְׁלֹשִׁים-- {ס} כְּפוֹרֵי כֶסֶף מִשְׁנִים, אַרְבַּע מֵאוֹת וַעֲשָׂרָה; כֵּלִים אֲחֵרִים, אָלֶף. {ס} 10 trente écuelles d'or, quatre cent dix écuelles d'argent géminées et mille autres ustensiles.
יא כָּל-כֵּלִים לַזָּהָב וְלַכֶּסֶף, חֲמֵשֶׁת אֲלָפִים וְאַרְבַּע מֵאוֹת; הַכֹּל הֶעֱלָה שֵׁשְׁבַּצַּר, עִם הֵעָלוֹת הַגּוֹלָה--מִבָּבֶל, לִירוּשָׁלִָם. {פ} 11 Tous les ustensiles, tant en or qu'en argent, étaient au nombre de cinq mille quatre cents; Chêchbaçar emporta le tout, lorsque les exilés partirent de Babylone pour Jérusalem.
Bien que la mention du nom Israel apparait accessoirement dans ce passage qui ouvre le Livre d’Ezra, en ses dix premiers versets, il est clair que c’est bien la maison de Juda qui est visée dans l’édit. Cyrus y est d’emblée désigné comme le Messie, l’oint( Mashiah) et l’on retrouve l’idée d’accomplissement qui se retrouve dans les Evangiles, dans la bouche de Jésus.
verset 2
2 «Voici ce que dit Cyrus, roi de Perse: L’Eternel, le Dieu du ciel, m’a donné tous les royaumes de la terre et m’a désigné pour lui construire un temple à Jérusalem, en Juda. »
Verset 5 « Les chefs de famille de Juda et de Benjamin, les prêtres et les Lévites, tous ceux dont Dieu réveilla l’esprit, se levèrent pour aller reconstruire la maison de l’Eternel à Jérusalem. »
Juda et Benjamin sont les deux « tribus » qui n’ont pas été englobées dans le Royaume d’Israel/ Abordons à présent la version remaniée figurant au chapitre 45 du Livre d’Isaie:(donc dans le deuxiéme volet de l’Ancien Testament)
Isaïe – Chapitre 45 - יְשַׁעְיָהוּ
א כֹּה-אָמַר יְהוָה, לִמְשִׁיחוֹ לְכוֹרֶשׁ אֲשֶׁר-הֶחֱזַקְתִּי בִימִינוֹ לְרַד-לְפָנָיו גּוֹיִם, וּמָתְנֵי מְלָכִים, אֲפַתֵּחַ–לִפְתֹּחַ לְפָנָיו דְּלָתַיִם, וּשְׁעָרִים לֹא יִסָּגֵרוּ. 1 Ainsi parle Yahwé à son Oint(Mashiho), à Cyrus je l’ai pris par la main pour mettre les nations à ses pieds et délier les ceintures des rois, pour ouvrir devant lui les battants et empêcher que les portes lui soient fermées :
ב אֲנִי לְפָנֶיךָ אֵלֵךְ, וַהֲדוּרִים אושר (אֲיַשֵּׁר); דַּלְתוֹת נְחוּשָׁה אֲשַׁבֵּר, וּבְרִיחֵי בַרְזֶל אֲגַדֵּעַ. 2 »Je marcherai devant toi, j’aplanirai les hauteurs, je briserai les portes d’airain et abattrai les verrous de fer.
ג וְנָתַתִּי לְךָ אוֹצְרוֹת חֹשֶׁךְ, וּמַטְמֻנֵי מִסְתָּרִים: לְמַעַן תֵּדַע, כִּי-אֲנִי יְהוָה הַקּוֹרֵא בְשִׁמְךָ–אֱלֹהֵי יִשְׂרָאֵל. 3 Je te donnerai des trésors enfouis dans les ténèbres, des richesses cachées dans des lieux secrets, pour que tu saches que je suis Yahwé, le Dieu d’Israël, qui t’appelle par ton nom.
ד לְמַעַן עַבְדִּי יַעֲקֹב, וְיִשְׂרָאֵל בְּחִירִי; וָאֶקְרָא לְךָ בִּשְׁמֶךָ, אֲכַנְּךָ וְלֹא יְדַעְתָּנִי. 4 C’est en faveur de mon serviteur Jacob, d’Israël mon élu, que je t’ai appelé par ton nom, que je t’ai décerné un titre, bien que tu ne me connusses pas.
ה אֲנִי יְהוָה וְאֵין עוֹד, זוּלָתִי אֵין אֱלֹהִים; אֲאַזֶּרְךָ, וְלֹא יְדַעְתָּנִי. 5 C’est moi qui suis Yahwé et nul autre hors de moi, point de Dieu! Je te ceins de force, bien que tu ne me connaisses pas,
ו לְמַעַן יֵדְעוּ, מִמִּזְרַח-שֶׁמֶשׁ וּמִמַּעֲרָבָה, כִּי-אֶפֶס, בִּלְעָדָי: אֲנִי יְהוָה, וְאֵין עוֹד. 6 afin qu’on sache, là où se lève le soleil et là où il se couche, que hors de moi il n’y a rien, que moi je suis Yahwé et nul autre;
ז יוֹצֵר אוֹר וּבוֹרֵא חֹשֶׁךְ, עֹשֶׂה שָׁלוֹם וּבוֹרֵא רָע; אֲנִי יְהוָה, עֹשֶׂה כָל-אֵלֶּה. {פ} 7 Je forme la lumière (Or) et crée (boré) les ténèbres (Hoshekh), j’établis la paix et suis l’auteur du mal: moi Yahwé, je fais tout cela. »
ח הַרְעִיפוּ שָׁמַיִם מִמַּעַל, וּשְׁחָקִים יִזְּלוּ-צֶדֶק; תִּפְתַּח-אֶרֶץ וְיִפְרוּ-יֶשַׁע, וּצְדָקָה תַצְמִיחַ יַחַד–אֲנִי יְהוָה, בְּרָאתִיו. {ס} 8 Cieux, là-haut, épanchez-vous, et vous, nuées, laissez ruisseler la justice! Que la terre s’entrouvre pour faire tout ensemble fleurir le salut et germer la vertu! Moi, Yahwé, j’accomplis tout cela.
ט הוֹי, רָב אֶת-יֹצְרוֹ–חֶרֶשׂ, אֶת-חַרְשֵׂי אֲדָמָה; הֲיֹאמַר חֹמֶר לְיֹצְרוֹ מַה-תַּעֲשֶׂה, וּפָעָלְךָ אֵין-יָדַיִם לוֹ. {ס} 9 Malheur à celui qui entre en lutte avec son Créateur vase fragile au milieu d’autres vases de terre! L’argile dira t-elle au potier qui la pétrit: « Que fais-tu? Ton œuvre est imparfaite! »
י הוֹי אֹמֵר לְאָב, מַה-תּוֹלִיד; וּלְאִשָּׁה, מַה-תְּחִילִין. {ס} 10 Malheur à celui qui dit à son père: « Pourquoi engendres-tu? » à la femme: « Pourquoi es-tu en travail d’enfants? »
יא כֹּה-אָמַר יְהוָה קְדוֹשׁ יִשְׂרָאֵל, וְיֹצְרוֹ: הָאֹתִיּוֹת שְׁאָלוּנִי, עַל-בָּנַי וְעַל-פֹּעַל יָדַי תְּצַוֻּנִי. 11 Ainsi parle Yahwé, le Saint d’Israël, son Créateur: « Ils me questionnent sur les événements prochains! Vous me faites des recommandations au sujet de mes enfants, de l’œuvre de mes mains!
יב אָנֹכִי עָשִׂיתִי אֶרֶץ, וְאָדָם עָלֶיהָ בָרָאתִי; אֲנִי, יָדַי נָטוּ שָׁמַיִם, וְכָל-צְבָאָם, צִוֵּיתִי. 12 C’est pourtant moi qui ai fait (assiti) la terre (Eretz) et créé (bariti) Adam qui est sur elle, c’est moi dont les mains ont déployé les cieux, et qui ai mis en rang toute leur armée.
יג אָנֹכִי הַעִירֹתִהוּ בְצֶדֶק, וְכָל-דְּרָכָיו אֲיַשֵּׁר; הוּא-יִבְנֶה עִירִי, וְגָלוּתִי יְשַׁלֵּחַ–לֹא בִמְחִיר וְלֹא בְשֹׁחַד, אָמַר יְהוָה צְבָאוֹת. {ס} 13 C’est moi qui l’ai suscité selon la justice, j’aplanirai toutes ses voies: il rebâtira ma ville, renverra libres mes exilés, sans rançon et sans présents: c’est Yahwé-Cebaot qui le dit. »
יד כֹּה אָמַר יְהוָה, יְגִיעַ מִצְרַיִם וּסְחַר-כּוּשׁ וּסְבָאִים אַנְשֵׁי מִדָּה, עָלַיִךְ יַעֲבֹרוּ וְלָךְ יִהְיוּ, אַחֲרַיִךְ יֵלֵכוּ בַּזִּקִּים יַעֲבֹרוּ; וְאֵלַיִךְ יִשְׁתַּחֲווּ אֵלַיִךְ יִתְפַּלָּלוּ, אַךְ בָּךְ אֵל וְאֵין עוֹד אֶפֶס אֱלֹהִים. 14 Ainsi parle Yahwé: « Les biens de l’Egypte, le négoce de l’Ethiopie et des Sabéens, à la haute taille, passeront entre tes mains et seront à toi; ces peuples suivront tes pas, s’avanceront dans les chaînes; ils se prosterneront devant toi et, suppliants, te diront: « En toi seul il est un Dieu; hors de lui, il n’y en a pas d’autre! »
טו אָכֵן, אַתָּה אֵל מִסְתַּתֵּר–אֱלֹהֵי יִשְׂרָאֵל, מוֹשִׁיעַ. 15 À coup sûr, tu es un Dieu caché, Dieu d’Israël, qui sauves!
טז בּוֹשׁוּ וְגַם-נִכְלְמוּ, כֻּלָּם: יַחְדָּו הָלְכוּ בַכְּלִמָּה, חָרָשֵׁי צִירִים. 16 Tous ils sont honteux et humiliés, ils marchent dans la confusion, les fabricants d’idoles.
יז יִשְׂרָאֵל נוֹשַׁע בַּיהוָה, תְּשׁוּעַת עוֹלָמִים: לֹא-תֵבֹשׁוּ וְלֹא-תִכָּלְמוּ, עַד-עוֹלְמֵי עַד. {פ} 17 Mais toi, ô Israël, tu seras sauvé par Yahwé, sauvé pour toujours; jusque dans l’éternité, vous n’éprouverez ni honte ni confusion.
יח כִּי כֹה אָמַר-יְהוָה בּוֹרֵא הַשָּׁמַיִם הוּא הָאֱלֹהִים, יֹצֵר הָאָרֶץ וְעֹשָׂהּ הוּא כוֹנְנָהּ–לֹא-תֹהוּ בְרָאָהּ, לָשֶׁבֶת יְצָרָהּ; אֲנִי יְהוָה, וְאֵין עוֹד. 18 Car ainsi parle Yahwé le Créateur des cieux ce Dieu qui a formé, façonné la terre, qui l’a affermie, qui l’a créée non pour demeurer déserte mais pour être habitée : « Je suis Yahwé et il n’en est pas d’autre!
יט לֹא בַסֵּתֶר דִּבַּרְתִּי, בִּמְקוֹם אֶרֶץ חֹשֶׁךְ–לֹא אָמַרְתִּי לְזֶרַע יַעֲקֹב, תֹּהוּ בַקְּשׁוּנִי; אֲנִי יְהוָה דֹּבֵר צֶדֶק, מַגִּיד מֵישָׁרִים. 19 Ce n’est pas en secret que j’ai parlé, dans un lieu obscur de la terre; je n’ai point dit aux enfants de Jacob: Recherchez-moi dans la solitude! Moi, Yahwé je dis ce qui est juste, j’annonce ce qui est vrai.
כ הִקָּבְצוּ וָבֹאוּ הִתְנַגְּשׁוּ יַחְדָּו, פְּלִיטֵי הַגּוֹיִם; לֹא יָדְעוּ, הַנֹּשְׂאִים אֶת-עֵץ פִּסְלָם, וּמִתְפַּלְלִים, אֶל-אֵל לֹא יוֹשִׁיעַ. 20 Assemblez-vous et venez, approchez tous, vous qui vous êtes échappés parmi les nations, vous qui faites preuve d’inintelligence en transportant avec vous vos idoles de bois et en invoquant un dieu incapable de secourir!
כא הַגִּידוּ וְהַגִּישׁוּ, אַף יִוָּעֲצוּ יַחְדָּו: מִי הִשְׁמִיעַ זֹאת מִקֶּדֶם מֵאָז הִגִּידָהּ, הֲלוֹא אֲנִי יְהוָה וְאֵין-עוֹד אֱלֹהִים מִבַּלְעָדַי–אֵל-צַדִּיק וּמוֹשִׁיעַ, אַיִן זוּלָתִי. 21 Faites votre récit, avancez vos raisons, délibérez ensemble: qui a, dans un passé lointain, annoncé tout cela? Qui l’a révélé dès longtemps? N’est-ce point moi, Yahwé à côté de qui il n’est pas de Dieu, moi, le Dieu juste et secourable, qui n’ai point de rival?
כב פְּנוּ-אֵלַי וְהִוָּשְׁעוּ, כָּל-אַפְסֵי-אָרֶץ: כִּי אֲנִי-אֵל, וְאֵין עוֹד. 22 Tournez-vous vers moi, et, vous serez sauvés, vous tous qui habitez les confins de la terre; car moi, je suis Dieu et personne d’autre.
כג בִּי נִשְׁבַּעְתִּי–יָצָא מִפִּי צְדָקָה דָּבָר, וְלֹא יָשׁוּב: כִּי-לִי תִּכְרַע כָּל-בֶּרֶךְ, תִּשָּׁבַע כָּל-לָשׁוֹן. 23 J’ai juré par moi-même c’est une parole véridique qui est sortie de ma bouche et qui ne sera pas révoquée j’ai juré qu’en mon honneur tout genou ploiera et toute langue prêtera serment.
כד אַךְ בַּיהוָה לִי אָמַר, צְדָקוֹת וָעֹז; עָדָיו יָבוֹא וְיֵבֹשׁוּ, כֹּל הַנֶּחֱרִים בּוֹ. 24 En l’Eternel seul, qui m’a parlé, résident le salut et la force; vers lui reviendront, couverts de honte, tous ceux qui s’étaient emportés contre lui.
כה בַּיהוָה יִצְדְּקוּ וְיִתְהַלְלוּ, כָּל-זֶרַע יִשְׂרָאֵל. 25 En Yahwé seront justifiés et glorifiés tous les descendants d’Israël. »
dimanche 30 juillet 2023
samedi 29 juillet 2023
jacques Halbronn Métholdologie. Qui est le préteur, qui est l'emprunteur.? La fabrique des Centuries
Jacques Halbronn méthodologie ; qui est le préteur, qui est l'emprunteur? La fabrique des Centuries
Il arrive que l'on soit confronté au questionnement suivant: qui a pris à qui? Est- ce la français qui a emprunté à l'anglais ou bien l'inverse, est- ce tel auteir qui aura pillé tel autre ou le contraire? probléme d'import-export et de plagiat.
La méthodologie que nous suggérons ici est la suivante. Il est clair que celui qui manifestement ne s'est pas donné les moyens d'obtenir tel résultat est celui qui aura "emprunté", "importé, plagié. Un pays qui n'a pas d'industrie ne saurait prétendre avoir produit telle ou telle machine. Un chercheur qui ne s'est pas constitué une bibliothèque importante et ne dispose que des quelques éléments dont il se sert est certainement en dette envers un autre chercheur.
Nous dirons que l'emprunteur commet inévitablement des erreurs de copie et que l'original se révélera plus cohérent, plus complet, plus articulé. Il en est ainsi pour l'emprunt linguistique où le plus souvent, l'emprunt n'est que ponctuel, partiel à la différence du corpus dont il aura été extrait sans parler des contre-sens encore que parfois l'erreur pourra se révéler créative et donner l'impression d'une certaine originalité. (cf notre Eloge de L'erreur (in Collectif Eloge, Ed Le lierre et le coudrier, 1990). L'historien doit avoir été formé par ses maitres à détecter les contrefaçons, les documents antidatés, les supercheries, faute de quoi il hypothéquera ses diverses productions dès lors qu'un chercheur plus avisé et plus consciencieux dévoilera tôt ou tard le pot aux roses. C'est ainsi que la première victime (collatérale) des emprunts non reconnus sera celui qui les aura pris pour argent comptant
Nous aborderons le cas de Crespin, réputé imitateur de Nostradamus. et dont Pierre Brind'amour se servit pour établir son édition critique du premier volet des Centuries (353 quatrains. ed Macé Bonhomme, 1555. Ed Droz 1996) en revenant sur notre étude parue en 2002 (Ed Ramkat). qui lui fut consacrée. La confrontation entre la prose de Crespin et les quatrains centuriques pose la question suivante: la prose précédé-t-elle les vers ou est-ce l'inverse,? Pour le chercheur québécois (cf notre étude par ailleurs), la prose de Crespin dériverait de la poésie de Michel de Nostredame . Or, il nous apparait qu'une telle thèse est difficilement défendable d'une façon générale, d'où l'expression "versifier", "versification" qui n'a pas son corrollaire.
Examinons donc les correspondances prose-quatrains que nous avions signalées, il y a 20 ans, en collaboration avec Robert Benazra quo s'était prêté au jeu.(in Documents inexploités sur le phénoméne Nostradamus) cf nos 'Enseignements sur la compilaton crespinienne" (pp. 55 et seq) et un paragraphe s'intitulé "Du vers à la prose" en nous référant au récent travail de Brind'amour. Nous notions alors que certaines centuries n'ont pas été traités par Crespin (p; 58) On s'arrêtera sur le fameux quatrain I, 35 censé avoir annoncé la mort du Roi en 1559 (p 66) A props d'unbe variante, nous notions :" "comment Crespin aurait il pu placer un pluriel ave "le lion jeune les vieux surmontera" au lieu du singulier dans les Centuries. "le vieux". Il semble que l'on aura voulu modifier le texte de Crespin pour le faire coller avec l'annonce de la mort du Roi. De même ,pat rapport au quatrain "Chartres" annonçant le couronnement d'Henri IV, on aura changé l'original "Chastres" en Chartres pour que cela "colle".(cf la Guide des Chemins de France de Charles Estienne qui servit à la composition de plusieurs quatrains.-(cf article de Ch. Liaroutzos RHR 1986). En 2002, la thèse que nous avions adoptée était la suivante, Crespin se serait inspiré d'une version manuscrite antérieure à l'imprimée ou bien carrément d'une précédente édition disparue.(cf p. 74). Depuis, nous pensons (cf notre post doctorat 2007) que c'est Crespin qui a servi à composer toute une série de quatrains, son texte pouvant avoir été remanié pour conférer une dimension prophétique plus assurée aux Centuries,
JHB 28 07 23
jacques halbronn Robert Amadou et son exploration du corpus Nostradamus (1989)
jacques halbronn Robert Amadou et son exploration du corpus Nostradamus (1989)
En 1989, il avait été question que le regretté Robert Amadou rédige une préface pour le Répertoire Chronologique Nostradamique de Robert Benazra mais c’est à Jean Céard que nous donnâmes finalement la préférence (Ed La Grande Conjonction-Guy Trédaniel, 1990) Amadou déposera au mois de mars son texte polycopié à la BNF sous le titre « Nuées et intelligences, préface en forme d’excursion » ( autour de Robert Nenzra Bibliographie des écrits relatifs à Nosradaus, second volume) Suivons donc pas à pas la dite excursion et Amadou s’arrête sur des textes d’adversaires de Nostradamus qui, selon lui, attestent de la parution en 1555 de la première édition des « Prophéties » (Centuries) dont le dit Benazra avait retrouvé depuis peu un exemplaire, publié par les « Amis de Michel Nostradamus » Initialement, le Répertoire de Benazra aurait du paraitre en deux volumes, l’un préface par le Professeur Céard, l’autre par Amdou mais l’on s’en tint à un seul volume, préfacé par Jean Céard. C’est ainsi qu’Amadou va aborder la couverture centirique faite de la Révoluion Française. Commentant l’Epitre à Henri II, R. A. note (p. 12) que celle ci ne comporte pas l’an 1789 mais 1792, à la différence de Richard Roussat, s’en tenant à Pierre d’Ailly. Amadou revient sur le quatrain I, 35 très souvent associé à la mort en tournoi du roi Henri II, en 1559, ouvrant la voie à la régence de Catherine de Médicis. « Lors du tournoi nul ne s’avisa d’en lire la prédiction dans les centuries »(p.22) et pour cause, dirons-nous, puisque ces centuries n’étaient pas encore parues; Nous avons signalé le jeu de mots » Dans cage d’or’, qui selon nous renvoie au meurtrier du Roi Gabriel d’Orges, ce qui, par sa précision même, indique qu’il s’agit d’un texte écrit après coup car la prophétie a ses limites On pense aux anagrammes qui marqueront les sixains au début du XVIIe siècle. Amadou passe au Janus de Chavigny qui atteste bien, cette fois, de la parution des Centuries à la date de 1594/ (p. 24) Amadou signalé à juste titre la parution d’un commentaire, faussement attribué à un certain Jaubert – son auteur était en fait le dominicain Giffré de Réhac (cf notre post- doctorat, EPHE 2007) et signalé que ce commentaire sera traduit en anglais par Garancières : il s’agit de l’Eclaircissement des véritables quatrains » Ce point ne semble pas avoir été signalé par Benazra.(????) Passant en revue toutes les références à Nostradamus pour les deux derniers siècles, Amadou manque de signaler la parution en 1906 de la réédition des adresses de Nostradamus à Pie IV en 1561, dont il avait pourtant traité par ailleurs (revue L’Autre Monde n° 103) Amadou ne semble pas, dès lors, avoir saisi toute l’importance que Nostradamus attribuait à l’an 1567- n’ayant probablement pas abordé les traductions italiennes se référant à Nostradamus dans les années 1560.(pourtant conservées à la BNF) et à la naissance d’un Antéchrist, ce qui est repris dans viii 76 dans un quatrain que les faussaires tireront de la dite Epitre au pape. Amadou évoque le projet d’une édition critique des Centuries (p/ 30) laquelle sera confiée à Pierre Brind’amour (1996, Droz) dont nous avons montré toutes les limites. Peu après la parution du RCN de Benazra et du texte d’Amadou, nous avons fait paraitre en 1991 dans la revue Réforme, Humanisme, Renaissance ‘Une attaque réformée oubliée contre Nostradamus (volume 33, numéro 33, p. 43-72.) Pourquoi y reprochait-on notamment à l’auteur des Prophéties d’être en quelque sorte à la solde du souverain pontife ? « De fait, en cette année 1561, Nostradamus rédigea deux Epîtres au Pape et l’année précédente, il lui accorde un passage significatif de son Almanach pour ladite année 1561″, almanach retrouvé par Amadou, à la Bibliothèque Sainte Geneviève, Paris.
