Etudes de Critique biblique, astrologique nostradamiquej et linguistique.
jeudi 16 septembre 2021
Jacques Halbronn Le syncrétisme centurique des quatrains et sixains
Jacques Halbronn
Le syncrétisme centurique des quatrains et sixains
Dans notre post doctorat consacré à la naissance de la critique nostradamique au XVIIe siècle (Ecole Pratique des Hautes Etudes
VE section) en 2007, nous avions signalé les doutes de l'auteur de l'Eclaircissement des véritables quatrains (1656).
Le corpus centurique est fortement marqué par le phénoméne du syncrétisme auquel nous nous consacrons sur plusieurs domaines, linguistique,biblique et astrologique notamment. Le syncrétisme se caractérise par le fait de mettre en vrac au sein d'un même corpus des données disparates, dans le temps et dans l'espace. Pour créer une impression d'unité, les expédients sont l'idée de synonymie, particulièrement exploitée dans le champ linguistique et morphosémantique et la technique du commentaire visant à traiter comme étant d'un seul tenant tout un corpus, comme ce fut le cas en 1594 avec Jean Aimé de Chavigny dans son Janus François puis dans le dit Eclaircissement du dominicain Jean de Réchac. Ajoutons, l'application d'un même formalisme comme pour les centuries de quatrains pour le corpus Nostradamus.
Certains auteurs se sont voués à nier l'existence d'un tel syncrétisme, comme dans le cas de Patrice Guinard pour qui la forme du quatrain est la preuve même de l'unité de la publication centurique, sa démarche visant notamment à mettre l'accent sur l'interprértion des dits quatrains. Si l'Histoire peut être recoupée par les divers quatrains, c'est la preuve que ces quatrains constituent un ensemble d'un seul tenant et en quelque sorte indivisible, selon Guinard lequel insiste sur la personne de Nostradamus seul et unique auteur d'un tel ensemble. L'historien du syncrétisme est habitué à une telle argumentation et notamment dans le champ du religieux - on pense à la prétendue unité de la "Bible" avec l'argument de la préfiguration et même à la pretendue unité de l'Ancien Testament et notamment du Pentateuque - et de sa pratique tout comme dans le champ de l'astrologique, dans lequel Guinard est également impliqué avec la même ferveur.
La thèse d'une unité d'inspiration du corpus centurique n'est plus guère tenable et nous avons montré que les "faussaires" auront intégré dans les Centuries des éléments disparates et souvent contradictoires On pense à Crespin dont les quatrains antijudaiques sur la Synagogue furent intégrés dans les Centuries tout comme la Guide des Chemins de France. (cf le travail de chantal Liaroutzos). En 1997, au Congrès Prophétes et prophéties, à la Sorbonne, nous avons montré que l'évolution du contenu des éditions parues dans les années 1588-89 suivait l'actualité politique. (cf notamment le quarain 46 de la IVe Centurie qui figure déjà dans la première éditions supposée de 1555! "Garde toi Tours de ta proche ruine". tout comme le couronnement d'Henri IV, début 1594 aura produit un quatrain comportant le nom de Chartres, lieu du dit couronnement. Guinard, évidemment, pourra toujours déclarer que tout cela avait été "prévu", "préfiguré" par Nostradamus! Il est vrai que le prophétisme se prête à de tels arguments (cf notre thèse d'Etat Le texte prophétique en France, formation et fortune, 1999, Presses Universitaires du Septentrion)
L'intégration des sixains dans le dit corpus aura fait tiquer plus d'un tout simplement parce qu'il ne s'agissait pas. de... quatrains. On voit à quoi tient le niveau critique des négateurs du syncrétisme. Nous avons découvert que ces 58 sixains avaient été l'oeuvre d'un certain Noel Morgard (auquel s'est intéressé par ailleurs Hervé Drévillon, Lire et écrire l'avenir. Ed Champ Vallon, 1996, à partir de sa thèse de 1994) La découverte de ces sixains (à la Bibliothèque Mazarine) aura mis en évidence le processus de récupération suivi par les "faussaires"..(cf Prophetica judaica Aleph : documents inexploités sur le phénomène nostradamique / par Jacques Halbronn. Suivi d'un dossier de documents nostradamiques comportant notamment Les trois épîtres pour l'an 1557 / de Michel de Nostredame. Les prophéties dédiées à la puissance divine / d'Antoine Crespin, dit Archidamus. Prophéties présentées au roy Henry le Grand / de Noël Léon Morgard, ED Ramkat 2002,. Cette découverte totalement nouvelle pour tous les "nostradamologues" (Ruzo, Chomarat, Benazra etc) ne nous avait été rendue possible que parce que nous ne nous sommes jamais cantonnés au seul corpus Nostradamus, circonscrit par l'usage au titre ou dans le texte du nom de Nostradamus, notamment dans le cadre de la réalisation de notre CATAF, Catalogue Alphabétique des Textes Astrologiques Français, mis en ligne sur le site du CURA dès sa création en 1999. Nous mêmes, nous avons cru qu'un Antoine Crespin s'était servi des Centuries- thèse reprise par Pierre Brind'amour dans son édition de 1996, chez Droz avant de comprendre que certes Crespin avait imité Nostradamus mais que c'est justement cela qui avait conduit à s'en servir.
JHB
16 09 21
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