par Jacques HalBronn
Il nous semble que l'on ne peut comprendre le phénomène astrologique sans aborder la question de la perception et de la captation des signes, tant cosmiques que sociaux en précisant que la hiérarchie sociale est largement fonction de nos facultés sémiologiques.
Nous avons déjà abordé, lors de précédents travaux, la délicate question des inégalités humaines face aux signes cosmiques, seule une certaine élite, à notre avis, étant en mesurer de se brancher sur une certaine dynamique céleste. Ce point est contesté par les tenants d'une astrologie "pour tous" et notamment du thème natal, comme bagage dont chaque humain serait doté à la naissance et qui serait comme un gage d'égalité, en dépit des différences existant entre les cartes du ciel.
Mais un autre angle- psychopathologique- mérite aussi d'être considéré qui expliquerait le recours à l'astrologie chez certaines populations souffrant de difficultés de repérage sémiologique au sein des milieux où elles résident. Ce qui pose, sous un jour nouveau, la question du langage astrologique (voir notre récent entretien avec Carole Leblay, sur teleprovidence.com, à Paris, le 31.10. 09)
Dans les deux cas de figure, nous avons affaire à des messages particulièrement subtils qui ne sont pas décodés automatiquement par tous et qui, au demeurant, ne sont pas évidents à traduire dans la mesure où ils ne passent pas par le langage ordinaire.
Et c'est justement là que l'astrologie intervient en ce qu'elle prétend traduire une langue qui ne serait pas comprise par certains. Rien à voir cependant avec le langage des astres que seul le subconscient de certains "élus" pourrait déchiffrer et "traduire " en actes. Cette idée de traduction en actes nous semble essentielle : la meilleure façon de montrer que l'on a compris un signe, c'est d'agir, de se comporter en conséquence. Celui qui n'adopte la bonne attitude en société prouve par là qu'il n’a pas enregistré certains signes/signaux et il en paie les conséquences. On est là dans une forme de sociopathie caractéristique des comportements des marginaux (enfants, émigrants, psychopathes, malades etc) Et ce seraient justement ces marginaux qui seraient la cible, au sens commercial du terme, des astrologues de terrain, venus demander de l'aide au niveau sémiologique de façon à adopter un comportement plus approprié aux circonstances rencontrées.
En ce sens, le rôle de l'astrologue sera d'optimiser des façons d'agir chez ses clients, plutôt que de procéder à un portrait psychologique. Comme nos actes en société déterminent des effets, l'on peut parler ici de prévision. Changez votre comportement et les choses changeront à terme autour de vous. En ce sens, il est juste de dire que l'astrologue doit conseiller, coacher, doit proposer de nouvelles attitudes, l'aspect psychologique ne jouant ici que pour comprendre ce qui viendrait bloquer la compréhension des signes sociaux environnants et la mise en œuvre des bons choix comportementaux.
En d'autres termes, nous dirons que l'astrologue est censé aider son client à mieux capter les signes que lui envoient les personnes avec qui il a affaire. Il le fera en étudiant le thème des dites personnes et éventuellement réalisera une synastrie (une comparaison de thèmes) avec le thème de son client. Il va de soi que les gens "normaux" se débrouillent sans recours à l'astrologie mais -comme nous l'avons souligné ailleurs - les techniques d'aide tendent à être adoptées par des populations beaucoup plus larges que celles qui sont visées au premier chef, et ce dans toutes sortes de domaine dont l'astrologie.
Bien sûr, pour un malentendant, un sourd muet, il y aura aussi un certain déficit sémiologique tout comme pour un non ou un mal voyant, un aveugle. Et pour pallier de tels handicaps, l'on a élaboré des langages, comme le braille, la "langue des signes". L'aveugle qui s'initie au braille pourra donc lire les textes en braille qu'on lui présentera et ainsi de suite. La personne qui ne capte pas certains signes (au niveau de la gestuelle, au niveau du discours etc, voir le Guide Pratique de Michael Curtis, "Comment Décrypter Le Langage du Corps : "http://www.progagnez.com/Langageducorps/pagedevente.html) apprendra l'astrologie pour pouvoir ensuite lire des textes accessibles en "astrologique" et qui sont constitués par des cartes du ciel mais aussi par une certaine terminologie planétaire, zodiacale etc plus ou moins étoffée.
