par Jacques HalBronn
Selon nous, l'astrologie doit s'intéresser, en priorité, à tous les phénomènes ayant des implications collectives fortes. Or, trop souvent, l'astrologue ne travaille que sur des cas isolés qui n'obéissent pas aux mêmes principes épistémologiques.
Que telle personne fasse telle chose dans son coin, aussi extraordinaire serait cette chose, ne saurait, a priori, relever du champ de l'astrologie et il vaut mieux laisser de tels dossiers à des psychologues et autres parapsychologues. En revanche, si le phénomène s'étend largement et obéit à une certaine périodicité, l'astrologie peut avoir son mot à dire.
Le XXIe siècle devrait dégager l'astrologie de cette galère de l'astrologie pour tous, si par tous l'on entend autant de cas particuliers. En revanche, si 'tous' signifie un processus collectif, une telle perspective nous semble acceptable.
Qu'à certains moments, une dynamique collective se développe, voilà qui pour nous fait sens astrologiquement. Deux critères donc: une dynamique collective et une cyclicité. Un phénomène qui aurait lieu sans discontinuer, sans interruption, ne nous intéresserait pas. Pas plus d'ailleurs qu'une périodicité artificielle déterminée par des habitudes que l'on décréterait explicitement, comme un calendrier électoral ou une manifestation annuelle.
L'astrologie n'est concernée que par des phénomènes sociaux d'une certaine amplitude avec deux registres complémentaires: d'une part, des leaders qui entrainent des groupes entiers dans leur sillage et de l'autre, des individus qui convergent simultanément dans une certaine direction.
Ce qui survient à un individu dans sa vie privée n'a nullement besoin de l'astrologie pour être examiné. En revanche, les astrologues, quant à eux, peuvent avoir besoin de s'intéresser au relationnel car c'est là qu'ils ont souvent un problème personnel à régler. S'ils trouvent des cobayes, tant mieux pour eux!
Or, la véritable mission de l'astrologie n'est pas là mais à un tout autre niveau où elle a réellement quelque chose à apporter à l'Humanité et qui est celui des flux sociaux et de ceux qui en sont les moteurs.
Certes, l'astrologie mondiale a connu et connaitra probablement de cuisants échecs mais ceux-ci sont nécessaires pour que celle-ci puisse se réformer. L'astrologue n'est pas l'astrologie et l'astrologie n'est pas quelque chose de figée du moins en tant que savoir cherchant à appréhender un certain objet. Le mot Astrologie a en effet deux sens: il est à la fois sujet et objet, il désigne le discours sur l'objet tout autant que l'objet lui-même. Or, entre ces deux plans, il y a, à l'évidence, un certain hiatus qui est à résorber. A quoi tient ce hiatus si ce n'est au maintien d'une tradition qui n'est pas le territoire (objet) mais la carte (sujet)?
En ce sens, nous nous méfions énormément de ce qu'on appelle l'Histoire de l'astrologie, expression là encore ambigüe puisqu'elle désigne aussi bien (ou aussi mal) un discours sur la genèse de l'astrologie que cette genèse elle-même et là encore quel hiatus! Or, il semble que d'aucuns prennent un malin plaisir à jouer sur les mots confondant l'entreprise cognitive-le projet - avec l'atteinte de son objectif. Quand on dit "L'Histoire de l'astrologie", est-ce que l'on ne cherche pas à laisser entendre que l'on sait de quoi l'on parle, tentant ainsi de clore le débat en se satisfaisant de ce qui a déjà été exprimé?
Un des obstacles auxquels se heurte la démarche astrologique et que l'on tend délibérément à minimiser est celui de l'interaction entre l'observateur et l'observé. Qui pourrait sérieusement contester que la parole de l'astrologue n'interfère pas sur les représentations de ceux auxquels il s'adresse? C'est la "self fulfilling prophecy", la prédiction qui se réalise -par elle-même - du fait même qu'elle circule, qu'elle est entendue. Le prophétisme est indissociable d'un tel effet d'annonce.
On reproche parfois aux astrologues d'expliquer les choses après coup mais que dire de ces annonces vouées à l'avenir et qui agissent sur les esprits? Tel astrologue nous dit préférer étudier des thèmes de gens qu'il ne connait pas plutôt que des cas connus et référencés mais n'est-ce pas là vouloir avoir carte blanche? Il y a dans la relation de l'astrologue à son client ou à son élève, quelque chose de l'ordre du viol, en le forçant à se voir et à voir le monde comme on le lui demande. Mais d'ailleurs, est-ce que l'individu n'est pas violé par son éducation, qui le force à se percevoir selon un certain modèle identitaire? C'est peut-être justement à un certain sevrage -terme préférable à viol - que s'attelle l'astrologue, à sortir l'individu de son innocence, du non choix, chez ceux qui ont été mal sevrés et qui sont toujours en quête d'identité.
Mais si échec, il y a, c'est bien, nous dira-t-on, que l'astrologue n'est pas dans l'infaillibilité assurée. En effet, on ne manipule pas un client comme on manipule un pays. Les leaders en savent quelque chose. Les peuples sont animés par des forces profondes et il revient à l'astrologie de les mettre en évidence. Quand elle dispose de modèles, de logiciels inadéquats, elle se "plante". Et c'est bien pourquoi l'astrologie mondiale reste le terrain privilégié de la recherche astrologique si tant est que l'on admette que ce champ comporte aussi les statistiques de Gauquelin sur les catégories socioprofessionnelles qui correspondent à des phénomènes collectifs.
Mais, de grâce, que l'on ne condamne pas l'astrologie mondiale pour ses errements car il n'est pas nécessaire de réussir pour persévérer ni d'espérer pour entreprendre, à condition que toute prévision s'accompagne d'un exposé détaille des outils dont on se sert, ce qui est somme toute généralement le cas en astrologie et ce qui la distingue des autres modes de prévision fondés sur tel ou tel art divinatoire. Il est également éminemment souhaitable que les colloques astrologiques soient l'occasion de bilans critiques et que l'astrologue ne travaille pas dans son coin mais au sein d'une certaine "cité scientifique". En ce sens, nous nous autorisons à critiquer les travaux de tel ou tel chercheur pour précisément que l'on ne jette pas le bébé avec l'eau (sale) du bain et inversement que l'on ne garde pas l'eau sale sous prétexte que la saleté émane du bébé.
JHB
07. 01. 10
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