Amadou signale une sorte de pastiche de la Préface à César (qu’il situe à la fin du xVIe siècle, ce qui fut bel et bien sa véritable date de parution et non mars 1555) (cf de Patrice guinard, CORPUS NOSTRADAMUS 116 « Quelques manuscrits des Prophéties, vaticinations et vagabondages (XVIIe siècle ») et CORPUS NOSTRADAMUS 60 –et sa »Biblio-iconographie du Corpus Nostradamus » (2016) Le texte, intégralement reproduit par Amadou en 1989) débute en se référant au « reste du siècle présent », soit les dernières années du XVIe.qui correspond au moment véritable de première parution des Centuries. et cette fois contrairement à ce qu’avait considéré Amadou pour authentifier l’édition de 1555, celaconstitue bien, selon nous, un témoignage valable.
Amadou aborde le cas de ceux qui usèrent du nom de Nostradamus (pp/ 43 et seq) y compris Antoine Crespin Archidamus dont nous avons traité longuement ainsi que Pierre Brind’amour dans son « édition critique » sur Nostradamus le Jeune, cf en 2002
nos – « Recherches autour de Nostradamus le Jeune » (site propheties.it)
In finé Amadou revient sur l’almanach pour 1561 et à la dédicace à Pie IV (p 53) Il affirme « les présages des almanachs valent, à mes yeux, ceux des centuries » Amdou n’avait pas eu, accés au manuscrit du ‘Recueil des présages prosaiques » que B. Chevignard éditera partiellement en 1999 (ed Seuil) dont se sert Chavigny dans le Janus Gallicus. Il ne remarque pas que les quatrains des almanachs sont issus de la prose de Nostradamus pour la même année tout comme les quatrains des Centuries sont calqués sur les épitres en prose des éditions des Prophéties, si ce n’est que cela renvoie non pas à l’Epitre à Henri II mais à l’Epitre à Pie iv qui aurait du figurer au début du second volet. Au fond, la même mésaventure affectera Robert Amadou dont la « Préface » initialement prévue ne sera pas retenue….
JHB 29 07 23
vendredi 28 juillet 2023
Jacques halbronn Quid d'un "judaisme" se référant constamment aux Enfants d'Israel?
jacques halbronn Quid d'un judaisme se référant constamment aux Enfants d'Israel?
Thomas Römer, Professeur au Collége de France, est parvenu dans son "Enquête sur le récit de la Sortie d'Egypte", à la conclusion que l'influence du Royaume d'Israel sur la rédaction du texte du Pentateuque serait assez évidente (. Bayard, Labor et Fides 2015)
Moïse en version originale : enquête sur le récit de la sortie d'Egypte (Exode 1-15) - Thomas Römer
MOÏSE EN VERSION ORIGINALE :
La question qui se pose pour nous, comme nous nous en sommes expliqués ailleurs, concerne le syncrétisme de l'Ancien Testament et la cohabitation non pas des différentes empreintes, sacerdotales, deutéronomiques et autres, mais bien celle de dénomination Judéens et Israélites. Comment se fait-il que l'on parle de "judaisme" et qu'en même temps, l'on se référe constamment à Israel, notamment jusque dans les livres de prières en circulation de nos jours (cf notre étude à ce sujet) C'est ainsi que le MJLF mouvement juif libéral de France (fondé en 1977) ne cesse de mentionner Israel dans sa littérature liturgique alors même qu'il se situait face à l'Union Libérale Israélite. D'un côté, l'on parle de nos jours plus volontiers des Juifs que des Israélites, comme on le faisait sous la IIIe République, mais sans réviser les appellations fleurissant dans les textes On frise la schizophrénie! Situation compliquée chez les juifs libéraux qui n'auront pas su profiter de la critique biblique pour moderniser le judaisme (cf l'Alliance pour un judaisme traditionnel et moderne, AJTM, faisant partie du nouvel ensemble JEM Judaisme en mouvement (avec l'e MJLF et l'UlI(F)..
JHB 28 07 23
jacques halbronn Etudes nostradamiques Antoine Crespin ou l'arroseur arrosé, l'imitateur récupéré. L'édition Brind'amour 1996
:jacques halbronn Etudes nostradamiques Antoine Crespin ou l'arroseur arrosé., l'imitateur récupéré. L'édition Brind'amour 1996
Nous allons revenir sur un texte paru il y a près de 30 ans, du à la plume du regretté Pierre Brind'amour. (Titre Les Premières Centuries ou Prophéties (édition Macé Bonhomme. 1555). Edition et commentaire de l'Epitre à César et des 352 premiers quatrains. Ed Droz Avertissement Pierre Kunstmann 1996.) Dans son introduction, le chercheur québécois, peu avant sa mort, à propos d'Antoine Crespin:(pp. XXV-XXVI) voyait en cet auteur un imitateur laborieux de Nostradamus, lequel Crespin n'avait pas hésité à se présenter sous le surnom d'Archidamus (cf aussi Patrice Guinard http://nostredame.chez-alice.fr/nhalb92.html). Rappelons que nous avons été le premier à révéler le travail de Crespin, cette imitation des Centuries n'aura été signalée ni par Ruzo, ni par Chomarat, ni par Benazra dans leurs bibliographies respectives.
La première remarque que nous ferons est la suivante: comment un tel "plagiat" (daté de 1572) a-t-il pu être ignoré au lendemain de la mort de Nostradamus (1566)? Comme nous l'avons montré dans nos Documents inexploités sur le phénoméne Nostradamus (Ed Ramkat 2002), On retrouve dans les "Prophéties à la puissance divine" des éléments figurant ou plutôt repris, dans les Dix Centuries, prétendument parues en 1568 chez Benoist Rigaud à Lyon et dont traitera longuement Guinard. La thèse de Crespin imitateur ne tient pas dès lors que cette édition à 10 centuries apparait comme antidatée et pour cause, puisque dans les années 1588 89, on ne trouve aucune édition des trois dernières centuries, censées constituer le second volet des Centuries! D'aucuns se dépécheront pour parler de quatrains "manquants" puisque selon eux attestés 20 ans plus tôt (cf notamment Robert Benazra,Répertoire Chronologique Nostradamique, 1990 Préface de Jean Céard lequel faitt partie du "Comité de publication des textes littéraires français" chez Droz). On est là dans un labyrinthe et l'on a besoin d'un fil d'Ariane qui fait terriblement défaut à ceux qui s'y sont risqués. Pour Brind'amour, les Prophéties de Crespin vont l'accompagner tout au long de son édition "critique" même s'il s'en sert parfois comme repoussoir au lieu d'envisager que son texte ait pu être "amendé" pour la circonstance. Tout dépend en effet de quel point de vue l'on se place, quel parti on adopte dans la polémique autour de Crespin. En tout cas, Brind'amour aura pris pour argent comptant ce cadeau empoisonné et si l'on parle ici de cadeau, c'est que l'on se demande dans quelles conditions, il en a pris connaissance, lui qui n'en dit mot dans son Nostradamus astrophile de 1993.(pp/ 55-56) signalant en passant(en 3 lignes) que Chomarat dans sa Bibliographie Nostradams recense 17 publications sous ce nom. Pas question ici , pour Brind'amour, à ce stade, de traiter du contenu des dites pronostications mais simplement de l'emprunt "Archidamus). Entre temps, juste avant sa mort, Brind'amour, à la différence de Chomarat et Benzara, aura réalisé tout ce que Crespin aurait emprunté aux Centuries. Eureka! En revanche, il n'avait pas réalisé, sur ces mêmes bases bibliographiques, que le quatrain IV, 46, faisant partie intégrante de l'édition "Macé Bonhomme" était dicté par les circonstances propres au temps de la Ligue!
Voyons donc comment en 1995, Brind'amour sera parvenu, in extremis - c'est le cas de le dire- à appréhender l'apport de Crespin! Brind'amour note toutes sortes de divergences avec l'édition 1555 et constate que cela s'apparente parfois aux éditions centuriques des années 1580. On se demande d'ailleurs comment Brind'amour sera parvenu à établir la relation entre la production de Crespin et celle qu'il attribue à Nostradamus! En outre, il ne se demande pas si le texte de Crespin n'est pas plus cohérent que celui des Centuries, ce qui inverserait le processus influentiel.
Selon nous, comme nous l'avons montré dans notre Post doctorat sur la naissance de la critique nostradamique au XVIIe siècle (EPHE 2007);kes dites Prophéties de Crespin sont antidatées tout comme l'Androgyn de 1570 lequel se référe obligeamment aux Centuries..propheties.it http://www.propheties.it › biblio L'androgyne né à Paris le 21 juillet 1570 illustré des vers latins de Jean Dorat, ... avec la traduction d'iceux en françois par Chevigny"
En fait, l'on peut se demander si Brind'amour a étudié les rapports de Crespin non pas seulement avec les "premières" Centuries mais avec l'ensemble de dix centuries dont nous pensons qu'il ne se constitua qu'autour de 1590.En 2002, nous en étions resté à la thèse d'une parution posthume des Centuries puisqu'il n'existait aucun document antérieur à 1569 concernant une quelconque parution du premier volet des Centuries. Ce n'est que par la suite, nous avons réalisé que Crespin avait développé une forme d'antijudaisme que l'on retrouvait dans certains quatrains (cf notre communication au congrès mondial des études juives 2005 ("Fortune du prophétisme d’Antoine Crespin Archidamus") Brind'amour note certaines tonalités antijuives qu'il juge tout à fait incompatibles avec le positionnement de Nostradamus sans s'apercevoir que les dits passages auront bel et bien "contaminé" certains quatrains comme ce quatrain "Roy de Bloys en Avignon régnes"(cf notre étude .L’hypertexte centurique des années 1590) lequel condamne la trop grande tolérance du pape envers "ses "Juifs,en Avignon. Apparemment, Brind'amour n'aura pas pris la mesure de l'article de Chantal Liaroutzos dans RHR , 5 ans avant notre propre texte) Les prophéties de Nostradamus : suivez la guide Réforme, Humanisme, Renaissance Année 1986 23 . Brnd'amour aurait compris que les faussaires, les faiseurs de quatrains n'avaient pas trop de scrupules pour remplir les "cases" avec à peu près n'importe quoi.§
Nos travaux sur le syncrétisme ont montré qu'assez vite des clivages majeurs cessent d'être perçus comme dans l'Ancien Testament à propos du schisme entre les maisons d'Israel et de Juda, au lendemaine de la mort du roi Salomon. Rien ne semble plus incompatible. l'ignorance du fait de la méconnaissance des anciens cliaages est la meilleur assurance d'impunité pour le syncrétisme
JHB 25 07 23
Le Livre de l'xode et le Royaume du Nord (Israel) par Tomas Rômer
L’Exode et l’histoire
Notre compréhension des liens entre l’histoire le récit de l’Exode a profondément été modifiée par les découvertes archéologiques, les comparaisons littéraires avec les textes du Proche Orient ancien ainsi que l’utilisation des méthodes scientifiques appliquée aux textes bibliques.
De nombreuses recherches ont tenté de trouver dans tel ou tel épisode de l’histoire égyptienne la base historique de l’Exode. Mais à ce jour, aucun document extra-biblique ne présente un épisode pouvant directement être référé à l’histoire de Moïse.
Une question complexe et discutée
Vu la complexité de la question, il est impossible en une page de présenter l’ensemble des options, des recherches et des hypothèses existantes sur cette question. C’est pourquoi, la synthèse présentée ci-dessous est le résultat d’un choix informé par les travaux d’un des meilleurs spécialistes en la matière, le professeur Thomas Römer du Collège de France. Les lignes qui suivent sont un résumé de ses travaux . Si vous souhaitez aller plus loin, n’oubliez pas de consulter les liens figurant en bas de page. Selon lui, l’histoire de Moïse dans l’Exode se présente comme une construction complexe que l’on peut décrire en cinq étapes.
Dans le royaume du Nord d’abord
Les origines orales de la tradition de la sortie d’Égypte remonte au IXème ou VIIIème siècle avant notre ère dans le royaume du Nord,. Yahvé, le Dieu d’Israël, y est présenté comme étant« celui qui fait sortir Israël du pays d’Égypte». Cette tradition s’est peut être constitué sans le personnage de Moïse. Car de nombreux textes bibliques présentent Yahvé comme étant le seul auteur de la sortie d’Égypte. La tradition orale de l’Exode reflète sans doute des situations conflictuelles entre l’Égypte et des groupes nomades vivant entre l’Egypte et Canaan.
Dans le royaume de Juda ensuite
Le transfert de la tradition de l’exode dans le royaume de Juda et la construction d’une « vie de Moïse » prend place au VIIème siècle avant notre ère. Après la chute de Samarie en – 722, les traditions de l’exode arrive à Jérusalem. Les scribes du roi Josias rédige une vie de Moïse, en construisant ce Moïse à l’image des rois assyriens. Moïse devient un héros qui est chargé de libérer le peuple de Yahvé de l’oppression, laquelle vise, à son niveau du récit, l’occupation assyrienne.
A la période de l’exil à Babylone
Après la destruction de Jérusalem en – 587 et la déportation de l’élite judéenne à Babylone, l’histoire de Moïse est doublement revisité. Le milieu deutéronomiste, qui se compose des familles des anciens hauts fonctionnaires, construit Moïse comme étant le premier des prophètes d’Israël. Moïse devient ainsi le précurseur de tous les prophètes qui, selon la théologie deutéronomiste, sont avant tout les prédicateurs de la loi. La défaite des Égyptiens, noyés dans la mer rouge, reprend, dans cette version, le thème de la guerre de Yahvé, élaborée à partir de l’ idéologie proche-orientale selon laquelle les dieux interviennent dans les guerres des hommes.
La version sacerdotale, qui s’élabore en même temps et qui est partiellement en concurrence avec la version deutéronomiste, introduit Aaron, l’ancêtre des prêtres, comme frère de Moïse. Elle insiste sur la collaboration nécessaire entre Moïse et Aaron lors de la confrontation avec Pharaon. Le miracle de la mer rouge, dans le récit des prêtres, ressemble à une nouvelle création ou à la création d’Israël comme peuple de Yahvé (cf. Genèse 1).
A l’époque perse
Vers le milieu de l’époque perse, les versions de deutéronomiste et sacerdotale sont combinées par des rédacteurs qui ont enrichi cette compilation par d’autres récits. Ainsi, l’on trouve, à l’origine de l’histoire de Moïse, plusieurs épisodes insistant sur l’apport des femmes étrangères qui le sauve de danger de mort (par ex, l’épisode des sages femmes des Hébreux) . Ces passages sont le reflet de débat de l’époque perse sur la ségrégation ou l’intégration des étrangers. Contrairement aux livres d’Esdras ou de Néhémie, qui prônent la dissolution des mariages mixtes, l’exode montre l’importance de femmes étrangères sans lesquelles l’histoire de Moïse n’aurait jamais pu se débuter.
Finalisée durant le 4ème siècle
Finalement, au moment de la promulgation du Pentateuque entre 400 et 350 avant notre ère, l’histoire de Moïse est encore une fois révisée par des rédacteurs.
Pour aller plus loin
Thomas Römer, Moïse en version originale. Enquête sur le récit de la sortie d’Egypte. Bayard – Labor et Fides, paris – Genève, 2015.
Pour voir le cours complet du professeur Römer au collège de France sur: « Le livre de l’Exode: mythes et histoires »
Pour une histoire plus globale sur la formation de l’Ancien Testament, une vidéo du professeur Dany Nocquet de Montpellier.
jacques halbronn Linguistique. Le role à repréciser des lettres "e" et "i" dans l'oralité du français
Jacques halbronn Linguistique. Le rôle à repréciser des lettres « e » et « i » dans l’oralité du français
Nous avions déjà bien avancé dans divers textes dans la redéfinition du rôle de cette lettre dans la prononciation du français mais nous n’étions pas allé tout à fait au bout de notre raisonnement. C’est ainsi que nous avions butté sur la conjugaison de la troisiéme personne du pluriel au présent mais aussi à l’imparfait. Nous avions notamment mis en évidence le fait que le e placé après une consonne la mettait en valeur alors que placé devant une consonne, il l’occultait.
Une application de cette loi est manifeste dans des cas comme « aspect », « respect », où la forme « ct » est effacée à l’oral alors qu’elle s’entend dans aspecter, respecter etc. Quid alors de la forme en « ent », ne devrait-elle pas se prononcer tout simplement « é »? Ils mangent devrait donc s’entendre « ils mangé » tout comme la forme ancienne « ed » du participe, forme qu’a conservé l’anglais mais sans respecter la régle du e devant une consonne. C’est en fait à l’imparfait que le probléme se pose de façon particulière, faut de quoi ils mangent et ils mangeaient se prononceraient pareillement.
C’est finalement sur la question du rôle de la lettre « i » que notre attention va se porter. En effet, la prononciatioin en « é » du « ai » qui nous semble devoir être revue et corrigée.. Prenons le cas du verbe essayer. On a essai, ils essaient, qu’ils essayent ou payer, ils paient, feuille de paie etc Ce son « eye » et non « aye » qui nous semble le plus approprié. On distinguera ainsi, ils chantent à prononcer « chanté » et ils chantaient, à prononcer « ils chanteyent », la forme actuelle du présent et de l’imparfait étant à évacuer. Si l’anglais prononce le « ai », « é », c’est son affaire comme dans day, say, may qui correspondent à l’allemand Tag, sagen, môgen etc
Il faut rendre au « i » sa prononciation « ye » ou « aille ». Les exemples ne manquent pas: roi donne royal, joie joyeux, craie crayeux, soie, soyeux alors qu’on devrait le prononcer « roye », sans parler de cry, try où l’anglais a su préserver la « bonne » lecture. notons en russe les formes « tvoy » pour le possesif , « Somnoy »: avec moi. Ne dit-on pas « langue d’oil », en prononçant le oye?
Nous proposerons la pratique langagière suivante:
Présent de l’indicatif . ils chantent, prononcer « ils chanté », le e effaçant le groupe qui le suit
Imparfait de l’indicatif, ils chantaient, prononcer « ils chantéyé », ce qui évite de confondre chantent et chantaient.
Revenons à la question du statut des marqueurs de nombre en français: tout se passe comme si l’on avait généralisé la non prononciation du « s » comme marqueur de pluriel, à partir du cas des formes où le s est précédé du « e », ce qui va l’occulter. En « bon » français, il faudrait dire : les grandes vacances sous la forme « lé grandé vacancé » à côté de chansons, chantons, avec un « s » bien sonore. L’anglais, lui, aura extrapolé en sens inverse et décidé de ne pas respecter la régle du e devant une consonne ou un ensemble de consonnes; ce par ignorance de la régle exposée plus haut . Avec l’usage de l’accent sur le « e », à l’écrit, cette régle s’est formalisée en français mais n’est respectée qu’à cette condition.
JHB 27 07 27
Robert Benazra La thèse du complot des Centuries
La thèse du complot des Centuries
à l’épreuve de la critique
par Robert Benazra
En ce début de nouvelle année, nous souhaitons à tous nos lecteurs une bonne lecture. Nous avons pensé qu’il serait utile, afin d’éclairer ceux qui nous lisent régulièrement, de donner un résumé des positions d’un de nos collaborateurs les plus prolifiques, concernant sa thèse du “complot des Centuries” et de répondre à son argumentation développée notamment dans notre rubrique Analyse depuis juin 2002.
Sommaire :
1 - Le début d’une controverse
2 - Le cheminement d’une pensée iconoclaste
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Le début d’une controverse
Jusqu’à une date récente, les nostradamologues ne se sont guère préoccupés de rechercher particulièrement des “preuves” qui attesteraient de la publication de Centuries vers le milieu du XVIe siècle, en dehors bien sûr des éditions des Centuries, proprement dites. Il nous faut cependant dire que dès avant les années Quatre-vingt (du siècle dernier), il s’agissait aussi bien pour Michel Chomarat et nous-même, qui avions entrepris chacun de notre côté l’élaboration d’une bibliographie de Nostradamus, d’une part, de fournir aux chercheurs un instrument de travail le plus exhaustif possible et surtout d’intéresser le milieu universitaire à cette recherche nostradamologique que nous appelions de tous nos voeux. La récente Table ronde organisée conjointement par l’équipe de Mme Jacqueline Allemand, du Musée Nostradamus, et la Mairie de Salon-de-Provence, à l’occasion du cinquième centenaire de naissance de l’astrophile provençal, allait dans le sens que nous avions précisé lors des Premières Journées Nostradamus en 1985, dans cette même ville où vécut et mourut Michel de Nostredame. Depuis, des universitaires comme Jean Céard, Jean Dupèbe, Pierre Brind’Amour, Bernard Chevignard ou Jacques Halbronn et quelques autres ont apporté chacun leur pierre à l’édifice que les Amis de Michel Nostradamus voulaient construire. Et de cette double réussite, nous n’en sommes pas peu fières.