Le problème, outre le caractère illusoire d'une telle "solution", c'est que dans le cas de la consultation astrologique, l'astrologue recourt à un langage astrologique que ses clients, en règle générale, ne maitrisent guère. Il en serait autrement si le client suivait des cours d'astrologie et rencontrait des initiés à l'astrologie. D'où la séparation radicale entre cours et consultation d'astrologie, le cours pouvant être une approche de la consultation mais non l'inverse.
Une autre question qui se pose est évidemment celle de la pertinence de la traduction d'une certaine signalétique sociale dans le langage astrologique. Si l'attitude conseillée par l'astrologue ne donne pas de bons résultats, c'est que le système est défectueux. Mais comme les conseils de l'astrologue ne sont pas uniquement dictés par l'astrologie, une évaluation du travail reste bien difficile à envisager, surtout si le dit astrologue n'est pas atteint des maux dont souffre son client. A contrario, un astrologue aussi démuni sémiologiquement que son client constituerait un cas plus intéressant à étudier. Le moins que l'on puisse attendre d'un astrologue est d'ailleurs qu'il sache doser son propos de façon à permettre à son client de l'intégrer. En fait, chez certaines personnes qui n'existent que parce qu'elles se sont approprié, savoir ce que l'autre revendique être peut suffire à le connaitre puisque nous ne serions que ce que nous prétendons et déciderions d' être...
Il nous semble que le terme de coach astrologique serait hautement recommandé dans la mesure où l'astrologue, selon nous, serait d'abord celui qui améliore les actions de ses clients. Rappelons que le mot karma signifie action en sanscrit. Certes, le client de l'astrologue peut aussi s'interroger à son propre sujet mais il nous semble assez évident que le client ne peut être aussi étranger à lui -même qu'à autrui dont il ne capte pas les intentions encore que si le client se situe mal face à autrui, il risque effectivement de ne pas avoir un regard approprié sur lui-même. C'est donc bien la question des relations du client avec autrui qui relèverait du champ d'une certaine astro-pathologie.
En conclusion, nous dirons qu'il ne s'agit pas "simplement" de traduire en français (ou en toute autre langue vernaculaire) ce qui serait dit par telle ou telle personne s'exprimant dans une langue étrangère mais bien de "traduire" en actes des informations qui auraient été mal captées par le client, au sein d'une société donnée.
Ainsi, dirons-nous que le langage astrologique se présente comme une interface entre une psycho-socio-sémiologie relative à un milieu donné et le client s'exprimant dans une certaine langue vernaculaire. Il s'agit de lui "mettre les points sur les i", de lui faire comprendre des points dont il n'aurait pas bien saisi la signification.
Tout le champ de l'astrologie tournerait donc autour d'enjeux sémiologiques, en rapport avec la captation de signes subtils, exigeant des "antennes" pour être perçus. Deux domaines s'offrent ici: une première astrologie élitique à caractère cyclique pouvant aider le monde à repérer ses chefs et aux futurs chefs à connaitre les cycles dont ils dépendent et une seconde astrologie visant à aider une population désorientée, maitrisant mal ses relations à autrui. L'une est dans un registre de temps, de périodicité, l'autre d'espace, relationnel. La première nous semble promise à un bel avenir au cours du XXIe siècle et plus largement du Troisième Millénaire tandis que la seconde nous semble assez peu crédible mais sauve sa mise par le truchement de l'astrologue qui "y met du sien" et "fait la part des choses". L'on se demandera pourquoi deux champs aussi différents peuvent cohabiter sous le même label. Cela tient au fait qu'autour de tout système, se développe un "SAV", un service après vente, de dépannage voué à traiter toutes sortes de dysfonctionnements. Rappelons que toute la théorie de l'individualisme est née de recherches pathologiques. (Les tempéraments d' Hippocrate) car ce qui nous distingue de notre prochain, c'est notre idiosyncrasie avec toutes nos bizarreries physiques et psychiques, nos "signes particuliers" qui nous décalent par rapport à la norme, de là à envier ceux qui se distinguent par leurs différences et à faire de cela un idéal de vie...., le grand chic étant désormais d'être inclassable.
L'astrologie nous dirait ce que signifient les astres au travers de leur langage mais en réalité, ce qui intéresse les gens, ce n'est pas ce que disent les astres mais bien ce que disent les hommes et les astres nous aideraient à comprendre les hommes, eux-mêmes marqués peu ou prou par les astres. On retiendra que le recours à l'astrologie devrait être réservé à des cas pathologiques d'une part, à des cas de destins exceptionnels de l'autre. Rien de ce qui est dans la norme, dans la médiocrité (au sens de moyenne) ne relève, selon nous, de l'astrologie laquelle a à traiter de ceux qui s'élèvent très haut, se placent au centre, au sommet et de ceux qui descendent très bas, dans les marges, à la périphérie.
