Etudes de Critique biblique, astrologique nostradamiquej et linguistique.
lundi 13 novembre 2023
jacques halbronn sur l'édition de la Correspondance de Nostradamus par Jean Dupébe (1983)
Jacques Halbronn sur l'édition de la Correspondance de Nostradamus par Jean Dupébe (1983)
Il y a 40 ans, paraissaient les "Lettres inédites" de Nostradamus, s'échelonnant entre 1558 et 565 dans une édition critique de Jean Dupébe.(Ed Droz, Genéve). Ce qui frappe, dans un tel ensemble, c'est l'absence de référence aux quatrains des Centuries mais aussi aux Epitres à César et à Henri II et notamment aucune mention de la mort d'Henri II en 1559 qui aurait été annoncée par Nostradamus dans un des quatrains du "premier volet" (1555-1557) comme s'il n'était pas jugé nécessaire de valider ces productions. A partir de 1990, une telle précaution va s'avérer de plus en plus nécessaire mais on n'en était pas encore là, apparemment, en 1583 d'autant qu'on allait (avec Robert Benazra, en particulier) retrouver une édition de Macé Bonhomme (1555) dans les bibliothèques d'Albi et de Vienne (Autriche), ce qui suffirait momentanément à une telle authentification. En 1985 se tiendra à Salon de Provence, un premier Colloque Nostradamus où nous interviendrons, avec la participation de Daniel Ruzo, de Jean Dupébe, de Jean Céard, de Robert Amadou, de Michel Chomarat, de Robert Benazra. Ce virus déniaisant du soupçon se propagera lors de la décennie suivante, avec Pierre Brind'amour, à notre suite" (cf archives in fine). Jean Dupébe reléve une référence au pape Pie IV (p. 68) de 1561 cat Nostradamus semble y attacher la plus grande importance -silence, en revanche sur les deux textes en prose introduisant des centuries, que Dupébe cependant commente! Or, cette Epitre à Pie IV est authentique à la différence des deux autres et, comme nous l'avons montré ailleurs, certains de ses éléments se retrouvent au second volet des "Prophéties", elle y sera remplacée par une pseudo Epitre à Henri II (cf nos Documents inexploités sur le phénoméne Nostradamus (Ed Ramkat, 2002) Dans sa lettre à Rosenberg de septembre 1561, Nostradamus écrit " Je voudrais que vous lisiez mon Ephéméride de 1562 dédié à Pie IV; j'y annonce nombre de prodiges et de calamités pour l'Europe"( trad. Dupébe; pp. 96-98 et 114-115)) De la supposée Epitre de 1558 à Henri II, en revanche, pas un mot! On regrettera que l'édition de Dupébe n'ait point suscité l'intérêt qu'elle eut mérité pour cette adresse au pape, laquelle sera vite traduite en italien.au point qu'encore de nos jours, bien des nostradamologues n'en aient toujours pas pris connaissance (cf notre article de 1991 dans RHR) Or, en citant les deux Epitres, Dupébe, ipso facto reconnaissait l'authenticité des Centuries qui les accompagnaient.