Un de ces chercheurs cependant, exploitant les faiblesses de la documentation existante, avance un certain nombre de spéculations, qui ne sont pas du tout partagées par la majorité des nostradamologues, en particulier Michel Chomarat et nous-même. Nous avons cependant souhaité donner la parole à cet universitaire, Jacques Halbronn, sur ce Site, afin qu’il développe ses idées, amorcées il y a une bonne dizaine d’années, après la publication de notre RCN, pour aboutir, à ce jour, à la soixantaine d’études publiées dans notre rubrique Analyse. Nous avons également publié, par l’intermédiaire de nos Editions Ramkat, un développement assez ample des thèses de cet auteur sous le titre Documents inexploités sur le phénomène Nostradamus (2002), ouvrage qui aborde une partie de la thèse doctorale de l’auteur, soutenue en 1999 à Nanterre (Paris X).1
Auparavant, J. Habronn avait écrit un article quelque peu fondateur intitulé “Les prophéties et la Ligue”2 qui posait à la fois le problème et résumait assez bien le point de vue de l’auteur sur la question de l’authenticité des Prophéties de Nostradamus. Nous nous proposons, dans la première partie de la présente étude, d’analyser les principaux arguments développés par son auteur dans ce texte essentiel.
J. Halbronn voudrait aborder différemment les études prophétologiques, avec une méthodologie assez particulière et pour le moins originale à l’égard notamment de contrefaçons réelles ou supposées, car selon lui, le prophétisme passe nécessairement par de tels subterfuges et autres interpolations. Nous reviendrons plus loin sur cette assertion ou profession de foi de J. Halbronn : la prophétie ne peut exister dans ce monde et tout texte dit prophétique est obligatoirement marqué par le contexte socio-politique de l’époque où il est apparu et donc, tout anachronisme dans ce domaine ne peut être qu’un leurre entretenu par la contrefaçon et le faux !
J. Halbronn souhaite remettre en question la datation traditionnelle d’un texte lorsqu’il traite de prophéties, utilisant pour cela ce qu’il nomme un raisonnement de type “chronématique” : il s’agit de dater un document par l’examen attentif de son contenu et la mise en évidence de “chronèmes”, c'est-à-dire des anachronismes ou des indices laissés par les faussaires et qui les trahiraient ; c’est un peu l’histoire du Petit Poucet à l’envers et l’historien des textes doit donc se préoccuper des “sources” en aval en retrouvant les modifications et changements subis par le texte original qu’il s’agit de reconstituer.
J. Halbronn prend ainsi l’exemple de la Ligue et des éditions des Centuries imprimées vers 1588 - 1589. Il se propose de déterminer la spécificité de la production prophétique à cette époque troublée, marquée par la division du Royaume entre les Lorrains et les Réformés. Mais près de trente ans plus tôt, n’était-ce pas également le même contexte avec le début des guerres civiles entre les Papistes et les Huguenots ?
Il semble que la présence du mot Tours dans un quatrain “sensible” revêt pour J. Halbronn une grande signification et porte, sans aucun doute pour lui, la marque du temps de la Ligue : la ville de Tours, à l’instar de La Rochelle, servait les intérêts de la cause réformée, alors que les villes de Paris, Lyon ou Cahors se mettaient plutôt au service de la propagande lorraine. Et voilà le point de départ des thèses halbroniennes.
Toute la démonstration de notre auteur repose essentiellement sur les éditions parisiennes et rouennaise des Centuries publiées en 1588 et 1589. Nous pensons avoir suffisamment démontré dans le RCN (pp. 118 - 121) - dont J. Halbronn fut un des co-éditeurs - que l’édition de la Veuve Nicolas Roffet était une édition frauduleuse qui a utilisé tous les stratagèmes de la falsification (inversion de l’ordre des quatrains, inversion de l’ordre des vers, suppression de quatrains, insertion de quatrains-présages parus dans les années 1561 à l’intérieur de centuries, insertion de quatrains tirés de nulle part, probablement inventés pour l’occasion, etc.) et là, nous sommes entièrement d’accord avec J. Halbronn : cette édition “ligueuse” a bien été imprimée dans un but politique.
Dans un paragraphe intitulé “Les ajouts à la centurie IV”, J. Halbronn entend démontrer que cette centurie IV n’avait pas encore atteint les 53 quatrains (de l’édition Macé Bonhomme datée de 1555) au début de 1588, puisque l’édition rouennaise, imprimée chez Raphaël Du Petit Val en 1588, ne comportait que 49 quatrains à cette centurie IV. Cet argument ne peut emporter l’adhésion et ce, pour une raison très simple : si effectivement il manquait 4 quatrains à la centurie IV de l’édition Du Petit Val, le dernier quatrain se terminait bien par le numéro 53. En effet, il manquait les quatrains 44, 45, 46 et 47 : l’éditeur les avait supprimé purement et simplement !
Ainsi, ce raisonnement de J. Halbronn ne peut tenir, car c’est exactement l’inverse qui s’est produit : 4 quatrains n’ont pas été ajoutés en passant de 1588 à 1590 (n’oublions pas que la même année 1588, les éditions parisiennes de la veuve Nicolas Roffet et de Pierre Ménier, comportaient les dits “quatrains ligueurs” et qu’il en était de même pour l’édition rouennaise de Raphaël Du Petit Val l’année suivante), mais 4 quatrains ont été retranchés dans cette édition rouennaise, dont Daniel Ruzo possédait le seul exemplaire connu. J. Halbronn pêche par excès de zèle, et n’est-ce pas une situation plutôt cocasse dans laquelle se trouve notre historien des textes qui entend démontrer que l’édition Macé Bonhomme de 1555 est antidatée en se référant au contenu d’une réelle et évidente contrefaçon ?
Pour montrer que la Ligue constituait un moment essentiel dans l’histoire de la littérature nostradamique, J. Halbronn met l’accent sur la grand conjonction en Poisson / Bélier qui était attendue pour 1583 / 1584. Cette conjunctio maxima coïncida avec le trouble dynastique provoqué par la mort précoce de François d’Alençon, dernier fils de Henri II et de Catherine de Médicis. Nostradamus serait, pour ainsi dire, le prophète... de la Ligue, et l’auteur de citer le premier vers du 2e quatrain de la centurie VI, qui fait partie des centuries apparues sous la Ligue :
En l’an cinq cens octante plus & moins
A partir de ce postulat, “autour de 1580”, J. Halbronn disqualifie les éditions 1555, 1557 et 1568 - antérieures à la Ligue - et les considère comme des contrefaçons, car toutes, hormis l’édition rouennaise à quatre centuries, comportent une injonction contre une ville “ligueuse”. Notre historien des textes aimerait bien (nous faire) croire que certains quatrains des éditions “contrefaites” 1555 et 1557 reflètent la situation politique telle qu’elle a eu lieu durant la période 1588 - 1590, et le test décisif serait donc pour lui le deuxième vers du 46e quatrain de la IVe centurie :
Garde toi Tours de ta proche ruine
Voilà son interprétation : “Nous y voyons une mise en garde évidente à cette ville, fidèle à Henri de Navarre, siège du Parlement et du gouvernement”, puis l’auteur conclut sans plus de précaution “à la contrefaçon des éditions antérieures à 1588 et qui comportaient le verset : Garde-toi Tours etc.”
Supposons donc, avec J. Halbronn, que ce vers soit effectivement une mise en garde de la propagande lorraine contre les Réformés. Que dire alors de celui-ci qui en est pour ainsi dire le pendant :
Romain pontife garde de t’approcher
Nous remarquons qu’il est construit de la même manière que le précédent et que le poète qui l’a composé tutoie à nouveau sa prochaine “victime” ! Ce vers fut publié avec le même lot de centuries que le précédent, puisqu’il s’agit du premier vers du 87e quatrain de la centurie II.3 Si J. Halbronn veut jouer sur le terrain mouvant de l’interprétation, il me semble que nous avons là une mise en garde contre le pape - le troisième vers de ce même quatrain est d’ailleurs sans équivoque : Ton sang viendra pres de la cracher - laquelle devrait provenir cette fois-ci de la propagande vendomienne.
Il y a d’ailleurs un autre quatrain (I.52), dont le caractère anti-catholique a récemment été souligné par Gruber4, à telle enseigne que Jean-Aimé de Chavigny5 en avait mutilé le troisième vers qui semblait contenir une expression pouvant être lue comme une malédiction pour l’église et l’a donc remplacé par un astérisque :
Version Benoît Rigaud, 1568 :
Peste à l’Eglise par le nouueau roy joinct
Version du Janus Gallicus :
* le nouueau Roy ioint
Mais le plus extraordinaire dans cette affaire, c’est que le lecteur de l’époque n’a probablement jamais eu la même grille de lecture que J. Halbronn : peut-on sérieusement imaginer que le grand public avait quelque chance de pouvoir identifier un vers parmi plusieurs centaines ? En fait de démonstration de la justesse de sa thèse, il nous semble que ce soit plutôt J. Halbronn qui chercherait à instrumentaliser les Centuries !
Dans un second paragraphe intitulé “Les ajouts à la centurie VI”, notre auteur récidive avec le même état d’esprit. En effet, les éditions parisiennes de 1588 et 1589 possède une particularité en leur page de titre : elles se présentent comme des rééditions d’une publication de 1560 - 1561 : “Reveues & additionnées par l’Auteur, pour l’An mil cinq cens soyxante & un de trente-neuf articles à la dernière centurie.” Bien que nous n’ayons pas retrouvé le moindre exemplaire d’une telle édition, qui aurait été publiée chez la faussaire Barbe Regnault6, nous n’excluons nullement son existence, même s’il s’agit sans doute d’une réelle contrefaçon avec une date de publication cependant authentique.
Rappelons à ce propos qu’en 1588, les édition parisiennes de la veuve Nicolas Roffet comportent 71 quatrains à la centurie VI et celles de Pierre Ménier en comportent 74, et que l’édition parisienne de Charles Roger publiée en 1589 ne comporte pas 74 mais 71 quatrains à la centurie VI. Cette centurie VI n’est pas “réapparue” complète en 1590 dans l’édition de Cahors, comme l’écrit J. Halbronn, mais déjà en 1589 dans l’édition rouennaise de Raphaël Du Petit Val : ainsi, la même année 1589 furent publiées une première édition avec 71 quatrains à la centurie VI et une seconde édition avec la même centurie complète cette fois-ci.
Nous avons montré dans le RCN (op. cit.) que dans cette centurie VI, l’éditeur a supprimé 21 quatrains qu’il a remplacé par divers autres quatrains, appartenant notamment aux centuries III, IV, V, et que dans la quasi totalité de ces quatrains répétés, l’ordre des vers en a été modifié pour dissimuler la supercherie au lecteur contemporain qui n’avait certainement pas sous les yeux la dernière édition publiée une vingtaine d’année auparavant.
A la lumière de ces quelques exemples, Il semblerait que le fragile château de cartes nostradamique monté par J. Halbronn possède quelques deffaillances qui mettent en péril les fondations même de sa construction hypothétique, et sur ces seules bases, nous ne pouvons donc pas adhérer à sa thèse des Centuries contrefaites.
Pour montrer que les derniers quatrains de la centurie VI ont été ajouté à l’époque de la Ligue, J. Halbronn prend l’exemple du quatrain VI.85 qui comporterait selon lui une référence au pape élu et rapidement décédé au début de l’été 1590, à savoir Urbain VII :
La grand’cité de Tharse par Gaulois
Sera destruite, captifs tous à Turban
Secours par mer du grand Portugalois
Premier d’esté le jour du sacre Urban
Examinons cependant une autre interprétation de ce quatrain tout aussi plausible que celle de J. Halbronn, notamment celle de G. Belthikine, dans la revue Inconnues, 1955, n° 12, pp. 55 - 56, qui nous semble plus pertinente au point de vue de la concordance. Ce quatrain, associé d’ailleurs au (V.14), relate l’extraordinaire aventure qui survint au grand maître de l’Ordre de l’Hôpital, Jean-Fernandez de Heredia (appelé Heredde dans V.14) connu sous le surnom de “grand portugalois”. Après avoir ramené la papauté de son exil d’Avignon à son siège romain, ce grand maître entreprit une expédition contre les Turcs (Turban) en vue de s’emparer de la ville de Corinthe. Cependant, il tomba dans une embuscade et fut fait prisonnier : ce n’est bien sûr pas une prophétie, puisque nous sommes en 1378, au moment même où Urbain VI (Urban) accédait au trône pontifical. Et cette élection, imposée par le peuple romain, marqua le début du Grand Schisme, un événement très important que ne manqua pas de rappeler Nostradamus dans ce quatrain significatif.
Dans un autre paragraphe intitulé “Les ajouts à la centurie VII”, J. Halbronn poursuit son test relatif aux centuries incomplètes. C’est la dernière centurie du 1er volet des Prophéties et la seule qui restera incomplète dans le “canon” centurique désormais célèbre.
Si on considère les éditions parisiennes de 1588 - 1589, on n’a pas fini d’être étonné de la manière avec laquelle les quatrains nostradamiens sont traités, voire proprement méprisés par certains imprimeurs. Dans les éditions de la veuve Nicolas Roffet, de Pierre Ménier ou de Charles Roger, la “centurie” VII ne comporte que 12 quatrains, numérotés 72 à 83 (poursuivant ainsi la numérotation de la VI), mais en plus, ces quatrains, excepté le premier qui est le 31e de la centurie VI, sont tirés de l’almanach nostradamien pour 1561.7
Là encore, J. Halbronn présuppose que le contenu “traditionnel” de cette centurie n’a pu apparaître qu’entre 1588 et 1590 et de chercher les preuves d’un tel ajout. Mais, une fois de plus, J. Halbronn se contente d’une lecture approximative de notre RCN et passe sous silence le fait qu’en 1589, si effectivement les éditions parisiennes de Pierre Ménier et Charles Roger ne possédaient point ce contenu, celle de Raphaël Du Petit Val à Rouen, la même année, avait 39 ou 40 quatrains à la centurie VII, si on en croît Daniel Ruzo qui possédait l’unique exemplaire, d’ailleurs malheureusement incomplet.
Dans son article, J. Halbronn nous rappelle un témoignage tardif qui fait référence à deux quatrains issus des trois premières centuries, et qui se trouve dans une lettre d’Estienne Pasquier à Airault, datant de 1589 (Livre XIII, lettre VI). Il s’agit des deux premiers vers du quatrain 51 et des quatre vers du quatrain 55 de la centurie III :
III.51
Paris conjure un grand meurtre commettre
Bloys luy fera sortir son plein effect
III.55
En l’an qu’un œil en France règnera
La Cour sera en un bien fascheux trouble
Le grand de Bloys son ami tuera
Le Règne mis en mal & doute double.
L’assassinat de l’instigateur de la Saint-Barthélémy aux états généraux de Blois le 23 décembre 1588, sur l’ordre de Henri III, est clairement annoncé dans les vers ci-dessus, “interprète” le rationaliste J. Halbronn, quatrains qui appartiennent, rappelons-le, à une centurie (la IIIe) qui fut largement attestée par Crespin en 1572.8 Même si nous suivons l’hypothèse qui sera émise par J. Halbronn affirmant que Nostradamus n’est point l’auteur des Centuries, nous avons quand même ici la démonstration éclatante d’une prophétie réalisée !
J. Halbronn se penche sur ce qu’il nomme la “pseudo-édition de Cahors”, qui reproduit en 1590 l’édition de Benoît Rigaud en deux volets. Il nous fait notamment remarquer que cette édition est plus “achevée” que l’édition d’Anvers par François De Sainct Jaure publiée la même année. Si cette dernière comporte effectivement 35 quatrains, nous ferons remarquer à J. Halbronn, ainsi que nous l’avions noté dans le RCN (p. 127), qu’il manque 5 quatrains (les n°s 3, 4, 8, 20 et 22), de sorte que le quatrain numéroté 35 correspond bien au numéro 40 de l’édition de Cahors ! Il n’est pas très rationnel de bâtir toute une théorie du complot à partir de déductions simplifiées, partiales et erronées, alors qu’il est patent que l’éditeur d’Anvers a tout simplement supprimé 5 quatrains dans une centurie déjà existante pour des raisons qui sont les siennes et que l’on pourrait bien sûr analyser, mais point là est notre souci d’aujourd’hui.
Nous pouvons résumer à ce stade la thèse principale de J. Halbronn. Les Prophéties de Nostradamus auraient servi de substrat aux conflits qui opposa les deux camps en présence dans les années qui suivirent la mort du prophète : les premières centuries (premier volet composé des centuries I-IV) furent réalisé par le camp Lorrain dans les années 1570, dans les années 1580 pour les centuries V-VII, et les dernières centuries (deuxième volet composé des centuries VIII-X) furent composées par le camp Navarre (anti-Guise) quelques années seulement avant la fin du XVIe siècle : les Centuries ne furent ni plus ni moins qu’une arme de propagande entre services d’espionnage et de contre-espionnage !9
En fait, J. Halbronn voudrait absolument nous faire croire à l’impossibilité d’un texte qui annoncerait sous la Ligue, qui plus est dans une ville aux mains des Guise, telle Cahors, la victoire, notamment sous forme d’anagramme, de Mendosus (Vendôme) sur Norlaris (Lorraine), clairement annoncée, selon lui, par un vers du quatrain 18 de la centurie X :
Le ranc lorrain fera place à Vendosme
Notre auteur en déduit de manière simpliste que les centuries VIII, IX et X (second volet de l’édition de Cahors) ne sont pas parues sous la Ligue, puisque reflétant les enjeux politiques de l’époque en servant les intérêts d’Henri de Navarre. Il nous semble que même un esprit rationnel peut parfois déraisonner lorsqu’il persiste dans une attitude scientiste et non scientifique : “On peut raisonnablement admettre, écrit J. Halbronn, en raison de l’enjeu, que le texte [Edition des Centuries à Cahors] parut à la veille des Etats de Paris de 1593 qui devaient élire le prochain roi de France.” (p. 122) Nous sommes en plein roman fiction : encore une fois, un vers noyé parmi des centaines d’autres aurait nécessité plusieurs “poètes-fraudeurs” travaillant de concert, “prophétisant” à la manière d’un Nostradamus, décédé une trentaine d’années auparavant, et dont le pot aux roses n’aurait été découvert que quatre siècles plus tard, bien au delà des espérances des instigateurs de l’époque ! Et pour quel enjeu politique, à court terme, M. Halbronn ?
Le vers du quatrain (X.18), cité par J. Halbronn, annonçant selon lui la victoire de Vendôme (Henri de Navarre) sur les Guise, est d’ailleurs en contradiction avec le vers du quatrain (VIII.1) qui ouvre le second volet des Centuries, également cité par le même auteur :
Pau, Nay, Loron, plus feu qu’à sang sera
En effet, si nous suivons la même logique halbronienne, qui interprète les quatrains avec une subjectivité manifeste, puisque créant de lui-même un clivage qu’il voudrait imposer au véritable auteur du texte, il en résulte qu’on ne promet guère de clémence, dans ce dernier vers, aux villes de Navarre ainsi citées. Une fois de plus, l’auteur nous fait lui-même la démonstration que ce nouveau lot de centuries (VIII, IX, X) serait tantôt du côté de la Navarre, tantôt du côté de la Ligue.
J. Halbronn semble d’ailleurs parfaitement se contredire quand il affirme, dans le texte que nous avons publié, que les centuries VIII-X sont attestées dès le début des années 1570 par Crespin, mais que les mentions de Norlaris (VIII.60 & IX.50) et de Mendosus (IX.45 & IX.50) ne le sont pas. En effet, comme nous l’avons montré10, Antoine Crespin Archidamus utilise ces dits quatrains dans Les Prophéties dédiées à la Puissance Divine (1572), respectivement aux Adresses 51 (IX.45) et 70 (IX.50). Et c'est un autre argument d’une hypothèse imp(r)udente qui s’écroule.
Dans le RCN, nous avions notamment signalé, note J. Halbronn, que le quatrain (VI.31) qui figure dans les éditions de La Ligue n’était pas le bon mais lui-même cite par erreur le quatrain (V.31). En fait, notre historien du prophétisme interprète une fois de plus de manière erronée notre analyse de cette édition de 158811 qui avait relevé un nombre relativement important d’anomalies, la disqualifiant pour en faire un élément à charge contre les éditions 1555, 1557 et 1568. Pour en revenir à ce quatrain numéroté traditionnellement (VI.31), nous avions simplement écrit qu’il avait été, avec une vingtaine d’autres, purement et simplement supprimé à cette place dans cette édition défectueuse et remplacé ici par le quatrain (IV.31) qui comme pour les autres, avait l’ordre de ses vers volontairement changés. Le quatrain (VI.31) prenant quant à lui la place du (VI.28) et se trouvant par ailleurs au début de la “centurie septième” de cette édition, d’ailleurs avec d’autres, comme nous l’avons dit plus haut, qui n’étaient pas des quatrains centuriques, puisqu’ils avaient été “empruntés” à l’almanach nostradamien pour 1561.
Dès lors, considérer que ces éditions “imparfaites” de la Ligue - dont l’analyse bibliographique a démontré nombre d’incohérences flagrantes pour des publications parues entre 1588 et 159012 - sont fondatrices du canon nostradamique relève véritablement du tour de force.
Pour nous, voici tout ce que ces éditions ligueuses pourraient éventuellement démontrer :
1 / L’existence incontestable d’une édition précédente à 4 centuries, la dernière incomplète à 53 quatrains (attestée en 1555), puisqu’ainsi constituée : “Prophéties de M. Nostradamus” - centuries première, seconde, tierce et quarte (53 quatrains).
2 / La possible existence d’une édition suivante (1556 ?) comportant au moins les centuries V et VI, puisqu’ainsi constituée : “Prophéties de M. Nostradamus adjoustées outre les précédentes impressions” - quatrains n°s 53 à 100, puis centurie cinquième et sixième (71 quatrains).
3 / La possible existence d’une édition suivante (après 1557) comportant au moins les centuries VII et VIII, puisqu’ainsi constituée : “Prophéties de M. Nostradamus adjoustées nouvellement” - centurie septième (12 quatrains) et huitième (6 quatrains).
En fait, nous ne retiendrons que le premier point, car les centuries VI, VII et VIII, incomplètes, comportant respectivement 71, 12 et 6 quatrains, sont des plus suspects.
Par ailleurs, l’énoncé de la page de titre de ces éditions parisiennes de 1588 - 1589 (Veuve de Nicolas Roffet, Pierre Ménier et Charles Roger) est le même que celui de l’édition disparue de 1560 - 1561, citée par Brunet et qui comportait sept centuries. Le nom de l’éditeur, la veuve Barbe Regnault, n’est pas de nature à nous rassurer, non pas sur l’existence d’une édition des Prophéties de Nostradamus à cette date, mais sur le contenu qui aura certainement été autant falsifié que celui, notamment, de la Pronostication nouvelle pour 1562 et de l’Almanach pour l’an 1563 par le même éditeur13, d’ailleurs également éditeur en 1558 d’un virulent pamphlet anonyme contre Nostradamus intitulé Le Monstre d’Abus.14 Toutes les publications que nous connaissons de Barbe Regnault, fille de François Regault et veuve d’André Barthelin, procèdent d’une bien curieuse manière : elles réunissent divers matériaux provenant de textes nostradamiens authentiques avec des modifications frauduleuses dans l’ordre des vers par exemple.
Que signifie donc cet énoncé : “Reveues & additionnées pour l’Autheur pour l’an mil cinq cens soixante & un, de trente neuf articles à la dernière centurie” ?
La première occurrence de cette formule se trouvait sur un exemplaire des Prophéties de Nostradamus (Paris, Barbe Regnault, 1560) vendu 12 sols à la vente Gersaint de 1750.15 Cet exemplaire - vraisemblablement une édition piratée, cependant contemporaine de l’époque annoncée - comportait, nous dit Brunet, sept centuries et à la fin du livre, on pouvait lire la date de 1561. Ainsi, en toute bonne logique, cet exemplaire devait comporter 39 quatrains à la centurie VII. Or, l’exemplaire des Prophéties conservé à Budapest et daté de 1557, imprimé chez Antoine du Rosne, comporte 40 quatrains à la centurie VII. Mais ce même exemplaire comporte également 99 quatrains à la centurie VI. Puisque l’énoncé ci-dessus ne précise pas à quelle centurie nous avons affaire, on pourrait légitimement supposer qu’il s’agissait d’insérer 39 quatrains “à la dernière centurie”, en complétant la sixième, mais c’est une simple conjecture.
A la fin de son article, après avoir affirmé que les exemplaires des éditions de 1555 et 1557 qui nous sont parvenus sont des contrefaçons qui portent la marque de la Ligue, J. Halbronn écrit : “Cette recherche est trop importante pour être laissée à ceux dont la préoccupation première reste le classement alphabétique et chronologique, sur la base des seules données apparentes”. Il n’est pas superflu de rappeler ici que sans un tel recensement - qui avait été fait, nous l’avons dit plus haut, de manière systématique dans les années 1980 - 1990, “et dont malheureusement la plupart [des nostradamisants] ne soupçonnaient même pas la nécessité”, écrivait Jean Céard dans la préface à notre RCN, J. Halbronn n’aurait jamais pu formuler de telles hypothèses et les études nostradamiennes ou nostradamiques seraient certainement restées l’apanage des seuls interprètes et autres commentateurs. Quant à l’argumentation développée dans l’article ici analysée, malgré toute la bonne volonté mais également le dénigrement systématique de l’auteur concernant les pièces du dossier qui nous sont parvenues, elle ne nous semble pas de nature à devoir mettre en cause la chronologie traditionnellement admise par le bibliographe aujourd’hui.
Robert Benazra
Feyzin, le 6 janvier 2004
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Le cheminement d’une pensée iconoclaste
Il est indéniable que Jacques Halbronn, dès avant la publication de sa thèse d’Etat, a contribué à intensifier la recherche de certaines confirmations (rares) de la publication de Centuries dans les années qui suivirent la mort de Nostradamus. Ainsi, grâce à un usurpateur nommé Antoine Crespin dit Archidamus, nous avons par exemple la conviction qu’en 1572, les Centuries étaient connues.16 Mais les “preuves” ainsi apportées et analysées, notamment sur notre Site, seraient en substance toutes frelatées ou pour le moins interprétées de façon outrancière. Il ne pouvait en être autrement, puisqu’il s’agit pour l’auteur de démontrer une (hypo)thèse, dont il faut bien l’avouer, qui avance sur le terrain mouvant du manque évident de documentation. On lui demanderait bien de tenter ce même genre de démonstration “négative” avec le Pantagruel de François Rabelais ou d’ailleurs tout autre texte d’un écrivain connu du XVIe siècle !
L’historien des textes va donc élaborer un certain nombre d’hypothèses, certes audacieuses, mais essentiellement soutenues par des arguments fondés sur un corpus très lacunaire et tenter de convaincre ses lecteurs de la justesse de sa proposition avancée d’un complot plus ou moins concerté, de faussaires très organisés sur plusieurs générations. Et que le but de ces faussaires était d’attribuer toutes sortes de documents à Nostradamus afin d’accréditer la thèse officielle admise par les bibliographes actuelles, à savoir que Nostradamus est l’auteur d’un recueil de Centuries comportant des quatrains et de faire de l’astrophile provençal une figure de légende contraire, selon lui, à la réalité.
Pour J. Halbronn, on ne trouvera jamais une référence explicite et viable aux quatrains centuriques ou à toute expression équivalente, avant 1585, c’est-à-dire avant la notice que Du Verdier consacre à Nostradamus.17 En d’autres termes, même si on trouvait un verset ou un quatrain centurique chez un auteur tel Crespin ou Colony, dans les années 1570, ceux-ci ne seront jamais attribués nommément à Nostradamus.
Dans sa critique des historiens de la littérature nostradamique, J. Halbronn voudrait mettre en évidence que le “nostradamisme centurique” est une supercherie littéraire et n’y voit donc qu’une approche apologétique et exégétique. Il veut ainsi proposer une autre méthodologie pour la description du corpus centurique, passant bien évidemment par une dénonciation systématique des documents qui sont parvenus à notre connaissance. Mais ette nouvelle approche critique de l’historien des textes prenant en compte le contexte historique, en recherchant témoignages et recoupement, suppose, malheureusement à priori, que l’événement prophétique ne traite que d’un futur immédiat souhaité et donc que la motivation et la manipulation des faussaires supposés seront toujours d’ordre purement politique.
La théorie de J. Halbronn repose aussi, nous l’avons vu précédemment, et en grande partie, sur le contenu des éditions parisiennes dites de la Ligne, parues en 1588 - 1589. Rappelons, une fois de plus, que nous avons apporté, dans le RCN, toute une argumentation qui disqualifie ce type d’édition. Pour ne présenter ici qu’un élément parmi d’autres, nous savons par le seul témoignage d’Antoine Couillard, dans ses Prophéties, datées de 1556, que la Préface à César a bel et bien été publiée en 1555. Or, dans ces éditions ligueuses, la même préface est datée de 1557 !
Dans les textes que J. Halbronn a publié sur notre Site, on trouve des affirmations à l’emporte-pièce, telle celle-ci : “on sait pertinemment [que la Préface à César] n’introduisait pas initialement les dites Centuries”18, puis une autre affirmation du genre : les véritables Prophéties de Nostradamus sont dues à l’imposteur qui s’est fait connaître sous le nom de Mi. de Nostradamus le Jeune19, ou bien encore qu’il s’agit d’une œuvre du poète gascon Auger Gaillard, celui dont le portrait - légèrement modifié - ornera un certain nombre d’éditions des Centuries du XVIIe siècle.20
Les “Centuries” de Nostradamus seraient ainsi l’œuvre de plusieurs faussaires de nature et d’époques diverses. D’ailleurs, J. Halbronn étend le concept à toutes les prophéties de France et de Navarre, et affirme qu’elles seraient toutes récupérées et ne peuvent pas échapper aux clivages politico-religieux. Elles ne font sens que pour l’époque où elles ont été composés, et ce qui importe donc est la contextualité de leur rédaction : toute littérature prophétique ne peut s’apparenter qu'au journalisme ! Voilà donc en substance la thèse que défend J. Halbronn depuis une bonne dizaine d’années.
Avant d’aborder certains points particuliers de cette thèse21, on peut résumer ainsi la typologie des éditions centuriques, telle que la conçoit leur auteur.22
Dans les années 1570, il y aurait eu deux types d’éditions : celle comportant les centuries I à IV et celle comportant les centuries qui seront par la suite connues comme VIII à X, soit un ensemble comportant sept centuries (I-IV et VIII-X). La première version à quatre centuries pleines est publiée sous le nom de Nostradamus le Jeune (ou Mi. de Nostradamus) et introduit par une épître dont on ne connaît pas le contenu. La “véritable” Préface à César, qui annonce des “Vaticinations Perpétuelles”, introduisait un autre genre de prédictions qui s’apparenterait plutôt aux Prophéties Perpétuelles de Thomas Joseph Moult (1740). Et une nouvelle Préface (celle retouchée de Nostradamus à son fils César) est alors rééditée, avec une centurie IV incomplète comme étant parue à Lyon chez Macé Bonhomme en 1555.
Dans les années 1580, il y aurait eu une première famille d’éditions comportant sept centuries (I à VII) avec la préface à César, apparue autour de 1588 et qui a conduit au faux antidaté de 1557, chez Antoine du Rosne (Bibl. de Budapest et de l’Université d’Utrecht). Une seconde famille d’éditions comportant dix centuries (I à X) avec la préface à César et l’Epître à Henri II, serait apparue vers 1584 et a conduit à un faux antidaté de 1568 chez Benoist Rigaud (exemplaires conservés, essentiellement d’abord parus chez des libraires lyonnais). Une troisième famille d’éditions comportant dix centuries plus les présages et les sixains, avec trois Epîtres (à César, à Henri II, à Henri IV), serait apparue vers 1593 et a conduit également à un faux antidaté de 1568 chez Benoist Rigaud (exemplaires conservés du XVIIe siècle, essentiellement d’abord parus chez des libraires troyens). Cette dernière correspond à un projet nostradamique en douze livres, signalé par Jean-Aimé de Chavigny dans son Janus Gallicus et sur lequel nous reviendrons.
Selon la reconstitution halbronienne de la “diachronie” centurique, on aurait publié des centuries complètes quelques années après la mort de Nostradamus, puis plus tard, dix centuries complètes, soit 1000 quatrains, constituant une “miliade” selon la formule de l’Epître centurique à Henri II. C’est n’est qu’à partir de 1584 que des centuries incomplètes auraient été publiées.
Ainsi donc, les exemplaires des Prophéties qui nous sont parvenus (1555, 1557 et 1568) sont des faux ou plus exactement des contrefaçons, en utilisant la subtile terminologie de l’auteur. Une raison invoquée pour l’édition Macé Bonhomme de 1555, ne comportant que 53 quatrains à la centurie IV, c’est qu’elle n’est pas attesté par les éditions lyonnaises de 1557 et de 1568 et qu’il faut attendre 1588, d’une part avec l’édition rouennaise - dont l’unique exemplaire se trouvait dans la Bibliothèque de Daniel Ruzo - pour que soit signalé en titre la division en quatre centuries et d’autre part avec les éditions parisiennes, dont le contenu introduit une coupure après le 53e quatrain de la IVe centurie.
Si les éditions des Centuries qui nous sont parvenues sont des faux qui n’ont pas été composés par Nostradamus, comme le pense J. Halbronn, les premières questions qui viennent à l’esprit sont les suivantes : pourquoi avoir laissé des centuries incomplètes (la IV pour l’édition 1555 et la VII pour les éditions 1557 et 1568, à 40 ou 42 quatrains), et si l’Epître à Henri II qui préface les centuries VIII à X est largement extrapolée, pourquoi comporte-elle dès lors cette référence à une “miliade”, alors que les Prophéties qui auraient été falsifiées, et qui nous sont parvenues, ne comportent-elles point les 1000 quatrains annoncées ?
La préface à César dont J. Halbronn ne peut (malheureusement) pas nier l’existence, à cause de plusieurs témoignages indépendants et citations, notamment celui de Couillard en 1556, aurait donc été refondue au début des années 1580, à la veille de la publication de l’édition “à la miliade”, dont Du Verdier s’est fait l’écho dans sa Bibliothèque en 1585.
Il est vrai que la thèse d’une première édition à sept centuries précédée de la Préface à César aura longtemps prévalu chez les nostradamologues, s’appuyant sur le premier volet des éditions datées de 1568. Si au début du XVIIIe siècle, Pierre-Joseph de Haitze23 date cette édition à 7 centuries de 1555, cela reste également le point de vue de biographes de Nostradamus, tels que Jean Moura et Paul Louvet24, qui manifestement n’avaient pas lu Eugène Bareste25, comme le fera trois ans plus tard Jacques Boulenger.26
En ce qui concerne cette Lettre à César, les différences que l’on constate entre ce texte et le “pastiche” de Couillard s’expliquerait d’après J. Halbronn par le fait que le document qui nous est parvenu sous cette désignation ne soit pas l’original mais serait une faux. Nous répondrons que Couillard n’a pas souhaité faire une reproduction servile mais bien une parodie, du même genre que celle que fera l’auteur d’un pamphlet anonyme contre Ronsard27, paraphrasant en quelque sorte l’Eligie à Guillaume des Autels de notre prince des poètes28 : les expressions ne sont justement jamais rigoureusement identiques, ainsi qu’on peut le voir dans l’exemple ci-dessous :
Ronsard (1560)
France, de ton malheur tu es cause en partie,
Je ten ay par mes vers mille fois advertye…
Ait de Nostradamus l’enthousiasme excité,
Ou soit que le daimon bon ou mauvais l’agite,
Ou soit que de nature il ayt l’ame subite…
Anonyme (1563)
France, tout ce malheur te vient de ta folie,
Dieu t’en a par sa voix mille foix advertie…
Ait d’un Nostradamus l’enthusiasme excité,
Car Dieu ne le conduit, ains le malin l’agite,
Quand de nature il cuide avoir l’ame subite…
Ainsi, quand Nostradamus disait à son fils César que “la connaissance de cette matière ne se peult encores imprimer dans ton debile cerveau” (Ed. 1555, fol. A4v), Couillard maniant l’ironie, comme à son habitude, répondait : “mon debile cerveau en a depuis eu fort à souffrir” (fol. B2r) !
Dans son article “Le Janus Gallicus et les éditions des Prophéties”29, J. Halbronn nous confirme lui-même, involontairement, l’hypothèse que nous avions émise dans notre étude30, à savoir que les carmes, ainsi désignées par Antoine Couillard, étaient bien des quatrains, lorsqu’il cite un passage de Jean de Chevigny qui fait allusion à Dorat31, dès 1570 :
“Pource donc que luy mesme [Dorat] confesse qu’il a profité & allegue les carmes d’un Prophete, qui fut Monsieur de Nostradame (...) je vous en ay bien voulu donner ce contentement. C’est le quatrain quarante cinquieme de sa seconde Centurie prophétique...”32
Ce quatrain mentionné est cité dans son intégralité avec une numérotation qui est celle du canon nostradamique.33 Pour J. Halbronn, ce texte de L’Androgyn de 1570 serait bien évidemment une contrefaçon, puisqu’il contient un témoignage en faveur des Centuries, attribués à Michel de Nostredame, avant cette date. Rappelons le principal axiome de cet historien : un texte qui apporte une preuve de l’existence des Centuries attribués à Nostradamus avant les années 1580 est un texte antidaté ou contrefait !
Par ailleurs, l’auteur soutient également que la Paraphrase de Galien sus l’exortation de Menodote (...) traduite de latin en françois par Michel Nostradamus, parue chez Antoine du Rosne (1557 et 1558), bien que texte non prophétique34, n’en serait pas moins une contrefaçon qui aurait accompagné les dites fausses éditions des Prophéties datées de 1557, car elle comporte “étrangement” une vignette semblable aux publications lyonnaise des Centuries (1555, 1557). J. Halbronn semble oublier qu’on y trouve notamment un acrostiche au folio D 7, d’ailleurs annoncé par l’auteur de l’Epître au Baron de la Garde : “et à un d’eulx avons mis notre surnom, aux lettres supérieures”.35 Et que penser d’une allusion claire à cet ouvrage dans les Epîtres Latines.36 En effet, vers 1560, le correspondant de Nostradamus, un certain Olrias de Cadenet, son cousin germain, s’adresse à lui ainsi :
“(...) moi, être indigne, incapable de goûter l’enseignement de Galien, j’ai osé exprimé mon opinion sur votre petit chef d’œuvre (…) J’ai dit à votre frère que nombre d’auteurs français, au style très pur, à la réputation bien établie, n’échappaient pas pour autant aux critiques de doctes lecteurs ; j’ai ajouté que votre traduction, même si elle était très fidèle à Galien pourrait bien subir le même sort.”37
En fait, J. Halbronn, qui a réponse à tout, affirme que les faussaires, ayant appris - par ce recueil de lettres personnels, qui devait circuler, semble-t-il, par toute la France - l’existence d’une étude de Nostradamus sur Galien, ont ainsi produit cette traduction ! Nous devons reconnaître, et nous retrouverons d’autres exemples de ce type, que nous avons parfois beaucoup de mal à suivre un raisonnement halbronnien, tant il erre souvent vers les sphères de l’improbable, voire de l’impossible. C'est vers de telles situations épistémologiques et méthodologiques que voudrait nous entraîner J. Halbronn accusant par avance ses éventuels contradicteurs d’instrumentaliser le phénomène Nostradamus, d’en faire une sorte d’ “artefact nostradamique” et de vouloir constituer une école apologétique à la solde des “Amis de Nostradamus”.
Cependant, toutes ces hypothèses iconoclastes concernant les faux supposés d’œuvres nostradamiennes ne reposent, nous l’avons dit et nous le répétons, que sur une seule et unique conviction, un dogme, dirions-nous : la prophétie n’existe pas et personne n’a pu décrire ou décrypter des événements avant qu’ils ne se produisent et donc Nostradamus n’a pu faire exception à cette règle, à cette “loi halbronienne” qui dit grosso modo, pour paraphraser une formule de Lavoisier : Rien ne peut être prophétisé, rien n’est innocent, tous les écrits prophétiques sont des contrefaçons ! C’est pourquoi, selon cet “axiome”, dans la mesure où l’on trouve des quatrains tirés des écrits de Nostradamus qui sembleraient correspondrent à des événements postérieurs à leur rédaction supposée, l’ultime conviction de J. Halbronn est que les quatrains en question sont une extrapolation ou bien que l’édition des Prophéties qui les contiennent sont tout simplement des faux édités avec la malicieuse intention de tromper les contemporains du ou des faussaires.
Il est vrai, par ailleurs, que Nostradamus ne mentionne les Centuries ni dans sa correspondance ni dans ses publications annuelles, ce qui permet déjà à certains historiens de nier qu’il en fut l’auteur. Une des rares pièces, n’appartenant pas au corpus centurique proprement dit, et pouvant témoigner de l’existence de Centuries du vivant de Michel de Nostredame, est publié en 1558 : ce sont les Significations de l’éclipse qui sera le 16 septembre 1559 qui évoquent une “seconde centurie”. Pour conforter sa thèse, J. Halbronn devra donc considérer ce petit texte comme une contrefaçon. Imaginons donc un faussaire qui fabriquerait un faux, en soulignant les effets d’une éclipse qui se serait produite plusieurs années auparavant, un faussaire qui aurait dépensé tant d’énergie, au risque de se voir démasquer par ses contemporains, pour simplement insérer une petite phrase justifiant de la réalité des centuries nostradamiennes en 1558 ! Ce n’est pas très sérieux. La seule justification de ce document de 14 pages, c’est qu’il s’agissait vraisemblablement pour Nostradamus, comme indiqué d’ailleurs sur la page de titre, de fournir “une sommaire response à ses detracteurs”.
L’historien des textes de s’interroger également sur l’authenticité des almanachs dits de Nostradamus. Comme l’ésotériste P. V. Piobb, dans la première moitié du XXe siècle, J. Halbronn conteste à Nostradamus la paternité de nombreux écrits parus sous son nom. Bien plus qu’une légende, Nostradamus serait donc un mythe pour J. Halbronn qui aime souvent à mélanger les textes et les époques. Car, ce n’est pas parce que les Protocoles des Sages de Sion sont véritablement un faux, attesté d’ailleurs très tôt par tous les historiens, que les Prophéties de Nostradamus en sont un également. A voir des faux et des complots partout, on finit par perdre pied, et remettre en doute de manière systématique les dates fournies par les quelques exemplaires des éditions centuriques qui nous sont parvenues tient plus d’une certaine lubie que d’une approche méthodologique qui se voudrait à la fois scientifique et rationnelle.
Selon J. Halbronn, la formule de Couillard sur les “nouvelles prophéties & pronostications” concernerait d’une part les almanachs avec leurs quatrains et d’autre part les pronostications nommément citées. Cette supposition et hypothèse me semble quelque peu arbitraire et infondée. J. Halbronn a montré dans un précédent article (cf. CURA) que les almanachs contenant des vers prophétiques n’étaient point une nouveauté en ce temps-là, et Couillard devait le savoir lui aussi. Son expression “nouvelles prophéties” concernait donc des “prophéties” dont le genre était inédit.
Par ailleurs, lorsque Couillard rédige sa parodie en 1555, un seul “almanach” nostradamien avait paru, justement celui pour 1555, ou plus exactement la “Pronostication pour 1555”, et si les “carmes”, dont nous parle également Couillard, Dorat et Chevigny, n’avaient été que les versets des quatrains-présages, comme le suppose J. Halbronn, Nostradamus en aurait donc composé moins d’une centaine et non “trois ou quatre cens carmes”, aux dires du premier contradicteur de l'astrophile de Salon-de-Provence ! Mais J. Halbronn n’est guère convaincu par sa propre hypothèse, puisqu’il en propose une autre : ainsi, grosso modo, il s’agit de 365 pronostics pour 365 jours d’une année. A l’appui de sa thèse, il cite un extrait de la présentation anglaise de l’Almanach pour 1559 faisant allusion à ces “short and mysticall sentences”. Malheureusement, ces petits présages qu’on voudrait identifier aux carmes sont tout sauf obscurs, justement : aujourd’hui “Beau temps”, demain “Bonne nouvelle”, etc. et en plus, ce genre de pronostics se trouve dans les almanachs à la date du jour en question !
Couillard étant à la foire d’Orléans, en novembre 1555, se trouva en présence d’un colporteur qui vendait certaines “Prophéties”. Il raconte :
“Les unes composées partie en prose, & autre partie en carmes tenebreux & obscurs, & les autres estoient les Pronostications aisées à entendre & claires comme le beau jour du midi.”38
Nous avons montré, dans un précédente étude39, que ces “carmes” ne sont autres que les quatrains eux-mêmes, mais pas seulement ceux qui se trouvaient dans un almanach de Nostradamus, celui pour 1555, et surtout que les Centuries, contrairement à ce que pense J. Halbronn, sont bel et bien parues non seulement du vivant de l’astrophile provençal, mais précisément en cette année 1555, dans un recueil de “prophéties” comprenant une préface à son fils César et “trois ou quatre cens carmes de diverses ténébrositez”, soit trois ou quatre centuries.
Dans l’Advis au Lecteur de sa Première Face du Janus françois, Jean-Aimé de Chavigny parle d’ “environ trois cens cinquante quatrains”. Il fait bien évidemment allusion aux quatrains des almanachs et des centuries dont il nous donne un commentaire, mais on peut se demander si le secrétaire particulier de Nostradamus, qui utilise une expression semblable à celle de Couillard, et n’ayant pas eu accès à l’édition Macé Bonhomme de 1555 comportant 353 quatrains, n’a pas voulu imiter et retrouver l’édition originale du Maître ?
Il nous semble qu’il y ait une certaine confusion chez certains nostradamologues qui voudraient distinguer entre pronostications et almanachs, les présages en vers (quatrains) devant se trouver exclusivement dans les seconds. La note de Chevignard (p. 268, note 1) n’est pas fausse, mais il faudrait éviter de la généraliser comme le fait J. Halbronn.40 A l’époque, on se servait indifféremment de l’un ou l’autre terme, et au début, Nostradamus agissait comme ses contemporains. Preuve en est la lettre que nous avons conservée de Hans Rosenberger adressée à Nostradamus, le 15 décembre 1561, où il lui demande de lui envoyer son “Ephemeridem41 de 1562 dédiée à Pie IV”, se plaignant d’ailleurs que de nombreux faux circulaient, même à Lyon.
Dans son étude42, J. Halbronn doute que l’épître dédicatoire mentionnée à Joseph de Panisses figurait en tête de la Prognostication pour 1555. Il suffit pourtant de se reporter à la reproduction du frontispice pour en avoir la confirmation.43
Cette première pronostication qui nous est parvenue, et dont l’unique exemplaire était conservé dans la Bibliothèque de Daniel Ruzo, n’en contenait pas moins des quatrains, ceux de l’année 1555, à moins de mettre en doute les affirmations de Ruzo lui-même, que nous avions rencontré, il y a une vingtaine d’années et dont nous connaissions déjà l’honnêteté intellectuelle, sans partager cependant toutes les hypothèses qu’il avait formulées concernant l’œuvre de Nostradamus.
Nous avons d’ailleurs un autre témoignage qui recoupe celui du chercheur péruvien. En 1870, Torné-Chavigny avait un exemplaire de ce document rarissime. Ecoutons-le :
“Le 2444 janvier 1554, Nostradamus fit la Prognostication pour l’année 1555 avec ses premiers Présages pour la même année. C’est l’un deux qui renferme ces mots : “Annibal fait ses ruses… Denys n’a sceu secret et à quoy tu t’amuses ?” Cette prophétie, antérieure aux Centuries…”45
Il s’agit bien de la “Prognostication” décrite par Daniel Ruzo46 dans ses précieuses fiches bibliographiques, que nous avons largement utilisé pour l’élaboration de notre RCN.47 Cet exemplaire unique est dédiée, le 27 janvier 1554 au prévôt de Cavaillon, Joseph des Panisses.
Dans le Recueil des présages prosaïques (RPP), Jean-Aimé de Chavigny scinde en deux séries de présages la Prognostication pour 1555 : “Des presages de l’an 1555” et “D’un autre presage sur la mesme année”.48 Mais il s’agit d’un seul et même ouvrage comme le montrent les extraits donnés par Torné-Chavigny.49
Dans son Nostradamus et l’Astrologie, Torné-Chavigny décrit ce même exemplaire, où nous trouvons en premier lieu les présages relatifs aux saisons, puis des chapitres sur la France, l’Espagne, l’Italie et l’Allemagne, puis les “Présages des douze moys de l’an 1555”. Le RPP a découpé le contenu de cette prognostication, de la manière suivante :
1/ Présages pour le printemps, l’été, l’automne et l’hiver suivis des 12 quatrains de l’année, chacun des mois étant accompagné de quelques présages.
2/ Des présages sur chaque mois suivis de quatre chapitres : De la France, Du Royaume et terre d’Espagne, De la Romanie, De la Germanie.
Dans le Janus Gallicus, nous trouvons deux quatrains pour annoncer l’année 1555, avant de passer aux quatrains mensuels. Le premier quatrain (“1555. D’un présage sur la dicte année”) qui ouvre le Recueil des Présages Prosaïques50 à l’année 1550, est le “quatrain général” de la Prognostication nouvelle pour 1555, alors que le quatrain-présage suivant (“De l’Epistre liminaire sur la dicte année”) ne semble pas devoir être attribué à Nostradamus.51
Dès 1560, Ronsard voit chez Nostradamus un poète à l’inspiration prophétique. Il est peu probable que le maître de l’Ecole de la Pléiade pensait aux seuls Almanachs de l’astrophile salonnais, mais avait vraisemblablement à l’esprit les quatrains des Centuries, lorsqu’il s’épanchait ainsi :
Que par les mots douteux de sa prophete voix,
Comme un oracle antique, il a dès mainte année
Prédit la plus grand part de nostre destinée.52
Dans son introduction à une édition des sept premières centuries, Bruno Petey-Girard analyse assez intelligemment l’art poétique nostradamien et souligne la différence - à ses yeux, essentielle - entre les deux types de publications de Nostradamus :
“Nostradamus propose : d’une part les Almanachs qui seraient destinés au grand public - ce qui ne signifie pas impérativement à un public populaire -, et d’autre part les Centuries prophétiques qui viserait un public plus restreint de lettrés et d’humanistes capables d’en décoder certains éléments savants et d’y trouver le plaisir d’une connivence cultivée.”53
Dans l’épître à son fils César, Nostradamus écrit qu’il a “rédigé par escrit, [d’]autres Propheties qui sont composées tout au long, in soluta oratione”, c’est-à-dire en prose. Et on peut légitimement se demander s’il n’a pas existé un texte, dès cette année 1555, plus accessible que les quatrains des Centuries. Nous ne savons pas si Nostradamus fait allusion au passage que nous avons cité, lorsqu’il évoque, dès 1559, une “interprétation de la seconde centurie de [ses] Propheties”54, passage qui serait interpolé, prévient J. Halbronn.
Et avec le même auteur de nous interroger. Michel de Nostredame a publié ses Centuries dès 1555, mais il semble que certaines prophéties avait été conservées “par devers lui”, depuis une ou deux decennies, peut-être depuis l’époque de ses études universitaires, dans les années Trente. Ne lit-on pas dans la Lettre à César :
“Combien que de longs temps par plusieurs foys j’aye prédit longtemps auparavant ce que depuis est advenu & en particulières regions, attribuant le tout estre faict par la vertu & inspiration divine etc”
Michel de Nostredame serait ainsi son premier exégète en présentant certains quatrains, dont il a pu vérifier leur réalisation. Le passage cité renvoie à une époque, non cependant indiquée, où certains pronostics sont supposés avoir été composés, peut-être “dez l’an de Grace 1534” si l’on en croit la page de titre du Janus Gallicus. Nous savons que dès cette année, Michel de Nostredame venait de s’installer comme médecin en Agenais.
Dès lors, on pourrait comprend l’allusion déjà citée dans les Significations de l’Eclipse qui sera le 16 septembre 1559, datée du 14 août 1558, reproduite en fac-similé dans l’ouvrage de B. Chevignard : “comme plus amplement est déclaré à l’interprétation de la seconde centurie de mes Prophéties.” Il pourrait éventuellement s’agir d’un commentaire que Nostradamus lui-même aurait composé et qui devait contenir une “interprétation” de ses quatrains prophétiques.
Rappelons que la règle halbronienne du jeu prophétique voudrait que le texte à prétention prophétique, aborde toujours un futur très proche, et il serait relativement facile d’en déterminer la date de publication par l’examen du contenu, en gardant à l’esprit que la prophétie n’existe pas en ce bas-monde. Ainsi, la thèse de J. Halbronn prévoit que les centuries VIII-X annoncent la victoire du camp protestant sur le camp catholique : ce serait la raison pour laquelle les éditions de Rouen, Paris et Anvers, qui paraissent sous la Ligue ne comportent pas les dites centuries pas plus que l’Epître à Henri II, dont le caractère réformé serait “évident” !
Voici un autre exemple : si on évoque l’année 1585 dans l’épître à Henri II, c’est, nous affirme J. Halbronn, que cette fameuse lettre n’a pu paraître qu’à cette époque, et de rechercher le contexte politique qui lui est associé. Or, nous dit-il, en 1584, le duc d’Alençon décède et laisse ainsi le champ libre au réformé Henri de Navarre, un cousin du roi Henri III : CQFD !
Par alleurs, pour montrer que les centuries VIII à X sont plus crespiniennes que nostradamiennes, J. Halbronn oppose les convictions farouchement antijuives des textes de Crespin, notamment celui où il s’en prend à ces “faux juifs exécrables”55, à l’attitude de Michel de Nostredame, d’ascendance juive, et qui n’a pas exprimé une hostilité particulière à l’égard de ses ex-coreligionnaires. Crespin trouve en effet non tolérable l’existence d’une certaine “enclave juive” en Avignon et milite en faveur de la reprise de ce “territoire occupé” par le pouvoir royal : Le Roy de Bloys dans Avignon régner, vers que l’on retrouve curieusement au début de deux quatrains d’une même centurie : VIII.38 et VIII.52. Puisque le 4ème verset du quatrain 52 est incomplet, il ne fait aucun doute pour J. Halbronn que cela est le signe d’une contrefaçon. Quant aux mentions de Carpentras et de Rome dans le quatrain (IX.41), elles renvoient à des événements survenus en 1571, impliquant fortement Crespin, et notre auteur pense ainsi avoir démontré que ces textes sont postérieurs à la mort de Nostradamus, textes qu’il situerait à la veille de la St-Barthélémy !
Dans les éditions parisiennes tronquées de 1588 - 1589, la centurie VI va jusqu’au quatrain 71. La raison n’est pas qu’il n’existait, à cette époque, que 71 quatrains à la VIe centurie, mais que les éditeurs ont voulu souligner par une sorte de coupure à cet endroit un ou plusieurs quatrains. C’est donc une raison purement exégétique qui permet ainsi d’attirer l’attention sur les quatrains qui précèdent ou qui suivent la dite coupure : un précédent avec une IVe centurie qui termine au quatrain 53, également souligné dans ces éditions, avait fait somme toute jurisprudence.
Si la centurie VI, dans les éditions parisiennes de la Ligue est coupée, ce serait donc pour attirer l’attention du lecteur sur le quatrain ainsi placé artificiellement en position finale.
VI.71
Avant qu’il ait du tout l’ame rendue
Quand viendra le grand roy parenter
Celuy qui moins viendra lamenter
Par lyons, d’aigles, croix, couronne vendue
Selon l’interprétation de J. Halbronn, Il s’agit là en fait d’une attaque contre Henri de Navarre, auquel il est reproché de s’appuyer sur l’étranger, symbolisé par le lion, l’aigle, la croix, et de leur vendre la couronne. Mais à contrario, si l’on trouve dans les mêmes éditions ligueuses une centurie IV coupée en deux, exactement sur le modèle de la centurie VI, on peut difficilement rapporter le quatrain IV.53 à un événement qui aurait été parfaitement identifié par les lecteurs de l’époque, tant il est vague.
Si nous pouvons admettre, en effet, que certaines éditions des Centuries n’ont pu paraître que dans un certain contexte qui leur donnait tout leur sens, il me paraît un peu trop téméraire de généraliser une telle hypothèse, en établissant (inconsciemment) un transfert inadéquat avec qui passe à notre époque avec les publication tapageuses et de circonstance de moult interprétations, dont nous savons qu’elles ne sont pas bien évidemment innocentes.
Le but du “gang des faussaires”, en inondant le marché populaire avec de nombreuses contrefaçons, aurait été de crédibiliser des éditions centuriques antidatées, en insérant à l’intérieur de textes authentiques de Nostradamus des passages apocryphes : pour J. Halbronn, toute mention d’un passage créditant Nostradamus de ses Centuries est le résultat d’une contrefaçon.
Nous pensons plutôt que toutes ces “contrefaçons” de documents non centuriques ont moins eu pour but de renforcer le crédit des Centuries que d’accréditer aujourd'hui la thèse de J. Halbronn qui voudrait que Nostradamus ne soit l’auteur d’aucun quatrain centurique, d’où cet acharnement de l’historien des textes à nous en démontrer la fuyante réalité !
L’essence même de la littérature prophétique pour J. Halbronn, est l’antidatage, et c’est pourquoi, une analyse sommaire des pièces du corpus nostradamique aboutit à la conclusion que le nostradamisme s’est mis en marche après la mort de Nostradamus seulement.
La thèse de J. Halbronn met également en avant le fait que les éditions de 1588, qui ne contenaient pas les centuries VIII-X, jugées favorables à la Réforme, furent publiées dans des villes ligueuses comme Paris, et que ce second groupe de centuries ne pouvaient paraître que dans des villes favorables à la Réforme. Il faut avouer qu’en matière de propagande, les uns et les autres n’étaient pas très efficaces. Dans un article déjà cité, Gruber nous rappelle qu’un ouvrage comme Der Seher von Salon, une publication de la propagande nazie fut édité au cœur même de l’ennemi, chez “Europa-Verlag”, une maison d’édition basée notamment à Londres, et que Karl Ernst Krafft, commissionné par le département de la propagande nazie fit édité son livre Comment Nostradamus a-t-il entrevu l’Avenir de l’Europe ? à Bruxelles même.56 Et inversement, la propagande britannique utilisa les mêmes méthodes en faisant publier un livre intitulé Nostradamus prophezeit den Kriegsverlauf (“Nostradamus prévoit le développement de la guerre”) chez l’imprimeur allemand Regulus-Verlag à Görlitz. Comment pourrions-nous, en effet, juger de l’efficacité d’une propagande si elle n’est diffusée qu’auprès de gens déjà convaincus ? D’ailleurs, nous n’avons aucun écho historique sur une telle propagande qui est plutôt passé inaperçue aux yeux des contemporains de la Ligue.
Un autre ouvrage gêne J. Halbronn, c’est le faux Almanach pour 1563, publié par Barbe Regnault, une libraire qui imprima le pamphlet de 1558, Le Monstre d’Abus57, d’une rare virulence contre Nostradamus et qui n’en était pas à son premier coup d’essai en matière de contrefaçon : on pourrait citer un Almanach pour l’an 156158, une Prognostication nouvelle pour 1562 et une édition des Prophéties datée de 1560.59 Ainsi, cette libraire parisienne, qui demeurait à la rue “sainct Jacques, à l’enseigne de l’Eléphant”, a produit au moins trois almanachs ou pronostication apocryphes en 1561, 1562 et 1563.
Le faux Almanach pour 1563 (Barbe Regnault) serait donc une “double” contrefaçon publiée à l’époque de la Ligue, nous dit J. Halbronn.60 Or, dans son Recueil mémorable des cas merveilleux, Jean de Marconville, écrivant “c’est an present 1563”, rapporte justement un présage dont il note en marge qu’il s’agit de “Nostradamus en la prediction du mois de May” :
“Aussi ilz ont escrit & pronostiqué, que c’est an present 1563 sera bien difficile à passer, pource qu’il sera plein de diversitez & adversitez : & un d’entre eulx a bien osé escrire qu’il y aura, non seulement mutation & changement de temps & d’estatz, mais aussi de religion.”61
Pierre Brind’Amour avait supposé que ce n’était pas l’Almanach de Nostradamus pour 1563 qu’avait lu Marconville, mais le faux almanach falsifié de Barbe Regnault.62
En effet, une citation semblable se trouve dans le faux almanach de Barbe Regnault, où nous lisons pour les prévisions de mai :
“...temps diuers & fort variable, plusieurs & diuerses mutations tant de temps que d’estats & de religion...” (fol. Cviir)
En fait, Barbe Regnault n’avait fait que reprendre, en partie, une Prognostication pour 1563, dont il nous reste la traduction italienne, en la pronostico di maggio MDLXIII :
“...sara tempo diverso, & molto variabile, saranno molte, & diverse mutationi tanto del tempo quanto de gli stati & della religione...”63
Par ailleurs, nous lisons dans la dédicace des allusions à l’Excellent et moult utile Opuscule, à la Lettre à César, mais également à l’Epître à Henri II.64 Ce qui gêne en fait le plus J. Halbronn, c’est que cet almanach comporte en son frontispice le quatrain 34 de la IIIe centurie :
III.34
Quand le deffault du Soleil lors sera,
Sur le plain iour le monstre sera veu:
Tout autrement on l’interprétera,
Cherté n’a garde, nul n’y aura pourveu.
L’argument que cet almanach ait paru sous le nom de “Barbe Regnault” et non “Veuve Barbe Regnault”, comme pour la Prognostication nouvelle pour 1562, ne tient pas, puisque Le Monstre d’Abus (1558) a bien paru sans la mention du veuvage de Barbe, et qu’à cette époque, cette dernière était déjà veuve, son mari étant décédé en 1553.65
Outre le quatrain III.34 sur le frontispice de ce faux almanach pour 1563, tous les quatrains dans le texte proviennent des almanachs pour 1555, 1557, et 1562. Si cette contrefaçon était postérieure, comme le souligne, à juste titre, l’étude citée de Gruber, les faussaires auraient également utilisé des quatrains des autres années.
Il y avait de nombreux faux qui circulaient, du vivant même de Nostradamus et justement à cette époque. Nous avons déjà cité la lettre de Rosenberger en 1561. Nous avons encore un “Extrait du privillege (sic) du Roy” dans l’Almanach pour 1557 (fol. Aiv-Aiir), dans lequel on lit que seuls les almanachs édités et “paraphez” par Jacques Kerver et Jean Brotot sont authentiques.
Examinons à présent la fameuse épître dédicatoire à Jean de Vauzelles, contenue dans la Pronostication nouvelle pour l’an 1562 par Barbe Regnault, dans laquelle Nostradamus le félicite d’avoir retrouvé le nom du meurtrier de Henri II. La même lettre au même Jean de Vauzelles a été également imprimée dans une autre pronostication de Nostradamus pour la même année, mais à Lyon, par Antoine Volant et Pierre Brotot66, les éditeurs “officiels” de Nostradamus.67
Cependant, la lettre à Jean de Vauzelles chez Barbe Regnault est loin d’être strictement identique à la version de Volant et Brotot. En effet, si nous comparons les deux textes68, il y a quand même une différence entre la lettre publiée par Chomarat69 et celle contenue dans la Pronostication de Barbe Regnault. Dans la contrefaçon du libraire parisien, il manque la citation du quatrain, lequel était d’ailleurs la justification principale de cette lettre dédicatoire.
Nous lisons chez Volant et Brotot :
“...comme quand j’en mis : Lors que un oeil en France regnera. Et quant le grain de Bloys son amy tuera, [... ] en infiny autres passages. Cela m’a causé une si grande amitié entre nous deux...”
Version Barbe Regnault de la lettre :
“...comme quand j’eu mis, Lors Cela m’a causé vne si grande amitié entre nous deux...” (fol. Aijv)
La citation des deux vers du quatrain identifié a carrément disparu chez la faussaire, elle qui avait publié Le Monstre d’Abus, ne souhaitait sans doute pas augmenter la célébrité de Nostradamus en notant une possible prédiction du prophète.
D’autres différences existent entre les deux lettres qui montrent que la version de Regnault est une version contrefaite basée sur le document publié par Volant et Brotot. La version piratée indique 1562 comme date de composition de l’épître, alors que la version lyonnaise indique bien 1561. La faussaire n’a prêté aucune attention à ce qu’elle avait imprimé au folio précédent (Aijr) : “Faciebat M. Nostradamus Salone Petre Provincia de mese Aprili 1561. pro anno 1562.” Enfin, on notera également la bévue de Barbe Regnault qui n’a même pas corrigé la présentation à… Pierre Brotot !70
Cette lettre nous apporte ainsi la preuve qu’un quatrain, dont Nostradamus était l’auteur, était connu avant 1561 et sans doute même dès 1559, lorsque Henri II mourut des suites de la blessure reçue à l’œil au cours du célèbre tournoi (“En l’an qu’un œil en France regnera”), puisque Jean de Vauzelles aurait écrit préalablement à Nostradamus pour lui communiquer son interprétation du dit quatrain dans lequel il avait lu, au 3ème vers (“Le grand de Bloys son ami tuera”), une allusion à l’adversaire du roi (“le grain de Bloys”), dans ce tournoi, c’est-à-dire Gabriel de Montgomery (1530 - 1574), Seigneur de Lorges.
III.55
En l’an qu’un œil en France regnera
La court sera à un bien fascheux trouble ;
Le grand de Bloys son ami tuera
Le regne mis en mal & doute double.
Ce quatrain est à rapprocher du (III.51) qui dit qu’un meurtre préparé à Paris (“Paris conjure un grand meurtre commettre”), sera exécuté à Blois (“Bloys le fera sortir en plain effect”).71
César de Nostredame72 reprendra à son compte une interprétation similaire lorsqu’il traitera de la mort d’Henri II survenue en 1559, avec le célèbre quatrain Le Lyon jeune le vieil surmontera etc, non sans ajouter “Prophétie à la vérité estrange où pour la cage d’or se void le timbre Royal dépeint au vif qui accordant merveilleusement bien avec ce qu’il en avoit dit en quelque autre endroit en ces termes courts & couverts, L’Orge estouffera le bon grain”. Comme Jean de Vauzelles, cinquante ans auparavant, César désigne ainsi l’un des titres de celui qui blessa mortellement le roi en tournoi. Pour J. Halbronn, ce dernier verset contribuerait, par sa précision suspecte, à faire dater les éditions qui le comporteraient d’après la mort du roi.
Fort malheureusement pour la thèse de M. Halbronn, la dérivation n’étant pas évidente pour arriver à Gabriel de Lorges en partant du “grand de Bloys”, il n’y a aucune raison de supposer qu’il s’agisse d’un faux, d'autant que nous avons montré que le faux était la pronostication parisienne, et donc cela ne peut aucunement lui servir pour ensuite discréditer cette référence aux Centuries.73
Dans son article déjà cité, Gruber analyse pour nous un almanach contrefait pour l’année 1565, attribué à Nostradamus, et qu’il a eu la chance d’examiner, avant qu’il ne soit mis aux enchères chez Zisska et Kistner, à Munich en 2001.74 En réalité, l’imprimeur n’est pas “Thibault Berger” (Chomarat), mais “Thibault Bessault”.75 Thibault Bessault était le beau-fils de Barbe Regnault et exerça également rue Saint Jacques “à l’enseigne de l’Eléphant”, après 1563. Il resta en activité jusqu’en 1565 et il hérita en quelque sorte de la tradition familiale sur la fabrication de faux Nostradamus.
Dans cet almanach, nous trouvons un quatrain sur le frontispice et des quatrains pour chaque mois de l’année. Certains de ces quatrains sont des copies des quatrains originaux des Prophéties, dont on aura parfois permuté les vers. On trouve ainsi des quatrains des centuries I, II et surtout V et VI, ce qui achève de détruire la thèse halbronienne concernant les centuries V-VII.
Gruber nous dit que Thibault Bessault n’a pas utilisé le vrai almanach de Nostradamus pour 1565, édité par Benoit Odo, dont un exemplaire est conservé à la Biblioteca Augusta del Comune di Perugia.76 Puisqu’il ne s’agit pas d’une copie de l’original, Bessault a certainement publié sa contrefaçon en 1564. Ainsi Comme pour Couillard, grâce à la contrefaçon du faussaire Bessault, n’en déplaise à Halbronn qui voit sa thèse fondre comme neige au soleil, nous savons que les centuries V et VI furent publiées antérieurement à 1564.
Gruber a noté une certain nombre de particularités très intéressantes, que nous reprenons, à propos de la composition de quelques mots dans l’almanach de Bessault, notamment par la comparaison avec l’édition Antoine du Rosne 1557 des Prophéties.
Le mot “penultime” (Bonhomme 1555, Anvers 1590) dans le 1er vers du quatrain (II, 28) est écrit : “penultiesme” dans l’almanach de Bessault comme dans l’edition Antoine du Rosne 1557. Le 1er vers du quatrain (V, 87) est habituellement donné comme “L’an que Saturne hors de servage” dans de nombreuses éditions (notamment celle de Benoît Rigaud, 1568), excepté dans celle d’Antoine du Rosne 1557, où nous lisons : “L’an que Saturne sera hors de servage” (ex. Budapest)77, comme dans l’almanach Bessault. Ainsi, la source pour les quatrains utilisés dans l’édition contrefaite par Bessault ou son auteur anonyme pourrait être l’édition des Prophéties de 1557, ce qui montrerait que l’édition Antoine du Rosne a circulé durant la vie de Nostradamus, avant 1564, et ne peut donc être une contrefaçon datant de la Ligue.
Une autre curiosité concerne la gravure sur le frontispice de l’almanach Bessault. Elle est identique à celle employée par Barbe Regnault pour la contrefaçon de l’Almanach pour l’An 1563.78 Ce n’est pas une surprise, puisque l’almanach publié chez Bessault est sorti des mêmes presses que celles de sa belle-mère. Cette gravure est inspirée de l’édition Macé Bonhomme 1555, qui a été également employée par Antoine du Rosne sur l’exemplaire d’Utrecht (6 septembre 1557). Les imprimeurs parisiens ont employé ici l’édition du Rosne 1557 comme source pour les quatrains et la gravure pour le frontispice. En effet, on remarque qu’il y a six étoiles dans la fenêtre sur les titres de Regnault et Bessault alors qu’il n’y en a que cinq chez Bonhomme et Antoine du Rosne (Utrecht).
Les faussaires de la rue Saint Jacques, “à l’enseigne de l’Eléphant”, avaient ainsi trouvé une manière lucrative de produire de faux almanachs en exploitant les vers des quatrains nostradamiens. Après Barbe Regnault et Thibault Bessault, Antoine Houic leur a succédé jusqu’en 1586. Rappelons notamment que Houic a édité des almanachs établis par un certain “Florent de Croz disciple de deffunct M. Michel de Nostradamus”.79 Ainsi, plusieurs générations d’imprimeurs parisiens se sont engagées dans cette activité lucrative.
A propos du manuscrit du Recueil des Présages Prosaïques80, J. Halbronn affirme qu’on n’y trouve aucune référence aux Centuries. Il nous semble que cet auteur n’a pas vraiment étudié le RPP ou même lu le livre de Chevignard assez attentivement, sinon il aurait rencontré un nombre important de références claires aux Centuries, apportées par Gruber dans son article déjà cité.81
Contrairement à ce que pense J. Halbronn, les “Présages” (quatrains des almanachs) qui figurent dans les éditions centuriques du début du XVIIe siècle n’ont pas été empruntés au RPP, mais au Janus Gallicus. En effet, dans ces éditions “troyennes”, on trouve seulement 141 présages, qui sont ceux de la Première face du Janus françois, alors qu’il y en a 154 dans le RPP.
L’historien des textes s’étonne en effet de certaines anomalies dans la restitution des Présages (quatrains des almanachs), version centurique, qui proviendrait du RPP, en remarquant dans le modèle Du Ruau, par exemple, que ces présages sont au nombre de 141, une omission de 10 quatrains (en fait 13). Mais comme nous l’avions noté dans le RCN (p. 160), il s’agit tout simplement du nombre de quatrains-présages commentés par le Janus Gallicus de 1594, contrairement à ce qu’affirme l’historien des textes, au début d’une de ses études.82 Point besoin d’inventer de grandes théories, le choix de Chavigny étant purement exégétique, bien qu’il avait à sa disposition les 154 présages.
J. Halbronn fait tout de même un drôle calcul, utilisant une numérologie allègrement tirée par les cheveux : “141 présages [+] 58 sixains, ce qui donne un total de 199 “articles”, ce qui n’est peut-être pas un hasard [!], l’ensemble constituant deux centuries à un article près”, le même genre de calcul qui voudrait que les 42 quatrains de la centurie VII formeraient avec les 58 sixains une centurie pleine.83
Dans l’étude déjà citée84, J. Halbronn souligne que les 141 présages comportent des lacunes et notamment le quatrain du mois de décembre 1567. Or, ce quatrain figure, nous dit-il, dans le Janus Gallicus (p. 182, n° 221). Si effectivement, il est écrit au-dessus du quatrain en question “Sur Decemb. 1567”, il s’agit ici d’une erreur d’impression, car le quatrain cité est celui de décembre 1562, lequel est inclus dans les “Présages tirez de ceux faits par Me Michel Nostradamus” et qui sont bien au nombre de 141. Ainsi, tout le raisonnement de J. Halbronn sur ce point devient caduc.
On sait que le projet d’un ensemble à douze centuries est exposé à la fin du “Brief Discours sur la vie de M. Nostradamus”, placé en tête du Janus Gallicus, et Chavigny cite quelques quatrains qu’il attribue aux Centuries XI et XII.
Nous lisons dans ce Brief discours :
“Entre autres enfantements de son esprit fécond (...) il [Nostradamus] a escrit XII Centuries de prédictions comprinses briévement par quatrains, que du mot Grec, il a intitulées Prophéties : dont trois se trouvent imparfaites, la VII, XI & XII. Ces deux dernières ont long temps tenu prison, enfin nous leur ouvrirons la porte.” (p. 6)
Nous avons des “centuries“ XI et XII qui “ont longtemps tenu prison” et qui sont donc inédites. On notera le concept de douze livres de centuries, sous forme versifiée85, et douze livres de présages, sous forme prosodique, tel qu’annoncé dans le “Brief Discours sur la Vie de Michel de Nostredame”, confirmé dans son texte “Au lecteur” :
“Qui a escrit di-je en 24. livres tant en prose que vers des choses merveilleuses en style fort obscur…” (p. 19)
Nous lisons dans l’Epitre de L’Androgyn :
“j’ay encores riere moy toutes les oeuvres tant en oraison prose que tournee, que bien tost je mettray en lumiere.”
Jean de Chevigny veut sans doute ici faire allusion aux centuries incomplètes VII, XI et XII, dont le Janus Gallicus ne nous a fait connaître qu’une petite partie. Et le passage “je mettray en lumière” concerne notamment les textes inédits que sont les “centuries” XI et XII. Jean-Aimé de Chavigny revient, à la fin du “Brief Discours sur la Vie de M. Michel de Nostredame”, sur ces divers documents qu’il a “riere” lui :
“Nous avons de luy d’autres présages en prose, faits puis depuis l’an 1550 iusques à 67 qui, colligez par moy la plupart & rédigez en XII livres sont dignes d’estre recommandez à la postérité (...) Ceux-cy comprennent nostre histoire d’environ cent ans & tous nos troubles, guerres (...) Ceux-là, scavoir les Centuries, s’estendent en beaucoup plus longs siecles, dont nous avons parlé plus amplement en un autre discours de la vie de mesme Auteur.”
L’auteur du Brief Discours semble donc distinguer deux ensembles :
1/ “Ceux-cy [Présages en prose parus entre 1550 et 1567] comprennent nostre histoire d’environ cent ans & tous nos troubles; guerres etc.” Il s’agit du Recueil des présages prosaïques “rédigez en XII livres”, dont le manuscrit a été récemment retrouvé et publié par B. Chevignard.
2/ “Ceux-là, scavoir les Centuries, s’estendent en beaucoup plus longs siecles, dont nous avons parlé plus amplement en un autre discours de la vie de mesme Auteur.” Il pourrait s’agir ici de ce qu’on pourrait appeler, un Recueil de quatrains poétiques, introduit par “un autre discours de la vie de mesme Auteur”, “plus amplement” développé que le Brief Discours du Janus Gallicus, dont nous espérons la découverte prochaine.
Dans une analyse sommaire86 de l’édition 1588, J. Halbronn note que les faussaires ont repris, pour les quatrains ajoutés à la centurie VII, les quatrains des mois de cet almanach dans l’ordre, de février à octobre, soit neuf quatrains. En fait, comme je l’avais précisé dans le RCN (p. 119), il ne s’agit pas de neuf quatrains, mais d’un quatrain centurique (VI.31) et de onze quatrains de l’almanach pour 1561, allant de février à décembre (et non octobre). Les faussaires ont inversé les versets pour le quatrain de février et d’octobre à décembre en plaçant chaque fois les vers 3 et 4 à la place des vers 1 et 2.
Il convient de signaler, toujours dans la même étude de J. Halbronn, une bévue amusante où la démonstration de l’historien des textes se retourne contre lui-même, accordant par ailleurs, certainement sans le vouloir, des dons prophétiques à Nostradamus notamment en interprétant deux quatrains “assez révélateurs”, nous dit-il, qu’il pense avoir été publiés pour la première fois sous la Ligue en 1588 (numérotés 82 et 83 dans une centurie VII), alors qu’il s’agit en fait des quatrains pour les mois de novembre et décembre 1561, comme on l’a souligné plus haut, dans lequel les vers ont été inversés : notre auteur tombe ainsi dans le piège grossier tendu par les faussaires de l’édition parisienne Nicolas Roffet ! Par ailleurs, J. Halbronn cite et interprète - façon Fontbrune - le quatrain (VI.31), que les mêmes faussaires avaient insérés dans cette centurie VII incomplète à 12 quatrains, avant les numéros 73 à 83. On notera que dans la centurie VI de cette édition, le quatrain (VI.31) est remplacé par le quatrain (IV.31) et que le (VI.31) a été mis à l’emplacement du (VI.28), toujours avec la même volonté de tromper le lecteur inattentif.
Ecoutons J. Halbronn :
“Il nous semble que cette refonte de l’Almanach pour l’an 1561 ait trait au Duc de Guise et à son assassinat à Blois (1588), du à un stratagème :
Le 1er quatrain est comme suit, le Roi et le Duc étant mentionnés :
Roy trouvera ce qu’il désiroit tant
Quand le Prélat sera reprins à tort
Responce au Duc le rendra content
Qui dans Milan mettra plusieurs à mort
Quant aux deux derniers quatrains (numérotés dans les éditions 82 et 83), il comportent les versets suivants assez révélateurs :
La stratagème simulte sera rare
La mort en voye rebelle par contrée
Par le retour du voyage Barbare
Exalteront la protestante (le camp réformé) entrée
Et le dernier quatrain évoque la lâche exécution du duc par les sbires du roi :
De nuict au lict assailly sans les armes”
En citant et interprétant pour 1588 le quatrain (VI.31), et les quatrains-présages de novembre et décembre (quatrième vers) pour l’année 1561, J. Halbronn se place dans la lignée des commentateurs, depuis Jean-Aimé de Chavigny, qui voudraient plier le texte de Nostradamus à leur convenance, dans un sens apologétique ou non, afin de soutenir des thèses étrangères à l’auteur ainsi bafoué.
Un des principaux arguments de J. Halbronn concerne le témoignage d’Antoine Crespin qui, encore en 1572, soit six ans après la mort de Nostradamus, n’aurait jamais entendu parler des Centuries V à VII, alors qu’il mentionne des extraits des Centuries I à IV et VIII à X. Dès lors, l'historien disqualifie l’édition Antoine du Rosne de 1557. Conclusion hâtive basée, ne l’oublions pas, sur le témoignage d’un faussaire qui n’hésite pas, quelques années après la mort de l’astrophile provençal, à s’intituler : Maistre Antoine Crespin Nostradamus. Rappelons à J. Halbronn que ce même personnage atteste de manière univoque dans deux de ses ouvrages87 de l’existence, avant 1573, de l’épître centurique à Henri II :
“Regarde à une Prophétie qui est faicte le xxvii. jour de Juin, 1558. à Lion, dediée au feu Henry grand Roy & Empereur de France, l’Autheur de laquelle Prophétie est mort & décédé.”
Aucun doute n’est permis : il s’agit bien ici de l’évocation de l’Epître à Henry Second, datée du 27 juin 1558, qui servit de préface aux centuries VIII-X. Une autre évidence qui saute aux yeux et que nous devons à nouveau rappeler à J. Halbronn, c’est qu’en citant les centuries IV et VIII, Crespin devait certainement se douter, même s’il n’avait pas à portée de main une édition les comprenant à moins tout simplement qu’il n’en eu pas utilité lors de sa compilation, que les centuries V à VII avaient certainement du paraître, dans une logique de continuité !
Dans sa démarche iconoclaste, qui nous fait un peu penser à un bulldozer qui aurait mission de raser complètement une maison sous prétexte qu’une épidémie de peste s’y serait déclarée, J. Halbronn pose cependant de vraies questions : dans l’édition posthume des Prophéties en 1568, pourquoi ne signale-t-on pas quelque part, au titre par exemple, que le roi Henri II, à qui Nostradamus a dédicacé ses trois dernières centuries, est décédé depuis près de 10 ans et pourquoi ne précise t-on pas que Nostradamus est également décédé ?
La réponse nous semble cependant évidente : il s’agit ici tout simplement d’une réédition de deux textes, l’un publié auparavant en 1557 et l’autre en 1558, une attitude éditoriale confirmée par le fait qu’une pagination distincte est accordée à chacun des textes présentés, avec une page de titre différente. Tout se passe comme si Benoît Rigaud avait voulu reproduire en un seul volume, dans un simple recueil, les éditions 1557 (avec la Préface à César) et 1558 (avec l’épître centurique à Henri II). Cette “carence nécrologique”, pour utiliser une expression de J. Halbronn, n’en est donc point une, l’éditeur lyonnais Benoît Rigaud n’étant pas le manipulateur parisien des éditions de la Ligue !
En ce qui concerne l’édition Macé Bonhomme de 1555 qui serait également antidatée, nous rappelons qu’une autre argumentation de J. Halbronn réside dans l’édition rouennaise de 1588, publiée par Raphaël du Petit Val, “divisées en quarte centuries”, dont le seul exemplaire connu était dans la Bibliothèque de Daniel Ruzo. Pour J. Halbronn, cette édition, dont nous avons montré dans le RCN qu’elle se rapprochait plus de la contrefaçon que des éditions “autorisées” de 1555 et 1568, rendrait inconcevable la parution en 1555 de quatre centuries alors qu’entre temps serait parue en 1557 et surtout en 1568 des éditions où la IVe centurie est englobée au sein d’un volet de sept centuries.
Et effectivement, nous avons montré dans le RCN (pp. 122 - 123) que le même éditeur, pour le moins, n’était pas tellement au fait des publications antérieures des Centuries. D’ailleurs, ce que ne précise pas J. Halbronn, si dans ces éditions rouennaises, la centurie IV se termine bien par le quatrain 53, il manque cependant les quatrains 44, 45, 46 et 47, qui plus est avec une Préface à César datée du 22 juin 1555 au lieu du 1er mars 1555. Raphaël du Petit Val tentera de se rattraper l’année suivant avec la publication d’une autre édition, sous le même titre, mais augmentée, “dont il en y a (sic) trois cens qui n’ont encores iamais esté imprimées”, reprenant ainsi le titre des éditions 1557 d’Antoine du Rosne. Le seul exemplaire connu de cette dernière édition, celui de Daniel Ruzo, est malheureusement incomplet, mais il comporte au moins six centuries - le IVe centurie est complète, cette fois-ci - et l’analyse des cahiers le composant permet de supposer un contenu identique aux éditions de 1557.
Selon la chronologie fantaisiste de J. Halbronn qu’on a un peu du mal à suivre, les Centuries VIII-X n’auraient pas été publiées après les sept autres centuries, puisque, nous dit-il, lorsqu’elles [les centuries VIII-X] sont apparues, il n’existait que quatre centuries (I-IV). Ainsi, les Centuries V-VII, soit 300 quatrains supplémentaires, n’ont pu apparaître que les années 1580, avec la confirmation de Du Verdier, dans sa Bibliothèque (1585), d’une édition à dix centuries publié à Lyon chez Benoist Rigaud. Quant à l’épître (remaniée) à Henri II, elle aurait justement préfacé les centuries V-VII !
J. Halbronn a tout de même une très curieuse façon de raisonner, lorsqu’il affirme avec la foi du charbonnier que les centuries V à VII ne sont pas parues avant 1572, date des Prophéties à la puissance divine. Alors qu’il nous a simplement montré que Crespin Archidamus n’a eu en sa possession, ou plus exactement n’a utilisé, que les centuries I-IV et VIII-X pour sa compilation. Tout au plus, pourrait-on ajouter, cela confirmerait plutôt que les centuries VIII-X ont certainement été publiées à part, dans un recueil dédicacé au roi de France Henri II (1558), et confirmerait par la même occasion la publication dans un précédent recueil des centuries I-IV (1555).
Pour J. Halbronn, une Epître à Henri II traitant d’une “miliade” de quatrains ne peut être concevable que s’il y a une édition à dix centuries “complètes”, et ces dix centuries “complètes” n’ont pu paraître qu’entre 1572 (témoignage Crespin) et 1585 (témoignage Du Verdier) : on passa ainsi de sept centuries (I-IV & VIII-X) à dix centuries (I-X), la fonction de l’Epître “à la miliade” ayant justement été de légitimer la présence des centuries V à VII. A aucun moment, J. Halbronn n’explique cependant le “miracle” de la coupure entre IV et VIII.
C’est là qu’il faut (essayer de) suivre le raisonnement de J. Halbronn : ce ne sont pas les centuries VIII à X qui étaient nouvellement arrivées et qui suivaient l’Epître au Roi, mais le lot de centuries V-VII, étant donné que les centuries VIII à X, connues avant 1572 (Crespin), n’étaient point inédites en 1585, quand parut l’édition signalée par Du Verdier !
La stratégie du prophétisme, selon J. Halbronn, consiste donc en quelque sorte à reculer dans le passé la date de textes prophétiques pour transformer un présent en futur anticipé, donnant par exemple à un lot de quatrains récents (V-VII) une pseudo-antériorité et accréditant auprès du public la thèse de sept centuries publiées avant 1558, d’où les éditions “antidatées” de 1557 chez Antoine du Rosne !
J. Halbronn a noté une particularité dans la Préface à César, notamment à la fin de l’épître où une phrase qui figure dans les exemplaires de 1555, 1568 et l’exemplaire d’Utrecht de 1557 ne figure pas dans la préface à César de l’exemplaire de Budapest :
“Nonobstant que soubs nuee seront comprins les intelligences : sed quando sub movenda erit ignorantia, le cas sera plus esclairci. Faisant fin, mon fils, prends donc ce don de ton père Michel Nostradamus, espérant toy declarer une chacune prophetie de quatrains icy mis.”
Alors que pour nous, cette suppression serait plutôt le signe d’une édition piratée, mais cependant contemporaine de l’édition d’Utrecht, pour J. Halbronn, le passage en question serait quelque peu “redondant” avec un autre passage de la même Préface à César :
“J’ay composé livres de propheties contenant chacun cent quatrains astronomiques de propheties lesquelles j’ay un peu voulu rabouter obscurément & sont perpétuelles vaticinations pour d’icy à l’année 3797”
Nous avons beau chercher, mais nous ne trouvons absolument aucune redondance, car dans ce dernier passage, Nostradamus donne plutôt certaines précisions : chaque “livre de prophéties” (ces “nouvelles prophéties” dont parlera Couillard) comporte 100 quatrains (centurie) qui dureront jusqu’en 3797.
Et pour conforter une thèse, déjà bien mal en point, J. Halbronn voudrait que le passage cité “Nonobstant que soubs nuee…”, comme celui d’ailleurs de l’Androgyn de 1570 - lequel fait allusion à un quatrain centurique - , soit interpolé.
Il nous semble qu’on ne peut pas en permanence balayer d’un revers de plume tout texte qui gênerait l’hégémonique argumentation de notre historien des textes. Il arrive un moment où l’on doit faire face à la réalité, même si elle dérange les thèses que l’on chercherait à imposer. On imagine mal, pour notre part, des faussaires qui travailleraient servilement plus ou moins de concert afin de peaufiner l’image canonique d’un prophète dont il n’ont véritablement cure.
Nous avons vu que Crespin témoigne en 1572 de sa connaissance de certains quatrains de la centurie IV, parmi les 53 premiers, sans nous donner bien entendu la moindre précision sur l’édition dont il se sert. Selon nous, trois éditions auraient existé avant cette date : une édition avec les centuries I-IV (à 53 quatrains) en 1555 (comportant pour la 1ère fois une préface à César), une édition avec les centuries I-VII (à 42 quatrains) en 1557, une édition avec les centuries VIII-X de 1558 (comportant pour la 1ère fois une préface à Henri II) - aucun exemplaire recensé à ce jour - et une édition posthume comportant les centuries I-X en 1568.
Bien que dans certains cas, on pourrait supposer que l’édition utilisé par Crespin pour le 1er groupe de centurie (I-IV) soit celle de Macé Bonhomme (1555) - on donnera les seuls exemples de “proférer” pour “prospérer” (I.1) ou “secours” pour “cours” (I.89) - nous ne pensons pas qu’on doive se fier au texte fournit par Crespin. En effet, on ne peut que rester prudent face aux interprétations crespiniennes des vers centuriques. A cet égard, nous donnerons les exemples du 4ème vers du quatrain (IV.6), écrit dans toutes les éditions signalées : “Couleur Venise insidiation”, mais transcrit par Crespin à l’Adresse 10 : “couler Venise en sédition” et du 1er vers du (III.67) : “Une nouvelle secte de Philosophe” devient “En nombre sexte de philosophes” à l'Adresse 13. Mais un exemple plus frappant de déformation du texte centurique se trouve à l’Adresse 11 avec les trois derniers vers du quatrain (VIII.99) :
Edition 1568
En autre lieu sera mis le saint siège :
Où la substance de l’esprit corporel,
Sera remys & receu pour vray siège.
Voici la “paraphrase” de Crespin (1572) :
“Le S. siège sera remis au corps spirituel, qui sera tenu pour vray siege” !
On ne peut pas espérer beaucoup de rigueur, lorsqu’on base son argumentation essentiellement sur le manque de documentation pour échafauder des hypothèses qui tiennent sur le fil du rasoir pour ne pas dire sur le vide. Le travail de l’historien n’est-il pas justement inverse et ne consiste-il pas à utiliser les documents tels qu’ils se présentent et non à leur faire violence en leur arrachant des aveux de circonstance, notamment par la torture du texte à l’instar des procédés inquisitoriaux du Moyen Age.
On trouve quand même de bien curieuses affirmations sous la plume de J. Halbronn : “Il est clair que si la Préface à César est datée de mars 1555, c’est que nécessairement elle a été rédigée plusieurs années après.”88 Ce serait ainsi la règle du jeu prophétique : nier, afin de ne pas devoir renoncer à une profession de foi dictée par une sorte de scientisme hérité du siècle des Lumières, comme s’il fallait ignorer avec dédain et parfois avec mépris les acquis, et une méconnaissance de ceux-ci, transmis par les siècles qui nous ont précédés. J. Halbronn ajoute : “l’être humain ayant ses limites en matière de connaissance de l’avenir (…), [dès lors, le] pronostic faux [ne peut être que] la marque du vrai pronostic.” En d’autres termes, si un quatrain centurique annonce un événement historique non encore réalisé au moment de sa supposée rédaction, il ne peut s’agir que d’un “faux pronostic”, donc une prédiction antidatée, et si le quatrain centurique se trompe dans la prévision de l’événement supposé, il y a de grandes chances pour que ce “pronostic faux” soit véritablement authentique : “une prévision réussie [ne peut être] qu’une prévision arrangée après coup. Chaque fois qu’un quatrain se voit confirmé, il y a comme une épée de Damoclés qui risque de tomber puisque cette confirmation pourrait servir à repousser sa date de rédaction d’autant.”
Pour nous, il est plutôt clair qu’une telle démarche est épistémologiquement et méthodologiquement en décalage avec l’esprit même de la recherche scientifique. Nier une quelconque faculté prédictive parce qu’elle ne correspond point à notre entendement, sous prétexte que cette dernière a été prise d’assaut et conquise par nombre de charlatans, n’est certainement pas une méthode pour une étude nostradamologique sereine et objective.
A la fin de son étude89, J. Halbronn écrit : “il nous semble que c’est le même auteur qui rédigea l’Epître à Larcher, en tête de L’Androgyn et le Brief Discours de la vie de M. De Nostredame”, ce à quoi nous répondrons simplement que l’auteur de L’Androgyn de 1570, Jean de Chevigny, et l’auteur du Janus Gallicus, qui comporte cette “brève vie de Nostradamus”, Jean-Aimé de Chavigny, sont une seule et même personne, comme il ressort d’ailleurs, en première analyse, de l’annotation manuscrite du Recueil des présages prosaïques, relevée par B. Chevignard dans son édition de ce dernier texte.
En effet, dans son édition du RPP90, B. Chevignard relève que “dans une inscription marginale de son Recueil, Chavigny note incidemment qu’il est l’auteur de l’Androgyn né à Paris le XXI Juillet MDLXX, publié à Lyon en 1570, sous le nom de Jean de Chevigny (Présages Prosaïques, Livre II, 301)”. La note, qui concerne un passage des Présages Merveilleux pour 1557 [“Seront sept qui orneront le né biparti qui les rendra confus. Et commencera Deucalion soy retirer”], est la suivante :
“Le né biparti c’est l’Androgyn à mon jugement, né à Paris 1570 duquel plusieurs ont escrit & l’ont orné. J. Daurat, Belleforest & nous le représentimes dans Lyon avec quelque description. Et l’auteur mesmes en avoir parlé en ses Centuries, Trop le ciel pleure Androgyn procreé. Ce que s’accorde à ce qu’il veut dire icy : qu’après la naissance dudit monstre les pluyes cesseront.”91
Depuis le début du XVIIe siècle, la perception qu’avait le public de la 1ère édition des Prophéties était celle d’un premier volet à sept centuries, précédé d’une Préface au fils de Nostradamus. On a ainsi longtemps ignoré l’existence de édition Macé Bonhomme de 1555 et c’est pourquoi on a également considéré que l’édition Antoine du Rosne à sept centuries, datée de 1557, n’était que la réédition conforme d’une précédente édition, que l’on datait de 1555, date de la Préface à César, mais dont on sait aujourd’hui qu'elle comportait 353 quatrains. Parallèlement, un second volet de centuries était censé être paru dès 1558, date de la rédaction de l’épître canonique à Henri II. De telles mentions d’éditions se trouvaient dans plusieurs bibliographies générales et nullement réservées au corpus nostradamique.
De même, l’édition lyonnaise Benoît Rigaud de 1568 est longtemps resté ignoré de nombreux bibliographes. Bareste, par exemple, qui connaissait pourtant l’existence de l’édition Macé Bonhomme, émet des doutes sur l’existence d’une édition Benoist Rigaud datée de 1568 :
“Les bibliographes parlent d’une autre édition de 1568 faite par Benoist Rigaud. Mais nous ne pouvons rien dire de positif à cet égard car nous ne la connaissons point ; elle ne se trouve dans aucune bibliothèque de Paris.”92
Si nous considérons l’édition 1566, son attribution suspecte au libraire lyonnais Pierre Rigaud, par Klinckowstroem notamment93, a permis de la déclarer contrefaçon, cette même édition qui avait été jugée, jusqu’alors, pouvoir être le fondement d’éditions critiques, comme celle de Torné-Chavigny94, et d’Anatole Le Pelletier.95
Sur le plan proprement scientifique, rappelons à J. Halbronn que l’édition 1555, “incomplète” par rapport à une édition ultérieure, ne peut être qualifié que d’édition inachevée, et parler d’une addition de 53 quatrains à un ensemble centurique, c’est déjà supposer une édition antérieure à 3 centuries, non seulement qu’on a jamais retrouvé mais surtout, dont personne n’a jamais parlé ou entendu parlé.96 Ce qui pose donc problème pour J. Halbronn, c’est le fait que l’édition 1555 ne signale aucune addition ou ajout de quatrains, comme l’ont fait les éditions de 1588 - 1589. Mais la raison la plus logique, que refuse de voir notre spécialiste ès contrefaçons, c’est que ce fut la première publication de ce genre et surtout, que ce fut le choix de Nostradamus de s’arrêter, pour cette année 1555, au 53e quatrain de la IVe centurie.
Dans la même étude, “Un Nostradamus schizophrène”, J. Halbronn suppose que l’édition 1555, pour être authentique, aurait du être très différente de celles qui ont existé au XVIIe siècle par exemple : “d’aucuns voudraient en même temps nous faire croire que rien n’a changé depuis le point de départ, que les textes n’ont point bougé”. Ainsi, les faussaires se seraient trahi en reproduisant une édition, dont les quatrains notamment ressemblent étonnement à ceux des éditions publiées ultérieurement ! J. Halbronn aurait souhaité, pour pouvoir admettre l’authenticité de l’édition 1555, que les quatrains y furent plus défigurés que nature. Mais quelques lignes plus loin, le même J. Halbronn constate que les textes qui nous sont parvenus sont “abîmés, adultérés, frelatés, détériorés, truffés de barbarismes - où l’on ne distingue même plus noms propres et noms communs - flétris, fanés par le temps” : La schizophrènie n’est peut-être pas du seul côté de Nostradamus ! L’astrophile provençal a maintes fois répété que ses quatrains étaient tout sauf “limpides”, et ainsi qu’il le dit dans la Préface à César, il les a “rabotés” comme ceux d’ailleurs des almanachs qu’il signa pendant une bonne dizaine d’années. Un des principes de la prophétie, n’est-il pas de cacher l’information ? Même l’Apocalyse de Saint-Jean n’est pas une “révélation” limpide !
Grosso modo, pour J. Halbronn, ce ne sont pas les Centuries qui rendirent Nostradamus célèbre, mais ce serait plutôt la réputation de l’astrophile provençal qui aurait été des plus bénéfiques pour la notoriété internationale des quatrains centuriques, lesquels n’ont pu apparaître que dans une production posthume. C’est la raison pour laquelle, si nous suivons son raisonnement, on a fait croire que les Centuries furent publiées de son vivant, en fabriquant des faux comme les éditions 1555, 1557 et 1568 !
Par ailleurs, selon J. Halbronn, Nostradamus serait un astrologue pur et dur, compositeur de pronostications ou de prophéties perpétuelles, à caractère astrologique et ne peut être un prophète, auteur de centuries. Les textes dédicatoires, à César et à Henri II, relèveraient donc de l’astrologie et furent récupérés pour encadrer et annoncer le corpus centurique. En recyclant les Epîtres annonçant des textes astrologiques pour les placer en tête de Centuries, corpus non astrologique selon J. Halbronn, les faussaires auraient commis une erreur de plus.
Nostradamus aurait donc été instrumentalisé. Il n’a pu être l’auteur des Centuries marqué par l’esprit iconoclaste de la Réforme, nous dit J. Halbronn, de ce nouvel esprit exégétique, car ce n’était pas un humaniste, c’était encore un homme du Moyen Age, prisonnier d’une certaine scolastique, alors que les Centuries sont un texte foncièrement moderne : il ne s’agit ni plus ni plus que de “décenturiser” Michel de Nostredame, en un mot de le dés-humaniser. J. Halbronn nous fait de plus en plus penser à l’ésotériste Piobb qui était arrivé à une semblable conclusion par un chemin tout aussi “vaultorte”, pour employer une expression nostradamienne (IX.20). L’historien des textes devrait relire attentivement la correspondance de Nostradamus et se pencher sur les carrés astrologiques des thèmes analysés pour constater que Nostradamus était plus astrophile qu’astrologue et que l’horoscope n’était pour lui qu’un support commode pour prophétiser !
La démarche de Jacques Halbronn est certes iconoclaste lorsqu’il parle de faussaires successifs sur plusieurs décennies, mais il brandit sa profession de foi comme s’il s’agit de l’arme fatale : il ne croit pas aux prophéties ! Voilà résumé le fond de sa pensée et son combat d’ “avant garde”. Cet auteur conteste aux Centuries leur caractère prophétique du fait qu’elles seraient trop ancrées dans une certaine réalité : c'est trop beau pour être vrai. Mais c’est une profession de foi qui croît être démontré à coup d’arguments homéopathiques, mais à mon avis avec des marqueurs en nombres insuffisamment probants pour entraîner une forte adhésion.
Les Archives Nationales (Paris) conservent un manuscrit du dominicain Giffré de Rechac intitulé : Nostradamus Glosé, dont seule une partie fut imprimée, en 1656, sous le nom d’Eclaircissement des Véritables Quatrains de Michel Nostradamus. J. Halbronn, à qui l’on doit la découverte de ce document, attire notre attention sur un quatrain signalé comme étant le VII.46. Or, nous savons que la centurie VII, incomplète, comportait 42 quatrains seulement dans l’édition Benoît Rigaud de 1568. Il s’agit, comme nous l’avions fait remarquer à J. Halbronn, du présage de décembre pour 1561.
Giffré de Rechac, dans le Nostradamus Glosé et Etienne Jaubert, l’auteur présumé de l’Eclaircissement de 1656, s’inspirent surtout du Janus Gallicus de 1594. Or, dans ce dernier ouvrage, Jean-Aimé de Chavigny n’y avait pas inclus le présage de décembre pour 1561. On pourrait penser que Giffré de Rechac n’a pu trouvé ce quatrain que dans une édition parisienne de 1588 ou 1589, où il figure dans cette fameuse centurie VII, mais avec le numéro 83 et non 46 !
Puisque nous avons ici affaire à un commentateur et non à un libraire-imprimeur - lequel aurait moins de scrupule à produire une édition falsifiée - il est peu probable que Giffré de Rechac ait eu en mains un exemplaire de l’almanach pour 1561, sinon il n’aurait pas numéroté son quatrain : VII.46. Par contre, l’édition datée de 1560 du faussaire Barbe Regnault, signalée par Brunet97, était peut-être en sa possession, et ceci pourrait certainement expliquer le mystère des fameux “39 articles” ajoutés “à la dernière centurie”. En 1560 - 1561, cette dernière centurie - dans l’hypothèse où le libraire n’avait pas connaissance d’une autre édition postérieure à celle de 1557 - était la centurie VII, avec 40 ou 42 quatrains. Ainsi, la VIIe centurie de cette édition pirate de Barbe Regnault pouvait éventuellement comporter 79 ou 81 quatrains !
Toutes les éditions du XVIIe siècle qui reproduiront le quatrain ci-dessus (avec également les présages pour février, septembre et novembre 1561) se baseront sur les éditions parisiennes de 1588 et 1589 et surtout le Janus Gallicus. Les éditeurs, s’inspirant de la formule parisienne “Adjoustées nouvellement. Centurie septiesme” (12 quatrains numérotés 72 à 83), ajouteront les quatrains 72, 80, 82 et 83 sous une formule type du genre “Autres Quatrains tirez de 12. soubz la Centurie septiesme : dont en ont esté rejectez 8. qui se sont trouvez es Centuries précédentes”. Ils avaient en effet remarqué, en analysant le Janus Gallicus, que les quatrains numérotés 74 à 79 et 81 étaient ceux de l’Almanach pour 1561 (et que le n° 72 était en fait le quatrain VI.31). Mais, ils n’avaient certainement pas sous les yeux un exemplaire de cet almanach nostradamien, car tous les éditeurs ont conservé les quatrains non transcrits par Chavigny, sans se douter - et nous pensons que les éditeurs parisiens de la Ligue l’ignoraient également - qu’ils appartenaient au même almanach. Si effectivement, comme le souligne J. Halbronn, dans sa dernière étude98, l’édition de 1605 ne comportait pas ces quatrains supplémentaires, nous lui ferons remarquer, contrairement à ce qu’il affirme par deux fois dans cet article, que les éditions d’Amsterdam de 1667 et 1668, elles, les comportaient.
Dans l’étude citée, J. Halbronn reste perplexe sur l’édition utilisé par le québécois Michel Dufresne dans la composition de son Dictionnaire Nostradamus (1989). Ce dernier nous dit dans son Avant-propos, qu’il a choisit “de recourir à une copie de l’édition de 1605 reproduite intégralement par Elisabeth Bellecour, à l’intérieur d’un ouvrage ayant pour titre Nostradamus trahi, publié en 1981, chez Robert Laffont”. Nous avons déjà donné notre opinion sur ce dernier ouvrage de E. Bellecour, préfacé par A. Slosman dans notre RCN (pp. 574 - 575), et la brève analyse ci-dessous - sans débattre bien évidemment sur le problème de l’interprétation laissée à la libre appréciation de chacun - va confirmer tout le bien que nous pensons de ce livre, en particulier sur le plan de l’honnêteté intellectuelle.
En effet, on peut lire sur la page de titre : Nostradamus trahi suivi du texte original et complet des dix Centuries, édition de 1605. Il est difficile de rencontrer autant de mensonge et de cynisme dans une seule phrase !
Tout d’abord, J. Halbronn a raison, lorsqu’il dit l’édition reproduite dans l’ouvrage en question n’est nullement celle de 1605, ayant noté l’absence du quatrain 100 de la Centurie VI, quatrain qui figure bel et bien dans l’édition “authentique” datée de 1605. Nous irons cependant plus loin que J. Halbronn.
L’ “édition 1605” ainsi présentée (pp. 101 - 284) est un agglomérat indigeste dont il n’est pas évident, à priori, d’identifier l’origine de ses éléments constitutifs. Pour notre propos, en ce qui concerne la centurie VII, le texte proposé par nos deux charlatans est grosso modo celui de l’édition Benoît Rigaud, 1568 pour les quatrains 1 à 42. Les quatrains 43 et 44 sont tirés de l’édition Jean Didier, 1627, que l’on retrouvera dans l’édition de Leyde, 1650. Quant aux quatrains numérotés 45 à 48, ils correspondent notamment aux quatrains 73, 80, 82 et 83 de la “centurie” VII des éditions parisiennes de 1588 - 1589.99
Il est vrai qu’aucune édition connue des Centuries, du vivant de Nostradamus, ne comporte un quatrain VII.46 ou VII.48.100 Ainsi que nous l’avons supposé plus haut, la fameuse édition 1560 - 1561 de Barbe Regnault pourrait tenir ce rôle, puisque justement, nous avons ici des quatrains-présages de l’almanach pour 1561, et seule une libraire indélicate ès contrefaçons pouvait intégrer dans une édition classique un supplément frauduleux.
A l’époque de l’élaboration de notre bibliographie, nous avions supposé, sans pousser plus avant l’analyse, que cette édition pouvait être identique aux éditions parisiennes de 1588 - 1589, puisque ces dernières se réclamaient d’elle, en leur page de titre : “Revues & additionnées par l’auteur pour l’an mil cinq cens soyxante & un, de trente-neuf articles à la dernière Centurie.”101 Nous suggérons aujourd’hui une autre hypothèse concernant le contenu de cette édition aujourd’hui disparue, et que nous ne désespérons pas de retrouver un jour chez un particulier chanceux ou mieux dans les cartons non inventoriés d’une bibliothèque de province.