Nous terminerons en mettant en garde ces astrologues qui présentent l'astrologie comme étant un langage sans peser ce que cela peut signifier. Qu'est ce qu'en effet peut signifier le mot "langage" dans la bouche de la plupart des astrologues? D'aucuns diront que c'est un moyen de comprendre ce qui se passe, qui s'applique à tout et n'importe quoi et qui donne toujours quelque indication, quelque réponse : on trace le thème et on déchiffre un peu comme avec le marc de café! On ne peut s'empêcher d'y trouver des relents de divination, de mancie/mantique dès lors qu'au lieu d'étudier les cycles cosmiques lesquels déterminent des dates à l'échelle de l'humanité, l'on fait le thème pour le moment de la consultation ou pour celui de la naissance du client, comme si ces moments là faisant automatiquement sens sur le plan astrologique, ce dont nous nous permettons de douter. L'astrologie, alors, nous parle, comme le ferait la Pythie, dans un langage oraculaire que l'astrologue aurait la formation pour traduire à la façon dont Joseph interprétait le songe de Pharaon (Bible) en sachant donner sens à la symbolique (7 vaches grasses, 7 vaches maigres).
Que dire du préjugé à la mode chez nombre d'astrologues à l'encontre des "voyants"? On notera d'abord qu'il existe une évidente promiscuité : nombre d'astrologues, sur Internet, ne figurent-ils pas dans des annuaires intitulé "réseau des voyants", "guide des voyants et des astrologues" sans parler des pages jaunes où l'on ne sait jamais à qui l'on a affaire. Qu'est ce qui distingue, finalement, l'astrologue du voyant? D'abord, nombre de voyants ont des notions d'astrologie et nombre d'astrologues ont certaines facultés d'intuition. En fait, le débat concerne plutôt les techniques concurrentes de l'astrologie et non les facultés parapsychologiques. Nous dirons que le clivage est celui des "pouvoirs" et des "savoirs". Les pouvoirs sont une affaire personnelle, les savoirs relèvent d'une recherche collective, impliquant de facto une certaine hiérarchie et une transmission de haut en bas de la pyramide astrologique socioprofessionnelle. En dernière instance, les astrologues sont censés, à l'instar des médecins, s'inscrire au sein d'une structure- d'une Faculté- déterminant des orientations s'appliquant à tous ceux qui en relèvent. Autrement dit, les astrologues sont censés - et c'est au cœur de leur image de marque- s'inscrire au sien d'une "Cité scientifique", à laquelle ils collaborent ou à laquelle ils se soumettent quand de nouvelles approches sont mise en place. En est-il réellement ainsi? Au final, plus ou moins.... Il y a une certaine transmission, il y a des maitres à penser qui font école, l'astrologue n'est pas censé être seul dans son coin comme pourrait l'être un voyant qui n'aurait de compte à rendre qu'à lui-même. Dans les faits, néanmoins, l'astrologue semble préférer, bien souvent, une attitude plus ambivalente, à mi-chemin entre celle du médecin voué à respecter certaines consignes de son "Ordre" (Science) et celle du praticien qui s'en tient à sa cuisine personnelle (Art) et qui n'apprécie pas de dépendre d'une quelconque autorité supérieure.