Les partisans de l'authenticité mettront en avant deux documents (l'un de Couillard, Du Pavilon (1556), l'autre de Chevigny sur l'Androgyn (1570) qui se référent de façon assez explicite au contenu de la dite édition, il convient d'y ajouter un troisiéme dû à Antoine Crespin (1572). Selon nous, il s'agit de contrefaçons antidatées, ce dont nous avons traité dans notre mémoire de post-doctorat (2007) sur la naissance de la critique nostradamique au XVIIe siècle. Nous mêmes, nous avons pu pense, un temps, que les deux derniers textes attestaient de la connaissance des Centuries, à la mort de Nostradamus en 1568 et d'ailleurs, il est probable que les Centuries seront présentées comme posthumes, retrouvées dans les papiers de Nostradamus, trouvés dans sa bibliothèque, avant que l'on ne s'avise, par un effet connu de surenchère, de la situer, tant qu'à faire, du vivant de Nostradamus.. En ce qui concerne l'identité de "Chavigny" à laquelle Dupébe consacre pas mal de place dans son étude (pp/ 21 et seq) à cette "hypothèse" d'une substitution, il est clair, en tout cas, que le dit "Jean Aimé de Chavigny" sera un artisan zélé de la diffusion des Centuries, avec son Janus François (Lyon, 1594) incluant des quatrains des almanachs, probablement repris du manuscrit 'Recueil des présages prosaîques" (cf l'édition partielle. de B. Chevignard, ed Seuil, 1999) , lequel il est présenté d'ailleurs comme son éditeur en 1589. On serait donc assez favorable à une forme d'imposture, de substitution à commencer par cette édition antidatée de 1570 de l'Androgyn qui va jusqu'à donner le numéro d'ordre d'un quatrain!(cf notre Discours de soutenance en 2007, sur You Tube)
La comparaison entre ces pseudo -témoignages de la parution des Centuries avant ou après 1568 avec le contenu des Lettres est édifiante Qui pourrait en effet supposer l'existence des Centuries et des Epitres à César et à Henri II à leur lecture alors même que la correspondance couvre la période 1558-1565 à commencer par l'impact de l'annoncé de la mort du Roi? A contrario, l'Epitre au Pape Pie IV est bel et bien signalée tant par Nostradamus que par l'un de ses correspondants. Autrement dit, la publication des dites Lettres nous apparait comme la première pièce à charge contre la fabrication des éditions de 1555 et 1557.
C'est grâce à ce Chavigny que le corpus Nostradamus des quatrains se voit rassemblé -les deux volets plus les "présages"., certains quatrains d'almanachs se retrouvant dans des éditions parues sous la LIgue.(1588-89). dans le "Janus Gallicus". Bien que Nostradamus ne les mentionne pas dans sa correspondance, ses almanachs annuels comportèrent bel et bien une forme versifiée (-dont il n'était probablement même pas l'auteur) de ses pronostications, et ce sont les dits quatrains qui donnèrent l'idée d'en fabriquer des centuries. Mais la date de publication n'est nullement indifférente puisqu'elle coincide avec une prophétie antéchristique figurant dans l'Epitre à Pie IV sur la base d'un quatrain de la VIIIe Centurie annonçant une échéance au bout de 27 ans. Or, 1594 est la somme de 1567, date de naissance fixée par Nostradamus et de 27, ce qui correspond à l'arrivée d'Henri de Navarre sur le trone de France, du fait de son couronnement.La date de 1567 figurant dans l'Epitre au Pape comporte la clef du quatrain VIII, 77 si ce n'est que la dite Epitre a été remplacée par une fausse Epitre à Henri II (datée de 1558) qui ne fournit pas une telle clef!
77° QUATRAIN VIII.77
L’antechrist trois bien tost annichilez.
Vingt & sept ans sang durera sa guerre,
Les heretiques morts,captifs exilez,
Sang corps humain eau rogie gresler terre.
..
La première face du Janus françois : contenant sommairement les troubles, guerres civiles & autres choses mémorables advenues en la France & ailleurs dés l'an de salut 1538 jusqu'à l'an 1589, fin de la maison Valésienne / par Jean-Aimé de Chavigny, Lyon,
P. Roussin 1594
Archives (sur Internet=
Robert Benzara (site Ramkat.free.fr)
"Depuis plusieurs années déjà, Jacques Halbronn - en particulier depuis l'élaboration de sa thèse 1 et plus récemment dans un ouvrage fondamental que nous avons souhaité publier 2 - tente un renouvellement des études nostradamiennes en cherchant à démontrer notamment que l'édition 1555 des Prophéties - dont nous avions découvert deux exemplaires uniques dans les années Quatre-vingt - est une édition frelatée."
Patrice Guinard :(CURA)
"La description iconographique et matérielle de l'édition de 1555 ne suffit pas, à elle seule, à mettre fin aux soupçons concernant son authenticité, alimentés principalement par les spéculations d'un Jacques Halbronn depuis son article de 1998 (Cahiers Saulnier, 15) jusqu'à ses plus récents développements sur le site Ramkat. [cf. aussi son mini-catalogue d'une cinquantaine d'entrées, qui ne répertorie que trois éditions "nostradamiques" présentes dans les collections de la BnF : Pierre Ménier 1589, le Janus d'un "pseudo-Chavigny" [sic], et Amsterdam 1668 ("Astrologie et Prophétie", 1994, pp.7, 43-44, 51]"
JHB 13 11 23
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