Nous avons vu plus haut que Barbe Regnault publia en 1562, un faux almanach pour l’an 1563 comportant des quatrains empruntés aux véritables almanachs nostradamiens des années 1555, 1557 et 1562. Dans la même logique, on peut supposer que Barbe Regnault aurait publié l’année précédente, en 1561, non pas un almanach mais une édition des Prophéties de Nostradamus, comportant cette fois-ci la totalité des quatrains-présages des années 1555, 1557 et 1561, soit (en comptant le quatrain de l’an)… “39 articles” qui seront ajoutés à la dernière centurie, soit à la fameuse centurie incomplète n° VII, ce qui donnerait 79 ou 81 quatrains. On pourrait ainsi expliquer la bizarre numérotation des éditions “ligueuses” de 1588 - 1589, lesquels utilisent des chiffres de même ordre : 71 (centurie VI) et 72 à 83 (pour des prophéties “adjousées nouvellement”), qui plus est en mentionnant sur leur page de titre la formule des “39 articles”.
Dans l’étude déjà citée de J. Halbronn, on peut lire :
“On comprend mal la formule de Benazra : “Nous ignorons pourquoi (ces quatrains) furent supprimés de l’almanach imprimé par Barbe Regnault et intégrés dans l’édition 1561 des Centuries”. En effet, l’almanach pour 1561 comporte les dits quatrains et ne parut pas chez Barbe Regnault…”
Encore une fois, J. Halbronn n’a pas lu avec attention notre RCN. Notre interrogation portait justement sur les quatrains additionnels à la centurie VII, dont nous annoncions qu’ils avaient été intégrés dans l’édition frauduleuse de 1561102, imprimée par Barbe Regnault.103 Sachant que le même imprimeur avait publié l’année précédente un Almanach pour l’an 1561, pas l’authentique - lequel fut imprimé à Paris, par Guillaume le Noir104 - mais un apocryphe ne contenant pas de quatrains-présages105, nous nous demandions simplement, à l’époque, pourquoi l’éditeur indélicat ne les avait pas inclus dans sa première publication. Mais nous donnions nous-même la réponse dès la présentation de cet almanach apocryphe en supposant que ce texte avait été mis sur le marché en même temps que l’édition falsifiée des Centuries, en 1561, afin qu’ils ne fassent pas double emploi et qu’on accepte sans trop réfléchir les quatrains additionnels à la centurie VII.
On peut se demander par ailleurs, pourquoi les éditions 1588 - 1589 avait une centurie VI incomplète avec 71 quatrains ? Mais comme nous l’avons noté à la fin de notre analyse d’une édition de 1588106, on peut légitimement supposer que l’éditeur parisien souhaitait maintenir un état antérieur des éditions des Prophéties, de la même manière qu’il l’avait fait pour la centurie IV, incomplète à 53 quatrains, telle qu’elle figurait dans l’édition Macé Bonhomme de 1555, et fournissant une addition des quatrains 54 à 100, précédée par la formule : “Prophéties… adjoustées outre les précédentes impressions. Centurie quatre”.
Pour terminer, nous tenons à dénoncer une grossière manipulation avec la récente mise en vente aux enchères sur le Site américain Authentigraph d’un ouvrage nostradamien (500 000 dollars US !), car il s’agit pour nous d’un canular, mais le terme escroquerie semblerait ici plus approprié. Et il nous semble que J. Halbronn soit tombé dans le panneau107, quand il admet, avec l’auteur de la notice anglaise sur la fameuse édition 1566 - dont nous savons qu’elle est antidatée108 - qu’il a existé deux imprimeurs du nom de Pierre Rigaud. Avec sérieux, J. Halbronn écrit : “On peut donc raisonnablement pensé” ou encore “Il est probable” qu’il a existé “Pierre Rigaud I”, lequel aurait d’ailleurs la même adresse que “Pierre Rigaud II”, rue Mercière, à Lyon, puisque, nous dit-il, les faussaires du XVIIIe siècle qui fabriquèrent des éditions des Prophéties en les datant de 1566 n’étaient pas “des imbéciles” et qu’ils se sont référé à un libraire ayant existé à l’époque. L’histoire de l’imprimerie lyonnaise109 est suffisamment bien connu aujourd’hui pour accepter sans broncher une telle hypothèse, qui ne sert que les intérêts d’un vendeur malhonnête.
Robert Benazra
Feyzin, le 12 janvier 2004
Notes
1 Cette thèse a été publiée par l’Atelier National de Reproduction des Thèses (ANRT). Elle est également diffusée dans les bibliothèques universitaires, sur microfiche, sous la référence ANRT 34216, et nous-même avons commencé à la publier sur notre Site Ramkat. Retour
2 Cf. Cahiers V.-L. Saulnier, n° 15, 1998, Prophètes et prophéties au XVIe siècle, pp. 95 - 133. Retour
3 Dans les années Quatre-vingt du XXe siècle, un Jean-Charles de Fontbrune en avait fait son cheval de bataille et ce quatrain fut un de ceux qui contribua notamment à assurer une belle notoriété à l’auteur du best-seller qui sut habilement l’exploiter. Retour
4 Cf. son article sur le Site du CURA, Dr. Elmar R. Gruber, “Reconsidering the ‘Nostradamus Plot’ (New Evidence for the Critical Evaluation of the Chronology of the Editions of the ‘Prophéties’)”. Retour
5 Cf. Jean-Aimé de Chavigny, La premiere face du Ianus François, contenant sommairement les troubles, guerres civiles & autres choses memorables advenuës en la France & ailleurs dés l’an de salut M.D.XXXIIII. iusques à l’an M.D.LXXXIX..., Lyon, Héritiers Pierre Roussin, 1594, p. 254. Retour
6 Cf. RCN, pp. 51 - 52. Si nous en croyons Brunet, la mention de 39 articles à la dernière centurie devait sans doute correspondre à un ajout dans la centurie VII. Retour
7 Cf. RCN, pp. 118 - 119. Retour
8 Cf. Jacques Halbronn, Documents inexploités sur le phénomène Nostradamus, Editions Ramkat, 2002, pp. 62 - 77. Retour
9 Elles le seront effectivement au cours de la Seconde Guerre mondiale, entre les services anglais et nazis. Retour
10 Cf. Documents inexploités..., op. cit., pp. 69 et 73. Retour
11 Cf. RNC, p. 121. Retour
12 Cf. RCN, pp. 118 - 125. Retour
13 Cf. RCN, pp. 51 et 58 - 59. Retour
14 Cf. RCN, pp. 33 - 34. Retour
15 Cf. RCN, p. 52. Retour
16 Cf. Documents inexploités…, op. cit. Retour
17 La Bibliothèque Du Verdier (1585) mentionne une édition Benoist Rigaud de 1568 : “Dix Centuries de prophéties par Quatrains qui n’ont sens, rime ni langage qui vaille.” (p. 881) Retour
18 Cf. “Le Janus Gallicus comme base d’une édition critique des Centuries”, Analyse 61. Retour
19 Nous avons abordé le cas de cet imposteur dans le RCN, pp. 92 - 93 et notre édition du manuscrit de Palamède Tronc de Coudoulet, Ed. Ramkat, 2001, pp. 9 - 11. Retour
20 Cf. “Le labyrinthe des éditions centuriques Rigaud”, Analyse 54. Retour
21 Dans l’examen des arguments présentés par J. Halbronn, nous n’avons cependant pas suivi une ligne directrice, puisque du propre aveu de leur auteur, ses “idées” sont appelées à évoluer et elles ont déjà été retouchées sur certains points si on compare quelques uns des premiers et des derniers textes mis en ligne. Nous avons donné notre opinion sur toutes ces études que nous avons relus attentivement au fur et à mesure qu’elles se présentaient à nous. Retour
22 Cf. son étude “Les trois canons centuriques et leur couplage exégétique”, Analyse 50. Retour
23 Cf. La vie de Nostradamus, Aix, Veuve Charles David, 1711, p. 50. Retour
24 Cf. La vie de Nostradamus, Paris, Gallimard, 1930, p. 174. Retour
25 Cf. Nostradamus, Paris, Maillet, 1840, pp. 253 - 255, et la description fidèle de Bareste d’un exemplaire de l’édition Macé Bonhomme. Retour
26 Cf. Nostradamus, Paris, Ed. Excelsior, 1933, p. 183. Retour
27 Cf. Palinodies de Pierre de Ronsard, 1563, fol. B. Voir RCN, pp. 63 - 64. Retour
28 Cf. Les poèmes de P. de Ronsard, Paris, Gabriel Buon, 1560, tome 3, fol. 218. Voir RCN, pp. 46 - 47. Retour
29 Cf. “Réponse aux observations parues dans le n° 26 du CURA consacré à Nostradamus”, Analyse 40, volet 4. Retour
30 Cf. “Les premiers garants de la publication des Centuries de Nostradamus ou la Lettre à César reconstituée”, Analyse 34. Retour
31 Jean Dorat (1508 - 1588), un des membres de la Pléiade fut le maître de Ronsard et Du Bellay. Retour
32 Cf. Jean de Chevigny, L’Androgyn né à Paris…, Lyon, Michel Jove, 1570, fol. A3. Voir également Petey-Girard, p. 14. Retour
33 On notera que le Janus Gallicus a reproduit le dit quatrain avec une variante “Androgyn” au lieu de “L’Androgyn”. Retour
34 Il s’agit d’une adaptation d’un traité de Galien, d’après une traduction latine d’Erasme. Retour
35 Le manuscrit de l’Interprétation des Hiéroglyphes de Horapollo est également signée de cette manière par Nostradamus. Voir Brind’Amour, Nostradamus astrophile, Ottawa, Ed. Klincksieck, 1993, p. 474. Retour
36 Le manuscrit latin fut publié par Jean Dupèbe en 1983 chez Droz. Retour
37 Cf. L’astrologie de Nostradamus, dossier présenté par Robert Amadou, Diffusion ARRC, 1992, pp. 82 - 83, traduction de Bernadette Lécureux. Retour
38 Cf. Antoine Couillard, Les Prophéties du Seigneur du Pavillon Lez Lorriz, Paris, Antoine le Clerc, 1556, fol. B1r. Voir RCN, pp. 18 - 19. Retour
39 Cf. “Les premiers garants de la publication des Centuries de Nostradamus ou la Lettre à César reconstituée”, Analyse 34. Retour
40 Voir son étude “Pour une relecture du RPP”, Analyse 31. Retour
41 Jean Dupèbe dans ses Lettres inédites, Droz, 1983, p. 115, traduit ce terme par “Pronostication” et Bernadette Lécureux, dans le dossier de Robert Amadou, L’Astrologie de Nostradamus, ARRC, 1992, p. 128, le traduit par “Almanach”. Il s’agit bien, en l’occurrence dans ce cas là, de l’Almanach pour 1562, imprimé à Paris, par Guillaume le Noir et Jean Bonfons. Voir RCN, pp. 47 - 50. Retour
42 Cf. “Un faux almanach de Nostradamus paru sous la Ligue”, Analyse 40, volet 1. Retour
43 Cf. Cahiers Astrologiques, n° 97, Mars - avril 1962, p. 64 et RCN, pp. 5. Voir aussi Chomarat-Laroche, Bibliographie Nostradamus, Baden-Baden, 1989, p. 10. Retour
44 Dans sa lettre Nostradamus et l’Astrologie, Saint-Denis-du-Pin, 1872, p. 19, Torné-Chavigny corrige le quantième du mois en 27. Retour
45 Cf. Torné-Chavigny, Lettres du Grand Prophète, Saint-Jean-d’Angely, 1870, p. 286. Retour
46 Les vers cités par Torné-Chavigny appartiennent au quatrain-présage de septembre 1555. L’exemplaire de Daniel Ruzo était sans doute celui de l’abbé Rigaud, lequel l’hérita de son maître Torné-Chavigny. Retour
47 Cf. Daniel Ruzo, Le testament de Nostradamus, Monaco, Edition du Rocher, 1982, p. 340. Retour
48 Cf. Bernard Chevignard, Présages de Nostradamus, Edition du Seuil, 1999, pp. 218 - 241 et 241 - 251. Retour
49 Cf. Torné-Chavigny, Lettres du Grand Prophète, Saint-Jean-d’Angely, 1870, p. 286 - 287. Retour
50 Ce quatrain figure en tête du RPP, au dessous du titre “Extraict d’un commentaire d’icelui sur l’an MDL, LII, LIII, LIIII et LV”, Retour
51 Cf. RCN, p. 6 et Présages de Nostradamus, op. cit., p. 113. Est-ce que le quatrain en question ne se trouvait pas dans une autre pronostication précédée d’une épître “liminaire” ? Retour
52 Cf. Les odes de P. de Ronsard, Paris, Gabriel Buon, 1560, tome 2, fol. 34v°. Retour
53 Cf. Nostradamus - Prophéties, Présentation par Bruno Petey-Girard, GF Flammarion, 2003, p. 12, note 1. Retour
54 Cf. Les Significations de l’Eclipse, qui sera le 16. Septembre 1559…, Paris, Guillaume le Noir, S. d., fol. Biir. Voir Chevignard, op. cit., p. 455. Retour
55 Cf. Documents inexploités, op. cit., p. 226. Retour
56 Cf. RCN, p. 499. Retour
57 Cf. RCN, pp. 33 - 34. Retour
58 Cf. RCN, p. 44. Retour
59 Nous avons déjà dit que cette édition est attesté par Brunet qui nous dit qu’un exemplaire avait été vendu aux enchères en 1750. Voir RCN, pp. 51 - 52. Retour
60 Cf. “Un faux almanach de Nostradamus paru sous la Ligue”, Analyse 40, volet 1. Retour
61 Cf. Jean de Marconville, Recueil mémorable des cas merveilleux advenuz de nos ans…, S.l.n.d., fol. 9r. Voir RCN, pp. 62 - 63. Retour
62 Cf. Pierre Brind’Amour, Nostradamus astrophile, Editions Klincksieck, 1993, p. 84. Retour
63 Cf. Bibliothèque Marciana (St Marc), Venise. Voir l’article de Jacques Halbronn, “Les fallacieux espoirs des nostradamologues à la solde des faussaires”, Analyse 40, volet 2. Retour
64 Cf. notamment Pierre Brind’Amour, Nostradamus astrophile. Les astres et l’astrologie dans la vie et l’oeuvre de Nostradamus, Paris, 1993, p. 488. On notera que les expressions “fureur” et “naturel instinct” ne se retrouvent que dans la Lettre à Henri II. Cette dernière expression ne se retrouve d’ailleurs pas dans Les Présages merveilleux pour l’an 1557 dont J. Halbronn pense qu’elle fut employée pour fabriquer la dite Epître à Henri II. Retour
65 Cf. Philippe Renouard, Imprimeurs et libraires parisiens du XVIe siècle. Ouvrage publié d’après les manuscrits de Philippe Renouard par le service des Travaux historiques de la Ville de Paris avec le concours de la Bibliothèque nationale, t. III, Paris, 1979, p. 279 - 281. Voir l’article de Gruber, op. cit. Retour
66 Cf. Michel Chomarat (avec Jean-Paul Laroche), Bibliographie Nostradamus, XVIe-XVIIIe siècles, Baden-Baden, 1989, notice 49. Retour
67 Cf. RCN, p. 50. Retour
68 Cf. article de Gruber, op. cit., qui reproduit le texte de la Pronostication conservée à la Bayerische Staatsbibliothek à Munich. Retour
69 Cf. Chomarat, op. cit., pp. 36 - 37. Fol 22v de la Pronostication nouvelle. Voir Pierre Brind’Amour, Nostradamus astrophile, Ottawa, 1993, p. 268. Retour
70 Cf. Gruber, op. cit. Retour
71 Cf. Pierre Brind’Amour, Les premières Centuries ou Prophéties, Droz, 1996, p. 405. Plus tard, les quatrains 51 et 55 seront appliqués à l’assassinat du duc de Guise dit Henri le Balafré, le 23 décembre 1588. Retour
72 Cf. Histoire et Chronique de Provence, Lyon , 1614, p. 782 E. Retour
73 Cf. Pierre Brind’Amour, Nostradamus Astrophile, 1991, pp. 267 - 268. Retour
74 Chomarat (op. cit., notice 65, p. 45) cite cet ouvrage d’après Renouard (op. cit., t. III, p. 297 - 298), lequel cite un catalogue de vente. Voir notre article “Les Pronostications et Almanachs de Michel Nostradamus” sur le Site du CURA. Retour
75 Almanach Pour l’An 1565. Composé par M. Michel Nostradamus Docteur en Medecin, de Salon de Craux en Provence. A Paris Pour Thibault Bessault, demourant en la rue S. Iaques, à l’enseigne de l’Elephant. Avec permission. Retour
76 Cf. RCN, pp. 65 - 67. Par rapport à l’original comportant 163 pages, l’almanach de Bessault se compose de seulement 32 folios seulement. Retour
77 Exemplaire Utrecht : “L’an que Saturne sera hors de servaige”. Retour
78 Cf. RCN, pp. 59 & 636, gravure A2 et Chomarat, op. cit. p. 39, fig. 11. Retour
79 Cf. Benazra, op. cit., pp. 91 & 115 et Chomarat, op. cit., notices 110, 137. Retour
80 Cf. Bernard Chevignard, Présages de Nostradamus. Présages en vers 1555 - 1567, présages en prose (1550 - 1559), Paris, 1999. Retour
81 (I.47) : Chavigny, PP 285, 1561 ; (I.90) : Chevignard, PP 98, 1554, p. 204 ; (II.89) : Chevignard, PP 285, 1559, p. 358 ; (III.93) : Chevignard, PP 380, 1559, p. 369 ; (III.100) : Chevignard, PP 451,1559, p. 378 ; (IV.62) : Chevignard, PP 238, 1559, p. 353 ; (VI, 2) : Chevignard, PP 359, 1555. Note omise par Chevignard ; (VI.13 & 79) : Chevignard, PP 112, 1558, p. 300 ; (X.37) : Chavigny, PP 204, 1561. Retour
82 Cf. “Le rôle des vraies Epîtres dans la datation du faux centurique”, Analyse 48. Retour
83 Nous savons, par ailleurs, que le nombre des Sixains avaient été plus important à l’origine. Voir RCN, p. 162. Retour
84 Cf. “Le rôle des vraies Epîtres dans la datation du faux centurique”. Retour
85 Cette mention de XII Centuries ne s’est pas imposé pas au niveau canonique. Retour
86 Cf. “Les trois canons centuriques et leur couplage exégétique”, Analyse 50. Retour
87 Cf. Epistre A la Royne mère du Roy Empereur de France Charles IX. Par M. Chrespin Archidamus, Seigneur de haute Ville… A Lyon, par Benoist Rigaud, 1573 et Epistre envoyée à M. Crespin Nostradamus, Seigneur de Haute Ville… A Vienne, par Nicolas Martin, 1573. Voir Documents inexploités, op. cit., pp. 50 - 53. Retour
88 Cf. “Les paradoxes du prophétisme centurique”, Analyse 59. Retour
89 Cf. son Analyse 61, op. cit. Retour
90 Cf. Présages de Nostradamus, op. cit., p. 56. Retour
91 Cf. Présages de Nostradamus, op. cit., p. 283, note 2. Retour
92 Cf. Nostradamus, Paris, Maillet, 1840, p. 255. Et de fait, aucun exemplaire ne se trouve effectivement dans les bibliothèques parisiennes, mais Paris n’est pas toute la France et le centre du monde, puisqu’ailleurs, nous en avons comptabilisé une bonne douzaine. Retour
93 Cf. son article dans Aus der Zeitschrift für Bücherfreunde, Leipzig, Mars 1913. Retour
94 Cf. Réédition du Livre de Prophéties de Nostradamus publié en 1566 chez Pierre Rigaud, Bordeaux, 1862. Retour
95 Cf. Les Oracles, Paris, 1867. Retour
96 Cf. son étude “Un Nostradamus schizophrène”, Analyse 74. Retour
97 Cf. RCN, p. 51. Le Supplément du Manuel du Libraire nous dit que cette édition contenait sept centuries. Retour
98 Cf. “Les différentes versions de la Centurie VII”, Analyse 76. Retour
99 Le Dictionnaire Nostradamus de Michel Dufresne serait donc à revoir sérieusement, si on souhaite véritablement disposer d’une base de donnée fiable ! Retour
100 Nous avons bien précisé une édition contemporaine de Nostradamus, car on a bien publié une édition comportant 48 quatrains à la VIIe centurie, mais c'était vers la fin du XVIIIe siècle. Voir RCN, p. 325. Cette édition, qu'on peut dater des années 1780 - 1790, est donc bien celle qui a été reproduite par les faussaires modernes E. Bellecour et A. Slosman. Mais le quatrain VII.46 de Giffré de Réchac est numéroté VII.48 cette édition parisienne imprimée “D'après un exemplaire trouvé dans la Bibliothèque du célèbre Pascal”. Retour
101 Cf. RCN, p. 52. Retour
102 Cf. RCN, p. 119. Retour
103 Cf. RCN, pp. 51 - 52. Retour
104 Cf. RCN, p. 42. Retour
105 Cf. RCN, p. 44. Dans Le Testament de Nostradamus, 1982, p. 261, Daniel Ruzo nous dit posséder un exemplaire de cet ouvrage. Retour
106 Cf. RCN, p. 121. Retour
107 Cf. “La question des éditions pseudo-rigaldiennes et l’édition de Cahors”, Analyse 62. Retour
108 Cf. RCN, pp. 295 - 300. Retour
109 Cf. notamment les 12 volumes de la Bibliographie lyonnaise de Baudrier. Retour
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