En fait, il ne faudrait jamais perdre de vue le fait que l'astrologue commence par vouloir s'aider lui-même, par l'astrologie, avant de tenter de conseiller autrui. Or, s'aider soi-même est une affaire qui se joue 24h/24 et 7 jours/7, ou du moins pendant les heures de veille, impliquant une certaine existence sociale. On comprend la difficulté à passer, ensuite, à un niveau scientifique, exigeant de passer du sujet à l'objet et de se demander non plus ce dont on a besoin mais comment le monde est structuré. Déclarer à un astrologue que l'astrologie ne donne que des informations à certains moments et pas en permanence, c'est remettre, ipso facto, l'investissement quotidien du dit astrologue qui risque d'être en manque, comme si l'on demandait à quelqu'un de n'utiliser ses lunettes qu'à heures fixes et non en permanence. Ajoutons que ces deux astrologies qui s'opposent sont fort différentes quant à leurs outils: l'une est un véritable kaléidoscope dont la diversité semble apte à refléter la complexité du vécu individuel tandis que l'autre est bien plus dépouillée et vise à fixer une série de rendez-vous cosmiques sensiblement espacés. On retrouve d'ailleurs la trace d'une telle conflictualité entre astrologie individuelle et astrologie mondiale, les tenants de l'une accusant les tenants de l'autre de concourir à la perte de l'Astrologie (voir notre entretien avec Daniel Véga, sur teleprovidence.com)
Nous établissons un lien entre sémiologie et somatologie. Lorsque le corps devient douloureux, dans bien des cas, il y a message. Notre corps nous indique de la sorte que quelque chose ne va pas mais ce n'est pas la douleur en question qui fait problème puisqu'elle n'est que signe mais ce qu'elle exprime. Une fois le message entendu, il n'a plus à se manifester par ce biais somatique. Selon nous, une des principales causes de malaise se situe dans notre rapport à la technique lorsque celle-ci se substitue à quelque chose de plus "naturel" à commencer par la présence de l'autre. Notre corps supporte mal les mystifications dont il est ainsi l'objet. Mettre fin à certaines d'entre elles contribuera à faire baisser le degré de somatisation. Une fois de plus, celui qui ne capte pas les signes -que ce soit au niveau cosmique, au niveau social ou au niveau personnel et parfois aux trois niveaux à la fois- est condamné à l'imprévoyance et donc à la surprise quant aux conséquences de ses dires et de ses actes.
La nature n'est pas, par elle-même, sémiologique (voir notre entretien de novembre 2009 avec Serge Bret Morel, sur téleprovidence) car cela exigerait qu'elle portât un regard sur elle-même. C'est probablement le fait de ne pas avoir saisi ce point qui aura entrainé nombre de maîtres à penser de l'école française d'astrologie du siècle dernier (J. P . Nicola, André Barbault, Dane Rudhyar) à pratiquer une approche globale du cosmos ou en tout cas du système solaire. Il importe, en effet, de distinguer le point de vue de la Nature et le point de vue de l'Homme regardant, contemplant, considérant la dite Nature. Selon le premier point de vue, trop vite adopté par la plupart des astrologues modernes, la Nature est un tout indivisible, où tout est solidaire. On ne peut prendre une planète et pas une autre, ce ne serait pas "logique", arguent-ils. Selon l'autre point de vue, le notre, l'Homme instrumentalise le monde, à sa guise, selon ce qu'il en perçoit, à un moment donné et selon ce qu'il entend en faire. Si j'ai besoin de bois pour fabriquer un bateau, je prendrai le bois qui est à ma portée et dans la quantité nécessaire. Je n'aurai pas besoin de couper toute une forêt pour ce faire. Si l'on admet que l'astrologie est un bateau, un vaisseau, que les hommes se sont construit pour mieux traverser, baliser, le temps, l'on comprendra qu'il n'était nullement nécessaire de tout prendre du cosmos pour atteindre ce but, bien au contraire cela eût été contre-productif. Certes, quand je cherche quelque chose, je dois avoir une perception globale pour repérer la chose en question mais seule celle-ci m'importera au final.
La nature, répétons-le, ne détermine pas de signaux. Ce sont les hommes qui se (lui) forgent une sémiologie. Une planète, isolée, ne saurait nous intéresser, astrologiquement, il importe qu'elle forme une certaine combinatoire avec un autre astre et la Nature comporte un nombre infini de combinatoires. Or, l'Homme n'a que faire, pour organiser sa propre vie, tant individuelle que collective, de l'infinitude....On ne saurait se dire "humaniste" si l'on ne comprend pas cela! En fait, tout se passe comme si certains astrologues rêvaient d'une signalétique qui n'aurait pas été établie, élaborée par les Hommes et qui, pour cette raison, prévaudrait. Une sorte de super-signalétique émanant directement du Cosmos et dont les astrologues seraient les zélés interprètes. Si de nos jours, une telle signalétique cosmique existe et est à observer, c'est parce que des hommes l'ont, en d'autres temps, déterminée, fixée, en opérant des choix que le cosmos lui-même aurait été bien en peine d'effectuer. Il y là une dialectique entre le règne minéral d'une part, les règnes végétal et animal de l'autre, les seconds structurant le premier, non pas sur un plan objectif mais subjectif, par le regard porté sur le premier.
JHB
20. 11. 09
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire